22:3 Moab eut une grande peur. Si’hon et Og avaient prélevé un tribut des rois cananéens en échange de la protection de leurs terres contre les envahisseurs,1 mais les rois avaient gardé cet arrangement secret vis-à-vis de la population en général afin de ne pas donner l’impression de dépendre d’autrui pour garantir sa défense.
Or Balak était au courant de cet arrangement. Il pensait que la raison pour laquelle les Juifs n’avaient pas encore attaqué les Moabites était la crainte de voir Si’hon et Og se mobiliser pour leur défense. Il savait en outre, comme tous d’ailleurs, que D.ieu avait promis des prouesses militaires spécifiquement aux non-Juifs, et vit que cette promesse avait empêché les Juifs de mener une guerre contre Édom.2 Il supposa alors que la raison pour laquelle les Juifs n’avaient pas attaqué Moab était qu’ils craignaient d’attaquer quiconque d’autre que les peuples de Canaan, car ils savaient que D.ieu leur avait uniquement promis le pays de Canaan, et qu’Il ne leur viendrait donc en aide que dans les batailles qu’ils mèneraient pour conquérir ce pays. Mais quand il vit que les Juifs avaient victorieusement combattu Si’hon et Og – qui ne vivaient pas en Canaan même –, Balak craignit qu’ils n’hésitent plus à lutter contre les Moabites. Et à présent il n’y avait personne pour les protéger.
Dès lors, Balak dit aux Moabites que de toute évidence, les Juifs n’avaient jamais hésité à conquérir des terres autres que Canaan, et que leurs protecteurs avaient été vaincus. Ainsi, les raisons pour lesquelles les Juifs ne les avaient pas attaqués auparavant n’étaient plus valables.
L’argument de Balak ne parut pas intimider les Moabites, qui étaient toujours d’avis que les Hébreux n’avaient nul intérêt sur leur terre et, en conséquence, ne les attaqueraient pas. Mais en fait ils devinrent très inquiets à la perspective d’être pillés sans relâche.3
23:9 Aussi robustes que les cimes des rochers… aussi robustes que les collines. La « robustesse » dont il est question ici fait référence au dévouement du peuple à D.ieu – dévouement sage, désintéressé et inébranlable –, au point d’être prêt sacrifier sa vie s’il le faut plutôt que de le trahir. Nous héritons de cet attribut des patriarches et des matriarches, qui intériorisèrent ce dévouement si ardemment qu’il devint une partie de leur être, et fut ainsi transmis à leurs descendants.4
10 Des quatre divisions d’Israël. Balaam reprit : « Leur vertu intrinsèque s’exprime également par le caractère régulier et inaltérable de certains des commandements qu’ils accomplissent. Ainsi, a-t-on jamais compté le nombre des commandements que D.ieu a ordonné de pratiquer aux descendants de Jacob en pensant que c’est ainsi qu’ils gagnent leur mérite ? En accomplissant les commandements, les Juifs acquièrent un mérite ininterrompu et infini, comme il en est des commandements qu’ils accomplissent avec la poussière de la terre : ils labourent le sol sans cesse, et à chaque fois qu’ils le font sans harnacher un bœuf et un âne ensemble, ils accomplissent un commandement !5 Ils sèment constamment leurs champs et leurs vignes, et à chaque fois qu’ils le font sans mêler les espèces, ils accomplissent un commandement !6 Quelqu’un a-t-il jamais compté la quantité de semence vitale d’Israël en pensant que le nombre témoignerait de son mérite ? D.ieu la compte parce qu’Il attend avec impatience la naissance de personnes justes. » Lorsque Balaam s’entendit dire que D.ieu comptait la semence vitale produite dans les relations conjugales des Juifs, il en fut dégoûté, et pensa : « Est-il convenable que le Saint D.ieu soit lubrique ? » Pour avoir considéré avec mépris la sainteté des relations conjugales et laisser entendre que D.ieu faisait mauvais usage de Sa vue, Balaam devint aveugle d’un œil. Cet œil fut enlevé par la suite, laissant à vide son orbite.7
16 L’Éternel entra en contact de nouveau. Dans ses deux premiers oracles, Balaam mentionne l’amour de D.ieu pour les Juifs ainsi que leur propre mérite. Dans le premier d’eux, il transmet l’idée qu’il est impossible de maudire les Juifs ; Balaam souligne ainsi l’amour protecteur de D.ieu. Dans le second, il signale que les Juifs méritent en fait d’être bénis, insistant sur leurs mérites intrinsèques.8
21 Il ne voit pas de mal dans Jacob. La raison pour laquelle D.ieu ne voit aucun mal en nous est parce qu’Il nous considère comme ayant déjà réalisé notre potentiel et réorienté notre penchant animal (notre âme animale) vers le Divin, autrement dit comme ayant bridé et canalisé la force brute de notre animal intérieur dans la recherche d’une conscience divine plus élevée. Ce qui nous permet d’effectuer cette transformation, c’est notre âme Divine. L’étincelle du Divin que possède tout un chacun contient un petit peu de la toute-puissance de D.ieu ; aussi, elle peut vaincre l’entropie de l’âme animale, qui nous tire toujours vers le bas, et à laquelle on ne saurait parer par des voies naturelles.
