ce dernier n’est pas contraint de l’épouser. En revanche, le frère de celui qui est mort sans enfant est tenu, par un commandement, de se marier avec sa belle-sœur. Or, la Tora n’a certainement pas maintenu l’obligation du lévirat avec une femme de mauvaise vie risquant de ruiner sa maison.
מִי קָא רָמֵינַן לַהּ עֲלֵיהּ בְּעַל כָּרְחֵיהּ
Selon une troisième version, Rav Yossef a répondu ainsi – Dans l’Écriture, celui qui se marie avec une femme répudiée pour inconduite est appelé « un autre », avec une note péjorative, car il est totalement différent du premier mari, puisque celui-ci a chassé une débauchée de sa maison, et lui, il l’a faite entrer dans son foyer. Dans ces conditions obligerait-on son beau-frère à l’épouser dans le cadre du lévirat ?
וְאִיכָּא דְּאָמְרִי אָמַר רַב יוֹסֵף הַכָּתוּב קְרָאוֹ אַחֵר שֶׁאֵין בֶּן זוּגוֹ שֶׁל רִאשׁוֹן שֶׁזֶּה הוֹצִיא רְשָׁעָה מִבֵּיתוֹ וְזֶה הִכְנִיס רְשָׁעָה לְתוֹךְ בֵּיתוֹ וְאַתְּ אָמְרַתְּ תִּתְיַבֵּם נָמֵי יַבּוֹמֵי
Abayè lui répliqua : mais dès lors, si elle s’est remariée et son époux est mort sans enfant, elle ne devrait pas épouser le frère de ce second mari, puisque l’Écriture l’appelle « un autre », exprimant ainsi sa désapprobation envers l’homme qui épouse cette femme indigne ! Réponse de Rav Yossef – Cette femme ne s’étant pas fait une mauvaise réputation après son remariage, le frère du second mari peut l’épouser sans crainte dans le cadre du lévirat, car elle s’est manifestement amendée.
אֲמַר לֵיהּ אַבָּיֵי אֶלָּא מֵעַתָּה נִשֵּׂאת לְאַחֵר וּמֵת בְּלֹא בָּנִים לֹא תִּתְיַבֵּם דְּהַכָּתוּב קְרָאוֹ אַחֵר גַּבֵּיהּ דְּהַאי מִיהָא בְּשֵׁם טוֹב הֲוָה קָיְימָא
Selon Rava, la règle de notre michna – interdisant à la femme qui s’est isolée avec l’amant présumé d’épouser son beau-frère dans le cadre du lévirat – s’explique par ce raisonnement a fortiori : si à la suite de l’isolement elle devient interdite à son mari qui lui était permis jusqu’à présent, elle est à plus forte raison défendue à son beau-frère qui lui était interdit du vivant de son mari.
רָבָא אָמַר קַל וָחוֹמֶר אִם נֶאֶסְרָה בַּמּוּתָּר לָהּ בָּאָסוּר לָהּ לֹא כׇּל שֶׁכֵּן
Abayè lui répliqua : mais dès lors, quand une veuve s’est mariée avec un Cohen Gadol à l’encontre de la loi (voir Lév. 21, 14) et celui-ci est mort sans enfant, elle ne devrait pas épouser son beau-frère qui est un simple Cohen, selon le même raisonnement – Si elle devient interdite à qui elle était permise, son mari, le Cohen Gadol, elle l’est à plus forte raison à son beau-frère qui lui était interdit pendant la durée du mariage.
אֲמַר לֵיהּ אַבָּיֵי אֶלָּא מֵעַתָּה כֹּהֵן גָּדוֹל שֶׁקִּידֵּשׁ אֶת הָאַלְמָנָה וָמֵת וְיֵשׁ לוֹ אָח כֹּהֵן הֶדְיוֹט לֹא תִּתְיַבֵּם אִם נֶאֶסְרָה בַּמּוּתָּר לָהּ בָּאָסוּר לָהּ לֹא כׇּל שֶׁכֵּן
Le Talmud Steinsaltz (Steinsaltz Center)
Traduit paragraphe par paragraphe; commenté par le Rabbin Adin Even-Israël Steinsaltz.
L’objection d’Abayè n’est pas valable, pour deux raisons. D’abord, peut-on dire dans ce cas, que la femme « devient interdite » à son mari, qui est Cohen Gadol ? Elle lui a toujours été interdite ! En outre, l’expression « son mari, le Cohen Gadol, à qui elle était permise » ne convient pas non plus pour la même raison !
