Et nous, nous la donnons aux Cohanim, en vertu d’une ordonnance de ‘Ezra qui a pénalisé les Lévites pour leur refus de revenir en Erets-Israël à la fin des soixante-dix ans d’exil en Babylonie (voir Yebamot 86b). En conséquence, nous ne pouvons pas déclarer : « Je l’ai donnée aussi au Lévite ... selon tout ce que Tu m’as ordonné » (Deut. 26, 13).
וַאֲנַן קָא יָהֲבִינַן לְכֹהֲנִים
Néanmoins, objecte la guemara, Yo‘hanan le Cohen Gadol aurait dû maintenir cette déclaration pour les autres dîmes (à savoir le ma‘asser chèni, « la seconde dîme », prélevée les première, deuxième, quatrième et cinquième années du cycle sabbatique, et le ma‘asser ‘ani, « la dîme du pauvre », la troisième et la sixième année) ! Rèch Lakich répond : chaque particulier qui ne fait pas de déclaration sur la première dîme n’en fait pas non plus sur les autres dîmes. Quelle en est la raison ? Abayè explique : parce que l’Écriture mentionne d’abord la première dîme. En effet, il est écrit : (Deut. 26, 12) « Quand tu auras achevé de prélever toute la dîme de ton revenu, en la troisième année qui est l’année de la dîme, et que tu l’auras donnée au Lévite, au résidant, à l’orphelin et à la veuve qui en mangeront dans tes portes » ; du fait que le verset revient ici sur des prescriptions déjà indiquées, les Sages en donnent une interprétation exégétique, à savoir que les mots – « Et que tu l’auras donnée au Lévite » – s’appliquent à la première dîme ; les mots – « au résidant » – s’appliquent à la dîme du pauvre ; enfin les mots – « dans tes portes » – s’appliquent à la seconde dîme, à propos de laquelle il est écrit (ibid. 12, 17) « Tu ne pourras manger dans tes portes la dîme de ton froment, de ton moût, de ton huile fraîche ... » La Tora les cite dans cet ordre pour qu’on en déduise la règle de Rèch Lakich.
וְלוֹדֵי אַשְּׁאָר מַעַשְׂרוֹת אָמַר רֵישׁ לָקִישׁ כׇּל בַּיִת שֶׁאֵין מִתְוַדֶּה עַל מַעֲשֵׂר רִאשׁוֹן שׁוּב אֵין מִתְוַדֶּה עַל שְׁאָר מַעַשְׂרוֹת מַאי טַעְמָא אָמַר אַבָּיֵי הוֹאִיל וּפָתַח בּוֹ הַכָּתוּב תְּחִילָּה
D’après Rabbi Yossè fils de Rabbi ‘Hanina qui affirme que Yo‘hanan le Cohen Gadol a aboli la déclaration sur la dîme parce qu’on ne la donnait plus aux Lévites, il en ressort qu’on effectuait couramment ce prélèvement. Pourtant, objecte la guemara, une baraïta enseigne : c’est aussi Yo‘hanan le Cohen Gadol qui annula la déclaration sur la dîme et décréta qu’il fallait impérativement prélever la dîme sur les produits demaï – tous les produits achetés à une personne du commun sont qualifiés de demaï car il n’est pas sûr que les dîmes en ont été prélevées. Et il prit cette décision car il envoya des émissaires dans tout le territoire d’Israël et vit que les gens séparaient seulement la grande terouma, mais que dans le cas de la première et de la seconde dîme, une partie les prélevait, une autre partie ne les prélevait pas.