Telle est la signification profonde du verset :
Il ne voit pas de mal dans Jacob : autrement dit, D.ieu entend par là que nous pouvons maîtriser notre âme animale, parce que…
L’Éternel est avec eux, c’est-à-dire en nous, en référence à l’âme divine, qui nous donne les moyens de transformer notre âme animale.9
23 Qu’a accompli D.ieu ? Balaam proclama : « Même à présent, D.ieu manifeste Son affection pour les Juifs en leur faisant savoir directement quand leur conduite Lui déplaît, pour leur donner l’occasion de se repentir et éviter le châtiment. Ainsi, il n’y a pas besoin de devins chez Jacob ni besoin d’augures chez Israël : chaque fois que le peuple a besoin de savoir quelle est Sa volonté, ce que D.ieu a promulgué est transmis à Jacob et à Israël au moyen de leurs prophètes, ou, lorsque le peuple n’est pas digne de recevoir de communication prophétique directe, par les ourim et toumim. »10
24:5 Que tes tentes sont belles. Le fait de dresser les tentes de telle sorte que personne ne puisse regarder, pas même par hasard, l’intérieur de celle qui appartient à une autre famille semblerait beaucoup moins significatif que le soin de préserver l’intégrité de la lignée familiale en restreignant l’activité charnelle dans les limites prescrites. Pourtant, Balaam mentionna en premier lieu ce fait apparemment anodin, soulignant ainsi que c’est bien le soin qu’accordait le peuple aux détails de leur conduite modeste qui l’impressionna.
La leçon que ceci nous enseigne est que nous ne devons jamais penser qu’il convient de nous soucier seulement des questions « importantes » de la pudeur et de l’intimité, et qu’il nous est permis de nous relâcher à l’égard des détails « insignifiants » et « innocents ». C’est que tout détail, pour petit qu’il soit, a son importance, au point de pouvoir transformer une malédiction (ou une situation maudite) en une bénédiction (ou une situation bénie).11
Jacob … Israël. Les deux noms du patriarche Jacob – Jacob et Israël – font référence au peuple juif en tant que nation. « Jacob » fait allusion aux Juifs dans leur rôle de serviteurs de D.ieu (comme dans le verset « N’aie crainte, Mon serviteur Jacob »12 ), tandis qu’« Israël » fait tout autant référence à leur rôle d’enfants de D.ieu (comme dans le verset « Israël est Mon fils aîné »13 ). Nous jouons tous ces deux rôles, parfois l’un à la fois, parfois les deux en même temps, tout en mettant l’accent sur l’un ou l’autre.
