Lois relatives au témoignage: Chapitre Seize

1. [Soit le cas suivant :] Ruben vole un champ ou un vêtement de Siméon. Vient Juda, qui conteste [le droit de propriété de] Ruben, disant : « Ce champ-là [...] » ou « Ce vêtement-là m’appartient », Siméon ne peut pas témoigner en faveur de Ruben que le champ ou le vêtement n’appartient pas à Juda [par exemple, en attestant que les témoins de Juda sont inaptes à témoigner]. [La raison en est que] Siméon désire que le champ ou le vêtement soit laissé en la possession de Ruben qui le lui a volé afin qu’il soit lui restitué [par le tribunal] de ce voleur, car il est possible que la preuve [produite] par Siméon pour reprendre [le champ ou le vêtement] de Ruben ne soit pas valable contre Juda. Et de même, si Ruben vend à Lévi le champ qu’il a volé ou que Lévi [son héritier] en hérite [après sa mort], et que Juda conteste [le droit de propriété de] Lévi, Siméon ne peut pas témoigner qu’il [le champ] n’appartient pas à Juda, car peut-être lui est-il plus facile de le reprendre de la main de Lévi [que de le reprendre à Juda].

2. S’il [Ruben] vend à Lévi le vêtement volé [de Siméon] et que Juda vient contester [le droit de propriété de Lévi], si Ruben décède, Siméon peut témoigner qu’il [ce vêtement] n’appartient pas à Juda. [La raison en est que même s’il est prouvé qu’il a été volé à Siméon,] le vêtement ne reviendra jamais à Siméon, car l’acheteur l’a acquis par le renoncement [du propriétaire à récupérer son bien] et changement de domaine [cf. lois sur le vol ch. 5 § 3, et lois sur le brigandage ch. 5 § 7], et, Ruben [le voleur] étant décédé, il n’a pas de qui se faire rembourser le prix [de ce vêtement]. En revanche, si Ruben est en vie, Siméon ne peut pas témoigner, même dans le cas du vêtement, étant donné qu’il a un profit que celui-ci ne soit pas mis en la possession de Juda, car il pourra [alors] produire une preuve que Ruben le lui a volé, et celui-ci devra lui rembourser le prix. Et de même, si le vêtement est en la possession des héritiers de Ruben, Siméon ne peut pas témoigner [dans cette affaire], parce que finalement, s’il est maintenu en la possession des héritiers, il lui sera retourné [quand il apportera la preuve que celui-ci lui a été volé, car l’héritage, contrairement à la vente, n’est pas considéré comme un changement de domaine, et par conséquent, l’héritier n’acquiert pas l’objet volé]. Et de même pour tout cas semblable.

3. [Soit le cas suivant :] Ruben vend un champ à Siméon sans garantie [en cas d’éviction], et Juda vient contester [le droit de propriété de] Siméon [disant que le vendeur de Ruben le lui a volé], et lui retirer [le champ], Ruben ne peut pas témoigner [dans cette affaire, par exemple, en attestant que les témoins de Juda sont inaptes à témoigner] ; [en effet,] bien qu’il ait refusé toute responsabilité [en cas d’éviction], [on considère qu’]il préfère que [le champ] soit maintenu en la possession de Siméon, afin que son créancier recouvre [sa créance] sur [ce champ en exerçant de son droit de suite] et qu’il [Ruben] ne soit pas « Un emprunteur méchant qui ne paie pas [sa dette] ».