מִכְלָל דְּאַפְרוֹשֵׁי הֲווֹ מַפְרְשִׁי וְהָא תַּנְיָא אַף הוּא בִּיטֵּל אֶת הַוִּידּוּי וְגָזַר עַל הַדְּמַאי לְפִי שֶׁשָּׁלַח בְּכׇל גְּבוּל יִשְׂרָאֵל וְרָאָה שֶׁאֵין מַפְרִישִׁין אֶלָּא תְּרוּמָה גְּדוֹלָה בִּלְבַד וּמַעֲשֵׂר רִאשׁוֹן וּמַעֲשֵׂר שֵׁנִי מִקְצָתָן מְעַשְּׂרִין וּמִקְצָתָן אֵין מְעַשְּׂרִין
Il leur dit : « Mes enfants ! Venez, que je vous explique : de même que dans la consommation de la grande terouma il y a un péché mortel, il y a dans la consommation de la terouma de la dîme donnée par le Lévite au Cohen et dans celle de produits tével (récolte dont les dîmes n’ont pas été prélevées) un péché mortel. » Autrement dit, nul prélèvement ne doit être dévalorisé !
אָמַר לָהֶם בָּנַי בּוֹאוּ וְאוֹמַר לָכֶם כְּשֵׁם שֶׁתְּרוּמָה גְּדוֹלָה יֵשׁ בָּהּ עֲוֹן מִיתָה כָּךְ תְּרוּמַת מַעֲשֵׂר וְטֶבֶל יֵשׁ בָּהֶן עֲוֹן מִיתָה
Il se leva et leur institua ces règles : qui achète des fruits à une personne du commun doit en prélever la première dîme et la seconde dîme afin que les produits n’aient plus le caractère de tével. Ensuite, il est tenu de prélever la terouma de la première dîme et de la donner à un Cohen, de peur de commettre un péché mortel en consommant cette terouma par erreur. Enfin, il doit consommer la seconde dîme lors d’un pèlerinage à Jérusalem. En revanche, chacun peut garder pour soi la première dîme (destinée aux Lévites) et la seconde dîme (destinée aux pauvres) prélevées la troisième et la sixième année sur des produits demaï, car leur consommation n’est pas interdite à un simple Israélite, les Lévites et les pauvres n’ayant sur ces dîmes qu’une revendication monétaire, et du fait qu’elles ont peut-être déjà été prélevées, c’est un cas de litige d’ordre pécuniaire ; or la règle dans un tel cas est que la charge de la preuve incombe au plaignant. Il ressort donc de cette baraïta qu’à l’époque de Yo‘hanan le Cohen Gadol, la majorité du peuple ne prélevait pas les dîmes, contrairement à ce qu’avait laissé entendre Rabbi Yossè fils de Rabbi ‘Hanina !
עָמַד וְהִתְקִין לָהֶם הַלּוֹקֵחַ פֵּירוֹת מֵעַם הָאָרֶץ מַפְרִישׁ מֵהֶן מַעֲשֵׂר רִאשׁוֹן וּמַעֲשֵׂר שֵׁנִי מַעֲשֵׂר רִאשׁוֹן מַפְרִישׁ מִמֶּנָּה תְּרוּמַת מַעֲשֵׂר וְנוֹתְנָהּ לְכֹהֵן וּמַעֲשֵׂר שֵׁנִי עוֹלֶה וְאוֹכְלוֹ בִּירוּשָׁלַיִם מַעֲשֵׂר רִאשׁוֹן וּמַעְשַׂר עָנִי הַמּוֹצִיא מֵחֲבֵירוֹ עָלָיו הָרְאָיָה
Le Talmud Steinsaltz (Steinsaltz Center)
Traduit paragraphe par paragraphe; commenté par le Rabbin Adin Even-Israël Steinsaltz.
En réalité, répond la guemara, Yo‘hanan le Cohen Gadol institua deux nouvelles règles. À la minorité composée des ‘havèrim qui prélevaient scrupuleusement la dîme et la remettaient aux Cohanim conformément à l’ordonnance de ‘Ezra, il demanda de ne plus faire la déclaration. Par ailleurs, il conféra le statut de demaï aux produits achetés aux personnes du commun, les soumettant, dans le doute, à l’obligation d’en prélever la dîme.