Les tentes sont mentionnées en rapport avec Jacob, et les sanctuaires avec Israël. Une tente est une couverture protectrice extérieure, tandis qu’un sanctuaire est la charpente-foyer que protège la tente. Lorsque nous servons D.ieu en tant que « Jacob », comme des serviteurs disciplinés et fidèles, même si notre côté animal a pris alors le dessus et que nous préférerions nous consacrer à d’autres tâches, nous dressons des « tentes », des champs de force protégeant la vie divine que nous nous sommes construite jusqu’à présent contre l’intrusion de la conscience mauvaise, négative ou animale. Lorsque nous servons D.ieu en tant qu’« Israël », comme des enfants affectueux et dévoués, nous faisons de notre vie un sanctuaire pour Lui par l’acte de renforcer notre conscience divine et nous reconnaître dans les valeurs et aspirations qu’Il a pour Son monde.14
7 Ton roi s’élèvera au-dessus d’Agag. Les rois d’Amalek sont tous appelés Agag, de même que tous les rois d’Égypte sont nommés Pharaon et les rois de Philistie, Aviméle’h.15 La raison pour laquelle les rois d’Amalek sont connus sous le nom générique d’Agag est que ce mot est lié au mot hébreu signifiant « toit » (gag), la partie de la maison qui protège ses habitants de l’atmosphère se déployant au-dessus de leurs têtes. Le peuple d’Amalek incarnait les maux de l’arrogance et de l’égocentrisme, se rebellant contre le D.ieu qui est au Ciel par pure effronterie. En effet, ils prétendaient ignorer D.ieu et se protéger de la présence du Ciel dans leur vie, gênante pour eux. C’est pourquoi le nom de leurs rois dérive du mot pour « toit ».16
14 Je te conseillerai. Balak fut finalement convaincu que Balaam était inapte à l’aider à vaincre les Juifs. Cependant, conscient que seuls les moyens spirituels pouvaient l’emporter sur eux, il était toujours d’avis que quelqu’un d’une envergure spirituelle plus élevée que celle de Balaam aurait des chances de réussir. En réponse, ce dernier dit à Balak : « Abandonne ton idée de l’emporter sur leurs mérites spirituels. Même les Égyptiens les plus vertueux et dignes de louanges, ceux qui firent cas des paroles de D.ieu et épargnèrent ainsi leurs animaux de mourir par les plaies, ne parvinrent pas à les vaincre et se noyèrent dans la mer des Joncs.17 En revanche, je te conseille d’attirer les Juifs dans la faute afin que leur D.ieu soit contraint de les punir. Leur D.ieu a horreur de la débauche charnelle, et les Juifs apprécient les vêtements faits en lin. Installe alors un marché, et place parmi les vendeurs de vieilles femmes offrant des vêtements de lin dans des étals ouverts. Les Juifs ne se méfieront pas de parler à de vieilles femmes. Puis demande à ces femmes de leur faire savoir que les mêmes vêtements sont vendus dans des tentes à des prix plus réduits. Tu auras préposé comme vendeuses dans les tentes de jolies jeunes femmes. Une fois que les hommes juifs y seront entrés, tu demanderas aux jeunes femmes de leur offrir du vin afin qu’ils baissent la garde et succombent à leurs sollicitations amoureuses. Les femmes pourront alors les séduire et les inciter en même temps à adorer leurs idoles, et D.ieu les punira pour leur immoralité comme pour leur idolâtrie. »
19 Il anéantira les restes de la cité. Le prophète Isaïe décrit l’un des traits distinctifs de l’ère messianique : « Des rois seront tes tuteurs, et leurs princesses tes nourrices. »18 Dans les pays gouvernés par des institutions monarchiques, les membres de la famille royale sont les personnalités les plus imprégnées des valeurs culturelles de leur société, à laquelle ils s’identifient avec fierté et loyauté. À ce titre, il semblerait qu’elles sont les dernières personnes à qui nous devrions confier les soins et l’éducation de nos jeunes enfants, si impressionnables à leur bas âge ! Cependant, à l’ère messianique les nations du monde seront débarrassées de leurs scories et, devenues désormais sensibles aux valeurs et qualités du peuple juif, elles cesseront d’être ses adversaires pour devenir ses défenseurs.
