Lois de l’acquisition et du don : Chapitre Six
1. On estime toujours l’intention du donateur ; si les circonstances révèlent son intention, on agit en conséquence, bien qu’il n’ait fait aucune déclaration explicite. Quel est le cas ? Une personne dont le fils est parti en outre-mer [dans un pays lointain], et elle a appris son décès ; elle a [alors] écrit [qu’elle faisait don de] tous ses biens à une autre personne publiquement, puis, son fils est revenu ; le don [qu’elle a fait] n’est pas effectif, car les circonstances montrent que si elle avait su que son fils était en vie, elle n’aurait pas fait don de tous ses biens. C’est pourquoi, si elle a retenu [lors de son don, son droit de propriété sur] une petite partie de ses biens, que ce soient des biens immeubles ou meubles, son don est effectif [car le fait qu’elle a retenu son droit de propriété sur quelques-uns de ses biens indique qu’elle avait l’intention de laisser un héritage pour son fils].
2. Et de même, celui qui écrit qu’il fait don de tous ses biens à l’un de ses fils, qu’il [le père donateur] soit en bonne santé ou alité malade, [on présume qu’]il l’a seulement désigné comme exécuteur testamentaire, et il [ce fils] est par rapport à tous les biens comme l’un de ses frères [il reçoit la même part que ceux-ci]. [Cela s’applique] même s’il [le fils auquel il fait don de ses biens] est un enfant couché dans son berceau [on présume que son père l’a désigné comme exécuteur testamentaire]. Il est logique de penser qu’il [le père] a seulement eu l’intention que ses frères l’écoutent [le fils qu’il a nommé exécuteur testamentaire, et non qu’il lui a réellement fait don de tous ses biens]. Et s’il a retenu une quelconque partie [de ses biens, et il n’a pas fait don à cet enfant], que ce soient des biens immeubles ou meubles, le fils acquiert le don [qui lui a été fait, car on considère dans ce cas que c’est un don que son père lui a fait].
3. Dans quel cas cela s’applique-t-il ? S’il a écrit [qu’il faisait don de tous ses biens] à un fils parmi d’autres fils. Toutefois, s’il a écrit [qu’il faisait don de] tous ses biens à un fils ou à une fille parmi des filles , ou à l’un des héritiers [autres que ses propres fils, par exemple, ses frères] parmi d’autres héritiers, même s’il n’omet aucun [bien dans la donation], le don est effectif.
4. Et de même, quand quelqu’un écrit [qu’il fait don de] tous ses biens à son épouse, qu’il soit en bonne santé ou alité malade, bien qu’un kiniane ait été effectué à cet effet, [on considère qu’il ne lui a pas fait don de tous ses biens mais qu’]il l’a simplement désignée comme exécutrice testamentaire pour ses héritiers. [Cela s’applique] que ses héritiers soient ses enfants qu’il a eus avec elle, [ses enfants qu’il a eus] avec une autre femme, ses frères ou d’autres héritiers. Et s’il a retenu une petite partie [des biens dont il n’a pas fait don dans l’acte], que ce soient des biens immeubles ou meubles, elle acquiert tout ce qu’il [son mari] lui a écrit.
5. Dans quel cas cela s’applique-t-il ? Pour [sa femme] mariée. Mais s’il a écrit [qu’il fait don de] tous ses biens à sa femme [qu’il a simplement] consacrée ou dont il a divorcé, même s’il n’a retenu [son droit de propriété sur aucun bien dans son don], elle a le même statut que les autres personnes, et le don est effectif.
6. Quand quelqu’un écrit [qu’il fait don de] tous ses biens à l’un de ses fils et à quelqu’un d’autre, ce dernier acquiert la moitié des biens par le don, et la moitié [des biens] revient à ses fils. Quant au fils auquel il a fait don [de ses biens, dont le nom est mentionné dans l’acte], [on considère qu’]il l’a nommé comme exécuteur testamentaire pour ses frères.