תַּרְתֵּי תַּקֵּן בִּיטֵּל וִידּוּי דַּחֲבֵירִים וְגָזַר עַל דְּמַאי שֶׁל עַמֵּי הָאָרֶץ
D’après notre michna, Yo‘hanan le Cohen Gadol supprima aussi les me‘orerim. De quoi s’agit-il ? Ra‘hava explique – Chaque jour, les Lévites se tenaient au Temple sur l’estrade qui leur est réservée et chantaient ce verset des Psaumes (44, 24) : « Réveille-Toi [‘oura] ! Pourquoi dors-Tu, Éternel ? » Yo‘hanan leur déclara : « L’Omniprésent sommeille-t-Il ? La Providence ne s’exerce-t-elle pas à tout moment ? Pourtant n’est-il pas dit (ibid. 121, 4) : “Voici, Il ne dort pas, Il ne sommeille pas, le gardien d’Israël” » ! Donc, à l’évidence, le verset fait référence à l’époque où les Enfants d’Israël sont plongés dans la souffrance alors que les nations du monde vivent en toute tranquillité, d’où l’appel des Lévites : « Réveille-Toi ! Pourquoi dors-Tu, Éternel ? » Yo‘hanan le Cohen Gadol préféra néanmoins abroger ce chant de crainte qu’il soit mal interprété.
וְאַף הוּא בִּיטֵּל אֶת הַמְעוֹרְרִים מַאי מְעוֹרְרִים אָמַר רַחֲבָה בְּכׇל יוֹם וָיוֹם שֶׁהָיוּ עוֹמְדִים לְוִיִּם עַל דּוּכָן וְאוֹמְרִים עוּרָה לָמָּה תִישַׁן ה׳ אָמַר לָהֶן וְכִי יֵשׁ שֵׁינָה לִפְנֵי הַמָּקוֹם וַהֲלֹא כְּבָר נֶאֱמַר הִנֵּה לֹא יָנוּם וְלֹא יִישָׁן שׁוֹמֵר יִשְׂרָאֵל אֶלָּא בִּזְמַן שֶׁיִּשְׂרָאֵל שְׁרוּיִין בְּצַעַר וְאוּמּוֹת הָעוֹלָם בְּנַחַת וְשַׁלְוָה לְכָךְ נֶאֱמַר עוּרָה לָמָּה תִישַׁן ה׳
D’après notre michna, il supprima aussi les nokfim. La guemara demande : que sont les nokfim ? Rav Yehouda a expliqué au nom de Chemouel que ce mot désigne ceux qui pratiquent des incisions, comme dans Isaïe (10, 34) : « Il entaille [ve-nikaf] les massifs de la forêt. » En effet, afin d’effectuer plus facilement l’abattage rituel, les Cohanim pratiquaient une incision entre les cornes du veau de sorte que du sang coule sur ses yeux et qu’il soit aveuglé. Lui, Yo‘hanan le Cohen Gadol, vint et annula cette pratique parce que l’incision sur la tête de l’animal apparaissait comme un défaut, si bien que des gens non avertis auraient pu en conclure de manière erronée qu’il est permis de sacrifier un veau présentant une lésion grave.
וְאֶת הַנּוֹקְפִים מַאי נוֹקְפִים אָמַר רַב יְהוּדָה אָמַר שְׁמוּאֵל שֶׁהָיוּ מְסָרְטִין לָעֵגֶל בֵּין קַרְנָיו כְּדֵי שֶׁיִּפּוֹל דָּם בְּעֵינָיו אֲתָא אִיהוּ בַּטֵּיל מִשּׁוּם דְּמִיחֲזֵי כִּי מוּמָא
Selon une autre explication rapportée par une baraïta, pour annihiler la résistance du veau avant l’abattage rituel, des Cohanim le frappaient (voir ‘Houlin 7b) avec des bâtons à la manière de certains idolâtres. Yo‘hanan le Cohen Gadol leur déclara : « Jusqu’à quand donnerez-vous à manger à l’autel des charognes [nevèlot] ? »Comment peut-il qualifier ces veaux de charognes, interroge la guemara ? Pourtant, ce terme s’applique seulement à des animaux qui ont péri de mort violente ou naturelle, mais pas quand il s’agit d’abattage rituel ! Donc, à l’évidence, Yo‘hanan le Cohen Gadol déclara aux Cohanim que leurs coups risquaient de rendre les bêtes tereifot – c’est-à-dire affligées d’une lésion mortelle et donc impropres aux sacrifices et à la consommation – en provoquant une perforation de la membrane cervicale. Pour faciliter l’égorgement rituel sans recourir à la force brutale, la baraïta conclut qu’il se leva et institua un nouveau procédé : les anneaux dans le sol de la cour du Temple, au moyen desquels les animaux étaient immobilisés avant l’abattage rituel.
