car elle est considérée, dans le doute, comme une femme convaincue d’adultère, ayant le statut de zona (« fourvoyée », statut que confère à une femme la plupart des relations illicites, dont l’adultère) – or il est écrit à propos des Cohanim (Lév. 21, 7) : « Ils ne prendront pas une zona. » Mais dans ce cas, Rabbi ‘Akiba devrait lui interdire la terouma pour la même raison, sans recourir à la formule ve-nitmaa. En effet, il est écrit (Lév. 22, 12) : « La fille d’un Cohen, si elle appartient à un homme étranger, elle ne mangera pas du prélèvement des choses saintes » et Rabbi ‘Akiba en déduit (Yebamot 68a) qu’une femme rendue zona par une relation illicite n’a plus droit à la terouma !
שֶׁהֲרֵי עָשָׂה בָּהּ סְפֵק זוֹנָה כְּזוֹנָה תְּרוּמָה נָמֵי לָא תִּיבְּעֵי קְרָא שֶׁהֲרֵי עָשָׂה בָּהּ סְפֵק זוֹנָה כְּזוֹנָה
Mais pour comprendre la baraïta, il faut la corriger et adopter cette version : Rabbi ‘Akiba perçoit quatre indices scripturaires dans les versets relatifs à la sota – le verbe nitmea « elle a été souillée », employé à deux reprises (Nbres 5, 14 et 27), puis le mot ve-nitmaa (v. 29), contenant deux autres indices – le verbe lui-même et le vav préfixé. Un indice vient interdire à son mari la femme soupçonnée d’adultère ; un deuxième, à l’amant présumé ; un troisième, lui interdire de se marier avec un Cohen, et un quatrième, la priver de la terouma.
אֶלָּא לְרַבִּי עֲקִיבָא אַרְבְּעָה קְרָאֵי כְּתִיבִי חַד לְבַעַל וְחַד לְבוֹעֵל וְחַד לִכְהוּנָּה וְחַד לִתְרוּמָה
Selon Rabbi Yichma‘el, qui n’interprète pas les vav, seules trois formules – les deux nitmaa, plus ve-nitmaa – se prêtent à une exégèse : l’une vient interdire la femme soupçonnée d’adultère à son mari ; une deuxième, à l’amant présumé, et une troisième, la priver de la terouma. Et il déduit du raisonnement a fortiori qu’elle n’a pas le droit de se marier avec un Cohen.
וְרַבִּי יִשְׁמָעֵאל תְּלָתָא קְרָאֵי כְּתִיבִי חַד לְבַעַל וְחַד לְבוֹעֵל וְחַד לִתְרוּמָה וּכְהוּנָּה אָתְיָא בְּקַל וָחוֹמֶר
Et d’où Rabbi Yichma‘el sait-il que l’une des trois « souillures » mentionnées par la Tora vient interdire la terouma à la sota, tandis que la défense d’épouser un Cohen se déduit du raisonnement a fortiori ? Peut-être faut-il tirer cette dernière interdiction du texte biblique et, en l’absence d’un autre indice scripturaire, permettre à la femme soupçonnée d’adultère de continuer à manger la terouma !
וְרַבִּי יִשְׁמָעֵאל מִמַּאי דְּאִיצְטְרִיךְ קְרָא לִתְרוּמָה וּכְהוּנָּה אָתְיָא בְּקַל וָחוֹמֶר דִּילְמָא כִּי אִצְטְרִיךְ לִכְהוּנָּה וּתְרוּמָה שַׁרְיָא
Rabbi Yichma‘el te répondra : il est logique d’apprendre du verset une interdiction ayant un point commun avec celle qui défend à la sota de s’unir à son mari et à l’amant présumé – déduite des deux occurrences de nitmaa. Puisque cette femme est interdite à son mari et à l’amant du vivant du mari, après le divorce, la troisième formule vient certainement la priver aussi de la terouma du vivant du mari,
et non lui défendre d’épouser un Cohen . . . après la mort de son mari – car, en cas de divorce, elle ne peut se marier avec un Cohen !
אָמַר לָךְ מִסְתַּבְּרָא דֻּומְיָא דְּבַעַל וּבוֹעֵל מָה בַּעַל וּבוֹעֵל מֵחַיִּים אַף תְּרוּמָה נָמֵי מֵחַיִּים לְאַפּוֹקֵי כְּהוּנָּה דִּלְאַחַר מִיתָה
Le Talmud Steinsaltz (Steinsaltz Center)
Traduit paragraphe par paragraphe; commenté par le Rabbin Adin Even-Israël Steinsaltz.
