La réponse courte :

L’univers n’a pas besoin d’exister. Il n’y a aucune raison pour que lui, vous, moi, eux, ou quoi que ce soit d’autre n’existe.

L’univers n’a pas besoin d’exister. Mais à partir du moment où il existe, c’est pour une raison.

Pourquoi est-il là ? Par un acte délibéré, mû par un désir.

Ce désir est l’élément central de la réalité, se déployant à travers l’histoire jusqu’à s’épanouir un jour aux yeux de tous. Appelez cela le but.

Expliquer ce but exige un contexte. Ce qui signifie que nous aurons besoin d’une réponse plus développée.

La réponse longue :

Qui a bien pu inventer ce problème ?

Contrairement à ce que l’on croit souvent, ce n’est pas une question que se sont posée tous les esprits réfléchis de tous les temps. Car elle repose sur un ensemble de présupposés. Le simple fait que cette question vous préoccupe implique que vous avez – peut-être inconsciemment – intégré la conception de la Torah sur la réalité : le monde n’est pas obligé d’exister.

La question du but présuppose l’idée de création

Pour illustrer cela : imaginez que vous n’ayez jamais vu d’automobile, ni même de route. Quelqu’un vous installe sur le siège conducteur d’une voiture, met le contact, vous manipulez les boutons et en concluez que c’est un appareil destiné à souffler de l’air frais sur votre visage.

Car pour qu’une voiture ait un but, il faut qu’il y ait une route. De même, pour qu’un marteau ait une utilité, il faut des clous, du bois, des artisans, des constructions.

Le but exige un contexte. L’univers n’a de but que s’il existe quelque chose qui le précède et le dépasse. Et alors, nous pouvons demander : « Dans ce contexte, que permet l’existence d’un monde ? »

Si vous n’avez pas ce contexte, le monde n’a pas besoin d’explication. Il est, tout simplement. On peut alors se fixer des objectifs personnels, comme : « Je vais profiter autant que possible. » Ou bien : « Ce voyage est pénible, comment puis-je en sortir pour trouver mieux ? »

Dans les deux cas, vous ne vous demandez pas : « Quel est le but de ce monde ? », mais plutôt : « Qu’est-ce que cela m’apporte ? »

La Torah apporte ce contexte. Elle affirme que l’univers a un commencement. Le temps a un commencement. C’est alors que la question du but se pose : pourquoi cela a-t-il commencé ? Que permet l’existence de ce monde ?

Et, plus profondément encore : « Quel est mon but, à moi, dans ce monde ? »

D’autre part, poser cette question, c’est aussi supposer que son Créateur est un agent libre. Les choses ne se produisent pas simplement par une chaîne de causalités – A donc B, B donc C, indéfiniment. Elles ne surviennent pas non plus « par hasard » (quoi que cela puisse signifier). Il y a, derrière le cosmos, un dessein – et ce dessein n’est pas inévitable.

Là encore, c’est la perspective de la Torah : « Au commencement, D.ieu créa… » et non « Au commencement, les choses sont simplement advenues ».

Votre question « Quel est le but de cette création ? », peut se reformuler autrement : « Nous voyons déjà une intention dans l’espace : peut-on entrevoir une intention dans le temps ? »

Mais, revenons à la question du contexte :

Quelle ampleur a ce problème ?

La Torah pose le problème du but, et la Torah rend ce problème presque insoluble. Pourquoi ? Parce qu’elle postule que le Créateur de tout cela est parfait. (Ce qui est logique aussi. S’Il n’était pas parfait, Il serait, Lui aussi, une créature.)

La Torah pose le problème du but, et le rend presque insoluble

Être parfait, c’est « ne manquer de rien ». N’avoir aucune faille, aucun besoin. Tout est possible pour cet agent absolument libre que nous appelons D.ieu. Non seulement tout ce que nous pouvons imaginer dans sa perfection ultime – sagesse, connaissance, créativité, puissance, beauté – mais aussi tout ce que nous ne pouvons même pas concevoir, car cela échappe à notre monde.

Le but, en revanche, implique un manque, un besoin, un désir. Comme dans : « Je n’ai pas ceci – comment l’obtenir ? » Je manque de nourriture : je mange. Je manque d’abri : je construis une maison. Je manque d’amour : je cherche une relation. Ainsi, les relations humaines, se nourrir, construire ont toujours un but.

