Au septième mois, le premier jour du mois, il y aura pour vous convocation sainte : vous ne ferez aucune œuvre servile. Ce sera pour vous un jour de sonnerie.

Nombres 29, 1

Le Choffar est fait d’une corne d’animal, mais seulement d’une espèce dont la corne est naturellement creuse et remplie par un os. Ce qui exclut tous les animaux cornus dont les cornes sont pleines, notamment la vache et le bœuf. Les cornes de ces derniers sont appelées en hébreu kérène et non choffar ; en outre, ces cornes nous rappelleraient le Veau d’Or que confectionnèrent les enfants d’Israël dans le désert après leur départ d’Égypte – souvenir qui ne s’accorderait guère à un jour comme Roche Hachana, où nos prières ont pour but de trouver grâce devant D.ieu et d’invoquer Sa bienveillance.

On a recours d’habitude – et de préférence – à une corne de bélier en souvenir de la bête offerte en substitution d’Isaac qui avait consenti à être attaché sur l’autel et offert en holocauste à D.ieu.

Rabbi Abahou dit : « Le message de D.ieu est : Sonnez d’un Choffar fait d’une corne de bélier ; Je me souviendrai alors de la akédah d’Isaac, et Je penserai à vous comme si vous étiez, vous aussi, prêts à M’offrir votre vie. »

Un exil après l’autre

Dans la section de la Torah ayant trait à la ligature d’Isaac – section que nous lisons le second jour de Roche Hachana – il est écrit :

« Et Abraham leva les yeux et vit derrière lui un bélier retenu dans un buisson par les cornes » (Genèse 22, 13).

Abraham vit le bélier qui se prenait les cornes successivement dans un buisson après l’autre.

Rav Houna, le fils de Rav Yits’hak, dit que le bélier pris à plusieurs reprises dans les buissons touffus préfigurait à Abraham que ses enfants seraient pareillement pris dans une succession d’exils, mais qu’à la fin ils seraient rachetés par le son de la corne de bélier (Midrache Rabba, Vayikra, 29).

Rabbi ‘Hanina ben Dossa dit que chaque partie de ce bélier avait une importance : ses cendres étaient les fondations de l’autel intérieur dans le Beth Hamikdache ; ses dix tendons devinrent les cordes de la harpe du roi David ; sa peau fit la ceinture de cuir d’Eliyahou (le prophète Élie) ; enfin, ses deux cornes : on sonna de la corne gauche au mont Sinaï quand la Torah fut donnée ; et on sonnera de la corne droite, la plus grande, quand les Juifs dispersés seront rassemblés de tous les coins de la terre. Ainsi qu’il est écrit (Isaïe 27) : « Et ce jour-là on sonnera du grand Choffar » (Pirké deRabbi Eliézère 31)

Le son direct et non l’écho

Le Choffar doit être recourbé : ainsi, il nous rappellera que nous devons incliner notre cœur vers notre Père Céleste.

Il ne doit comporter ni dorure, ni peinture. Une embouchure en or, par exemple, le rendrait impropre à la mitsva du Choffar. Seuls quelques éléments décoratifs gravés à même la corne sont permis.

La voix du Choffar est un appel à la pénitence et une invitation au combat. Le Choffar nous invite à lutter contre tout ce qui nous empêche d’appliquer complètement les règles de notre religion. Il nous dit d’être courageux et ne pas avoir peur de respecter et remplir les saints commandements, comme, par exemple, mettre les Téfiline, porter des Tsitsit, observer le Chabbat, etc. « Si c’est nécessaire, luttez et surmontez tous les obstacles. »

Le fidèle doit écouter le son même du Choffar, et non son écho. Entendre ce dernier seulement n’acquitte pas de la mitsva du Choffar. Cette loi avait son importance pour les Juifs au temps de l’Inquisition, quand les Marranes (Israélites restés secrètement fidèles à leur foi) n’avaient d’autre moyen que de se cacher au fond des bois, loin sur les collines ou à l’intérieur des grottes pour sonner du Choffar, car s’ils avaient le malheur d’être pris sur le fait, ils étaient envoyés au bûcher.

La prière prise pour une rébellion

On sonne du Choffar à Roche Hachana après la lecture de la Torah, avant et pendant la prière du Moussaf. Bien qu’en règle générale, il ne faille pas différer l’accomplissement d’une mitsva (et, en tant que tel, le son du Choffar s’imposerait au commencement de l’office), celle-ci est retardée pour la raison suivante : il arriva une fois que les Juifs asservis sonnèrent du Choffar un matin de très bonne heure. Leurs maîtres, interprétant cet acte comme un appel à la rébellion, les encerclèrent et les massacrèrent. Afin d’éviter le retour d’une si tragique erreur, les juifs décidèrent alors de ne sonner du Choffar qu’après la lecture de la Torah.

L’idée s’avéra bonne. En effet, constatant que les Juifs avaient déjà fait paisiblement une partie de leurs prières, récité le Chéma, dit la Amida et lu dans la Torah, leurs maîtres se rendirent compte qu’il s’agissait d’un rassemblement pacifique dont le but était la prière et non la révolte. (Talmud Yérouchalmi, Roche Hachana 4:5.)

Rachi explique qu’il fut un temps où l’on interdit aux Juifs de sonner du Choffar. Des gardes surveillèrent sur place les prières jusqu’à la conclusion de l’office de Cha’harit. Aussi les Juifs sonnèrent-ils du Choffar plus tard, pendant l’office de Moussaf.

C’est ainsi que la règle fut instituée : on sonna désormais du Choffar après l’office de Cha’harit. Une autre raison existe également : à l’heure de ce dernier office, les fidèles sont déjà couronnés des mitsvot : les Tsitsit, le Chéma et la lecture de la Torah. Alors intervient le Choffar, porteur du pardon.