au début de la fête, quand les pèlerins se rassemblent au Temple. Cependant, le roi ne peut procéder à la lecture publique le premier jour, férié, parce qu’il est interdit d’installer l’estrade. Comme on ne veut pas la dresser la veille pour ne pas encombrer le parvis du Temple, la cérémonie du hakhel est repoussée au lendemain. מֵאַתְחַלְתָּא דְּמוֹעֵד
La michna continue : « Le bedeau de la synagogue prend le Rouleau de la Tora et le donne au président. » La guemara demande (comme en 40b) : puisque le bedeau ne remet pas le Rouleau au roi, et qu’on honore d’abord les autres dignitaires en présence de leurs supérieurs, il semble qu’un élève ait le droit de témoigner du respect à un condisciple en présence du maître – contrairement à l’affirmation de Rabbi Yochiya, opposé sur ce point à Aba ‘Hanan (Baba Batra 119b) ! Abayè répond sur le même mode qu’en 40b : tout ce cérémonial est accompli en l’honneur du roi. וְחַזַּן הַכְּנֶסֶת נוֹטֵל סֵפֶר תּוֹרָה וְנוֹתְנוֹ לְרֹאשׁ הַכְּנֶסֶת שָׁמְעַתְּ מִינַּהּ חוֹלְקִין כָּבוֹד לְתַלְמִיד בִּמְקוֹם הָרַב אָמַר אַבָּיֵי כּוּלָּהּ מִשּׁוּם כְּבוֹדוֹ דְּמֶלֶךְ
Suite de la michna – « Le roi se lève, reçoit le Rouleau de la Tora et lit assis. Cependant, le roi Agrippa se leva pour recevoir le Rouleau et resta debout pendant la lecture, ce qui lui valut les félicitations des Sages. » La guemara s’interroge (comme en 40b). En précisant que le roi Agrippa se leva au moment où il reçut le Rouleau de la Tora, la michna laisse entendre qu’il était assis jusque-là. Pourtant, la lecture avait lieu dans le parvis du Temple et, selon une règle établie, personne, (fût-ce un roi de la dynastie asmonéenne), n’a le droit de s’y asseoir, à l’exception des rois de la dynastie de David, car il est dit (II Sam. 7, 18) – « Le roi David vint s’asseoir devant l’Éternel et dit : “Qui suis-je, Éternel Dieu, et qu’est-ce que ma maison pour que Tu m’aies fait arriver jusqu’ici ?” » À l’instar de Rav ‘Hisda qui affirme (en 40b) que, le jour de Kipour, le Cohen Gadol lisait la Tora dans la cour des femmes, on peut répondre ici que la lecture du roi Agrippa eut lieu au même endroit. וְהַמֶּלֶךְ עוֹמֵד וּמְקַבֵּל וְקוֹרֵא יוֹשֵׁב אַגְרִיפַּס הַמֶּלֶךְ עָמַד וְקִיבֵּל וְקָרָא עוֹמֵד עוֹמֵד מִכְּלָל דְּיוֹשֵׁב וְהָאָמַר מָר אֵין יְשִׁיבָה בַּעֲזָרָה אֶלָּא לְמַלְכֵי בֵּית דָּוִד בִּלְבַד שֶׁנֶּאֱמַר וַיָּבֹא הַמֶּלֶךְ דָּוִד וַיֵּשֶׁב לִפְנֵי ה׳ וַיֹּאמֶר וְגוֹ׳ כִּדְאָמַר רַב חִסְדָּא בְּעֶזְרַת נָשִׁים הָכָא נָמֵי בְּעֶזְרַת נָשִׁים