D.ieu n’a pas faim. Il n’a pas à craindre d’être mouillé par la pluie. Il n’a pas besoin de s’engager dans une relation. Il est parfait. C’est justement ce qui fait de Lui D.ieu. Donc, si D.ieu ne manque de rien, pourquoi aurait-Il besoin d’un monde ? Si tout est possible, pourquoi se limiter à quoi que ce soit ?

Des raisons raisonnables

D.ieu est-il un artiste ? Les artistes ont-ils besoin de leur art ?

D.ieu serait-Il comme un artiste ? Les artistes ont-ils besoin de leur art ? Voilà de quoi alimenter les conversations lors d’un cocktail : un artiste parfaitement comblé ressentirait-il tout de même le besoin de créer de nouveaux chefs-d’œuvre ?

Or, le Zohar propose effectivement une raison à la création qui s’inscrit dans cette perspective. Dans un passage fréquemment cité, le Zohar1 indique que le monde fut créé…

« … afin qu’il y ait des créatures capables de Le connaître à travers chaque mode par lequel Il dirige Son monde, avec bonté et avec rigueur, selon les actions des êtres humains. Car si Sa lumière ne se répandait pas à chaque créature, comment serait-Il connu ? Et comment se réaliserait “Toute la terre est remplie de Sa gloire” ? »

Rabbi ‘Haïm Vital, principal disciple du Ari (Rabbi Its’hak Louria), explique la profondeur de ce passage : sans l’acte de création, toutes les perfections infinies de D.ieu resteraient à l’état de potentiel. Or, le potentiel ne s’accomplit vraiment que lorsqu’il devient effectif. Puisque D.ieu pouvait créer un monde, Il l’a fait, pour que ces potentiels deviennent effectifs.2

La création serait donc comme l’expression de l’artiste, qui fait passer son potentiel à l’actuel.

Cependant, bien que cette raison soit parfaitement fondée, les maîtres de la ‘Hassidout insistent pour dire qu’elle ne peut constituer le but ultime : elle impose des limites humaines à un D.ieu qui, par définition, ne connaît pas de limites.

Rabbi Moché Cordovero, l’un des maîtres du Ari, a observé qu’il serait, pour D.ieu, préférable de laisser les choses à l’état de potentiel. Pour nous, êtres humains, rien n’est accompli tant que ce n’est pas advenu réellement. Il ne suffit pas de savoir que l’on peut gagner : il faut franchir la ligne d’arrivée.

Mais pour D.ieu, c’est tout le contraire. Il a déjà gagné avant même de courir. Tout est possible pour Lui, sans concurrence ni obstacle. Lorsqu’une possibilité devient effective, tout ce que cela fait, c’est exclure toutes les autres possibilités qui ne se sont pas réalisées.

Comme le souligne Rabbi Chalom DovBer de Loubavitch (le Rachab) :

Pour l’être créé, le potentiel n’est pas l’effectif. Mais, Là-haut, il n’en est pas ainsi : le potentiel ne manque pas de réalité. Potentiel et effectif coexistent.3

Tout ce que l’art de D.ieu pourrait Lui apporter, Il le possède déjà.

En réalité, D.ieu n’a même pas besoin d’être un artiste – tout ce que l’acte créateur pourrait Lui apporter, Il le possède déjà, sans rien faire. En langage kabbalistique : l’Infini possède une Lumière infinie, qui contient toutes les perfections.

Alors, à quoi bon créer un monde ?

Un raisonnement encore plus profond

Rabbi ‘Haïm Vital propose lui-même une autre explication :

« …Quand s’est éveillée Sa volonté, béni soit-Il, de créer le monde pour faire du bien à Ses créatures, afin qu’elles reconnaissent Sa grandeur et méritent d’être un réceptacle pour ce qui est au-dessus, pour s’attacher à Lui, béni soit-Il… »4

D.ieu est bon, donc Il crée. On franchit ainsi une étape supplémentaire par rapport à la simple métaphore de l’artiste.

Être bon, c’est plus que s’exprimer, c’est plus qu’être un artiste. L’artiste comme le philanthrope donnent. Mais l’artiste est mû par le besoin de réaliser ses propres talents, alors que le philanthrope est mû par le souci de l’autre.