נֶאֶסְרָה הָא אֲסִירָא וְקָיְימָא מוּתָּר לָהּ אָסוּר לָהּ הוּא
Mais en réalité, voici l’objection soulevée par Abayè contre Rava. On sait par ailleurs que la femme d’un Cohen ayant subi un viol devient interdite à son mari. En outre, le fils né de l’union illégitime d’un Cohen est ‘halal, c’est-à-dire disqualifié de la prêtrise et assimilé à un simple Israélite. Ainsi, quand la femme d’un Cohen a été violée et son mari est mort, s’il a un frère ‘halal, elle ne devrait pas l’épouser dans le cadre du lévirat, suivant le même raisonnement : si après le viol elle devient interdite à son mari qui lui était permis jusque-là, elle l’est a fortiori à son beau-frère qui lui était interdit du vivant de son mari.
אֶלָּא אֵשֶׁת כֹּהֵן שֶׁנֶּאֶנְסָה וָמֵת וְיֵשׁ לוֹ אָח חָלָל לֹא תִּתְיַבֵּם אִם נֶאֶסְרָה בַּמּוּתָּר לָהּ בָּאָסוּר לָהּ לֹא כׇּל שֶׁכֵּן
Réponse de Rava – Ce raisonnement ne tient pas, car la femme d’un simple Israélite lui reste permise après un viol. Par conséquent, même si la femme d’un Cohen est défendue à son mari en cas de viol, cet interdit ne s’applique pas à son frère ‘halal. En revanche, l’adultère interdisant la poursuite de la vie conjugale empêche certainement le lévirat, considéré comme le prolongement du premier mariage.
אוֹנֶס בְּיִשְׂרָאֵל מִישְׁרֵא שְׁרֵי וְגַבֵּי דְּהַאי מִיהָא לֵיכָּא אִיסּוּרָא
MICHNA: Selon la michna précédente, quand la femme d’un Cohen s’est isolée avec l’amant présumé malgré la mise en garde, dûment attestée, de son mari, elle est interdite à ce dernier et n’a plus le droit de consommer la terouma jusqu’à ce qu’elle passe avec succès l’épreuve des eaux amères. Voici à présent les femmes qui perdent définitivement le droit de rester mariées et, le cas échéant, de continuer à consommer la terouma si elles sont épouses de Cohanim :
celle qui avoue son adultère ; celle convaincue d’adultère par des témoins venus déposer contre elle ; celle qui s’est isolée avec l’amant présumé malgré la mise en garde de son mari et refuse de boire les eaux amères ou celle dont le mari ne veut pas la soumettre à cette épreuve ; et enfin celle qui a eu une relation illicite avec son mari en route vers Jérusalem, alors qu’il la conduisait pour boire les eaux amères, qui n’ont aucun effet dans un tel cas d’après une baraïta rapportée en 28b.
מַתְנִי׳ וְאֵלּוּ אֲסוּרוֹת מִלֶּאֱכוֹל בִּתְרוּמָה הָאוֹמֶרֶת טְמֵאָה אֲנִי לָךְ וְשֶׁבָּאוּ עֵדִים שֶׁהִיא טְמֵאָה וְהָאוֹמֶרֶת אֵינִי שׁוֹתָה וְשֶׁבַּעְלָהּ אֵינוֹ רוֹצֶה לְהַשְׁקוֹתָהּ וְשֶׁבַּעְלָהּ בָּא עָלֶיהָ בַּדֶּרֶךְ
GUEMARA: Rav ‘Amram a déclaré – Rav Chèchet nous a enseigné une règle, et a éclairé nos yeux en appuyant son enseignement à partir de la michna. À savoir : les eaux amères n’ont aucun effet sur une femme soupçonnée d’adultère s’il existe des témoins de son adultère qui sont partis à l’étranger. Pourquoi ? Car il est dit (Nbres 5, 13) : « elle s’est isolée, elle s’est souillée sans qu’il y ait de témoin[s] en la matière. » Ce verset laisse entendre que l’épreuve des eaux amères est imposée seulement dans le cas où personne ne sait rien à son sujet, mais pas si son adultère est connu par des témoins.
