Nous avons expliqué qu’une personne doit toujours être bessim’ha parce qu’elle doit se rendre compte que tout ce qui lui arrive vient de D.ieu. Rien n’est accidentel, ni le fait du hasard. La question est cependant de savoir comment faire le lien entre l’abstrait et le réel. Comment notre conscience de ces concepts peut-elle affecter nos sentiments ?

Bien qu’une personne sache que tout vient de D.ieu, elle devient souvent déprimée ou brisée si quelque chose de tragique se produit. Quelle est l’origine de ces sentiments ? Est-ce l’événement lui-même qui cause la douleur et le chagrin, ou l’implication de la personne dans cet événement ?

Pour clarifier la question : lorsque quelque chose arrive à une personne et que celle-ci ne comprend pas en quoi cet événement est nocif, elle ne ressent pas de douleur. Quand cela nous fait-il mal ? Quand nous comprenons. Et en effet, comme le dit le roi Salomon1 : « Plus on sait, plus on souffre. » Ainsi, lorsqu’une personne éprouve de la douleur, il y a deux causes à son sentiment : l’événement douloureux et la conscience qu’elle en a.

Lorsque nous parlons de « conscience » dans le paragraphe précédent, nous parlons de la capacité de la personne à comprendre ; mais il y a une autre dimension. Une personne peut être capable de comprendre la douleur d’une situation, mais peut choisir de ne pas le faire. Si la personne laisse résonner en elle un incident négatif, elle en concevra inévitablement de la douleur. Mais elle peut choisir d’en faire abstraction, de ne pas prêter attention à ce qui s’est passé. Si elle le fait, et parvient à contrôler son esprit, elle ne ressentira aucune douleur.

Le Rabbi de Modzitz fut un grand maître ‘hassidique qui composa de nombreuses mélodies ‘hassidiques magnifiques. Dans sa vieillesse, il dut subir une opération. Malheureusement, il était affaibli par sa maladie et les médecins avaient peur de lui administrer une anesthésie car ils ne savaient pas s’il se réveillerait. En revanche, ils savaient que sans l’opération, il ne survivrait pas.

Ils demandèrent au Rabbi quoi faire et celui-ci fit une suggestion unique : il allait composer un air ‘hassidique. Lorsque les médecins le verraient profondément absorbé par la mélodie, ils devraient commencer l’opération.

Et c’est ce qui se passa. Il composa la mélodie et pendant qu’ils effectuaient l’opération, il chantait le nigoun et ne ressentait absolument aucune douleur. Ce chant nous est parvenu. Il comporte 36 strophes, car l’opération dura un certain temps.

Ceci n’est cependant pas une histoire au sujet d’un Rabbi et d’un miracle. Il était certes un grand Rabbi et il est connu pour avoir accompli des miracles, mais cet événement particulier était d’ordre naturel. Il était si profondément concentré sur le chant qu’il n’était conscient de rien d’autre, et il ne ressentait donc pas de douleur.

Nous ne sommes pas des Rebbéim, et ce niveau de concentration nous dépasse de loin, mais nous pouvons trouver des parallèles à cela dans notre propre vie. Prenons l’exemple suivant : quelqu’un rentre à la maison du travail. Quelque chose s’est passé dans le train qui l’a mis en colère, et il franchit le seuil de chez lui en fureur.

Soudain, le téléphone sonne. C’est un ami de province avec lequel il n’a pas parlé depuis des mois. Les deux amis commencent à parler et conversent pendant une demi-heure. Lorsque notre homme raccroche, il se rend compte qu’il n’est plus énervé depuis une demi-heure. Pourquoi cela ? L’incident contrariant s’est bien produit et l’appel téléphonique n’y a rien changé. Mais il a changé le centre de son attention. Pendant qu’il parlait, il ne pensait plus à ce qui s’était passé.

C’est pourquoi nous voyons que certaines personnes qui ont subi des horreurs – par exemple, les survivants de la Shoah – parviennent néanmoins à se ressaisir et à reconstruire leur vie et leur famille. Et il y en a d’autres pour qui il suffit de s’apercevoir qu’elles ont perdu leurs clés de voiture pour qu’elles s’effondrent.

