Cette question traverse sans doute l’esprit de millions de contribuables lorsqu’ils remplissent leur déclaration de revenus annuelle.
Pour certains, c’est une pensée amère : Je me tue au travail et, après avoir payé le loyer et les factures et le strict nécessaire pour me permettre de continuer à me tuer au travail, le peu qui en reste – les quelques sous que j’aurais pu utiliser pour quelque chose que je veux pour moi – va « à l’État »...
Pour d’autres, c’est une notion plus positive : Je contribue une partie relativement faible de nos revenus et, en retour, le gouvernement paie pour notre défense nationale et d’autres services essentiels, finance la recherche scientifique et les institutions culturelles, et assure aux nécessiteux divers services – toutes choses dont je devrais m’occuper moi-même...
Nous, les Juifs, avons aussi une sorte d’« impôt ». Nous parlons bien sûr de la tsédaka, communément appelée « charité » mais qui signifie plus exactement « justice » et « droiture ». L’attitude juive, c’est que lorsque nous partageons nos bienfaits avec les nécessiteux, nous ne sommes pas généreux ou charitables, mais nous nous employons plutôt à redresser un tort, à corriger un déséquilibre dans le monde de D.ieu, un déséquilibre que nous croyons que D.ieu a créé seulement parce qu’Il veut que nous le corrigions.
Selon les termes du Talmud dans l’Éthique des Pères :
Rabbi Eléazar de Bartota dit : Donne-Lui de ce qui Lui appartient, car toi et tout ce qui t’appartient êtes à Lui. C’est ainsi que David dit (Chroniques I 29,14) : « Car tout vient de Toi et c’est de Ta main que nous tenons ce que nous T’avons donné. »
Il est significatif que Rabbi Eléazar ne dit pas simplement : « car tout ce qui est à toi est à Lui », mais plutôt « car toi et tout ce qui t’appartient êtes à Lui ».
Le Rabbi de Loubavitch explique que l’on pourrait autrement prendre le concept juif de tsédaka à l’extrême opposé, et se dire : « Dans ce cas, je ne fais pas vraiment quoi que ce soit ! Après tout, rien n’est à moi, et en donnant la tsédaka, je ne fais que mon devoir. Je n’ai aucune raison de sentir que j’ai accompli quelque chose, ni d’en retirer un sentiment de satisfaction... »
Mais la vérité, cependant, est qu’il existe bel et bien un « toi » ainsi que des choses qui sont « à toi ». Les deux sont le résultat de la façon dont le Créateur a configuré Sa création, donnant à l’être humain le libre arbitre, la conscience de soi et les ressources qui lui appartiennent légalement et moralement. C’est seulement que celles-ci font partie d’une réalité et d’une vérité plus vastes, dans lesquelles tout existe pour servir le dessein divin.
Ainsi, lorsque nous donnons aux nécessiteux, notre acte de tsédaka a une véritable signification morale et spirituelle. Nous donnons de nous-mêmes, de par notre reconnaissance du fait que « nous » et « le nôtre » sont un sous-ensemble d’une plus grande vérité. Et cette reconnaissance elle-même est un véritable bond existentiel, un affranchissement des contraintes du soi pour se connecter à la réalité infinie de D.ieu.
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