7. Et de même, s’il écrit [qu’il fait don de] tous ses biens à sa femme et à une autre personne, ce dernier acquiert la moitié [des biens], et sa femme est une exécutrice testamentaire pour la moitié [des biens].
8. Toute femme qui acquiert tous les biens de son mari par un don [qu’il lui fait, par exemple, s’il écrit clairement à sa femme qu’il lui fait don de tous ses biens et non simplement qu’il la nomme exécutrice testamentaire, ou s’il s’agit d’une femme qui a seulement été consacrée ou qui est divorcée] perd [la garantie qu’elle a sur ses biens pour le paiement de la somme mentionnée dans] son contrat de mariage [cf. § 11], et celui-ci est déchiré. C’est pourquoi, si une reconnaissance de dette est réclamée [au donateur] et que tous les biens sont saisis pour [le paiement du créancier dont] la reconnaissance de dette est antérieure à la donation, elle [la femme] reste sans rien, et ne peut pas effectuer une saisie pour [le paiement de la somme mentionnée dans] le contrat de mariage qui est antérieur à la reconnaissance de dette. Car on estime que par le profit qu’elle a de la nouvelle qu’il [son mari] lui a écrit [qu’il fait don de] tous ses biens, elle perd tout droit qu’elle a sur ces biens [y compris la garantie pour le paiement de la somme mentionnée dans son contrat de mariage] à l’exception de cette donation.
9. Et de même, celui qui rédige [qu’il fait don de] tous ses biens à ses enfants, garçons ou filles, qu’il soit lui-même en bonne santé ou alité malade, et écrit [qu’il fait don] à sa femme avec eux d’une petite partie d’un bien immeuble, étant donné qu’il l’a associée [dans l’héritage] avec les enfants et qu’elle n’a pas protesté [disant qu’elle désire percevoir la somme d’argent mentionnée dans son contrat de mariage], elle perd [la garantie qu’elle avait sur ces biens pour le paiement de la somme mentionnée dans] son contrat de mariage [par le profit qu’elle a d’être associée aux enfants], et ne peut effectuer aucune saisie sur les biens [pour le paiement de la somme mentionnée dans son contrat de mariage]. Toutefois, elle peut percevoir [la somme mentionnée dans] son contrat de mariage des biens qu’il [son mari] acquiert par la suite.
10. S’il lui écrit [à son épouse, qu’il lui fait don de] biens meubles seulement, ou s’il retient [son droit de propriété sur] un bien immeuble, quel que soit sa taille, [la garantie pour le paiement de] son contrat de mariage est encore valide. Et selon l’institution des guéonim, [cela s’applique] même s’il [son mari] retient [son droit de propriété sur] des biens meubles, quels qu’ils soient, car elle se dit [lors du don] : « Je percevrai [la somme qui m’est due en vertu de mon contrat de mariage] de ce [des biens] qu’il a gardé[s] » [elle ne renonce donc pas par ce don à la garantie de son contrat de mariage] ; et étant donné qu’elle peut effectuer une saisie sur ce qu’il a gardé, elle peut effectuer une saisie sur les autres biens.
11. Quand quelqu’un écrit [qu’il fait don de] tous ses biens à ses fils, et écrit [qu’il fait don] à sa femme d’une partie [de ses biens immeubles] avec eux [comme dans le cas du § 9], et que l’un des fils décède du vivant de son père, elle peut percevoir [la somme mentionnée dans] son contrat de mariage de la part du [fils] défunt, car elle n’a pas perdu [le droit à la somme mentionnée dans] son contrat de mariage mais seulement le droit d’effectuer une saisie [des biens des héritiers pour le paiement de celui-ci].
