Question :
Pourquoi y a-t-il deux Talmuds ? Et pourquoi le « Talmud de Babylone » est-il considéré comme ayant plus d’autorité que le « Talmud de Jérusalem » ?
Réponse :
Il est vrai que le Talmud de Babylone est beaucoup plus étudié que le Talmud de Jérusalem. En outre, s’il y a un désaccord entre les deux Talmuds, la Halakha (la loi de la Torah) suit le Talmud de Babylone.
L’explication la plus simple de cela est que la rédaction du Talmud de Jérusalem fut interrompue par la force au milieu du IVe siècle lorsque les Romains éradiquèrent l’érudition juive en Israël et que la plupart de sages du Talmud fuirent vers Babylone. Les rédacteurs du Talmud de Babylone, en revanche, furent en mesure d’examiner en profondeur le Talmud de sorte à parvenir – quelque 150 ans plus tard – à un produit fini qui devint accepté comme le dernier mot en matière de loi et de tradition juive.
Une autre vertu du Talmud de Babylone est que, alors que le Talmud de Jérusalem se compose essentiellement de décisions halakhiques, le Talmud de Babylone est un mélange (Babel signifie d’ailleurs « mélangé ») de commentaires de la Bible, de halakha et de débats. Nous obtenons un régime équilibré, selon la prescription des sages : « Une personne doit diviser son apprentissage entre l’Écriture, la halakha et l’érudition. » (Talmud, Sanhédrine 24a ; Tossefot, ibid)
Cependant, sur cette même page du Talmud mentionnée ci-dessus, Rabbi Yirmiya nous dit que, quand le prophète Yirmiya (c’est-à-dire Jérémie) dit : « Il me fait résider dans les ténèbres », il faisait allusion au Talmud de Babylone. Rachi explique cela ainsi : le Talmud de Jérusalem traite directement le propos et fournit une décision claire, tandis que le babylonien est plein de questions et de doutes, qui restent souvent sans résolution.
Mais si le Talmud de Babylone est assimilé aux ténèbres et fut écrit dans l’obscurité de l’exil, tandis que le Talmud de Jérusalem fut écrit dans la lumière de la Terre Sainte, plus proche de l’époque du Temple, pourquoi choisissons-nous les ténèbres plutôt que la lumière ?
Le Rabbi a discuté de cette question à plusieurs reprises et l’a expliquée ainsi : quand une personne cherche dans la lumière, elle trouve immédiatement ce qu’elle cherche. Mais quand la lumière est faible, sa recherche est bien plus compliquée. Elle doit examiner tout objet que sa main rencontre, le retourner dans tous les sens et s’appliquer à en comprendre, classifier et assembler les différentes parties. Au final, qui acquiert la compréhension la plus profonde ? Pas celui qui a vu la vérité dès le premier coup d’œil, mais celui qui s’est battu pour la découvrir. De fait, l’exil a permis quelque chose qui n’aurait pu être atteint autrement.
Le Rabbi a développé ce thème dans beaucoup de ses discours. La distinction entre les deux Talmuds, fit-il remarquer, ne réside pas seulement dans leurs contenus, mais dans leurs approches respectives : celle du Talmud de Jérusalem se concentre sur le contenu – le « quoi », tandis que celle du Talmud babylonien est affaire de processus – le « comment ». L’approche de Babylone devint finalement l’approche juive normative du savoir : l’étude de la Torah réside beaucoup plus dans le cheminement vers la destination que dans ce qu’on y trouve une fois arrivé. C’est l’une des explications de pourquoi, même après que nous ayons la réponse que nous cherchions, nous préservons la discussion tout entière et l’étudions de nouveau encore et encore. Non seulement la destination, mais le chemin lui-même est également la Torah.
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