בְּמַתְנִיתָא תָּנָא שֶׁהָיוּ חוֹבְטִין אוֹתוֹ בְּמַקְלוֹת כְּדֶרֶךְ שֶׁעוֹשִׂין אוֹתוֹ לִפְנֵי עֲבוֹדָה זָרָה אָמַר לָהֶם עַד מָתַי אַתֶּם מַאֲכִילִין נְבֵילוֹת לַמִּזְבֵּחַ נְבֵילוֹת הָא שָׁחֵיט לְהוּ אֶלָּא טְרֵיפוֹת שֶׁמָּא נִיקַּב קְרוּם שֶׁל מוֹחַ עָמַד וְהִתְקִין לָהֶם טַבָּעוֹת בַּקַּרְקַע
La michna poursuit : « Jusqu’à son époque, on frappait du marteau à Jérusalem. » Les forgerons, explique une baraïta, travaillaient à ‘Hol ha-Mo‘ed dans la Ville sainte – suivant la lettre de la loi autorisant, en ces jours de demi-fête, des travaux dont l’ajournement entraînerait une perte matérielle irréversible. Yo‘hanan le Cohen Gadol le leur interdit, parce que les coups de marteau s’entendaient au loin et seuls les habitants les plus proches savaient qu’il s’agissait d’un travail permis car ne souffrant aucun retard.
עַד יָמָיו הָיָה פַּטִּישׁ מַכֶּה בִּירוּשָׁלַיִם בְּחוּלּוֹ שֶׁל מוֹעֵד
« À son époque, conclut la michna, aucun homme n’avait besoin de demander si les prélèvements avaient été effectués sur le demaï. »En effet, il institua d’en prélever systématiquement les dîmes, comme expliqué dans la baraïta rapportée précédemment.
כׇּל יָמָיו לֹא הָיָה אָדָם צָרִיךְ לִשְׁאוֹל עַל הַדְּמַאי כְּדַאֲמַרַן
MICHNA Autres signes de déclin – Depuis la dissolution du Grand Sanhédrin, on a cessé de chanter dans les lieux de réjouissance, car il est dit (Is. 24, 9) : « On ne boit plus de vin avec le chant . . . »
מַתְנִי׳ מִשֶּׁבָּטְלָה סַנְהֶדְרִין בָּטַל הַשִּׁיר מִבֵּית הַמִּשְׁתָּאוֹת שֶׁנֶּאֱמַר בַּשִּׁיר לֹא יִשְׁתּוּ יָיִן וְגוֹ׳
Depuis la mort des premiers prophètes, les Ourim ve-Toumim (voir Ex. 28, 30) ne rendent plus d’oracles. Depuis la destruction du deuxième Temple, on ne dispose plus du chamir ni du nofet tsoufim (ces deux termes seront expliqués par la guemara), et il n’y a plus en Israël d’hommes de foi qui s’en remettent au Saint béni soit-Il. Il est dit en effet (Ps. 12, 2) : « Au secours, Éternel, car il n’est plus d’homme pieux ... »
מִשֶּׁמֵּתוּ נְבִיאִים הָרִאשׁוֹנִים בָּטְלוּ אוּרִים וְתוּמִּים מִשֶּׁחָרַב בֵּית הַמִּקְדָּשׁ בָּטַל הַשָּׁמִיר וְנוֹפֶת צוּפִים וּפָסְקוּ אַנְשֵׁי אֲמָנָה מִיִּשְׂרָאֵל שֶׁנֶּאֱמַר הוֹשִׁיעָה ה׳ כִּי גָמַר חָסִיד וְגוֹ׳
Rabban Chim‘on ben Gamliel rapporte ce témoignage de Rabbi Yehochoua : « Depuis la destruction du Temple, il n’y a pas de jour sans malédiction, la rosée n’a plus d’effet bénéfique et les fruits ont perdu leur saveur. » Selon Rabbi Yossè, ils ont même perdu leur suc. Selon Rabbi Chim‘on ben El‘azar, la disparition de la pureté a fait perdre aux fruits leur saveur et leur parfum. De même, depuis que les dîmes ont cessé d’être prélevées, les céréales ont perdu leur suc. Selon d’autres Sages, la prostitution et la sorcellerie ont tout ruiné.
