On était en 5515 (1755), trois ans après que le prédicateur Rabbi Joseph eût pris Rabbi Issakhar-Dov comme gendre. Le beau-père révéla finalement à son gendre que le scribe Zebulon et lui-même étaient disciples du Baal Chem Tov et que, lorsqu’ils disparaissaient de Loubavitch, leur destination était Medziboz où ils se rendaient auprès de leur nouveau chef. Le prédicateur se mit à enseigner la nouvelle doctrine ‘hassidique à son gendre qui fut conquis. Un nouveau monde lui était révélé. Tout ce qu’il n’avait pu comprendre auparavant lui devenait clair à présent.
Au mois d’Eloul cette année-là, Issakhar-Dov alla avec Zebulon rendre visite au Baal Chem Tov. Rabbi Joseph devait rester à Loubavitch pour prêcher devant les fidèles pendant les Fêtes Solennelles.
Pendant trois mois, Issakhar-Dov demeura avec le Baal Chem Tov. Il passa chez lui les grandes fêtes et vit le Baal Chem Tov dans toute sa majestueuse splendeur. Il observa sa manière de vivre et nota la façon dont il priait. Il écouta également ses réflexions sur la Torah. Tout concourut à faire de lui un brûlant adepte du ‘Hassidisme. Cependant, il avait encore beaucoup à apprendre. Aussi quand il revint chez lui, il se plongea dans l’étude du ‘Hassidisme. Il y avait maintenant un trio à Loubavitch : le prédicateur Rabbi Joseph, le scribe Zebulon et le jeune Issakhar-Dov. Ils pouvaient se réunir pour étudier le ‘Hassidisme et échanger leurs idées sur divers sujets de haute importance. Personne à Loubavitch ou ailleurs ne découvrit leur secret et ne sut qu’ils étaient des ‘hassidim et disciples du Baal Chem Tov de Medziboz dont le nom commençait à être connu du monde juif, mais qu’il n’était pas encore prudent de suivre ouvertement.
Le temps n’était pas encore venu pour les disciples du Baal Chem Tov de se montrer à découvert avec les nouveaux enseignements de leur Maître. L’heure n’avait pas encore sonné, particulièrement en Russie blanche, en Lituanie et dans les pays avoisinants. Ces pays devaient attendre la venue de grandes âmes, en particulier le « Vieux Rabbi », Rabbi Chnéour Zalman, fondateur de ‘Habad, qui introduisit les enseignements du Baal Chem Tov parmi les Juifs de ces régions et les y implanta pour les générations futures.
Ainsi, entre temps, ces trois disciples du Baal Chem Tov étudiaient le ‘Hassidisme ensemble à Loubavitch, se perfectionnant dans la connaissance de ses doctrines et dans l’accomplissement de bonnes œuvres, préparant ainsi le terrain pour le ‘Hassidisme dans l’avenir. Déjà, leur nouvelle manière de vivre, leurs bonnes œuvres, leur amour du simple ouvrier, leur façon neuve d’aborder les illettrés pour implanter en eux l’amour du judaïsme, servaient à paver la voie pour les futurs chefs et adeptes du ‘Hassidisme.
C’est l’amour de l’homme simple, qui était et demeura la base réelle des enseignements du Baal Chem TovComme nous le voyons, c’est réellement à Loubavitch même que furent jetées les bases du ‘Hassidisme. Rien de surprenant alors à ce que Loubavitch devînt le foyer de ‘Habad et le centre du ‘Hassidisme pour la Russie blanche et la Lituanie. Non seulement ces trois justes posèrent les fondations du ‘Hassidisme à Loubavitch, mais Loubavitch fut également le lieu où Chnéour Zalman reçut ses premiers enseignements de la Torah, et de nul autre que de Rabbi Issakhar-Dov. Ainsi, bien avant que le maître et fondateur de ‘Habad ait connu l’existence du ‘Hassidisme, et peut-être même avant qu’il ait entendu parler du Baal Chem Tov (car il n’était alors qu’un enfant de douze ans), il connaissait déjà les principes de base du ‘Hassidisme, tels qu’ils étaient exposés par le prédicateur Rabbi Joseph dans ses sermons. Chnéour Zalman fut ainsi influencé non seulement par son maître, Rabbi Issakhar-Dov, mais aussi par le beau-père de celui-ci, le prédicateur Rabbi Joseph et peut-être également par le scribe Zebulon, puisque les trois hommes étaient toujours ensemble. On pouvait percevoir l’esprit du ‘Hassidisme dans toutes leurs paroles, leur manière de vivre et dans leur attitude envers leurs semblables, en particulier, dans leur amour de « l’homme du commun ».
C’était cet amour de l’homme simple, qui était et demeura la base réelle des enseignements du Baal Chem Tov. Il ne recherchait pas la grande culture chez les Juifs. Il attachait plus d’importance au cœur. Le Juif qui pouvait lire ses prières en hébreu, même s’il n’en connaissait pas la traduction, par le simple fait qu’il prononçait sincèrement ces paroles sacrées en hébreu, était une source de satisfaction pour le Tout-Puissant, dans les cieux, déclarait le Baal Chem Tov.
Le Baal Chem Tov sentait également qu’on pouvait accomplir de grandes choses avec ces hommes simples qui connaissaient seulement un chapitre ou deux des Psaumes. Ces soi-disant « hommes du commun » qui avaient jusqu’alors toujours été mis à l’écart par les intellectuels et attaqués en termes des plus violents par les prédicateurs, c’étaient ces gens qui étaient maintenant élevés par l’intérêt et l’amour du Baal Chem Tov, et c’est parmi eux également qu’il commença à s’attirer de nombreux partisans.
Voici un exemple caractéristique des causeries du Baal Chem Tov :
Jusqu’à l’époque de notre patriarche Abraham, disait le Baal Chem Tov, le monde était dans l’obscurité. Au temps d’Abraham il n’y avait pas de justes et il n’y avait pas de maîtres pour montrer la voie droite aux hommes de ce temps ou pour implorer la miséricorde pour leurs âmes. Mais quand vint Abraham notre patriarche, il apporta la lumière dans le monde en enseignant aux hommes de sa génération la vraie manière de servir le Créateur. Il invoqua la sublime clémence de D.ieu envers Ses humbles créatures. Abraham tenta même d’implorer la pitié de D.ieu pour les habitants de Sodome et de Gomorrhe, corrompus et pécheurs.
Et cependant, continuait le Baal Chem Tov, le peuple au temps d’Abraham était appelé « une nation semblable à un âne » ; mais le peuple juif n’est jamais soumis à une telle comparaison. Le véritable am haarets (peuple de la terre), qui désigne le Juif illettré, n’est pas vraiment un terme péjoratif. Par cette expression, les masses juives sont comparées au sol.
Car, de même qu’on foule le sol, tout le monde piétine le Juif, mais, dans ce même sol, D.ieu a mis le pouvoir de faire pousser toutes sortes de plantes et de fruits pour nourrir toutes Ses créatures. Dans le sol on trouve aussi des trésors tels que l’or, l’argent, les diamants et tous les métaux précieux et les minerais importants. Il en est ainsi du peuple juif : il est rempli des plus belles et des plus précieuses qualités que l’homme puisse jamais posséder, même le plus simple d’entre eux. Comme le disaient nos Sages : « même le plus indigne d’entre vous est plein de vertus comme une grenade est pleine de graines. »
Commencez une discussion