Rabbi Lévi Its'hak, fut inculpé en même temps que les trois autres personnalités. Ils furent accusés « d'être membres d'un mouvement clandestin juif antisoviétique, actifs au cours de réunions secrètes organisées dans la maison de Schneerson, d'avoir collecté de l'argent parmi la population au profit des familles de prisonniers, d'avoir participé à la gestion de caisses non déclarées, d'avoir au cours de ces réunions lancé des propagandes antisoviétiques, d'avoir diffamé le gouvernement soviétique et d'avoir entretenu un lien avec des communautés à l'étranger par l'intermédiaire de leur chef : Schneerson. »

Document ordonnant l'exil de Rabbi Lévi Its'hak
Document ordonnant l'exil de Rabbi Lévi Its'hak

Le verdict prononcé contre lui le condamna à cinq ans d'exil dans la ville de Tchiali, au Kazakhstan, au fin fond de l'est de l'Asie en tant qu’« homme dangereux pour la société. »

Lorsqu'on transmit la nouvelle à la Rabbanit 'Hanna, elle tenta de leur expliquer que son mari avait déjà soixante-dix ans (selon leurs papiers), mais en vain. On lui répondit que l'endroit où était envoyé son mari était convenable, qu'il conserverait sa citoyenneté, mais qu'il devait seulement changer de lieu de résidence.

On lui dit aussi qu'avant son départ, elle pourrait revoir son mari une dernière fois.

Cette rencontre à travers les barreaux (la première depuis son arrestation) fut un mélange de joie et de souffrance, la joie des retrouvailles et la souffrance de voir ce qu'il avait enduré. Elle ne s'imaginait pas qu'en une si courte période, son état de santé se serait détérioré au point qu'elle aurait du mal à le reconnaître. Cette rencontre, sous les yeux d'un surveillant, ne dura que quelques minutes. Avant leur séparation, Rabbi Lévi Its'hak lui demanda pardon. Il pensait que ses forces ne lui permettraient pas de tenir durant un si long voyage... Elle lui laissa un colis et ils se quittèrent.

Il fut transféré à ‘Harkov (où il revit une deuxième fois la Rabbanit 'Hanna). Alors, le dur et épuisant voyage commença. Un mois de trajet, telle était la distance qui séparait 'Harkov de Alma-Ata, capitale du Kazakhstan, à l'est de l'Asie. Comme Rabbi Lévi Its'hak le raconta lui-même, la chose la plus dure durant le voyage était le manque d'eau pour netilat yadaïm (les ablutions du matin). Pendant onze jours, les prisonniers furent privés d'eau. Même l'eau potable était rationnée et suffisait difficilement à étancher leur soif. Rabbi Lévi Its'hak, scrupuleux sur chaque détail de la loi juive, se servit de cette eau pour netilat yadaïm. Plus encore, il céda le peu de nourriture qu'il possédait au soldat qui la distribuait en échange d'un peu plus d'eau pour netilat yadaïm.

Ils arrivèrent à Alma-Ata le 15 Chevat 5700 (1940). Les prisonniers furent alors divisés en différents groupes. Un des ‘hassidim prisonniers raconte avoir vu Rabbi Lévi Its'hak suivi de soldats et de chiens féroces, tombant à terre en raison de sa grande faiblesse. Les soldats le frappèrent alors de terribles coups et lâchèrent sur lui leurs chiens qui le mordirent et déchirèrent ses vêtements jusqu'à ce qu'il fut obligé de se relever et d'avancer sans aucune force...