רַבָּן שִׁמְעוֹן בֶּן גַּמְלִיאֵל אוֹמֵר הֵעִיד רַבִּי יְהוֹשֻׁעַ מִיּוֹם שֶׁחָרַב בֵּית הַמִּקְדָּשׁ אֵין יוֹם שֶׁאֵין בּוֹ קְלָלָה וְלֹא יָרַד הַטַּל לִבְרָכָה וְנִיטַּל טַעַם הַפֵּירוֹת רַבִּי יוֹסֵי אוֹמֵר אַף נִיטַּל שׁוֹמֶן הַפֵּירוֹת רַבִּי שִׁמְעוֹן בֶּן אֶלְעָזָר אוֹמֵר הַטׇּהֳרָה נָטְלָה אֶת הַטַּעַם וְאֶת הָרֵיחַ הַמַּעַשְׂרוֹת נָטְלוּ אֶת שׁוֹמֶן הַדָּגָן וַחֲכָמִים אוֹמְרִים הַזְּנוּת וְהַכְּשָׁפִים כִּילוּ אֶת הַכֹּל
GUEMARA Pour apporter la preuve qu’on a cessé de chanter dans les lieux de réjouissance depuis la dissolution du Sanhédrin, l’auteur de la michna a cité le verset (Is. 24, 9) : « On ne boit plus de vin avec le chant . . . » D’où savons-nous que ce verset se rapporte à cette époque-là ? Rav Houna fils de Rav Yehochoua le déduit par recoupement avec cet autre verset (Lam. 5, 14) : « Les vieillards [les juges vénérables] ont cessé de se tenir à la porte [du Sanhédrin], les adolescents ont cessé leurs chansons. »
גְּמָ׳ וּמִמַּאי דְּמִשֶּׁבָּטְלָה סַנְהֶדְרִי כְּתִיב אָמַר רַב הוּנָא בְּרֵיהּ דְּרַב יְהוֹשֻׁעַ דְּאָמַר קְרָא זְקֵנִים מִשַּׁעַר שָׁבָתוּ בַּחוּרִים מִנְּגִינָתָם
Rav a déclaré : dès lors, l’oreille qui écoute un chant mérite d’être arrachée. Rava affirme de même que le chant dans la maison amène la destruction sur le seuil, car il est dit (Tsef. 2, 14) : « Une voix chantonne à la fenêtre, la destruction est sur le seuil, car le cèdre est une ville [‘èra]. »
אָמַר רַב אוּדְנָא דְּשָׁמְעָא זִמְרָא תִּעֲקַר אָמַר רָבָא זִמְרָא בְּבֵיתָא חוּרְבָּא בְּסִיפָּא שֶׁנֶּאֱמַר קוֹל יְשׁוֹרֵר בַּחַלּוֹן חֹרֶב בַּסַּף כִּי אַרְזָה עֵרָה
Quel est le sens de l’expression : « car le cèdre est une ville » ? Rabbi Yits‘hak a déclaré : une maison recouverte de cèdre serait-elle aussi résistante qu’une ville ? En réalité, voici le sens du verset : si une voix chantonne à la fenêtre, même une maison recouverte de cèdre vacille [mitro‘èa]. Rav Achi enseigne – On en déduit que la ruine d’une maison commence par le seuil, ainsi qu’il est écrit : « la destruction est sur le seuil. » Et si tu veux, on le déduit d’ici (Is. 24, 12) : « [Quand une maison est] désolée, la porte est démolie », et c’est la marque du mauvais génie qui règne dans les endroits dévastés. Mar bar Rav Achi affirme : moi je l’ai vu, ce mauvais génie, et il encorne comme un bœuf.