La michna poursuit – « Les Sages félicitèrent le roi Agrippa ». S’« ils le félicitèrent », c’est donc qu’il a bien agi. Pourtant Rav Achi a déclaré : même Rabbi Yehochoua (Kidouchin 32b) – qui affirme qu’un Nassi, président du Sanhédrin, peut renoncer à l’honneur qui lui est dû – reconnaît qu’un roi n’a pas ce droit. Un monarque ne saurait rejeter les honneurs attachés à sa fonction, car le verset (Deut. 17, 15) – « Tu placeras au-dessus de toi un roi » lui demande d’imposer le respect en toute circonstance ! וְשִׁבְּחוּהוּ חֲכָמִים שִׁבְּחוּהוּ מִכְּלָל דְּשַׁפִּיר עֲבַד הָאָמַר רַב אָשֵׁי אֲפִילּוּ לְמַאן דְּאָמַר נָשִׂיא שֶׁמָּחַל עַל כְּבוֹדוֹ כְּבוֹדוֹ מָחוּל מֶלֶךְ שֶׁמָּחַל עַל כְּבוֹדוֹ אֵין כְּבוֹדוֹ מָחוּל שֶׁנֶּאֱמַר שׂוֹם תָּשִׂים עָלֶיךָ מֶלֶךְ שֶׁתְּהֵא אֵימָתוֹ עָלֶיךָ
Réponse : lorsque le roi accomplit un commandement – en l’occurrence, la lecture publique de la Tora – c’est différent ; il a le droit, dans ce cas, de faire preuve d’humilité. מִצְוָה שָׁאנֵי

Le Talmud Steinsaltz (Steinsaltz Center)

Traduit paragraphe par paragraphe; commenté par le Rabbin Adin Even-Israël Steinsaltz.

« Quand le roi Agrippa arriva au verset (ibid.) : “Tu ne pourras placer sur toi comme roi un homme étranger, des larmes jaillirent de ses yeux. Les assistants lui déclarèrent : “N’aie crainte, Agrippa, tu es notre frère, tu es notre frère !” » À ce propos, on a enseigné dans une baraïta au nom de Rabbi Nathan – « À ce moment-là, le peuple, désigné par antiphrase comme les ennemis d’Israël, méritèrent d’être exterminés pour avoir flatté le roi Agrippa. » Bien que juif par sa mère, il n’avait pas droit à la royauté en raison de son ascendance paternelle. וּכְשֶׁהִגִּיעַ לְלֹא תוּכַל לָתֵת תָּנָא מִשְּׁמֵיהּ דְּרַבִּי נָתָן בְּאוֹתָהּ שָׁעָה נִתְחַיְּיבוּ שׂוֹנְאֵי יִשְׂרָאֵל כְּלָיָיה שֶׁהֶחֱנִיפוּ לוֹ לְאַגְרִיפַּס
Rabbi Chim‘on ben ‘Halafta a déclaré : depuis que la flatterie s’est renforcée, des entorses sont faites à la justice, parce que les juges font preuve de complaisance envers l’une ou l’autre partie, les actions sont corrompues et personne ne peut plus déclarer à son prochain – « Mes actes sont meilleurs que les tiens. » אָמַר רַבִּי שִׁמְעוֹן בֶּן חֲלַפְתָּא מִיּוֹם שֶׁגָּבַר אֶגְרוֹפָהּ שֶׁל חֲנוּפָּה נִתְעַוְּותוּ הַדִּינִין וְנִתְקַלְקְלוּ הַמַּעֲשִׂים וְאֵין אָדָם יָכוֹל לוֹמַר לַחֲבֵירוֹ מַעֲשַׂי גְּדוֹלִים מִמַּעֲשֶׂיךָ