Cela n’a pas tant à voir avec l’événement en lui-même qu’avec la manière dont nous le laissons nous affecter. Et cela nous conduit à considérer un autre aspect du problème : il arrive que nous conservions les souvenirs d’un événement désagréable bien plus longtemps que nécessaire. Nous continuons à y penser jour et nuit, matin et soir. Et y penser autant renforce et amplifie la souffrance que cet événement a provoqué.

Il existe une alternative. Quand nous arrêterons d’y penser, la souffrance cessera. Et c’est là que beaucoup d’entre nous commettent une erreur fondamentale : la plupart des gens pensent qu’ils sont seulement capables de contrôler leurs actions et leur discours. Ils savent qu’ils peuvent décider d’accomplir quelque chose ou de s’en abstenir, ou de dire quelque chose ou de ne pas le dire, mais ils s’imaginent que leurs pensées sont incontrôlables.

C’est une erreur. Il est certes plus difficile de contrôler la pensée car, contrairement à la parole ou à l’action, celle-ci est constante : il n’est pas un moment dans la journée où l’on ne pense pas. Mais nous avons le choix du contenu de nos pensées. Nous avons la capacité de les diriger comme nous le souhaitons.

Si une personne prend conscience qu’elle a la capacité d’arrêter de penser à l’incident dont le souvenir la fait souffrir, elle lâchera prise et elle ne ressentira plus alors autant de douleur et de tristesse.

Qu’entend-on par « lâcher prise » d’une pensée négative ? Dans le Tanya,2 l’Admour Hazakène écrit qu’il faut repousser des deux mains une pensée indésirable. Il ressort de ses mots qu’il y a deux possibilités : repousser une pensée d’une main et repousser une pensée des deux mains.

Quelle est la différence ? Lorsqu’un incident se produit, même s’il s’agit de quelque chose auquel nous ne voulons pas penser, il exige notre attention ; naturellement, notre esprit se concentre dessus et des pensées émergent. Nous avons trois manières de considérer ces pensées.

Commençons par donner une analogie :

Quelqu’un est dérangé par un importun. Celui-ci sonne constamment à sa porte et demande à être reçu à l’intérieur et à recevoir de l’attention. Le maître des lieux n’apprécie pas du tout la compagnie de cette personne, mais il ne sait pas quoi faire.

Il existe trois alternatives. La plus simple est que lorsque le visiteur sonne à la porte, l’hôte l’invite à entrer, car il ne voit pas d’autre issue. Il s’assied avec son invité, lui propose du café et des gâteaux, et discute avec lui pendant deux heures.

Si l’hôte n’a pas été à l’aise, l’invité a, quant à lui, passé un très bon moment. Il a obtenu l’attention qu’il recherchait, et ce, d’une manière bienveillante et distinguée. Il n’a certainement pas été découragé de revenir. Au contraire, après avoir été traité de cette manière, il est inévitable qu’il revienne.

Il y a une autre possibilité : l’hôte n’autorise pas le visiteur à rentrer chez lui. Il se tient sur le seuil et lui crie de quitter les lieux, tout en bloquant l’entrée.

Dans ce cas, bien que le visiteur n’ait pas pénétré dans la maison, il a tout de même retenu l’attention de l’hôte. Celui-ci est venu à la porte et lui a parlé. Certes, pas agréablement, mais il lui a accordé son attention. Et il y a donc la possibilité que le visiteur revienne solliciter cette attention, quelle que soit la manière dont elle lui est accordée.

Il y a une troisième alternative qui consiste à tout simplement ignorer celui qui se présente à la porte. Dans ce cas, il peut revenir une fois, peut-être deux fois, peut-être même trois fois, mais il finira par arrêter, car rien ne l’encourage. Il n’est pas du tout pris en considération.

Il en va de même des pensées indésirables. Si l’on accepte une pensée et que l’on y réfléchit (même si la pensée est dérangeante), on renforce ce type de pensée. L’attention que l’on accorde à un schéma de pensée encourage celui-ci à passer continuellement du subconscient au conscient, même s’il nous cause de l’inconfort.

