Lois relatives aux dommages [causés] par les biens [d’une personne] : Chapitre Trois

Ce chapitre étudie les dommages relevant de la catégorie générale dite de la « dent ».
On envisage différentes hypothèses de dommages résultant de la présence d’un animal dans une propriété privée, avec ou sans l’autorisation du propriétaire. (Ndt)


1. Un animal est [considéré comme] mouad pour [l’action de] consommer des produits [du champ], des légumes et ce qui est semblable.
C’est pourquoi, si un animal, entré dans le domaine de la victime du dommage, a consommé des produits qu’il mange habituellement, le propriétaire de l’animal doit payer [la réparation de] l’entier dommage, ainsi qu’il est dit [Ex. 22, 4] : « [en envoyant son bétail] paître dans le champ d’autrui, [il paiera] du meilleur de son champ… »
Si l’animal a mangé [les produits d’autrui] dans le domaine public, le propriétaire est exempt. Et si l’animal a tiré un profit , son propriétaire doit payer le profit qu’il a tiré, non [la réparation du] dommage causé.

2. Comment cela ? Si l’animal est entré dans le domaine de la victime du dommage, et a mangé des graines de sésame, des châtaignes ou quelque chose de semblable, de la valeur d’un dinar, le propriétaire de l’animal doit payer un dinar [au maître des lieux].
[En revanche,] si l’animal a mangé ces produits dans le domaine public et en a tiré un profit, on considère [ces produits consommés] comme de l’orge ou des épis d’orge , et le propriétaire de l’animal doit payer [selon] le prix bas des épis d’orge ou de l’orge.

3. Si l’animal a consommé des aliments qui lui sont nuisibles, par exemple, s’il a mangé du blé, étant donné qu’il n’en a pas tiré de profit, son propriétaire est exempt.
Si l’animal a mangé des choses qu’il ne mange pas habituellement, par exemple, un vêtement ou des ustensiles, que ce soit dans le domaine de la victime du dommage ou dans le domaine public, son propriétaire doit payer [la réparation de] la moitié du dommage, car cela est une déviation [de la norme, donc un cas dérivé de « la corne ». Par ailleurs, on ne peut exempter le propriétaire de l’animal en invoquant le principe mentionné au ch. 2 § 19 (d’un comportement anormal à l’égard d’une personne qui s’est elle-même écartée de la norme) car en l’occurrence, la victime n’a pas dévié de la norme. En effet,] il est dans l’habitude des gens de poser leurs ustensiles ou leurs vêtements dans le domaine public le temps de se reposer un peu.

4. Si un animal arrache des produits [agricoles] du domaine public et les mange, alors qu’il se trouve dans le domaine de la victime du dommage [le propriétaire des produits], ce cas fait l’objet d’un doute [dans le Talmud].
C’est pourquoi, le propriétaire de l’animal ne doit payer que le profit tiré. [Toutefois,] si la victime se saisit [d’un bien appartenant au propriétaire de l’animal d’une valeur égale à la réparation] du dommage causé, on ne [doit] pas [le] lui retirer, car l’animal a mangé [les fruits] dans son domaine.

5. Si un chien entre dans une cour [privée], prend du pain ou de la viande, [puis] les sort dans le domaine public ou dans une autre cour [qui appartient à d’autres personnes], et les mange à cet endroit, le propriétaire du chien doit payer le profit tiré [par son chien et non le prix de la nourriture consommée] .
Si le chien consomme [ces aliments] dans un champ qui appartient au propriétaire de la cour [où il les a pris], le propriétaire du chien doit payer [la réparation de] l’entier dommage, comme si le chien avait mangé à l’intérieur de la cour. Car il [les] a mangés [finalement] dans le domaine de la victime du dommage. Il en va de même pour tout cas semblable.

6. Si un animal consomme des aliments qu’il ne mange pas habituellement, mais qu’il [peut] consomme[r] par nécessité [s’il ne trouve rien d’autre], par exemple, si une vache mange de l’orge, un âne des vesces ou du poisson, un porc un morceau de viande, [ou encore] si un chien lèche de l’huile, un chat mange des dattes, et de même pour tout cas semblable, [la règle ci-après est appliquée].
Si l’animal a mangé [la nourriture] dans le domaine de la victime du dommage, le propriétaire de l’animal paye [la réparation de] l’entier dommage.
Et [si l’animal l’a mangée] dans le domaine public, son propriétaire est exempt. [Toutefois, dans ce dernier cas,] si l’animal [en] a tiré un profit, son propriétaire doit payer le profit tiré.

