Par la grâce de D.ieu.

Le 2 Nissan 5716 [1956] Brooklyn N.Y.

À nos frères, fils d’Israël — et à tous ceux en particulier, qui œuvrent dans le domaine de l’éducation — partout où ils se trouvent, que D.ieu leur accorde longue vie.


Je vous salue et vous bénis.

Pessa’h, la première fête qui nous ait été donnée, a, tant à l’échelle de la communauté d’Israël qu’à celle de chaque Juif, tout particulièrement trait à l’éducation.

Au niveau du peuple juif tout d’abord, la sortie d’Égypte a constitué pour lui sa naissance en tant que nation ainsi que le début de sa préparation à recevoir la Torah, dont le contenu constitue un enseignement et une éducation quant à la façon d’agencer la vie.

Au niveau individuel, la Torah a mis un accent particulier sur l’éducation, en ordonnant : « Tu raconteras à ton fils, en ce jour, en disant : c’est en vue de ceci que l’Éternel a œuvré pour moi, lors de ma sortie d’Égypte », faisant ainsi de l’éducation la pierre angulaire de la fête de Pessa’h. Pessa’h, à ce titre, se trouve être un moment privilégié pour méditer sur les concepts et les règles régissant le domaine de l’éducation et la façon dont ceux-ci peuvent être mis à contribution, en particulier les jours de fêtes.

Aux jours de fêtes, et tout particulièrement à Pessa’h, sont attachés de nombreuses lois et coutumes qui, au-delà de la signification qu’elles revêtent au moment de leur accomplissement, doivent voir leur portée étendue à la vie de tous les jours, tout au long de l’année. Cette idée, déjà très conséquente au niveau de chaque Juif, l’est encore davantage pour la jeunesse et les enfants.

En termes concrets, du fait de circonstances diverses, les enfants, au lieu d’être davantage soumis à l’influence de leur milieu éducatif les jours de fêtes, se trouvent au contraire « libérés », qui de la Yéchivah, qui de la Yéchivah Kétanah, qui du Talmud Torah, non seulement durant cette période, mais déjà un certain temps avant. Ces vacances n’étaient jadis pas susceptibles de porter atteinte à l’éducation reçue précédemment, car le dehors, et bien sûr la maison, étaient alors de nature à inspirer aux enfants, et dans toute sa mesure, l’ardeur requise pour la vie juive de tous les jours. Quant aux institutions éducatives, elles étaient principalement dédiées à insuffler aux enfants la connaissance de la Torah.

De nos jours, le devoir des institutions n’est pas seulement d’enrichir les connaissances des enfants dans le domaine de la Torah ; il doit être également d’insuffler et d’affermir en eux la crainte de D.ieu, le désir d’accomplir parfaitement les Mitsvot et plus généralement, l’esprit de la vie juive. Ainsi, l’éloignement de leurs écoles ne se fera pas trop sentir à un moment où l’influence de celles-ci est dans toute sa mesure nécessaire.

Je me tourne, à cet égard, vers tous ceux susceptibles d’œuvrer pour une saine éducation, et vers les parents en particulier, afin que soit pallié cette situation à l’aide des moyens appropriés, à savoir :

1) Instituer qu’en veille de fête, ou tout au moins le plus près possible de celle-ci, il soit procédé pour les enfants à un rappel des enseignements, des lois et des coutumes nécessaires à la célébration de la fête, ainsi que de leurs significations.

2) Instituer, ce qui est plus que nécessaire, que durant les jours de fête (en tous cas, les jours de demi-fête), les éducateurs réunissent leurs élèves, de manière également appropriée, afin de mettre à profit ces jours favorables pour conforter l’influence qu’ils ont sur leurs élèves, dans les domaines attachés à la fête de façon générale, et à leur pratique en particulier.

On pourra, à cet effet, certainement trouver les moyens de vaincre les difficultés comme l’éloignement ou la dispersion des enfants, car la réunion devant se tenir durant la fête ne doit pas obligatoirement avoir lieu dans les locaux de l’institution même. Les conditions techniques de déroulement (répartitions des classes, des maîtres, etc.) ne revêtent pas ici de grande importance, s’agissant d’enseignements pouvant s’adresser à des élèves de plusieurs niveaux réunis.

3) Que les parents ne s’en remettent pas entièrement aux institutions juives et qu’ils prennent à cœur le fait que d’un côté l’influence de la rue est nocive pour les enfants, et que de l’autre, les enfants ayant plus de temps libre pendant leurs vacances, leur responsabilité à leur égard en matière d’éducation s’en trouve accrue. Les moyens dont disposent les parents à cet effet sont également bien plus amples.

D.ieu fasse que tous les garçons et les filles, tous les enfants entrant dans les quatre catégories mentionnées par la Haggadah, puissent être réunis autour d’une même table, imprégnés du désir d’accomplir « les témoignages, les décrets, et les lois que l’Éternel notre D.ieu nous a ordonnés », qu’ils posent tous de pertinentes questions, et qu’ils interrogent afin de savoir et d’accomplir ce que la Torah leur aura réellement répondu. Puisse cette ébauche de rassemblement des exilés, que constituera le fait d’inviter au Seder des enfants éloignés de la Torah, hâter le début de la délivrance, la délivrance véritable par le Machia’h, et que s’accomplisse alors le souhait par lequel nous introduisons le Seder : « Actuellement nous sommes esclaves, l’année prochaine nous serons libres. »

Avec ma bénédiction pour une fête de Pessa’h cachère et joyeuse.