גְּמָ׳ אָמַר רַב עַמְרָם הָא מִילְּתָא אֲמַר לַן רַב שֵׁשֶׁת וְאַנְהַר לַן עַיְינִין מִמַּתְנִיתִין סוֹטָה שֶׁיֵּשׁ לָהּ עֵדִים בִּמְדִינַת הַיָּם אֵין הַמַּיִם בּוֹדְקִין אוֹתָהּ מַאי טַעְמָא דְּאָמַר קְרָא וְנִסְתְּרָה וְהִיא נִטְמָאָה וְעֵד אֵין בָּהּ דְּלֵיכָּא דְּיָדַע בָּהּ לְאַפּוֹקֵי הָא דְּהָא אִיכָּא דְּיָדַע בָּהּ
Et, poursuit Rav ‘Amram – Rav Chèchet a éclairé nos yeux en appuyant son enseignement à partir de la michna. En effet, parmi les femmes n’ayant plus le droit de consommer la terouma, le Tana mentionne : « Celle convaincue d’adultère par des témoins venus déposer contre elle. » Quand ces témoins sont-ils venus ? Si c’est avant qu’elle boive, elle est assimilée à la femme dévoyée, certainement défendue de consommer de la terouma, comme indiqué au début de la liste établie dans notre michna à propos de celle qui avoue son propre adultère !
וְאַנְהַר לַן עַיְינִין מִמַּתְנִיתִין דְּקָתָנֵי וְשֶׁבָּאוּ לָהּ עֵדִים שֶׁהִיא טְמֵאָה דַּאֲתוֹ עֵדִים אֵימַת אִי נֵימָא מִקַּמֵּי דְּתִשְׁתֵּי זוֹנָה הִיא
Mais à l’évidence, le Tana se réfère à des témoins partis à l’étranger et revenus déposer contre elle après qu’elle a bu. Cet enseignement de la michna, conclut Rav Chèchet, se comprend si on admet que les eaux amères n’ont aucun effet quand il existe des témoins de l’adultère. Mais si les eaux amères peuvent établir l’innocence ou la culpabilité de la femme même quand l’adultère est connu par des témoins partis à l’étranger, quand ceux-ci reviennent déposer contre elle, ils devraient être considérés comme des menteurs puisque la femme a passé l’épreuve avec succès, et elle devrait donc pouvoir continuer de consommer de la terouma !
אֶלָּא לְבָתַר דִּשְׁתַאי אִי אָמְרַתְּ בִּשְׁלָמָא אֵין הַמַּיִם בּוֹדְקִין אוֹתָהּ שַׁפִּיר אֶלָּא אִי אָמְרַתְּ מַיִם בּוֹדְקִין אוֹתָהּ תִּיגַּלֵּי מִילְּתָא לְמַפְרֵעַ דְּסָהֲדֵי שַׁקָּרֵי נִינְהוּ
Rav Yossef lui répliqua : on peut maintenir que généralement les eaux amères sont efficaces même si l’adultère est connu par des témoins absents. Néanmoins, ces derniers ne sont pas convaincus de mensonge parce que l’accusée a pu bénéficier du mérite d’une bonne action justifiant la suspension des effets mortels des eaux amères.
אֲמַר לֵיהּ רַב יוֹסֵף לְעוֹלָם אֵימָא לְךָ מַיִם בּוֹדְקִין אוֹתָהּ וְהָא אֵימוֹר זְכוּת תּוֹלָה לָהּ
Sur quoi porte le débat entre Rav Chèchet et Rav Yossef ? Pour le savoir, il faut se reporter à la quatrième michna du troisième chapitre (en 20a). Là, les Sages, représentés par un Tana anonyme, affirment qu’il existe un mérite susceptible de suspendre pendant un, deux ou trois ans les effets des eaux amères. Rav Chèchet et Rav Yossef discutent pour savoir si ces Sages conviennent néanmoins avec Rabbi Yehouda ha-Nassi que la consommation des eaux amères peut entraîner le dépérissement progressif de la coupable.
En effet, nous avons enseigné dans la cinquième michna du troisième chapitre (en 22b) : « Selon Rabbi, le mérite en question peut ralentir les effets des eaux amères, sans pour autant les suspendre entièrement. La femme coupable d’adultère n’enfante plus et ne jouit plus d’une santé florissante ; elle dépérit progressivement et connaît finalement la mort décrite par la Tora (Nbres 5, 27) “son ventre gonflera et son flanc s’affaissera.” »
בְּמַאי קָמִיפַּלְגִי בְּמִתְנַוְּונָה דְּרַבִּי דִּתְנַן רַבִּי אוֹמֵר זְכוּת תּוֹלָה בַּמַּיִם הַמָּרִים וְאֵינָהּ יוֹלֶדֶת וְאֵינָהּ מַשְׁבַּחַת אֶלָּא מִתְנַוְּונָה וְהוֹלֶכֶת לְסוֹף שֶׁהִיא מֵתָה בְּאוֹתָהּ מִיתָה
Rav Chèchet pense que cet avis est partagé par les Sages ayant évoqué la suspension des effets des eaux amères. Dans ces conditions, si la femme dont l’adultère est connu par des témoins partis à l’étranger avait un mérite, on s’en serait aperçu puisqu’elle aurait dû dépérir progressivement. À l’évidence, les eaux amères n’ont pas entraîné cette mort lente, parce qu’elles n’ont aucun effet quand il existe des témoins ailleurs.