מַאי כִּי אַרְזָה עֵרָה אָמַר רַבִּי יִצְחָק בַּיִת הַמְסוּבָּךְ בַּאֲרָזִים עִיר הוּא אֶלָּא אֲפִילּוּ בַּיִת הַמְסוּבָּךְ בַּאֲרָזִים מִתְרוֹעֵעַ אָמַר רַב אָשֵׁי שְׁמַע מִינַּהּ כִּי מַתְחֵיל חוּרְבָּא בְּסִיפָּא מַתְחֵיל שֶׁנֶּאֱמַר חֹרֶב בַּסַּף וְאִיבָּעֵית אֵימָא מֵהָכָא וּשְׁאִיָּה יֻכַּת שָׁעַר אָמַר מָר בַּר רַב אָשֵׁי לְדִידִי חֲזֵי לִי וּמְנַגַּח כִּי תוֹרָא
Rav Houna précise que le chant des haleurs – qui se donnent ainsi du cœur à l’ouvrage – et celui des bouviers qui dirigent à la voix les bêtes de labour restent permis après la destruction du Temple, mais les chants des tisserands sont interdits, car ils ne sont guère utiles à leur travail. Rav Houna, rapporte la guemara, avait réduit tout chant à néant, c’est-à-dire qu’il avait interdit à ses contemporains de chanter chez eux et dans les maisons de festins. Cette mesure entraîna une telle surabondance et une telle baisse des prix que personne ne voulait pas même acheter cent oies ni cent mesures de blé pour la somme dérisoire d’un zouz. Par la suite, vint Rav ‘Hisda qui dénigra la mesure prise par Rav Houna et autorisa de nouveau les chants, ce qui entraîna une raréfaction des biens et une hausse des prix si importante qu’on ne pouvait même plus se procurer une seule oie pour un zouz.
אָמַר רַב הוּנָא זִמְרָא דְּנַגָּדֵי וּדְבַקָּרֵי שְׁרֵי דְּגַרְדָּאֵי אֲסִיר רַב הוּנָא בַּטֵּיל זִמְרָא קָם מְאָה אֲווֹזֵי בְּזוּזָא וּמְאָה סָאֵה חִיטֵּי בְּזוּזָא וְלָא אִיבְּעִי אֲתָא רַב חִסְדָּא זַלְזֵיל בֵּיהּ אִיבְּעַאי אֲווֹזָא בְּזוּזָא וְלָא אִשְׁתְּכַח
Rav Yossef a déclaré : il est impudique que des femmes répondent aux chants des hommes. Et quand des hommes répondent aux chants des femmes, prêtant l’oreille à leurs voix voluptueuses (voir Berakhot 24a), c’est encore plus grave, car leur désir s’enflamme telle une étoupe au contact du feu. Quelle est l’implication pratique de la distinction établie par Rav Yossef ? Réponse : si le responsable d’une communauté n’a pas l’autorité nécessaire pour interdire les chants mixtes, il doit commencer par interdire aux hommes de répondre aux chants des femmes.