Rabbi Yehouda fils de l’Ouest (c’est-à-dire habitant d’Erets-Israël, située à l’ouest de la Babylonie) ou, selon une autre version, Rabbi Chim‘on ben Pazi a exposé en public cet enseignement : il est permis de flatter les méchants en ce monde. En effet, le verset (Is. 32, 5) – « Le vaurien ne sera plus qualifié de noble et le fourbe ne passera plus pour généreux » se réfère aux temps messianiques et laisse entendre qu’à notre époque ces flatteries sont autorisées. דָּרֵשׁ רַבִּי יְהוּדָה בַּר מַעְרְבָא וְאִיתֵּימָא רַבִּי שִׁמְעוֹן בֶּן פַּזִּי מוּתָּר לְהַחְנִיף לִרְשָׁעִים בָּעוֹלָם הַזֶּה שֶׁנֶּאֱמַר לֹא יִקָּרֵא עוֹד לְנָבָל נָדִיב וּלְכִילַי לֹא יֵאָמֵר שׁוֹעַ מִכְּלָל דְּבָעוֹלָם הַזֶּה שְׁרֵי
Rabbi Chim‘on ben Lakich le déduit du propos de Jacob à Ésaü (Gen. 33, 10) – « J’ai regardé ta face comme on voit la face d’un être céleste et tu m’as agréé. » רַבִּי שִׁמְעוֹן בֶּן לָקִישׁ אָמַר מֵהָכָא כִּרְאֹת פְּנֵי אֱלֹהִים וַתִּרְצֵנִי
Cette interprétation des paroles de Jacob s’oppose à celle de Rabbi Lévi qui a expliqué : Jacob n’a pas eu l’intention de flatter Ésaü mais de l’intimider. À qui peut-on le comparer ? À un invité qui, se rendant compte que son hôte veut le tuer, lui déclare : ce mets que je savoure chez toi a le même goût que celui que j’ai consommé au palais du roi. Comprenant que son invité est un familier du roi, l’hôte renonce à le tuer. וּפְלִיגָא דְּרַבִּי לֵוִי דְּאָמַר רַבִּי לֵוִי מָשָׁל שֶׁל יַעֲקֹב וְעֵשָׂו לְמָה הַדָּבָר דּוֹמֶה לְאָדָם שֶׁזִּימֵּן אֶת חֲבֵירוֹ וְהִכִּיר בּוֹ שֶׁמְבַקֵּשׁ לְהוֹרְגוֹ אָמַר לוֹ טְעַם תַּבְשִׁיל זֶה שֶׁאֲנִי טוֹעֵם כְּתַבְשִׁיל שֶׁטָּעַמְתִּי בְּבֵית הַמֶּלֶךְ אָמַר יָדַע לֵיהּ מַלְכָּא מִיסְתְּפֵי וְלָא קָטֵיל לֵיהּ
Rabbi El‘azar a déclaré – Tout flatteur amène la Colère sur le monde, car il est dit (Job 36, 13) : « Les flatteurs dans le cœur suscitent la colère. » En outre, sa prière n’est pas entendue, car il est dit dans la suite du verset – « Quand Il les fera souffrir, leur prière n’aura pas d’effet. » אָמַר רַבִּי אֶלְעָזָר כׇּל אָדָם שֶׁיֵּשׁ בּוֹ חֲנוּפָּה מֵבִיא אַף לָעוֹלָם שֶׁנֶּאֱמַר וְחַנְפֵי לֵב יָשִׂימוּ אָף וְלֹא עוֹד אֶלָּא שֶׁאֵין תְּפִלָּתוֹ נִשְׁמַעַת שֶׁנֶּאֱמַר לֹא יְשַׁוְּעוּ כִּי אֲסָרָם
La guemara cite cinq autres enseignements de Rabbi El‘azar se rapportant à la flatterie. Les six sont évoqués par les termes mnémotechniques : la Colère, Embryon, la Géhenne, en sa Main, une femme Nida, Exilée. (סִימַן אַף עוּבָּר גֵּיהִנָּם בְּיָדוֹ נִידָּה גּוֹלָה)