Quant à Rabbi ‘Akiba, celui-ci n’admet pas la nécessité de déduire du verset une interdiction ayant un point commun avec celle de la sota à son mari et à l’amant présumé. Par conséquent, sans un quatrième indice scripturaire, on aurait seulement appris l’interdiction la plus sévère, à savoir, celle de se marier avec un Cohen, mais pas celle de manger la terouma.
וְרַבִּי עֲקִיבָא דּוּמְיָא דְּבַעַל וּבוֹעֵל לֵית לֵיהּ
Et à supposer qu’il admette cette nécessité, impliquant la possibilité de déduire l’interdiction d’épouser un Cohen par un raisonnement a fortiori, Rabbi ‘Akiba pourrait rétorquer : même s’il était possible de déduire par un raisonnement a fortiori que la sota n’a pas le droit d’épouser un Cohen, la Tora a pris la peine d’y faire allusion par le vav de ve-nitmaa.
וְאִי נָמֵי אִית לֵיהּ מִילְּתָא דְּאָתְיָא בְּקַל וְחוֹמֶר טָרַח וְכָתֵב לַהּ קְרָא
Rav Guidel a rapporté cet enseignement de Rav – La distinction établie dans la baraïta à propos d’une impureté douteuse entre une personne pouvant ou non être interrogée à ce sujet, se déduit du verset qui traite des lois de pureté concernant la chair des offrandes (Lév. 7, 19) : « Et la chair qui touchera tout [individu] impur ne sera pas consommée, et la chair, tout [individu] pur consommera la chair. » La première partie : « Et la chair qui touchera tout [individu] impur ne sera pas consommée » laisse entendre que la chair est interdite seulement si son impureté est certaine, mais qu’elle est permise en cas de doute.
אָמַר רַב גִּידֵּל אָמַר רַב דָּבָר שֶׁיֵּשׁ בּוֹ דַּעַת לִישָּׁאֵל וְאֵין בּוֹ דַּעַת לִישָּׁאֵל מֵהַאי קְרָא נָפְקָא וְהַבָּשָׂר אֲשֶׁר יִגַּע בְּכׇל טָמֵא לֹא יֵאָכֵל וַדַּאי טָמֵא הוּא דְּלֹא יֵאָכֵל הָא סָפֵק טָמֵא וְסָפֵק טָהוֹר יֵאָכֵל
Lis à présent la fin du verset : « Et la chair, tout [individu] pur consommera la chair. » Il apparaît que la chair est permise uniquement à une personne dont la pureté est certaine, mais pas en cas de doute !
אֵימָא סֵיפָא וְהַבָּשָׂר כׇּל טָהוֹר יֹאכַל בָּשָׂר וַדַּאי טָהוֹר הוּא דְּיֹאכַל בָּשָׂר הָא סָפֵק טָמֵא וְסָפֵק טָהוֹר לֹא יֹאכַל
Comment concilier les implications contradictoires des deux parties du verset ? À l’évidence, la fin se réfère à l’impureté éventuelle d’une personne pouvant être interrogée à ce sujet ; en cas de doute, elle devient impure.
En revanche, le début du verset se rapporte à la chair d’une offrande qui a pu être contaminée par une source d’impureté : ne pouvant être interrogée, elle reste permise en cas de doute.
אֶלָּא לָאו שְׁמַע מִינַּהּ כָּאן שֶׁיֵּשׁ בּוֹ דַּעַת לִישָּׁאֵל כָּאן שֶׁאֵין בּוֹ דַּעַת לִישָּׁאֵל
Et, explique la guemara, on avait besoin à la fois de cette interprétation de Rav Guidel au nom de Rav et de l’analogie, établie dans la baraïta citée précédemment, avec la femme soupçonnée d’adultère. En effet, s’il n’y avait que l’interprétation de Rav Guidel au nom de Rav, on aurait fait une différence entre une personne pouvant ou non être interrogée, tant dans le domaine privé que dans le domaine public. Aussi fallait-il déduire de la sota que cette distinction n’est exacte que dans un domaine privé.
וְאִיצְטְרִיךְ דְּרַב גִּידֵּל אָמַר רַב וְאִיצְטְרִיךְ לְמִיגְמַר מִסּוֹטָה דְּאִי מִדְּרַב הֲוָה אָמֵינָא בֵּין בִּרְשׁוּת הַיָּחִיד וּבֵין בִּרְשׁוּת הָרַבִּים אִיצְטְרִיךְ לְמִיגְמַר מִסּוֹטָה
Et si on avait pris la femme soupçonnée d’adultère comme unique référence, on aurait pensé qu’une impureté douteuse dans un domaine privé est considérée comme certaine seulement si la source et le receveur sont, tous deux, des personnes douées de raison – à l’instar de la sota et de son amant. Les deux enseignements étaient donc nécessaires.