On peut essayer de bloquer les pensées, de les empêcher de venir à l’esprit, mais souvent, cela signifie que l’on se bat contre soi-même en se répétant encore et encore de ne pas avoir ces pensées particulières. Mais tout comme l’hôte qui crie au visiteur à la porte, on leur prête alors attention. C’est ce que nous entendons par « repousser une pensée d’une main » : d’une main, on repousse la pensée, mais dans la mesure où l’on y prête attention, on la rapproche de l’autre main.

En d’autres termes, quand je pense que je ne devrais pas penser à quelque chose, je suis en train d’y penser. Je prends ces pensées en considération et, ce faisant, je les invite à passer du subconscient au conscient.

Il existe une autre alternative. Lorsqu’une pensée vient à l’esprit, on peut refuser d’y prêter la moindre attention. Il ne s’agit pas de s’efforcer de la chasser de son esprit, mais de simplement l’ignorer en concentrant son attention sur un tout autre sujet. Ignorer une pensée et ne lui accorder aucune considération mène à ce que ce schéma de pensée finisse par ne plus solliciter l’attention.

La plupart des gens demanderont : « Comment puis-je penser à autre chose ? Cette pensée ne cesse de me venir à l’esprit. »

Un homme se présenta une fois chez le Maguid de Mézeritch avec ce problème. « Mon esprit ne cesse de dévier. Comment puis-je contrôler mes pensées ? »

« Va voir mon disciple, Reb Zev de Zhitomir. Il t’aidera », répondit le Maguid.

L’homme se mit ainsi en voyage pour aller consulter Reb Zev. Il arriva à Zhitomir dans la nuit et ce n’est qu’avec difficulté qu’il réussit à localiser la maison de Reb Zev. Finalement, il atteignit la maison du tsadik et frappa bruyamment à la porte, impatient d’échapper au froid.

Il n’y eut pas de réponse. Il frappa de nouveau, mais personne ne vint ouvrir. Il en fut troublé car la maison était manifestement occupée, et il continua de frapper de toutes ses forces, mais personne ne répondit. Contrarié, mais sans autre alternative, il fut contraint de passer la nuit dehors.

Au matin, Reb Zev l’accueillit chaleureusement. Le visiteur expliqua au tsadik pourquoi il était venu et Reb Zev l’invita à profiter de son hospitalité aussi longtemps qu’il le souhaitait. Le voyageur était dérouté devant la différence entre cet accueil si aimable et la froideur qui lui avait été affichée la nuit précédente, mais par respect pour le tsadik, il n’en dit pas mot.

Il demeura chez Reb Zev plusieurs jours, ayant de nombreuses conversations avec le tsadik et apprenant en observant sa conduite quotidienne. Mais une chose le dérangeait. Il était venu dans un but précis qui était d’apprendre à contrôler ses pensées, et Reb Zev ne lui donnait aucun enseignement à ce sujet.

Finalement, il demanda au tsadik : « Le Maguid m’a envoyé ici pour une raison. Pourquoi ne m’avez-vous pas appris à contrôler mes pensées ? »

– Mais je l’ai déjà fait, répondit Reb Zev.

– Quand cela ?

– La nuit de ton arrivée, tu as frappé et cogné à la porte de ma maison pour que je te laisse entrer. Je savais que tu étais là, mais j’ai décidé de ne pas te laisser entrer. Et je me suis tenu à cette décision, quelle que soit la force de tes coups sur la porte. Voilà le secret pour contrôler tes pensées.

C’est vrai, ce n’est pas facile. Mais il existe une alternative : personne ne peut penser à deux choses en même temps. Ainsi, lorsque l’on se force à penser à un autre sujet, les pensées indésirables disparaissent.

Certes, elles peuvent revenir dix minutes plus tard, mais on peut de nouveau contrôler ses pensées et penser encore à autre chose. Elles peuvent revenir vingt minutes plus tard, mais encore une fois, on peut penser à un autre sujet.

Finalement, si on continue d’ignorer la pensée indésirable assez longtemps, elle cessera d’émerger du subconscient. Au début, elle apparaîtra moins souvent qu’avant, puis elle finira par disparaître complètement.

Pour donner une image : nos muscles sont renforcés par l’exercice. Si nous n’utilisons pas un muscle, celui-ci s’affaiblit. Si une personne est, à D.ieu ne plaise, clouée au lit plusieurs mois à cause d’un problème de dos, elle pourra avoir du mal à marcher quand elle sera enfin capable de sortir du lit. Sa maladie n’a peut-être pas affecté les muscles de ses jambes, mais l’inactivité l’a fait.