Cela ne fait que souligner le lien rattachant les prophéties de Balaam et l’ère messianique. La figure de Balaam est le symbole de cette transformation, car ses tentatives de malédictions furent transformées en de formidables bénédictions de louange.19
25:1 Israël s’établit à Chitim. Comme nous le savons, tout au long de leur voyage dans le désert, les Juifs n’eurent pas à se soucier de pourvoir aux besoins ordinaires de la vie matérielle. La manne, le puits de Miriam et les nuées de Gloire satisfaisaient leurs besoins d’aliments, de boissons et de vêtements.20 Dès lors que toutes ces provisions étaient fournies par le Ciel, elles ne contenaient pas d’impuretés. En fait, tout au long de leurs quarante années d’errance les Juifs n’eurent pas à excréter de déchets corporels.
Ces provisions étaient pures au sens matériel comme spirituel, ce qui signifie qu’elles ne contenaient aucun élément pouvant éveiller l’appétit sensuel. À Chitim les Juifs étaient au seuil d’un nouveau type de vie, qui impliquait un engagement direct et intense dans le monde matériel. Il était peut-être inévitable qu’à leur première rencontre avec la vraie matérialité, qui revêtait l’apparence de la jouissance sensuelle à l’état pur, se soit éveillée leur curiosité à l’égard d’un aspect de la réalité jusqu’alors inconnu d’eux.
Ce fut ainsi que le peuple commença à s’égarer : au début, seulement dans le sens de « se laisser entraîner par les yeux et le cœur, par lesquels on s’égare »,21 mais finalement ils commencèrent à s’égarer tout autant dans leur comportement. C’est la raison pour laquelle le lieu où cela se produisit portait le nom de « Chitim » (שטים) lequel s’apparente au mot hébreu signifiant « déviation » (lissetot, לשטות). Toute faute commence par un écart mineur du bon chemin, comme se perdre dans la forêt commence par un léger écart de la voie principale.
C’est Moïse qui, par son mérite, nous préserve de retomber à nouveau dans cette faute, comme il est dit : « Et Il l’enterra [Moïse] dans la vallée en Moab, en face du site de [la secte de] Péor,22 afin de racheter ce qui survint à Péor. »23 Cela est dû au fait que Moïse personnifie l’humilité et l’oubli de soi. Celui qui possède ces traits est immunisé contre le sentiment égocentrique prônant qu’il faut que rien ne nous manque, ce par quoi l’on commence à fauter, et gardera en outre la conscience de la présence de D.ieu, qui l’empêche de se sentir attiré par les charmes sensuels de la matérialité.24
6 L’homme hébreu. Les transgresseurs de la tribu de Siméon s’approchèrent de l’un de leurs chefs,25 Zimri fils de Salou, et se plaignirent : « On nous condamne à mourir ! Pourquoi ne fais-tu rien pour nous défendre ?! » Alors, Zimri rassembla un groupe d’Hébreux et se rendit avec eux chez la fille de Tsour,26 le roi principal de la confédération madianite,27 et essaya de la convaincre de s’engager dans des relations charnelles avec lui. La jeune femme s’appelait Kozbi. Au début Kozbi déclina sa demande, arguant que son père, le chef des Madianites, lui avait ordonné de ne séduire personne d’autre que Moïse. Mais Zimri lui fit remarquer que sa lignée était supérieure à celle de Moïse, puisqu’il était issu de la tribu de Siméon, le second fils de Jacob, tandis que Moïse était descendant de Lévi, le troisième de ses fils.
Il défia Moïse. Zimri lui demanda : « M’est-il permis d’épouser cette Madianite ? Si tu dis qu’elle est interdite, de quel droit alors as-tu épousé Tsipora, également madianite ? » Le raisonnement manquait de sens, car Moïse avait épousé Tsipora avant que la Torah soit donnée, et, de ce fait, avant que le mariage entre Juifs et non-Juifs soit interdit. Comme nous l’avons vu,28 ce n’est que depuis le don de la Torah que les Juifs furent tenus à l’observance des commandements de D.ieu, ce que firent également la multitude diverse et d’autres non-Juifs (comme Tsipora) qui décidèrent alors de rejoindre le peuple juif. Mais Zimri n’attendit pas sa réponse et, pour renforcer son argument, emmena Kozbi dans une tente et se livra à des relations charnelles avec elle.
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