Au Moyen Âge, il y avait en Alsace-Lorraine de nombreuses communautés juives. Cependant, aucun Juif n’avait le droit de passer la nuit à Strasbourg.
Hans Joerg, le courageux bourgmestre, bien qu’il n’aimât pas particulièrement les juifs, les avait autorisés à vendre leurs marchandises au marché et les protégeait contre les attaques de la populace.
C’était plus que les juifs n’en pouvaient attendre à cette époque.
Ce mercredi-là, le marché fourmillait de paysans venus en ville pour vendre leurs produits et pour acheter des articles de ménage aux commerçants juifs.
Subitement, il se fit un grand tumulte. Un messager annonça à la foule que la fille du bourgmestre avait été enlevée avant l’aube.
La foule excitée ne tarda pas à accuser les Juifs, prétendant qu’ils avaient commis ce crime pour forcer le bourgmestre à leur accorder l’autorisation de séjour à Strasbourg.
Hans Joerg aimait sa fille plus que lui-même. N’ayant d’autre explication au malheur qui le frappait, il ajouta foi à ces accusations. Il ordonna immédiatement de mettre en prison tous les commerçants juifs de la foire et menaça d’expulser tous les Juifs d’Alsace-Lorraine si sa fille ne lui était pas rendue dans deux semaines au maximum.
Désespérés, les Juifs s’adressèrent à Rabbi Isaac de Worms qui n’était pas seulement un grand érudit et le chef de l’une des plus grandes yéchivas, mais aussi un médecin de renommée mondiale.
Son arrivée à Muehlheim, la ville qui comptait le plus grand nombre de Juifs en Alsace, fit une profonde impression sur tous les habitants, juifs et chrétiens, et tous s’attendaient à quelque événement important.
Rabbi Isaac ne réussit par à obtenir une entrevue avec Hans Joerg ; celui-ci refusait tout contact avec les Juifs tant que sa fille ne lui serait pas rendue. Les jours passaient et les Juifs se demandaient comment prévenir le grave danger qui les menaçait.
Jour et nuit, Rabbi Isaac réfléchissait à la situation, se creusant la tête pour trouver une solution satisfaisante.
C’est ainsi que deux semaines passèrent. Le délai fixé par le bourgmestre expirait le lendemain. Sur son lit, Rabbi Isaac ne pouvait pas fermer l’œil. Il était minuit passé, lorsqu’il entendit grincer la porte cochère.
Un homme masqué, en costume de cavalier, entra dans sa chambre et le pria de l’accompagner au chevet d’un malade.
Rabbi Isaac s’habilla et sortit dans la rue où deux chevaux attendaient.
Les deux hommes chevauchèrent rapidement sur la route jusqu’à la colline escarpée en haut de laquelle se trouvait un château fortifié. Chemin faisant, le cavalier raconta à Rabbi Isaac l’aventure dangereuse arrivée au malade, le Comte d’Alsberg, lorsque celui-ci avait, deux semaines plus tôt, fait prisonnière la fille de son ennemi.
Sur le chemin du retour, le cheval avait désarçonné le Comte et maintenant celui-ci était gravement malade. Rabbi Isaac soupçonna tout de suite l’identité de la captive et, dans son cœur, il remercia D.ieu de lui avoir donné l’occasion de sauver les Juifs d’Alsace-Lorraine.
Après plusieurs heures de traitement difficile, Rabbi Isaac réussit à soulager le Comte. Le malade, reconnaissant de tout ce que ce docteur avait fait pour lui, promit de lui donner tout ce qu’il désirerait. Rabbi Isaac choisit, naturellement, la prisonnière.
Ne pouvant revenir sur sa promesse, le Comte lui accorda sa demande, bien qu’il perdît ainsi le meilleur moyen d’humilier son fier ennemi, le bourgmestre de Strasbourg.
Rabbi Isaac se dépêcha de retourner à Muehlheim d’où deux hommes accompagnèrent la jeune fille à la maison de son père.
En revoyant sa fille et en apprenant comment elle avait pu être libérée, Hans Joerg autorisa les Juifs d’Alsace à s’établir à Strasbourg.
Commencez une discussion