4. [Soit le cas suivant :] Ruben vend une vache ou un vêtement [c'est-à-dire un bien meuble] à Siméon, et Juda vient contester [le droit de propriété de Siméon et] le lui retirer, Ruben peut témoigner [en attestant que les témoins de Juda sont inaptes à témoigner] qu’il appartient à Siméon. [La raison en est que] même s’il est maintenu en la possession de Siméon, [Ruben n’en tire pas profit car] un créancier n’a pas de droit de suite sur les biens meubles [de son débiteur], même si ceux-ci sont grevés d’une hypothèque [cf. lois sur le créancier et le débiteur 18 : 5]. Dans quel cas cela s’applique-t-il ? Si Siméon admet avec certitude que cette vache ou ce vêtement appartenait à Ruben le vendeur, et sait qu’il lui appartient réellement. En revanche, si Siméon n’admet pas cela, Ruben ne peut pas témoigner pour faire perdre à Juda son droit, car s’il [le vêtement ou la vache] est retiré à Siméon, il se retournera [contre Ruben] et exigera le remboursement, disant : « Tu m’as vendu quelque chose qui ne t’appartenais pas, puisque des témoins sont venus et ont attesté qu’il appartenait à Juda ». Dans quel cas disons-nous que Ruben peut témoigner pour faire perdre à Juda son droit et laisser les biens meubles en la possession de Siméon ? Si des témoins viennent et attestent qu’ils savent que Ruben n’a jamais possédé de bien immeuble. Mais s’il n’y a pas de témoins [qui attestent] cela, il [Ruben] ne peut déposer même dans [le cas de] la vache ou du vêtement [c'est-à-dire même dans le cas de biens meubles (il est évident qu’il ne peut témoigner dans une affaire de bien immeuble, pour comme nous l’avons expliqué au § précédent)]. Pourquoi ne peut-il pas témoigner [dans ces cas] ? De crainte qu’il [Ruben] ait [conféré à son créancier un droit de suite sur ses biens meubles en] cédant [ceux-ci] à son créancier incidemment avec un bien immeuble et en écrivant : « [Tous les biens meubles] que j’acquerrai [sont affectés d’une hypothèque pour ta créance] », grevant les biens meubles [qu’il acquerrait] d’une hypothèque incidemment avec le bien immeuble, de sorte que son créancier puisse exercer son droit de suite même sur [des biens meubles, tels que] la vache ou le vêtement ; c’est pourquoi, il [Ruben] ne peut pas témoigner, car [on considère qu’]il désire qu’il [le vêtement ou la vache] soit maintenu en la possession de Siméon afin que son créancier puisse recouvrer [sa créance sur celui-ci, cf. fin du § précédent]. Il en est de même pour tous les cas semblables. Ces principes ne dépendent que de l’appréciation du juge et de sa capacité à comprendre le fondement des jugements. Il doit savoir comment chaque chose peut en causer une autre, et approfondir le cas ; s’il remarque qu’un témoin peut avoir un quelconque intérêt dans un témoignage, même lointain, celui-ci ne doit pas témoigner. Et de la même manière qu’il ne doit pas servir de témoin dans ce cas, de crainte qu’il ait un intérêt, ainsi, il ne doit pas servir de juge. Il en est de même pour tous les facteurs de disqualification : de même que ceux-ci disqualifient un témoin, ainsi, ils disqualifient un juge.

5. C’est pourquoi, on ne doit pas nommer dans un sanhédrin deux [juges] qui sont des proches parents, aussi bien dans un petit sanhédrin que dans le grand sanhédrin. En revanche, les [juges] qui ajoutés pour atteindre [le nombre de] sept pour déclarer une année embolismique, comme nous l’avons expliqué dans les lois sur la sanctification du nouveau mois, il me semble que s’il y a parmi eux des proches parents, cela ne porte pas à conséquence.

6. Toute personne qui est apte pour servir de juge est apte pour servir de témoin. [Néanmoins,] certaines personnes sont aptes pour servir de témoin, mais non pour servir de juge : un ami, un ennemi, un converti [ou issu de parents convertis ; il faut que sa mère ou son père au moins soit d’origine juive], un [esclave non juif] affranchi [dont le statut est le même que le converti]. Et de même, une personne trop âgée, un sariss, un mamzer, un borgne sont aptes à témoigner mais ne sont pas aptes à juger dans les procès capitaux, comme nous l’avons expliqué.