Tetsé – Répandre la conscience du Divin
La sixième partie du Deutéronome se poursuit avec le second discours d’adieu adressé par Moïse au peuple juif. Moïse continue ici par un rappel de nombreux aspects de la loi juive, à commencer par les lois régissant le comportement de l’armée juive lorsqu’elle part (tetsé, en hébreu) en guerre.
Comme nous l’avons signalé, D.ieu ordonna à nos ancêtres de conquérir la terre d’Israël et la libérer de ses habitants païens afin qu’ils possèdent un lieu qu’ils pourraient transformer en une demeure pour Lui. En fin de compte, bien sûr, l’intention de D.ieu est que le monde entier devienne Sa demeure ; c’est l’essence de la déclaration de nos sages, selon laquelle « dans les temps messianiques, la terre d’Israël s’étendra pour englober le monde entier ».1 Comme première étape de ce processus, le peuple juif avait à démontrer aux peuples du monde que cet objectif était réalisable ; cela nous obligeait à établir notre propre état souverain, dans lequel nous serions à même de poursuivre cet objectif sans entraves. Ce pays serait régi par des lois spéciales et l’on observerait des commandements uniques, qui ne s’appliqueraient et ne seraient pratiqués nulle part ailleurs dans le monde.
La terre d’Israël serait ainsi, par rapport au reste du monde, l’équivalent géographique du peuple juif par rapport au reste de l’humanité. D.ieu avait séparé le peuple juif du reste de l’humanité comme « un royaume de prêtres et une nation sainte ».2 Le peuple juif se doit de servir d’idéal et d’inspiration à l’humanité tout entière. De même, D.ieu sépara la terre d’Israël du reste du monde afin qu’elle soit l’exemple de ce qu’il devait aspirer à devenir.
Ceci n’était cependant qu’une première étape dans le processus de transformation du monde pour en faire Sa demeure. La seconde étape consistait en l’élargissement volontaire des frontières de leur domaine qu’entreprirent nos ancêtres, étendant ainsi le territoire où les lois spéciales de la terre d’Israël sont en vigueur. Ainsi, ils augmentèrent progressivement la proportion du monde qui illustre l’idéal d’être une vraie demeure pour D.ieu.
Or, comme nous le savons, la justification du déplacement des peuples cananéens était qu’il s’agissait en fait d’étrangers ayant ravi le pays à ses habitants d’origine, la descendance de Chem, d’où descend le peuple juif.3 En réoccupant la terre, le peuple juif ne faisait rien d’autre que la restituer à ses propriétaires légitimes. Mais la conquête de terres situées en dehors des frontières de la terre d’Israël ne saurait faire l’objet d’une telle justification. En vertu de quel droit nos ancêtres s’approprièrent-ils donc un territoire qui apparemment ne leur était pas destiné ?
De plus, il est dangereux de mener une guerre, et la Torah nous interdit de nous mettre en danger sans besoin impérieux.4 Quand la Torah nous ordonne ponctuellement d’engager une guerre, comme lors de la conquête de la Terre Promise ou dans des cas de légitime défense, il est clair que cette directive l’emporte sur l’interdiction de mettre notre vie en danger. Mais une guerre non obligatoire est un cas différent ; comment donc fut-il permis d’en entreprendre ?
En réalité, ces deux questions constituent la réponse l’une de l’autre. Le danger inhérent à l’acte de faire la guerre contre un autre peuple indique que ce peuple s’est défini comme un ennemi de la sainteté. Rappelons que les guerres facultatives ne devaient pas s’entamer avant que les guerres obligatoires (et leurs guerres spirituelles, intérieures, correspondantes) soient toutes livrées et remportées, autrement dit après que le peuple juif était parvenu à prendre possession du territoire et l’avait transformé en un modèle idéal de vie sainte. Si un peuple voisin, ayant vu ce modèle possible d’une demeure divine sur terre, a choisi de ne pas participer à cette vision (par son refus des règles de vie de la Torah destinées aux non-juifs), il a perdu de ce fait son droit à gérer son territoire et sa population.
La raison pour laquelle la Torah n’ordonna pas expressément à nos ancêtres de conquérir un tel pays, leur en laissant l’initiative, était que, de cette manière seulement, pouvait être véritablement démontrée leur identification absolue à l’impératif divin. Dès lors qu’ils intériorisèrent la perspective de D.ieu sur la vie, au point d’être prêts à risquer leur existence pour répandre la conscience divine, même en l’absence d’une injonction concrète à le faire, cette disposition devint leur mission.5
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