Nous avons de nombreuses pensées et expériences emmagasinées dans notre esprit subconscient. Lorsque nous les laissons investir notre conscience, c’est comme faire travailler un muscle. Cela signifie qu’en plus du fait que nous nous concentrons maintenant sur ces pensées, nous les encourageons également à émerger continuellement du subconscient.3

Mais lorsque nous ne permettons pas à une pensée de faire surface et que nous la repoussons des deux mains – c’est-à-dire que nous l’ignorons totalement –, cela diminue la probabilité qu’elle réapparaisse dans l’avenir. Il est possible qu’elle revienne, voire qu’elle se répète plusieurs fois. Mais chaque fois qu’elle est ignorée, sa tendance à se reproduire est affaiblie.

Quand, au contraire, on ne repousse une pensée que d’une main, c’est-à-dire qu’on lui accorde de l’attention en pensant à comment ne pas y penser, on invite de fait cette pensée ; c’est comme une forme d’exercice. On permet à la pensée de capter l’attention, ce qui l’encourage à continuer d’émerger du subconscient dans le conscient.

Un homme et une femme se présentèrent un jour chez un rabbin. La femme exigeait le divorce. La raison en était que son mari rentrait ivre à la maison et lui disait toutes sortes de choses désagréables. En réponse, celle-ci lui criait dessus. Il lui lançait alors quelque chose, et elle lui jetait autre chose. Chez eux, la troisième guerre mondiale éclatait presque tous les soirs.

Malgré ces difficultés, le rabbin vit que ce mariage avait du potentiel, voire beaucoup, si seulement les deux apprenaient à modifier leur conduite. Il demanda donc à la femme d’essayer encore une fois, et il promit que si cela ne fonctionnait pas, il veillerait à ce que le divorce soit conclu.

Que suggéra le rabbin ? Il a dit à la femme : « J’ai un ancien livre de Kabbale qui contient un remède aux conflits entre époux. » Il donna à la femme des instructions détaillées : elle devait apporter une bouteille contenant exactement 250 ml à un mikvé après minuit un soir de Roch ‘Hodech, le premier jour du mois. Elle devait remplir la bouteille d’eau trois fois et la vider trois fois. Ensuite, elle devait remplir à nouveau la bouteille, l’envelopper dans un sac pour que les autres ne la voient pas et la ramener à la maison.

« Lorsque votre mari rentrera à la maison, poursuivit le rabbin, vous prendrez une cuillère à café de cette eau. Vous ne la cracherez pas et ne l’avalerez pas tant que votre mari ne se sera pas endormi. »

La femme prépara la bouteille et l’eau. Cette nuit-là, elle entendit son mari rentrer à la maison. De loin, elle comprit qu’il était ivre et qu’il disait des choses très désagréables.

Obéissant aux instructions, elle prit l’eau, en mit une cuillère à café dans sa bouche et la garda là. Son mari entra dans la maison et se mit à la couvrir d’insultes. Bien sûr, elle mourait d’envie de lui hurler dessus, mais elle ne pouvait pas : elle avait l’eau dans sa bouche. Et ainsi, son mari continua de crier pendant une demi-heure.

Finalement, devant l’absence de réponse, il se fatigua et s’endormit. Alors la femme se dépêcha de cracher l’eau. Elle se mit à crier et à libérer toute la haine qui s’était accumulée en elle pendant qu’il lui criait dessus. Mais cela ne dérangea pas son mari. Il ronflait et n’entendit pas un mot de ce qu’elle disait.

Le lendemain, la même chose se produisit. Il rentra à la maison et se mit à crier, mais elle ne pouvait pas lui répondre car elle avait l’eau dans la bouche. Mais ce jour-là, il y eut un changement : il ne cria que pendant 25 minutes, puis s’endormit.

Jour après jour, la scène se répéta, mais à chaque fois le mari criait un peu moins. Bientôt, il ne cria qu’une minute ou deux, et au bout d’un moment, il cessa complètement de crier.