Pour l’artiste, le public n’a sans doute pas de valeur intrinsèque – il n’est qu’un prétexte à l’art. Mais le philanthrope s’intéresse à plus que le fait de donner : il veut qu’il y ait un destinataire. S’il donne de la nourriture, il veut que les gens n’aient plus faim. S’il donne de l’instruction, il veut que les élèves ne soient plus ignorants. Le monde subjectif du bénéficiaire lui importe véritablement.

Cette explication évite le piège de la précédente : il ne suffit pas, pour D.ieu, de dire : « Si des êtres étaient créés, Je leur ferais du bien. » Il faut que cela soit, qu’ils existent réellement et reçoivent effectivement la bonté. Voilà le sens profond de la bonté.

Le monde est donc advenu par la logique même de la bonté absolue de D.ieu. Et là encore, pour reprendre le langage de la Kabbale (si élégant pour ces sujets), la lumière infinie, sans limite, ne suffit pas : il faut des récepteurs, capables d’absorber cette lumière et d’y réagir – autrement dit, il faut un monde.

Tous les labeurs et toutes les difficultés de l’humanité trouvent ainsi leur sens : pourquoi avons-nous le libre-arbitre ? Pourquoi devons-nous avancer à tâtons dans l’obscurité ? Pourquoi tout ce labeur ? Parce que D.ieu est bon, et souhaite pour nous le bien suprême.

« Le pain gratuit, disent les sages, est le pain de la honte. » Si l’on veut vraiment donner, il faut permettre à l’autre de mériter ce don. C’est ce que l’on appelle un don digne. D.ieu nous permet donc de peiner à la tâche, pour que nous éprouvions la propriété des fruits de nos efforts.

Oui, mais…

Pourquoi ce monde-ci ?

En résumé, si D.ieu avait voulu être reconnu ou bien prodiguer la bonté, ce monde serait bien le dernier qu’Il aurait créé. Franchement, qui pourrait sérieusement prétendre que ce monde incarne le summum de la bonté ?

Certes, je viens d’expliquer que la bonté véritable, c’est quand on mérite par ses efforts le fruit de son travail. Mais, au fond, qui a décidé que cela devait fonctionner ainsi ? Il va de soi que c’est le Créateur Lui-même. Il aurait pu, tout aussi bien, nous façonner d’une nature telle que recevoir gratuitement soit perçu comme le bien suprême, et que le vrai mérite consisterait alors à accepter des dons sans réserve.

Franchement, qui pourrait sérieusement prétendre que ce monde incarne le summum de la bonté ?

Quant à la notoriété, certes, Il est un auteur publié de renom, un influenceur de première importance sur la scène mondiale. Pourtant, pour quasiment chaque créature vivante sur cette planète, il existe quelqu’un d’infiniment plus important : elle-même. C’est un monde où chaque être s’adore lui-même plus que tout autre chose, ici-bas ou ailleurs. Si D.ieu recherchait la célébrité, il faut bien constater que, sur ce point, Il a perdu la partie ici-bas.

Pourquoi, au juste, D.ieu voulut-Il créer ce monde-ci ?

Peut-être, en fin de compte, cherchons-nous la réponse du mauvais côté. Au lieu de nous tourner vers D.ieu en nous demandant ce que ce monde pourrait bien apporter à un Créateur qui possède déjà tout, il faudrait plutôt porter notre regard sur le monde lui-même et se demander : « Pourquoi, au juste, D.ieu a-t-Il voulu créer cela ? »

En vérité, les réponses du Zohar et du Ets ‘Haïm servent de toile de fond pour mieux apprécier les particularités de ce monde. C’est un monde qui, d’abord et avant tout, clame : « Je suis là. » Toute trace d’un Créateur n’apparaît qu’en filigrane. Il faut d’ailleurs un effort de réflexion soutenu pour ne pas oublier que ce monde n’est pas simplement « là » par lui-même.

C’est un monde où chaque créature cherche avant tout son propre intérêt. La vie, ici-bas, consiste fondamentalement à absorber le plus d’énergie possible de son environnement sans retourner celui-ci contre soi, et à devenir aussi grand et nombreux que possible sans se faire dévorer. Le simple fait que ce système ne s’effondre pas en permanence partout est, en soi, quasiment miraculeux.

