Parmi les prophéties relatives aux temps messianiques, il y a l’annonce de la disparition de la mort :

« Il anéantira la mort à jamais, et l’Éternel D.ieu fera sécher les larmes de tous les visages. »1

Et le Midrash2 enseigne à ce sujet : « Dans ce monde-ci, les années sont raccourcies du fait du mauvais penchant ; mais dans les Temps Futurs, “Il anéantira la mort à jamais”. »

Nos Sages ont débattu3 sur la question de savoir si cette éternité concerne seulement le peuple juif ou toutes les nations du monde : « Rabbi ‘Hanina a dit : “Il n’y aura de mort dans les Temps Futurs que pour les nations du monde.” ; Rabbi Yéhochoua ben Lévi a dit : “Ni pour [le peuple d’]Israël, ni pour les nations du monde.” »

Cela signifie que les êtres humains ne mourront plus et vivront éternellement. Et ceux qui sont morts par le passé reviendront lors de la Résurrection des morts, après laquelle la faculté de mourir disparaîtra. C’est ainsi que Rachi explique les mots du verset « Il anéantira la mort à jamais » : « Il la recouvrira et l’occultera pour toujours. » Et dans son commentaire du Talmud,4 Rachi ajoute : « Dans les Temps Futurs, après avoir ressuscité, ils ne mourront plus de nouveau. »

Le Machia’h vivra éternellement

Toutefois Maïmonide est d’avis que la mort subsistera lors de l’ère messianique, et que ceux qui reviendront à la vie lors de la résurrection connaîtront ensuite de nouveau la mort. Selon lui, la mort est une nécessité de l’existence : « Sache que l’homme doit nécessairement mourir et se désagréger et revenir aux éléments qui le composent. »5 Il reconnaît certes que « la vie humaine s’allongera » dans les Temps Messianiques, mais il maintient que les hommes finiront par mourir. Même le Machia’h lui-même mourra, selon lui : « Le Machia’h mourra, et son fils lui succédera sur le trône, puis son petit-fils. »

Ceci, car, dans l’opinion de Maïmonide, la véritable finalité de l’existence est le monde spirituel des âmes, et c’est à cela que se réfèrent les Sages lorsqu’ils évoquent le « Monde Futur ». Dans cette optique, le monde de la résurrection est une situation temporaire dont l’objet est d’octroyer une récompense au corps physique. Après cette période de rétribution, les hommes mourront une dernière fois et accéderont à leur plénitude dans un monde dénué de toute matérialité.6

Cette opinion de Maïmonide a été vigoureusement repoussée par la grande majorité des sages juifs.7 Na’hamanide, indigné, écrit8 : « Se peut-il que le Rav, de mémoire bénie, décrète la mort sur le Machia’h et sa génération ! » Il cite le verset « Il anéantira la mort à jamais » et cite les propos du Talmud9 : « Les Justes que le Saint béni soit-Il fera revivre ne retourneront pas à la poussière. » Na’hmanide tranche que la finalité est bien le Monde de la Résurrection, dans lequel tous vivront éternellement.

Dans sa disputation contre les chrétiens, Na’hmanide a repoussé leur argument selon lequel le « Machia’h » serait déjà venu puis serait mort, sur la base du fait que le Machia’h ne peut pas mourir. Il y explique10 que l’existence de la mort n’existe que comme conséquence au péché de l’Arbre de la Connaissance, « et tous admettent que la faute et le châtiment d’Adam disparaîtront lors des Temps Messianiques. S’il en est ainsi, après la venue du Machia’h, la mort disparaîtra de nous tous, mais du Machia’h lui-même, elle sera totalement absente. » Pour preuve, Na’hmanide cite le verset11 évoquant le Machia’h : « Il t’a demandé la vie, Tu la lui as octroyée, de longs jours, à tout jamais. »12

Le verdict de la Kabbale et de la ‘Hassidout

La Kabbale et la ‘Hassidout tranchent13 selon l’avis de Na’hmanide, que la mort disparaîtra du monde dans les Temps Futurs,14 et que le Monde de la Résurrection constitue l’aboutissement final et la perfection ultime de la création. La ‘Hassidout développe abondamment la raison pour laquelle le summum de la révélation divine aura précisément lieu dans ce monde matériel, et non pas dans le Jardin d’Éden ou dans les mondes supérieurs.

Malgré cela, il n’est pas dit que la disparition de la mort interviendra dès le début de l’Ère Messianique. Il est possible que ce ne soit que lors de la seconde période, dans laquelle le mal disparaîtra, ce qui entraînera automatiquement la disparition de sa conséquence qu’est la mort. S’agissant de la première période, cela dépendra de la forme que prendra la Délivrance messianique : si elle correspond au scénario où nous serons « méritants », toutes les prophéties sur les Temps Messianiques se matérialiseront immédiatement.