12. Une [femme] qui désire se marier et écrit [qu’elle fait don de] tous ses biens à son fils à une autre personne, puis, se marie, et divorce, ou son mari décède, sa donation est nulle, car [on présume qu’]elle a voulu contourner [la loi de l’héritage], et a écrit [qu’elle faisait don de] tous ses biens que dans le but d’éviter que son mari n’hérite [de ses biens], [mais il était implicite que] quand elle en aurait besoin, ils [ces biens] lui seraient retournés. C’est pourquoi, si elle décède du vivant de son mari, le donataire acquiert toute [la donation]. Et si elle a retenu [son droit de propriété sur] une toute petite partie, même des biens meubles, sa donation est valide ; et même si elle divorce, cela [les biens] ne lui est pas retourné.
13. Dans tous les cas où des personnes font don de tous leurs biens, si la donation est nullifiée et que tous les biens sont retournés aux propriétaires initiaux, le donataire n’est pas tenu de restituer les fruits [dont il a joui]. En effet, même si un homme fait un don durant toute la vie d’une personne définie en mentionnant explicitement que c’est à la condition que celui-ci soit [ensuite] restitué, il [le donataire] peut jouir des fruits tout le temps de la donation, comme nous l’avons expliqué.
14. Celui qui envoie des ustensiles d’outre-mer et donne pour instruction : « Que ceux-ci soient donnés à mes enfants », ils doivent être donnés aux fils et aux filles, ce qui convient aux fils, comme les rouleaux [de la Torah] ou les instruments de guerre [est donné] aux fils, et ce qui convient aux filles, comme les vêtements en soie colorés et les anneaux en or, est donné aux filles. Si [des objets] peuvent servir à la fois aux garçons et aux filles, ils reviennent aux garçons. Et de même, quand quelqu’un envoie des ustensiles chez lui sans donner de précision et il y a des ustensiles qui peuvent servir aux filles, les filles les prennent, [car] on estime que c’est à elles qu’il les a envoyés. Et s’il n’a pas de filles ou que ses filles sont mariées, ils reviennent à ses brus, car on estime que c’est à elles qu’il les a envoyés.
15. Quand quelqu’un marie son fils aîné avec une [fille] vierge dans une maison, il [le fils] acquiert la maison, à condition que ce soit le premier mariage de ce fils, et que le père n’ait pas marié d’autre fils avant lui, et qu’il [le père] n’a laissé aucun élément lui appartenant dans cette maison qu’il a désignée [pour ses fils]. Ces règles sont comme une loi sans raison, et les sages ont fixé cela en sondant l’intention [du père] : du fait de l’immensité de sa joie et de son amour [pour son fils], il a pris la résolution de lui céder [son droit de propriété sur] cette maison, puisqu’il n’a laissé aucun élément lui appartenant. C’est pourquoi, s’il y a laissé même un seul flacon, il n’acquiert pas la maison. S’il désigne [pour le mariage] une maison et des ustensiles ménagers, même s’il laisse dans la maison un ustensile qui lui appartient ou qu’il a un grenier [pour céréales] ou quelque chose de semblable dans celle-ci, il [le fils] acquiert les ustensiles ménagers mais n’acquiert pas la maison.
16. S’il lui désigne une maison avec un grenier [c'est-à-dire que la maison où a lieu le mariage a également un grenier], il [le fils] acquiert la maison, mais n’acquiert pas le grenier. Et de même, s’il lui désigne une maison avec un porche, il acquiert la maison mais n’acquiert pas le porche. Si [une maison comprend] deux logements l’un derrière l’autre, il n’acquiert que le logement où son mariage a eu lieu.