Et c’est un monde où, comme l’écrit Rabbi ‘Haïm Vital, « la vie est pleine d’épreuves et de souffrances, et les méchants ont toujours le dessus ».5

Alors, pourquoi créer un tel monde ?

L’utilité de l’opposition

Rabbi Chnéour Zalman, fondateur de ‘Habad, aborde cette question de front, d’une manière à la fois radicale et fidèle à la tradition.

Dans son ouvrage classique connu sous le nom de « Tanya », il remarque d’abord que tout monde, si spirituel, lumineux, bon, doux ou bienveillant soit-il, représente une descente pour D.ieu. D.ieu est désigné par les kabbalistes comme la « Lumière Sans Fin ». Un monde doit, par définition, avoir des limites : des frontières, des définitions, des spécificités. Aussi merveilleux soit-il, tout monde créé implique une limitation, d’une façon ou d’une autre, de l’infinité de Sa lumière. Quel intérêt pourrait-il bien y avoir à cela ?

Comme nous l’avons dit plus haut, pour D.ieu, contrairement à nous, le potentiel l’emporte sur l’actuel. Dans un monde parfait, il n’y a rien de vraiment nouveau, sinon du compromis.

Mais qu’en est-il de ce monde-ci ? Il écrit :

Ce monde-ci est la descente ultime, en termes de négation de Sa lumière et de multiplicité des couches d’obscurité. La descente est si extrême que… il s’oppose en fait à D.ieu, disant : « Moi, et rien que moi ! »6

Voilà qui est véritablement nouveau. Ce n’est plus seulement une expression de la volonté ou de l’imagination divine : ce monde oppose une résistance. Il affirme sa propre existence, il ose même nier celle de son Créateur.

Ce monde s’oppose. Il s’affirme comme réel. Il va jusqu’à nier l’existence de son Créateur.

Mais pourquoi D.ieu voudrait-Il cela ? Qu’est-ce que cela Lui apporte ?

En vérité, rien. Car, comme nous l’avons dit, Il n’a besoin de rien. Alors pourquoi le créer ? Parce que :

Il a tout simplement décidé qu’Il prendrait plaisir lorsque cette opposition serait réprimée et que l’obscurité serait transformée en lumière ; lorsque Sa lumière infinie resplendirait dans les endroits d’obscurité et d’altérité à travers tout ce monde, rayonnant avec plus d’intensité et de puissance – avec l’avantage de la lumière issue de l’obscurité – que le simple reflet de Sa lumière qui brille dans les mondes supérieurs.7

Certes, c’est contre-intuitif, mais cela répond à tous les critères. Le Créateur est un agent véritablement libre : Il n’a pas besoin de cela, mais Il a décidé de le vouloir. Cela explique la dureté et l’obscurité de ce monde. Cela contourne le problème du potentiel et de l’effectif : car il y a ici quelque chose de radicalement neuf : l’obscurité transformée en lumière. Et cela donne un sens à notre existence dans ce monde-ci.

Oui, cela peut paraître audacieux, mais, comme je l’ai indiqué, c’est aussi la tradition. À propos du jour où le Tabernacle biblique fut érigé dans le désert, l’ancien Midrash enseigne :

Rabbi Chmouel ben Na’hmane a dit : « Depuis que D.ieu a créé le monde, Il a désiré avoir une demeure dans le monde le plus bas. »8

Il s’agit d’un désir, non d’un besoin, ni même d’une raison. Un désir pur. Irrationnel, donc absolu, sans atténuation. Et c’est un désir qui porte précisément sur le « monde le plus bas ».

Comment la victoire sur l’opposition et la « transformation de l’obscurité en lumière » créent-elles une demeure pour D.ieu ? Voici l’explication :

Egos contre anges

Ici-bas, nous avons des egos. Comme nous l’avons cité du Tanya, ce monde est dominé par le « Moi et rien que moi ! »

Il existe des mondes supérieurs. Ils sont emplis de lumière divine. Chacune des créatures qui les peuplent est saisie d’émerveillement devant cette lumière. Il n’y a pas, là-bas, de place pour les egos.

Et c’est un problème. Comment un être dépourvu d’ego pourrait-il véritablement s’identifier à son Créateur ?