7. Si un animal « sauvage » (‘haya) déchire et mange un animal ou [mange] de la viande dans le domaine de la victime du dommage où il est entré, son propriétaire doit payer [la réparation de] l’entier dommage, car c’est là son comportement ordinaire.
Mais s’il s’agit d’un chien qui a mangé des agneaux [même] petits ou d’un chat qui a mangé de grands coqs, le propriétaire doit [seulement] payer [la réparation de] la moitié du dommage, un tel comportement étant une déviation [de la norme].

8. [Soit le cas suivant :] un panier contenant du pain [se trouve dans une propriété privée] ; un âne entre, casse le panier et mange le pain. [Dans ce cas,] le propriétaire de l’âne doit payer, pour le panier [cassé] ainsi que pour le pain [mangé], [la réparation de] l’entier dommage, car tel est le comportement ordinaire [d’un âne].
De même, si un bouc voit un navet ou un [aliment] semblable sur l’ouverture d’une jarre, s’accroche à la jarre, mange le navet et brise la jarre, [le propriétaire du bouc] doit payer, pour les deux [le navet mangé et la jarre brisée], [la réparation de] l’entier dommage. [Cela est considéré comme un comportement ordinaire de la part de l’animal,] car de même qu’il est dans son habitude de manger, de même est-il dans son habitude de se suspendre aux ustensiles et de monter pour manger. Il en va de même pour tout cas semblable.
Mais [dans le premier cas,] si l’âne entre et mange le pain, puis brise le panier, le propriétaire de l’âne doit payer, pour le pain [mangé], [la réparation de] l’entier dommage, et pour le panier [brisé], [la réparation de] la moitié du dommage. Il en va de même pour tout cas semblable.

9. Si un animal mange [des produits se trouvant] au milieu de la rue, [qu’il mange] au cours de la marche ou qu’il s’arrête [pour] manger, le propriétaire de l’animal doit payer le profit que l’animal a tiré [et non le prix de la nourriture ; la rue étant un domaine public, la nourriture n’aurait pas dû être laissée à cet endroit].
[Cette règle s’applique] même si l’animal tourne [sa tête] sur les côtés [de la rue] et mange [des produits qui s’y trouvent alors qu’il est lui-même au milieu de la rue ].
Mais si l’animal quitte la rue, va se tenir sur les côtés de la rue et mange [les produits qui s’y trouvent], le propriétaire de l’animal doit payer [la réparation du] dommage causé [il s’agit dans ce cas d’un dommage causé par « la dent » dans le domaine de la victime] .
Si l’animal mange [des produits] de l’entrée [la devanture] d’une boutique , le propriétaire de l’animal doit payer le profit [tiré par son animal]. [Si l’animal mange des produits] de l’intérieur de la boutique, le propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé.

10. Si un animal, marchant dans le domaine public, a étendu son cou et a mangé [un produit qui se trouvait] sur le dos d’un autre [animal], même s’il s’est arrêté, son propriétaire paye le profit tiré [par son animal et non le prix de la nourriture consommée]. Car c’est le comportement ordinaire des animaux que de manger [ce qui se trouve] sur le dos de l’autre.
[Cependant,] si l’animal a sauté [c'est-à-dire qu’il a redressé ses pattes de devant et s’est tenu sur l’autre animal ] pour manger [un produit se trouvant] sur le dos de l’autre, le propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé, car le dos de l’autre [animal] est considéré comme la cour de la victime du dommage [c'est-à-dire comme son domaine privé ; par conséquent, le propriétaire de l’animal qui a causé le dommage en est tenu à la réparation intégrale, cf. § 2].

11. Si un animal glisse sur une pierre ou sur son urine, tombe dans un jardin potager et se heurte contre des fruits ou des légumes [qui amortissent sa chute], ou mange [les fruits et légumes qui s’y trouvent], le propriétaire de l’animal doit payer [seulement] le profit tiré par son animal. Même si l’animal va d’une plate-bande à l’autre [et abîme les cultures du jardin], et même s’il y reste toute la journée, son propriétaire ne doit payer que le profit tiré [et non le dommage causé dès lors que l’animal y est entré par accident] . Quel profit [l’animal] a-t-il par son choc [sur les fruits ou les légumes] ? Le fait d’avoir trouvé un endroit tendre [pour l’amortir] et que ses organes ne se soient pas écrasés.
Mais si l’animal descend [dans le jardin] de manière normale et mange [des fruits du jardin], son propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé. [Dans ce cas,] même si [l’animal met bas et] souille les fruits avec le placenta [ce qui est un cas de force majeure], son propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé, car [l’incident] a commencé par une négligence [de sa part].
De même, si l’animal est poussé par un autre [animal du troupeau] et tombe, son propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé. [Il en est responsable] parce qu’il aurait dû faire passer les animaux du troupeau un à un pour qu’ils ne se poussent pas l’un l’autre.