Lorsque les cris s’arrêtèrent, ils purent communiquer entre eux. Dès lors qu’ils se mirent à se parler, ils commencèrent finalement à s’apprécier.

Le remède suggéré par le rabbin était-il écrit dans la Kabbale ? Eh bien, pas explicitement, mais la Kabbale enseigne les vertus de la tolérance. Ce que le rabbin disait était essentiellement : « Ignorez-le et laissez-le atteindre son équilibre. Alors vous verrez que les choses pourront s’arranger. » Et ça a marché. Pourquoi ? Parce qu’en ignorant quelque chose, vous l’affaiblissez jusqu’à le décourager complètement.

Le même concept s’applique à nos pensées. La clé est de repousser une pensée indésirable des deux mains, de diriger notre esprit vers un autre centre d’intérêt et de laisser la pensée indésirable s’écouler de notre conscience naturellement, sans effort.

La ‘Hassidout met en évidence le pouvoir de notre intellect, et nous enseigne que celui-ci est la clé des émotions.4 Tout comme une clé avec laquelle on peut soit allumer, soit éteindre le moteur d’une voiture, en concentrant ou en désactivant notre attention mentale, nous pouvons contrôler nos émotions.

Changer les événements qui se sont produits n’est pas en notre pouvoir ; ils font partie de l’histoire. Mais nous pouvons changer la nature de la façon dont nous réagissons à ce qui se produit. Nous avons un contrôle total de notre intellect et nous pouvons décider de ce à quoi nous voulons penser et de ce à quoi nous ne voulons pas penser. Et lorsque nous mettons ce contrôle en pratique, nous devenons maîtres de nos émotions.

Prenons, par exemple, les sentiments de colère. Comme nous l’avons mentionné précédemment, nos Sages enseignent qu’une personne qui se met en colère et perd son sang-froid est considérée comme si elle adorait des idoles. On pourrait se demander : si une personne est provoquée et ressent sa colère monter, n’est-il pas préférable qu’elle laisse celle-ci éclater ? La psychologie moderne dit que si une personne laisse la pression intérieure s’accumuler, cela peut causer des problèmes. Elle devient comme une cocotte-minute, et cela peut même affecter sa santé. Si, cependant, elle laisse s’exprimer ce qu’elle ressent, cela soulage la pression et elle peut ensuite se calmer et redevenir elle-même. S’il en est ainsi, pourquoi la Torah nous dit-elle de ne pas libérer la colère ?

Il y a deux réponses à cette question : premièrement, on peut sublimer la colère et exprimer son énergie sous une forme positive. La façon dont une personne s’exprime n’a pas à être destructrice. La même énergie peut être libérée par des canaux positifs. Au lieu de se laisser aller à la colère, on peut serrer les dents et s’appliquer avec détermination à surmonter une épreuve à laquelle on est confronté.

De plus, si l’énergie brûle à l’intérieur d’une personne, il peut certes être préférable qu’elle la laisse sortir. Ce que la Torah exige, cependant, est de ne pas atteindre ce point, de ne jamais laisser son sang en arriver à bouillir à l’intérieur.

Pourquoi se met-on en colère ? Non pas à cause de ce qui s’est passé, mais parce que l’on pense à ce qui s’est passé et que l’on se concentre dessus. Nous avons une alternative. Il n’est pas nécessaire d’alimenter ce feu. Il est possible de détourner ses pensées du facteur contrariant et de se concentrer sur autre chose.

L’enjeu n’est pas de travailler sur des méthodes de relâchement de la pression, mais d’avoir une longueur d’avance ; de travailler sur la manière d’empêcher la pression de s’accumuler. Et cela implique de discipliner nos pensées.

C’est un principe de base de la Torah. Tout comme nous devons discipliner nos actions et notre discours, nous devons aussi discipliner nos pensées. Celui qui s’y applique avec effort finit par atteindre le contrôle de soi.

Prenons l’exemple de la jalousie. Si quelqu’un voit quelque chose qu’une autre personne possède et que sa réaction naturelle est de devenir jaloux, il se peut qu’il ne puisse pas changer cette réaction naturelle facilement. Ce qu’il peut faire en revanche, c’est ne pas entretenir des pensées de jalousie. C’est quelque chose dont il a le contrôle.