17. Nous avons déjà expliqué dans [les lois sur] les mariages que quand deux personnes [le père du marié et le père de la mariée] s’entretiennent du mariage et que l’un [le père du marié] s’engage pour son fils et l’autre [le père de la mariée] s’engagent pour sa fille, disant [le père de la mariée dit au père du marié] : « Combien donnes-tu à ton fils ? » « Telle somme » [répond le père du marié]. [Puis le père du marié demande au père de la mariée :] « Et toi, combien donnes-tu à ta fille ? » « Telle somme » [répond le père de la mariée], et ils se lèvent, et la consécration [de la jeune fille] a lieu, leur déclaration verbale a valeur de kiniane. [Toutefois,] le transfert de propriété par cette déclaration verbale n’a effet qu’au moment du mariage, car l’intention de la promesse est qu’il y ait mariage. Et il faut que les biens qu’ils [les parents] promettent soient en leur possession, car un homme ne peut pas transférer son droit de propriété à autrui sur quelque chose qui n’est pas encore venu au monde [et de même, quelque chose qui n’est pas en sa possession, cf. lois de la vente, 22 : 5], comme nous l’avons expliqué. Et ces engagements ne sont pas mis par écrit [c'est-à-dire qu’ils n’ont pas la valeur d’un acte écrit, même s’ils sont mis par écrit], aussi n’ont-ils pas considérés [même s’ils sont mis par écrit] comme un document écrit pour conférer un droit de suite [au couple].
18. Quand quelqu’un consacre une femme, même s’il la consacre pour mille dinar, qu’elle ou lui se rétracte [et un divorce a lieu], ou que lui ou elle décède, [l’argent de] la consécration n’est pas retourné, mais est considéré comme une véritable donation irrévocable.
19. [Toutefois,] si la consécration a été faite sur des bases erronées, l’argent est restitué.
20. Quand quelqu’un consacre sa sœur, l’argent [qu’il lui donne] est [considéré comme] un don ; [en effet,] un homme sait [pertinemment] que la consécration n’a pas prise pour les arayot, et cela n’est pas [considéré comme] une erreur [qu’il a commis], mais [on présume qu’]il s’est en fait résolu de lui faire don [de cette somme d’argent].
21. Quand quelqu’un envoie des cadeaux à sa [femme consacrée] dans la maison de son père, que ceux-ci soient nombreux ou non, qu’il [le marié] ait pris part à un repas pour les consécrations [dans la maison de ses beaux-parents] ou non, si lui ou elle décède, ou que l’homme se rétracte [et divorce], tous les cadeaux lui sont restitués, sauf les aliments et les boissons [qu’il a offerts et qui ont déjà été consommés].
22. Et de même, les vêtements peu nombreux qu’il lui a envoyés pour qu’elle les porte alors qu’elle est dans la maison de son père, si elle les a portés et qu’ils sont devenus usés ou ont été perdus, ils ne doivent pas être retournés. Mais s’ils sont [toujours] intacts, il peut faire une saisie sur tous [les biens qu’il a envoyés] au tribunal, car il est évident qu’il ne les a envoyés qu’à titre gracieux.
23. Si elle s’est rétractée, tout lui est retourné, même les aliments et les boissons ; [pour ceux-ci] elle paye leur valeur à bas prix. Et les guéonim ont convenu que si les aliments et les boissons avaient une valeur de six [zouz], elle doit payer quatre [zouz] si elle se rétracte [un tiers de moins que le prix normal]. Car il ne lui a donné ces cadeaux qu’en pensant qu’elle ne se rétracterait pas.
24. Mes maîtres ont donné comme directive que si l’usage local veut que tout [futur] marié [lors de la consécration] fasse un festin et reçoive ses amis ou donne de l’argent aux intendants et aux ministres officiants ou des [personnes] semblables, et qu’il a suivi l’usage, et qu’elle s’est [ensuite] rétractée, elle doit tout payer, car elle lui a causé une perte financière, et [nous avons pour règle que] quiconque cause qu’autrui subisse un préjudice financier doit payer [cf. lois relatives à qui cause un préjudice corporel ou matériel]. Et ce, à condition qu’il y ait des témoins des dépenses qu’il a faites, car [dans ce cas, [il n’a pas la prérogative de] prêter un serment et de percevoir [la somme qu’il réclame].
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