Le don de charité avant la prière a sa source dans le Talmud, qui enseigne : « Les voies de D.ieu ne sont pas comme celles des mortels. Comment cela se passe-t-il chez les êtres humains ? Si un homme apporte un présent à un roi, il se peut qu’il soit accepté ou non. Et même s’il est accepté, il n’est pas certain que cet homme sera admis en présence du roi. Il n’en est pas ainsi avec D.ieu. Si un homme donne ne serait-ce qu’une petite pièce à un mendiant, il est jugé digne de recevoir la Présence divine, comme il est écrit : “Je contemplerai Ton visage dans le tsédek (la charité).”1 » Ainsi, rapporte le Talmud, Rabbi Eléazar avait l’habitude de donner une pièce à un pauvre, puis commençait immédiatement à prier.2

À un niveau élémentaire, donner la charité avant la prière chaque jour (à l’exception du Chabbat et des fêtes juives) revient à offrir un cadeau au roi avant de lui adresser une requête. À un niveau plus profond, nous avons conscience que c’est avec une immense bonté que D.ieu, qui est infini, subvient à nos besoins finis — et parfois insignifiants. Nous éveillons cette bonté divine en donnant la charité et en accomplissant des actes de bienveillance.3

Rabbi Chmouel, le quatrième Rabbi de ‘Habad, expliquait : la prière doit être empreinte de vitalité. En donnant la charité à un pauvre, ce qui revient à lui donner de la vie, la prière de celui qui donne est imprégnée d’un surcroît considérable de « vitalité ». (En disant cela, il accompagna ses paroles d’un geste de la main vers le haut, pour signifier que ce surcroît dépasse l’imagination.)

Et de fait, son fils, Rabbi Chalom Dov Ber, cherchait fréquemment un indigent à nourrir avant de commencer à prier.4

Quand donner ?

Que signifie exactement « avant la prière » ?

L’interprétation la plus répandue est : avant le début de l’office.

Or, dans la plupart des cas où le mot « prière » apparaît dans le Talmud et dans le Code de la Loi juive, il s’agit d’une référence à la Amida (la prière silencieuse). Certains ont donc l’usage de donner la charité juste avant de commencer la Amida.5

Cependant, il est quelque peu problématique de faire une interruption à ce stade de la prière. C’est pourquoi d’autres suivent la coutume du Arizal qui, pour des raisons kabbalistiques (qui dépassent le cadre de cet article), avait l’habitude de donner la charité en disant les mots véata mochèl bakol (« et Toi, Tu règnes sur tout ») dans Vayevarekh David (« Et David bénit... »).6

Le Rabbi de Loubavitch fait cependant remarquer que le motif du don à ce moment précis n’est pas le même que celui du don avant la prière. C’est pourquoi la coutume la plus répandue est de faire un don avant le début de l’office (et ensuite, suivant le Arizal, nombreux sont ceux qui donnent à nouveau en disant véata mochèl bakol).7

La coutume veut que l’on donne la charité avant les prières de Cha’harit (le matin) et de Min’ha (l’après-midi). Nombreux sont ceux, cependant, qui ne donnent pas avant la prière du soir (Maariv), suivant l’avis du Talmud de Jérusalem8 et du Arizal9 selon lesquels il convient de s’abstenir de donner la nuit, car les attributs de rigueur s’y déploient avec intensité et l’on craint que les forces extérieures ne s’en nourrissent.10 Le Rabbi explique que cette réserve ne s’applique que dans le cas où l’on chercherait activement une boîte de charité pour donner. Si, toutefois, l’on est abordé par une personne dans le besoin, on reste tenu de l’aider.11

Nos sages enseignent : « Grande est la charité, car elle hâte la rédemption »,12 comme l’enseigne également le prophète Isaïe : « Sion sera rachetée par la justice, et ses repentants par la charité (tsédaka). »13

Puisse cela arriver rapidement, de nos jours !