וְאִי מִסּוֹטָה הֲוָה אָמֵינָא עַד דְּאִיכָּא דַּעַת נוֹגֵעַ וּמַגִּיעַ צְרִיכָא
§ À ce stade, une introduction est nécessaire pour comprendre la suite de la michna (citée ci-après). Il existe différents degrés d’impureté selon la nature de sa source, le plus élevé étant l’impureté communiquée par le cadavre d’un être humain [avi avot ha-touma] ; qui le touche devient lui-même source d’impureté [av ha-touma] et transmet l’impureté au premier degré à un autre, du premier degré au deuxième, puis parfois du deuxième au troisième et, dans certains cas, même du troisième au quatrième – comme on le verra plus loin. Le cadavre des huit reptiles mentionnés dans l’Écriture (Lév. 11, 29–37), la personne atteinte de gonorrhée ou d’une affection lépreuse ont aussi le caractère de av ha-touma. À la fin de la période d’impureté, l’intéressé doit s’immerger dans un bain rituel durant la journée [tevoul yom] ; dès lors, il peut consommer une nourriture profane et la dîme, mais il est tenu d’attendre la tombée de la nuit pour manger un aliment prélevé au titre de la terouma et, le cas échéant, apporter une offrande pour avoir droit à la chair des sacrifices (voir Yebamot 74b). Venons-en maintenant à la michna – « En ce même jour, Rabbi ‘Akiba déduisit du verset (Lév. 11, 33) se rapportant au cadavre de l’un des huit reptiles : “Et [tout] ustensile en argile à l’intérieur duquel tomberait [l’un] d’eux, tout ce qui est à l’intérieur sera impur”, qu’un pain impur au second degré rend impur ce qui le touche au troisième degré. En entendant cette interprétation de Rabbi ‘Akiba, Rabbi Yehochoua s’est exclamé – Qui dégagera la poussière de tes yeux, Rabban Yo‘hanan ben Zacaï ? Tu affirmais qu’une génération à venir allait déclarer qu’un pain, même s’il a le caractère de terouma, ne saurait devenir impur au troisième degré, car ce degré d’impureté n’est évoqué nulle part dans l’Écriture. »
בּוֹ בַּיּוֹם דָּרַשׁ רַבִּי עֲקִיבָא וְכׇל כְּלִי חֶרֶשׂ כּוּ׳
Si la Tora n’y fait aucune référence, objecte la guemara, pourquoi Rabban Yo‘hanan ben Zacaï le considérait comme impur, redoutant que ce degré d’impureté soit méconnu par une génération future ?
וּמֵאַחַר דְּאֵין לוֹ לָמָּה טָמֵא
Rav Yehouda a expliqué au nom de Rav – On n’en trouve aucune référence explicite dans le texte biblique, mais on peut le déduire par ce raisonnement a fortiori : un tevoul yom, considéré comme pur au sujet des aliments profanes qu’il ne disqualifie pas et peut immédiatement consommer, rend toutefois la terouma impure s’il la touche avant la tombée de la nuit ; dans ces conditions,
un pain profane, qui – selon le verset du Lévitique déjà cité – devenant lui-même impur au deuxième degré dans un ustensile en argile contaminé par un reptile, rend certainement la terouma impure au troisième degré.
אָמַר רַב יְהוּדָה אָמַר רַב מִן הַתּוֹרָה אֵין לוֹ מִדִּין קַל וָחוֹמֶר יֵשׁ לוֹ וּמָה טְבוּל יוֹם שֶׁמּוּתָּר בְּחוּלִּין פּוֹסֵל בִּתְרוּמָה כִּכָּר שֵׁנִי שֶׁפָּסוּל בְּחוּלִּין אֵינוֹ דִּין שֶׁיַּעֲשֶׂה שְׁלִישִׁי בִּתְרוּמָה
Il y a lieu d’objecter : peut-être qu’un tevoul yom rend la terouma impure parce qu’il était une source d’impureté principale [av ha-touma] avant son immersion, contrairement au pain impur seulement au deuxième degré et qui ne peut en aucun cas devenir av ha-touma !
אִיכָּא לְמִיפְרַךְ מָה לִטְבוּל יוֹם שֶׁכֵּן אַב הַטּוּמְאָה
On peut apporter une preuve
תֵּיתֵי
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