12. [Soit le cas suivant :] un animal glisse, tombe [dans un jardin, puis] sort [de ce jardin, le propriétaire ayant pris connaissance de l’incident]. [Si l’animal] retourne au jardin, bien qu’il y retourne sans que le propriétaire en ait connaissance, celui-ci doit payer [la réparation] du dommage causé, parce qu’il aurait dû garder [son animal] pour [éviter] qu’il n’y retourne. Car c’est chose connue : dès lors que l’animal connaît le chemin du jardin, il y retourne de lui-même.

13. Si un potier introduit ses pots dans une cour privée sans autorisation et que l’animal du propriétaire les brise, ce dernier est exempt. Si cet animal subit un dommage avec les pots, le propriétaire des pots est tenu pour responsable.
Si le potier introduit [ses pots dans la cour] avec l’autorisation [du propriétaire, et que l’animal de ce dernier se blesse avec ceux-ci], le potier est exempt.
[Enfin,] si [les pots sont brisés] alors que le propriétaire [de la cour] a pris sur lui de les garder, ce dernier est tenu responsable.

14. De même, si une personne introduit ses produits [agricoles] dans une cour privée sans autorisation et que l’animal du propriétaire les mange, ce dernier est exempt. Si son animal glisse sur les produits et subit un dommage, le propriétaire des produits est tenu pour responsable.
[En revanche,] s’il introduit [ses produits] avec l’autorisation [du propriétaire de la cour, et que l’animal de ce dernier glisse et se blesse], il est exempt. Si le propriétaire [de la cour] prend sur lui de garder les produits [et que son animal les abîme], le propriétaire [de la cour] est tenu pour responsable.
S’il introduit ses produits sans [en avoir reçu l’]autorisation et que l’animal du propriétaire les mange, subissant un dommage à cause de cette consommation, le propriétaire des produits est exempt, car l’animal n’aurait pas dû les manger.
S’il introduit [ses produits dans la cour] avec l’autorisation [du propriétaire] et que le propriétaire de la cour laisse [le propriétaire des produits] autorisé dans la cour pour la garder, [puis,] que l’animal du propriétaire mange les produits et subit un dommage à cause de cette consommation, le propriétaire des produits est tenu pour responsable. En effet, dès lors qu’il a vu l’animal manger des produits qui lui sont nuisibles et l’a laissé [faire], il est tenu pour responsable, le propriétaire [de la cour] n’étant pas présent pour éloigner l’animal des produits.
Une fois , une femme entra dans la maison de ses voisins pour cuire [une pâte] dans le four. Ils la laissèrent et se retirèrent [par pudeur] pour ne pas la voir [les bras découverts] pendant qu’elle pétrissait et cuisait [la pâte]. La chèvre du propriétaire vint, mangea la pâte et mourut. Les Sages condamnèrent la femme à payer la valeur de la chèvre. Il en va de même pour tout cas semblable.

15. Si une personne fait un tas de gerbes dans le champ d’autrui sans en avoir [reçu] l’autorisation, et que l’animal du propriétaire du champ les mange, ce dernier est exempt.
Si l’animal du propriétaire glisse [sur les gerbes] et subit un dommage, le propriétaire des produits [les gerbes] est tenu pour responsable. [Toutefois,] si l’animal du propriétaire mange [les gerbes], et subit un dommage à cause de cette consommation, le propriétaire des gerbes est exempt.
S’il fait un tas de gerbes [dans un champ] avec l’autorisation [du propriétaire], ce dernier doit répondre [des dommages causés par son animal], bien qu’il ne se soit pas engagé à garder [les produits]. [La différence entre ce cas et les précédents est la suivante :] le gardien des aires de battage , dès lors qu’il permet à quelqu’un d’y faire un tas [de gerbes], est considéré comme s’il lui avait dit : « [Tu peux] faire un tas de gerbes ici et je [les] garderai pour toi. »