Il y a cinq cent cinq ans naquit l'éminent érudit en Talmud, Rabbi Moche Alechkar. Mais, à l'instar de nos autres grands Sages, les siècles n'ont pas effacé, ni même fait pâlir, ce qu'il nous a légué.
Issu d'une famille de remarquables rabbins, son père était Rabbi Yits'hak. Son lieu de naissance demeure incertain. Nous savons toutefois que dans sa jeunesse il vécut et fit ses études dans la ville de Zamora ; et que son maître fut Rabbi Chmouel Valensi, qui dispensa ses enseignements à celui qui devait devenir le célèbre Rabbi Yaakov ben 'Habib (auteur du Ein Yaakov). Ce dernier était du même âge que Rabbi Moché.
En l'an 1492, les Juifs sont chassés d'Espagne. Rabbi Moché a environ vingt-six ans. Il connaît beaucoup de tribulations et court bien des dangers, semblable en cela à ses coreligionnaires expulsés eux aussi du royaume. Il manque de perdre la vie lors du naufrage du bateau à bord duquel il avait quitté l'Espagne. Plus tard, il tombe aux mains de pirates, mais réussit heureusement à s'enfuir. Il aborde enfin aux rivages de Tunisie en compagnie de Rabbi Abraham Zacouta. Il est reçu avec beaucoup d'honneurs par la communauté juive de Tunis où il demeurera environ dix-huit ans.
Mais l'Espagne catholique, et avec elle l'Inquisition, étendent leur domination jusqu'en Afrique du Nord. Rabbi Moché doit à nouveau prendre le large. Les mêmes tribulations et les mêmes périls recommencent, tant sur terre que sur mer. Finalement, il parvient à Patras, en Grèce, où il prend la tête de la Yéchivah, et a souvent l'occasion d'entrer en contact avec d'autres autorités rabbiniques de son temps afin de trancher des questions de loi judaïque. Plus tard, il se rend en Égypte où il devient Grand-Rabbin du Caire. Entretemps, sa réputation ne faisant que croître, de nombreuses autorités rabbiniques recherchent son avis sur des points de loi délicats. Il entretient une correspondance active avec des personnalités religieuses. Parmi elles, citons Rabbi David Cohen de Corfou, Rabbi Moché de Padoue, Rabbi Yaakov Bérab, Rabbi Lévi ben 'Habib (fils de Rabbi Yaakov ben 'Habib mentionné ci-dessus) et Rabbi Eliahou Mizra'hi.
121 réponses
La dernière partie de sa vie, Rabbi Moché Alechkar la passa à Jérusalem. Quand la controverse éclata entre Rabbi Yaakov Bérab, qui voulait réinstaurer l'ancienne loi de Semikhah (ordination rabbinique spéciale) et Rabbi Lévi ben 'Habib qui y était opposé, Rabbi Moché Alechkar se rangea d'abord à l'opinion du premier ; puis il changea de camp, étant en désaccord avec lui également sur d'autres questions.
Généralement, il était porté à se conformer aux décisions des anciennes autorités rabbiniques qu'il considérait comme de véritables géants du savoir toranique. « Nos générations ne peuvent soutenir la comparaison avec elles, pas plus qu'un singe ne peut être comparé à un homme », écrivit-il dans l'une de ses Réponses, et il critiquait avec force les Rabbins enclins à suivre les décisions rabbiniques récentes.
Rabbi Moché Alechkar est l'auteur de 121 Réponses qui constituent pour nous une source très précieuse de renseignements sur les problèmes auxquels avaient à faire face les Juifs en ces temps si critiques, problèmes créés par l'Expulsion d'Espagne, problèmes de réfugiés, de familles dispersées, etc. Ces Réponses furent imprimées pour la première fois en 1554. Rabbi Moché Alechkar écrivit aussi une défense du Guide des Égarés de Maïmonide, en réponse aux notes critiques de Rabbi Chem-Tov ibn Falaquera. Cette défense (ou réfutations : Hassagoth) fut publiée dans ses Réponses (sec. 117), de même qu'à la fin du Séfère Haémounoth de Rabbi Chem-Tov, imprimé en l'an 1557.
Un remarquable Paytan aussi
En outre, Rabbi Moché Alechkar écrivit deux autres ouvrages, l'un intitulé Guéon Yaakov, sur le Tour Ora'h-'Haim ; l'autre, un commentaire sur Aboth. Aucun d'eux ne fut publié.
Rabbi Moché a été non seulement un érudit remarquable en Talmud, en Kabbalah et un spécialiste de la philosophie juive, mais aussi un éminent Paytan, un compositeur de poésies et de prières sacrées, dont quelques-unes étaient récitées dans certaines communautés.
Il mourut à Jérusalem en l'an 5302 (1542). Mais il continue à vivre dans les œuvres impérissables qu'il nous a laissées.
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