Il peut ne pas être en mesure d’empêcher une pensée jalouse d’émerger du subconscient dans le conscient. C’est une réaction naturelle. Mais il peut – et doit – se contrôler pour ne pas s’attarder à cette pensée.

Chaque fois qu’une pensée jalouse vient à l’esprit, il ne faut pas la contempler et détourner son attention. La pensée peut revenir plusieurs fois, mais à mesure que l’on fera l’effort de contrôler sa conscience, ces pensées jalouses seront beaucoup moins fréquentes. En fin de compte, elles cesseront de jaillir du subconscient.

Le même concept s’applique en ce qui concerne les pensées de haine. La Torah nous dit de ne pas haïr un autre Juif.5 Mais que se passe-t-il si une autre personne nous fait terriblement de mal ? Il est naturel que des sentiments de haine soient suscités. Comment pouvons-nous les contrôler ?

La réponse est qu’il est en effet très difficile de changer ce que nos tripes nous dictent pour ne pas réagir avec colère ou haine dans un tel cas. Cela peut être hors de notre contrôle. Une fois qu’une telle chose a eu lieu, des pensées de haine commenceront probablement à apparaître.

Mais c’est ici que nous devons exercer un contrôle de soi. Nous avons la capacité de nous empêcher d’occuper notre esprit avec des pensées de haine.

Comment s’arrêter ? Non pas en repoussant la haine d’une seule main, mais en s’en détournant totalement, en passant à un sujet complètement différent. Cela empêche les sentiments de haine d’être renforcés et amplifiés. De la sorte, ils ne s’embraseront pas et finiront par disparaître.

Ces pensées de haine peuvent continuer à revenir. Néanmoins, lorsqu’elles sont ignorées une fois, deux fois, trois fois et même cent fois, elles finissent par cesser de surgir du subconscient.

Beaucoup d’entre nous peuvent regarder en arrière dans notre passé et constater que lorsque nous étions plus jeunes, nous étions obsédés par certaines choses. Nous les voulions et ne pouvions pas arrêter de penser à elles. Le matin, l’après-midi, à l’école, pendant les repas, la nuit, quand nous nous endormions, dans nos rêves ; c’était presque comme si c’était tout ce à quoi nous pensions.

Quand nous y repensons maintenant, nous nous demandons : « Que s’est-il passé ? Pourquoi ne suis-je plus obsédé par ces mêmes pensées ? Qu’est-ce qui a changé ? » Souvent, la situation n’a pas changé et ce désir n’a jamais été satisfait.

Pourquoi alors ne continue-t-on pas à y penser ? La réponse est très simple. Plusieurs années ont passé, et dans l’intervalle, nous avons été confrontés à de nouvelles situations, à de nouveaux désirs et à de nouveaux problèmes, et peut-être même à de nouvelles obsessions. Nous avons consacré tellement de temps et d’attention à ces nouvelles choses que nous avons perdu tout intérêt pour les anciennes. Nous leur avons accordé de moins en moins d’attention et nous avons finalement cessé d’y penser.

C’est ce que nous devrions faire des sentiments de dépression et de toutes les pensées négatives. En général, nous devons savoir que tout ce qui se passe est bon et que, par conséquent, une personne doit toujours être bessim’ha, remplie d’une vraie joie. Nous devons intérioriser cette idée, en faire une partie de nous. Cela nous aidera à ne pas perdre notre équilibre lorsque des choses indésirables se produisent.

Mais si quelque chose parvient à nous bouleverser, nous devons savoir que nous avons une alternative. Celle-ci n’implique pas de méditer sur la façon dont l’élément bouleversant est en réalité un bien déguisé. Une personne très bouleversée ne pourra pas toujours honnêtement arriver à une telle prise de conscience. Ce que nous pouvons faire – et ce que nous devons faire si nous voulons préserver notre équilibre intérieur –, c’est diriger notre attention vers un autre sujet, et recommencer encore et encore jusqu’à ce que ne plus être perturbés par la pensée bouleversante. Arrivés au stade où nous ne sommes plus contrôlés par nos pensées déprimantes, nous pouvons alors nous concentrer sur la vérité que la Torah enseigne : que tout vient de D.ieu et est par essence bon.