Le Créateur est l’unique véritable ego. Tout procède de Lui. Rien n’advient sans Sa volonté. De Son point de vue, il n’existe réellement rien d’autre que Lui. Même dans les créatures qui s’opposent à Lui, Il ne perçoit rien d’autre que Sa propre réalité.

Comment un être sans ego peut-il s’identifier à son Créateur ?

Un ange, habitant l’un de ces mondes idéaux et sublimes, est incapable de concevoir un sentiment d’être aussi absolu. Dès lors, le monde des anges ne peut pas servir de demeure à D.ieu.

Mais lorsqu’un être humain, tombé au plus profond d’un abîme sombre, se relève et déclare : « C’est mon choix. Cela ne dépend que de moi. Je dois sortir de là. Je dois reprendre ma vie en main. »

Et qu’il se transforme, remplaçant ses addictions destructrices par une passion pour la sagesse de la Torah, qu’il se donne aux mitsvot et aux actes de bonté, et qu’avec la même fougue qui détruisait autrefois son monde, il le remplit à présent de lumière et de bien divins – voilà un être créé qui façonne sa propre existence, et qui incarne la volonté divine.

Il devient ainsi la demeure de D.ieu, possible uniquement dans ce monde-ci, le plus bas de tous.

Application pratique

Vous n’êtes pas un addict ? Voici une illustration concrète, telle que transmise par l’enseignant ‘Habad par excellence, le Rav Yoel Kahn :

Imaginons quelqu’un qui s’apprête à prendre un repas. La sagesse populaire situerait toutes les attitudes possibles face à ce geste entre deux pôles :

L’attitude égocentrique et instinctive : « J’ai faim. Si j’ai faim, je mange. Cette nourriture me plaît. Je mange ce que j’aime. Pourquoi ? Parce que lorsque j’ai faim, je mange ce qui me plaît. »

L’attitude éclairée, totalement dénuée d’ego : « J’ai faim, mais cela n’a aucune importance. Je ne remarque même pas ma faim, tant je suis absorbé par des considérations métaphysiques supérieures. Qu’est-ce que la nourriture, au fond ? Qu’est-ce que la faim ? Qu’est-ce qu’un corps ? Qui suis-je ?

Mais, puisque D.ieu m’a enjoint de subvenir aux besoins de ce corps, et que cela se fait par la nourriture, je prendrai une petite portion, uniquement pour remplir mon devoir. »

Laquelle de ces attitudes accomplit la volonté du Créateur dans Sa création ?

La réponse est : aucune des deux.

La première attitude ancre le sujet dans la réalité matérielle, mais ne laisse aucune place à une présence divine – seul l’ego humain occupe l’espace.

La seconde, au contraire, invite une conscience supérieure, mais au détriment du monde réel. Car l’individu y a réprimé ce qui fait de lui un habitant de ce monde matériel et égocentrique. Pour réaliser le projet d’« une demeure pour D.ieu dans le monde inférieur », il doit y avoir jonction de ces deux pôles.

Et voici la troisième option :

« J’ai faim. Quand j’ai faim, je mange. Pourquoi ? Parce que c’est ainsi que fonctionnent les êtres terrestres comme moi. Et voici la nourriture que j’aime manger. Mais, un instant. J’ai un but. Mon désir de manger a un sens. Je prononcerai donc une bénédiction sur cette nourriture, et je la consommerai en ayant à l’esprit que je mange afin d’accomplir ma mission dans la vie et de réaliser beaucoup de bien. À présent, mangeons. »

Dans cette attitude, il y a une personne authentique, vivant dans un monde réel, mais qui accomplit quelque chose de divin. Et D.ieu dit : « Voilà ! C’est précisément cela que Je recherchais ! Me voici, présent dans un monde authentique, apparemment dominé par l’ego, et c’est ici que la lumière naît de l’obscurité. »

Cela peut paraître contre-intuitif. Mais c’est tout à fait réalisable.

Sources : Ce sujet est traité en profondeur dans la littérature ‘Habad. Voir les sources indiquées au Sefer Hamaamarim 5666 (édition révisée 2010), à partir de la p. 6. Likoutei Si’hot vol. 6, p. 17-25. Torat Mena’hem, Sefer Hamaamarim Meloukat, vol. 3, p. 352-354.