אָמַר רַב יוֹסֵף זָמְרִי גַּבְרֵי וְעׇנְיָ[ין] נְשֵׁי פְּרִיצוּתָא (זָמְרִי) [זָמְרָן] נְשֵׁי וְעָנַיִ[ין] גַּבְרֵי כְּאֵשׁ בִּנְעוֹרֶת לְמַאי נָפְקָא מִינַּהּ לְבַטּוֹלֵי הָא מִקַּמֵּי הָא
Rabbi Yo‘hanan a déclaré – Celui qui boit du vin au son de quatre sortes d’instruments de musique amène cinq châtiments dans le monde, car il est dit (Is. 5, 11–12) : « Malheur à ceux qui sont debout tôt le matin pour chercher une boisson enivrante, à ceux qui s’attardent au crépuscule et que le vin embrase. Il y a des cithares, des harpes, des tambourins, des flûtes et du vin à leurs festins, mais ils ne prennent pas l’œuvre de l’Éternel en considération. »
אָמַר רַבִּי יוֹחָנָן כׇּל הַשּׁוֹתֶה בְּאַרְבָּעָה מִינֵי זֶמֶר מֵבִיא חָמֵשׁ פּוּרְעָנִיּוֹת לְעוֹלָם שֶׁנֶּאֱמַר הוֹי מַשְׁכִּימֵי בַבֹּקֶר שֵׁכָר יִרְדֹּפוּ מְאַחֲרֵי בַנֶּשֶׁף יַיִן יַדְלִיקֵם וְהָיָה כִנּוֹר וָנֶבֶל תֹּף וְחָלִיל וָיַיִן מִשְׁתֵּיהֶם וְאֵת פֹּעַל ה׳ לֹא יַבִּיטוּ
Qu’est-il écrit ensuite ? Le prophète enchaîne aussitôt sur les cinq châtiments qui en résultent : « C’est pourquoi mon peuple sera exilé faute d’intelligence » (v. 13) – ces hommes frivoles amènent donc l’exil dans le monde ; « sa noblesse sera la proie de la faim » (ibid.) – ils amènent la famine dans le monde ; « sa multitude sera altérée par la soif » (ibid.) – ceux qui apprennent la Tora (qui est ici comparée à l’eau) l’oublient et souffrent de la soif ; « Les humains seront courbés, l’homme sera rabaissé » (ibid. 5, 15) – ils conduisent au rabaissement du Très-Haut appelé, par antiphrase, l’ennemi du Saint béni soit-Il. En effet, « l’homme » désigne parfois le Saint béni soit-Il, comme dans le verset (Ex. 15, 3) : « L’Éternel est un Homme de guerre. » Enfin le cinquième châtiment : « Et les yeux des orgueilleux seront rabaissés » (ibid.) – ils conduisent au rabaissement d’Israël.
מָה כְּתִיב אַחֲרָיו לָכֵן גָּלָה עַמִּי מִבְּלִי דָעַת שֶׁגּוֹרְמִין גָּלוּת לָעוֹלָם וּכְבוֹדוֹ מֵתֵי רָעָב שֶׁמְּבִיאִין רָעָב לְעוֹלָם וַהֲמוֹנוֹ צִחֵה צָמָא שֶׁגּוֹרְמִין לַתּוֹרָה שֶׁתִּשְׁתַּכַּח מִלּוֹמְדֶיהָ וַיִּשַּׁח אָדָם וַיִּשְׁפַּל אִישׁ שֶׁגּוֹרְמִין שִׁפְלוּת לְשׂוֹנְאוֹ שֶׁל הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא וְאֵין אִישׁ אֶלָּא הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא שֶׁנֶּאֱמַר ה׳ אִישׁ מִלְחָמָה וְעֵינֵי גְבֹהִים תִּשְׁפַּלְנָה שֶׁגּוֹרְמִין שִׁפְלוּת שֶׁל יִשְׂרָאֵל
Et après ces cinq châtiments, qu’est-il écrit ? « C’est pourquoi
וּמָה כְּתִיב אַחֲרָיו לָכֵן
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