La Paracha Vayéra commence par le récit de l’apparition de D.ieu à Abraham à l’entrée de sa tente où il se reposait après s’être circoncis.
Mais quand Abraham observa que non loin de là se tenaient trois étrangers, il se leva, demanda à D.ieu de patienter et courut accueillir ces étrangers et leur offrir son hospitalité.1
Ainsi, pour témoigner son hospitalité à des étrangers, Abraham n’hésita-t-il pas à laisser D.ieu attendre. C’est ainsi que nos Sages ont déduit de la conduite d’Abraham que « l’hospitalité à l’égard des voyageurs est plus importante encore que de recevoir la Présence Divine ».2
Un tel comportement d’hospitalité est devenu une partie intégrante de la conduite juive.
Pourtant, Abraham n’avait pas reçu un tel commandement. Qu’est-ce qui le conduisit donc à ressentir qu’il était convenable d’abandonner D.ieu pour s’occuper d’étrangers ?
Une conduite emprunte de bonté vis-à-vis d’autrui peut être motivée par deux types de sentiments : la magnanimité ou l’humilité.3
Un exemple de magnanimité serait la générosité manifestée par un roi puissant ou une personne fortunée. Le sentiment de leur propre valeur et de leur propre importance les conduit à agir de façon généreuse et bienveillante, « dispensant des bienfaits à tous ».
Un exemple de bonté découlant d’un sentiment d’humilité est la charité accomplie par Abraham, qui disait de lui-même : « Je ne suis que poussière et cendres ».4 Parce qu’il se sentait inférieur à tous, il estimait qu’il était naturel de manifester de la bonté et de l’honneur à tous.5
La bonté qui se dégage d’une telle abnégation est supérieure à celle qui résulte d’un sentiment de magnanimité et ce, de deux manières :
La bonté née du sentiment que toute autre personne a plus de valeur que soi entraînera que celui qui l’éprouve donnera tout aux autres, ne subsistant qu’avec ce qu’ils lui laisseront. En revanche, la bonté découlant de la magnanimité verra le donneur garder pour lui-même la part du lion, ne donnant que le restant aux autres.
Plus encore, la bonté magnanime ne se manifeste que lorsque le bienfaiteur ne souffre pas de sa propre générosité. Mais la bonté résultant de l’effacement de soi inspire une personne à donner quand bien même cela lui causera de la souffrance et des manques.
Parce que la bonté et l’hospitalité d’Abraham provenaient de ce sentiment d’abnégation et d’effacement, non seulement plaça-t-il sa propre vie en danger en combattant des rois puissants pour sauver des vies,6 mais il était même prêt à risquer sa vie spirituelle qui lui était bien plus chère que sa vie corporelle.
C’est cette forme supérieure de bonté qui incita Abraham à faire attendre D.ieu pendant qu’il allait accueillir des étrangers.
Poussière et cendre
Ce qui précède éclaire les paroles de nos Sages qui affirment7 que « par le mérite de notre patriarche Abraham qui déclara : “Je ne suis que poussière et cendres”, ses enfants reçurent les commandements des cendres de la Vache Rousse et de la terre de la Sotah [utilisée dans le rituel révélant la culpabilité ou l’innocence d’une femme soupçonnée d’adultère] ».
Il est un principe selon lequel « D.ieu récompense mesure pour mesure ».8 Mis à part la concomitance des mots « terre » et « cendres », quel est le lien fondamental entre les propos d’Abraham et ces deux commandement ?
La connexion est la suivante : l’accomplissement de ces deux commandements est lié avec l’humilité et le sacrifice de soi spirituel induits par la conscience de n’être « que poussière et cendres ».
Les cendres de la Vache Rousse, utilisées pour purifier des personnes rendues impures par contact avec un mort, rendaient elles-mêmes légèrement impurs ceux qui s’occupaient de les préparer.9 C’est ainsi que la purification d’un individu par les cendres de la Vache Rousse impliquait le sacrifice de soi de ceux qui procédaient au rituel purificateur.
Les cendres de la Sotah servaient également dans une cérémonie qui nécessitait un sacrifice de soi spirituel puisque le rituel impliquait que l’on efface le Nom de D.ieu. Pour rétablir la paix entre un mari et une femme, la Torah prescrit que le nom de D.ieu soit effacé,10 un acte de sacrifice de soi qui fait écho à la bonté d’Abraham.
Basé sur Likoutei Si’hot vol. 25, p. 79-83.
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