À l’âge de cinq ans, Rabbi Chnéour Zalman était déjà sage et érudit. Il sentait que les portes de la Torah étaient ouvertes devant lui et il trouvait une réponse à toutes les questions difficiles qu’il rencontrait.

Lorsqu’il eut huit ans, il décida d’écrire un commentaire sur la Torah. Ce commentaire fut si profond qu’il incluait tous les enseignements contenus dans les commentaires de Rachi,1 du Ibn Ezra2 et du Ramban3. Les rabbins qui eurent ce commentaire devant les yeux en furent stupéfaits.

Une nuit, alors que Chnéour Zalman était âgé de dix ans, il fit un terrible rêve :

Il se trouvait dans le « ‘heder chéni », la salle attenante à la grande salle de prière, dans la synagogue de Lyozna, et il étudiait la Torah. Soudain, un homme connu sous le nom de Rabbi Réouven Baal Chem fit son entrée. Celui-ci était connu de tous dans la région comme guérisseur, donnant des « ségoulot » et des médicaments de son cru à ceux qui le sollicitaient.

Tu es convoqué en « dine Torah », en procès devant le tribunal rabbinique, dit Rabbi Réouven Baal Chem au petit Chnéour Zalman dans son rêve.

– Moi ? Mais qu’ai-je donc fait ? répondit l’enfant.

– Rentre dans la synagogue et tu connaîtras la réponse, lui dit Rabbi Réouven.

L’enfant pénétra dans la synagogue et vit les trois rabbins de la ville de Lyozna enveloppés de leurs talliths, assis à la table située au sud de la synagogue. Leur faisant face, à deux mètres d’eux, se tenaient trois vieillards à l’allure vénérable, tout de blanc vêtus.

Lorsque Chnéour Zalman et Rabbi Réouven se furent approchés de la table, l’un des rabbins membres du tribunal fit signe aux trois vieillards de s’approcher également.

C’est alors que le rabbin qui était assis au milieu des trois s’adressa à Chnéour Zalman :

– Ces trois hommes sont Rachi, Rabénou Ibn Ezra et le Ramban. Ils sont venus ici car ils t’assignent en dine Torah.

– Messieurs les rabbins, qu’ai-je fait ? demanda Chnéour Zalman.

Le rabbin continua :

– Chnéour Zalman, tu es assigné car tu veux leur enlever le mérite que l’on étudie leurs commentaires de la Torah. Du fait que ton commentaire inclut leurs enseignements, si tu publie le tien, plus personne n’étudiera les leurs.

Chnéour Zalman demeura silencieux. Il n’avait pas à s’excuser, car il n’avait pas eu l’intention de causer du tort à qui que ce soit.

Soudain, il éclata en sanglots. Le visage ruisselant de larmes, il s’écria :

– Je brulerai mon commentaire ! Je le promets !

Les trois vieillards habillés de blanc se réjouirent en entendant cette promesse. Ils posèrent leurs mains sur la tête de Chnéour Zalman et dirent :

– Nous te bénissons pour que tu réussisses dans ton étude. Tu mériteras de développer de nouveaux enseignements dans la Torah, au point où des milliers et des milliers de gens, dans toutes les générations jusqu’à la venue du Machia’h, marcheront dans tes voies.

Ainsi s’acheva le rêve et Chnéour Zalman se réveilla.

Au matin, lorsqu’il se leva, il était très triste de ce qui s’était passé dans son rêve. Il était soucieux et décida de jeûner.

La nuit suivante, il fit de nouveau le même rêve. Lorsque, la nuit d’après, le rêve se répéta une troisième fois, Chnéour Zalman se leva, se dirigea vers la bibliothèque et se saisit du commentaire qu’il avait écrit.

Il sortit dans la cour, ramassa du bois et alluma un feu. Lorsque le feu fut suffisamment fort, il y jeta son manuscrit.

Des années plus tard, la bénédiction des trois sages s’accomplit : Rabbi Chnéour Zalman de Lyadi, connut sous le nom d’« Admour Hazakène », le « Vieux Rabbi », écrivit de nombreux livres, parmi lesquels le Choul’hane Aroukh HaRav et le Tanya. Il fut le fondateur de la ‘Hassidout ‘Habad et de la dynastie des Rabbis de Loubavitch qui, conformément à la bénédiction, eurent – et continuent d’avoir – un profond impact sur la vie juive dans le monde entier.