Par la grâce de D.ieu

Le 11 Nissan 5721 [1961] Brooklyn N.Y.

À nos frères juifs,
partout où ils se trouvent.
Que D.ieu leur accorde longue vie.

Je vous salue et vous bénis.

La sortie d’Égypte, substance de la fête de Pessa’h, est au centre de la vie, tant communautaire, qu’individuelle, du Juif.1

Elle est en outre, source d’enseignements, de même qu’elle sert de guide, non seulement de par sa teneur générale, mais encore par les différents aspects qui la constituent.

L’une des composantes essentielles de la sortie d’Égypte est la formidable confiance, vouée alors à D.ieu, et à Sa providence,2 et qui trouva sa concrétisation lorsque tout un peuple, des millions d’individus,3 hommes, femmes et enfants, quittèrent un pays nanti pour s’en aller au loin, sans la moindre provision, confiant en la seule parole que Moïse avait adressée au Nom du Tout-Puissant.

Plus encore, lorsqu’ils quittèrent l’Égypte, les Juifs ne prirent pas le chemin le plus court — pourtant connu d’eux — celui du pays des Philistins. Celui-ci, bien que dangereux, car il laissait prévoir une guerre, laissait du moins un espoir de survie, fut-ce à quelques-uns, en cas de défaite. À la place, le peuple s’en fut dans un lointain désert,4 où la nature excluait toute possibilité de survie. Encore une fois, cette attitude n’avait pour tout fondement que la parole prononcée par Moïse au Nom de D.ieu.

L’impression grandit encore, lorsque l’on considère le fait que les Juifs avaient vécu en sédentaires, durant deux cent dix ans dans le pays de Gochen, une terre des plus fertiles, qui n’était pas tributaire des pluies car constamment irriguée par le Nil5 ; une terre comblée par les dispositions favorables de la nature.

Il est écrit : « Comme aux jours de ta sortie d’Égypte, Je te montrerai des prodiges. »6 Ce verset signifie que depuis le jour de la sortie d’Égypte,7 l’absolue confiance en la Providence divine, et l’application constante, et jusque dans la vie quotidienne de ses enseignements, sans référence aux hypothèses humaines, et aux dispositions de la nature, doit être l’inconditionnel compagnon de route, et le guide de chaque Juif, sur les plans individuel et communautaire, et ce, à chaque époque.

Ceci constitue la réponse à donner au monde non-juif, et aux Juifs déjudaïsés lorsqu’ils avancent aux Juifs pratiquants l’argument suivant : « Nous vivons dans un monde, où il faut âprement lutter pour l’existence. De plus, chacun habite un pays donné, où prévaut un certain mode de vie. Comment, dans ce cas, se refuser à complaire aux concepts en vigueur dans ce pays ? (Qu’il s’agisse de l’appât du gain, ou de la crainte de ne pas ressembler aux voisins.) Par quel moyen se lier aux six cent treize mitsvot, qui “jugulent” le moindre aspect de l’existence juive ? »

La sortie d’Égypte fournit à cela une réponse, ainsi qu’il a été expliqué.

Lors de la sortie d’Égypte, la mise en pratique des enseignements divins, sans prise en compte, des contingences qui prévalaient, et la rupture avec un passé de deux cent dix ans en Égypte constituèrent la seule voie menant au bonheur véritable ; un bonheur spirituel — recevoir la Torah, et devenir le peuple élu8 — et matériel — hériter d’un pays, où coulent le lait et le miel.

Ainsi, à l’heure actuelle, et toujours sans considérer ce que fut le passé, l’unique voie conduisant le Juif au bonheur véritable, consiste à édifier sa vie quotidienne conformément à la Torah, et à ses Mitsvot, dont il est dit : « ... parce que l’homme qui les pratique obtient par eux la vie. »9

* * *

Les Juifs ont reçu l’injonction : « Dans toutes tes voies, connais-Le. »10 Il existe en effet, pour chaque domaine d’activité, et chaque moment de la journée, des enseignements de la Torah que le Juif doit s’efforcer de mettre en pratique. Ainsi peut-il à chaque instant réfléchir à la question évoquée plus haut. C’est à cet effet que l’injonction a été faite à chaque Juif, de se remémorer la sortie d’Égypte « Tous les jours de sa vie ».11 Un souvenir qui est source d’enseignements, qui illumine, et affermit la conduite, et qui finalement, procure toute sa vitalité à la vie juive. Mon Maître et beau-père (Rabbi Yossef Its’hak) — de sainte mémoire — souligne cette idée, en affirmant que la fête de Pessa’h ne vient pas illuminer de façon quotidienne, mais de façon perpétuelle.12

Avec ma bénédiction pour une fête de Pessa’h cachère et joyeuse.