Un jour, un ‘hassid sortit son livre de prières pour commencer à prier, et plia le coin d’une certaine page avant de commencer. Un autre homme de la synagogue remarqua que le sidour du ‘hassid avait de nombreuses marques de plis, comme si plier le coin d’une page était un événement quotidien. Le ‘hassid expliqua : « Mon attention est limitée et j’ai du mal à me concentrer sur les prières du matin. Mais si je fais un pli sur une page, quand j’arrive à ce point dans la prière, je peux m’assurer que pour au moins une prière par jour, je suis pleinement présent et concentré. »

Le chapitre 39 du Tanya pourrait très bien être la source de ses actions. Dans ce chapitre, l’Admour Hazakène traite de la destination spirituelle d’une mitsva accomplie ou d’une prière prononcée. On peut en effet se demander : qu’advient-il d’une mitsva ou d’une prière une fois accomplie ou récitée ? Si elle est effectuée avec l’intention voulue, la mitsva ou prière s’élève jusqu’aux palais célestes de D.ieu, où elle se fond dans les lumières spirituelles (Sefirot) qui s’y trouvent, s’unissant finalement à la lumière infinie de D.ieu (Eïn sof). C’est ce que signifie qu’elle parvient « devant D.ieu ».

Bien qu’aucun GPS ne puisse localiser leur emplacement, ces palais spirituels, ou mondes, sont la demeure des anges ou des âmes des justes. Le monde où résident les anges s’appelle Yetsira, un monde d’émotion divine, où les anges servent D.ieu par amour et par crainte. Pourtant, Yetsira est un monde de niveau inférieur, car les anges y servent D.ieu seulement par instinct, dans un état émotionnel fixe. Le monde où réside l’âme des justes, Briah, est plus élevé dans sa nature spirituelle, car c’est le monde de l’intelligence divine, du fait que les justes servent D.ieu non par instinct, mais en employant leur intellect à créer un amour et une crainte de D.ieu.

Lorsqu’un Juif accomplit une mitsva ou prie avec un amour et une crainte de D.ieu instinctifs, la mitsva s’élève et se confond avec les lumières divines (Sefirot) de Yetsira. Mais quand un Juif contemple la grandeur de D.ieu et conçoit de cet effort intellectuel un amour ou une crainte de D.ieu, sa mitsva monte jusqu’au monde supérieur de Briah, se fondant dans les lumières divines de Briah, la demeure des justes. La raison en est qu’une mitsva motivée par un amour et une crainte de D.ieu générés intellectuellement a une qualité supérieure, ce qui la fait monter dans un monde plus haut que les anges.

Qu’en est-il lorsqu’une mitsva est accomplie sans aucune intention, mais simplement de façon routinière ? Ou si quelqu’un s’est tellement laissé distraire pendant sa prière qu’au lieu de penser à l’amour et à la crainte de D.ieu, il est complètement absorbé dans des pensées banales et sans rapport avec ce qu’il dit ? Ou pire encore, s’il a effectué cette mitsva ou cette prière avec des motifs égoïstes en tête ?

C’est là que la repentance entre en jeu. Bien que les mitsvas et les prières sans intention ne puissent pas s’élever et se confondre avec ces grandes lumières divines, la repentance a posteriori ou bien l’insertion d’une intention dans des prières passées libèrent ces bonnes actions et ces prières de sorte qu’elles puissent atteindre leur destination spirituelle.

Cela signifie qu’une prière du Chéma récitée avec concentration et dévotion, suscitant un amour et une crainte de D.ieu générés intellectuellement dans le cœur du Juif, peut faire en sorte que les prières du Chéma d’une année entière s’élèvent ensemble au monde de Briah, le monde qui est plus haut que les anges.

Un petit bout de Tanya : Si hier mon esprit a erré pendant la prière, aujourd’hui je peux me concentrer et faire en sorte que deux prières s’élèvent vers les hauts mondes spirituels.

(Inspiré du chapitre 39 du Tanya)