Deuxième déclaration de Rabbi El‘azar : tout flatteur est maudit même par les embryons dans les entrailles de leur mère, car il est dit (Prov. 24, 24) – Celui qui dit au méchant : « Tu es juste », les peuples yikvouhou, les nations le détestent. Le radical kov signifie maudire, puisque Bil‘am dit à Balak (Nbres 23, 8) – « Comment maudirais-je celui que Dieu n’a pas maudit [kabo]. » Et le terme de nation fait allusion aux embryons, car il est dit à propos de ceux que portait Rébecca (Gen. 25, 23) – « Une nation sera plus puissante que l’autre. » וְאָמַר רַבִּי אֶלְעָזָר כׇּל אָדָם שֶׁיֵּשׁ בּוֹ חֲנוּפָּה אֲפִילּוּ עוּבָּרִין שֶׁבִּמְעֵי אִמָּן מְקַלְּלִין אוֹתוֹ שֶׁנֶּאֱמַר אֹמֵר לְרָשָׁע צַדִּיק אָתָּה יִקְּבֻהוּ עַמִּים יִזְעָמוּהוּ לְאֻמִּים וְאֵין קוֹב אֶלָּא קְלָלָה שֶׁנֶּאֱמַר לֹא קַבֹּה אֵל וְאֵין לְאוֹם אֶלָּא עוּבָּרִין שֶׁנֶּאֱמַר וּלְאֹם מִלְּאֹם יֶאֱמָץ
Troisième enseignement de Rabbi El‘azar : tout flatteur tombe dans la Géhenne, car il est dit (Is. 5, 20) – « Malheur à ceux qui appellent le mal – bien, et le bien – mal… » Qu’est-il écrit ensuite (au verset 24) ? « Aussi, de même qu’une langue de feu dévore le chaume, de même que l’herbe sèche disparaît dans la flamme, ainsi leur racine sera comme de la pourriture » ; le verset fait allusion au feu de la géhenne. וְאָמַר רַבִּי אֶלְעָזָר כׇּל אָדָם שֶׁיֵּשׁ בּוֹ חֲנוּפָּה נוֹפֵל בְּגֵיהִנָּם שֶׁנֶּאֱמַר הוֹי הָאוֹמְרִים לָרַע טוֹב וְלַטּוֹב רָע וְגוֹ׳ מָה כְּתִיב אַחֲרָיו לָכֵן כֶּאֱכֹל קַשׁ לְשׁוֹן אֵשׁ וַחֲשַׁשׁ לֶהָבָה יִרְפֶּה וְגוֹ׳
Quatrième enseignement de Rabbi El‘azar – Qui flatte un méchant finit par être livré en sa Main, ou tombe au pouvoir de ses fils, ou encore tombe au pouvoir de son petit-fils, car il est écrit (Jér. 28, 6) : « Jérémie le prophète dit [à ‘Hananya] – Amen ! Ainsi fasse l’Éternel ! Puisse l’Éternel accomplir ta parole. » Jérémie cautionna la prédiction mensongère de ‘Hananya sur le retour prochain du roi Joïachin et des ustensiles du Temple. Quelques jours plus tard, le prophète sortit de Jérusalem pour prendre possession d’une terre qu’il avait reçue en héritage dans le territoire de Benjamin. Et il est écrit à ce propos וְאָמַר רַבִּי אֶלְעָזָר כׇּל הַמַּחְנִיף לַחֲבֵירוֹ סוֹף נוֹפֵל בְּיָדוֹ וְאִם אֵינוֹ נוֹפֵל בְּיָדוֹ נוֹפֵל בְּיַד בָּנָיו וְאִם אֵינוֹ נוֹפֵל בְּיַד בָּנָיו נוֹפֵל בְּיַד בֶּן בְּנוֹ שֶׁנֶּאֱמַר וַיֹּאמֶר יִרְמְיָה הַנָּבִיא [לַחֲנַנְיָה] אָמֵן כֵּן יַעֲשֶׂה ה׳ יָקֵם ה׳ אֶת דְּבָרֶיךָ וּכְתִיב