Rav Yossef, lui, pense que le dépérissement progressif dû aux eaux amères est envisagé seulement par Rabbi, mais pas par les autres Sages. Pour ces derniers, le mérite de la femme lui assure une immunité totale pendant une, deux ou trois années ; ainsi, il se pourrait que ce soit le mérite de la femme qui rend les eaux amères sans effet.
רַב שֵׁשֶׁת סָבַר בֵּין לְרַבִּי וּבֵין לְרַבָּנַן הָוְיָא מִתְנַוְּונָה וְרַב יוֹסֵף סָבַר לְרַבִּי הָוְיָא מִתְנַוְּונָה לְרַבָּנַן לָא הָוְיָא מִתְנַוְּונָה
Rav Chimi bar Achi a soulevé une objection à l’encontre de Rav Chèchet en citant le début de la même michna (22b) – « Rabbi Chim‘on a déclaré : un mérite ne saurait suspendre la mort d’une femme coupable d’adultère qui boit les eaux amères. Autrement, leur effet de dissuasion serait atténué. Sachant que leurs mérites les préserveront du châtiment, les femmes n’hésiteront pas à se soumettre à l’épreuve des eaux amères, plutôt que d’avouer leur faute. En outre, les femmes soupçonnées injustement par leurs maris ne seront pas réhabilitées même si elles passent l’épreuve avec succès. Les gens diront : “En réalité, elles sont coupables, mais leur mérite les a préservées des eaux amères”. »
מֵתִיב רַב שִׁימִי בַּר אָשֵׁי רַבִּי שִׁמְעוֹן אוֹמֵר אֵין זְכוּת תּוֹלָה בַּמַּיִם הַמָּרִים וְאִם אַתָּה אוֹמֵר זְכוּת תּוֹלָה בַּמַּיִם הַמָּרִים מְדַחֶה אַתָּה אֶת הַמַּיִם בִּפְנֵי כׇּל הַנָּשִׁים הַשּׁוֹתוֹת וְאַתָּה מוֹצִיא שֵׁם רַע עַל הַטְּהוֹרוֹת שֶׁשָּׁתוּ וְהֵן אוֹמְרִים טְמֵאוֹת הָיוּ אֶלָּא שֶׁתָּלָה לָהֶן זְכוּת
Et, poursuit Rav Chimi bar Achi, si les eaux amères n’ont aucun effet quand il existe des témoins de l’adultère à l’étranger, comme l’affirme Rav Chèchet, on pourrait avancer le même argument : les femmes innocentes ne seront pas réhabilitées en buvant ces eaux, car les gens diront – « Elles étaient coupables, mais elles ont survécu parce que des témoins de l’adultère se trouvaient à l’étranger » !
וְאִם אִיתָא יֵשׁ לָהּ עֵדִים בִּמְדִינַת הַיָּם נָמֵי אַתָּה מוֹצִיא שֵׁם רַע עַל הַטְּהוֹרוֹת שֶׁשָּׁתוּ וְהֵן אוֹמְרִים טְמֵאוֹת הָיוּ אֶלָּא שֶׁיֵּשׁ לָהֶן עֵדִים בִּמְדִינַת הַיָּם
La guemara répond : tu opposes à Rav Chèchet l’avis de Rabbi Chim‘on ? Effectivement, d’après ce dernier, puisque le mérite de l’accusée ne saurait suspendre son châtiment par les eaux amères, il en va de même pour les témoins de l’adultère.
לְרַבִּי שִׁמְעוֹן קָאָמְרַתְּ לְרַבִּי שִׁמְעוֹן מִדִּזְכוּת לָא תָּלְיָא עֵדִים נָמֵי לָא תָּלוּ
Rav a formulé une autre objection à Rav Chèchet en citant la suite de la même michna – Avant de boire les eaux amères, une femme soupçonnée d’adultère doit apporter une oblation de farine d’orge, dont une poignée est brûlée sur l’autel et le reste est consommé par un Cohen (voir Nbres 5, 15–29). Dans certains cas, l’offrande préparée, ne pouvant ni être apportée sur l’autel ni être rachetée, elle était brûlée tout entière sur le dépôt des cendres de l’autel. Rav reprend ici deux de ces cas, mentionnés dans la michna parmi d’autres : « Et voici les accusées dont les offrandes doivent être brûlées de la sorte –
מֵתִיב רַב וְאֵלּוּ שֶׁמִּנְחוֹתֵיהֶן נִשְׂרָפוֹת
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