Après le don de la Torah relaté dans la paracha de Yitro que nous avons lue la semaine dernière, la Torah enseigne de nombreuses lois religieuses, civiles et pénales dans la paracha de cette semaine, Michpatim, « les lois ».
L’une d’entre elles est l’objet d’une confusion depuis des siècles, voire des millénaires, entre les Juifs et ceux qui ont de la Torah une lecture superficielle :
« Œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied ; brûlure pour brûlure, plaie pour plaie, contusion pour contusion. » — Exode 21,23-26
Non, la Torah ne prône pas la « loi du talion ». La Torah Écrite fut donnée au Sinaï en même temps que la Torah Orale qui en révèle le sens et l’intention. L’idée ici n’a jamais été de faire perdre à l’auteur des dommages le même organe que celui qui a été perdu par la victime, ou à lui infliger la même douleur. La Torah Orale, consignée dans le Talmud,1 enseigne qu’il s’agit d’indemniser financièrement la victime selon un barème déterminé par des experts qui prenait en compte le nouvel état de handicap ainsi causé, mais également la douleur, les frais médicaux, la perte de revenus due à l’incapacité de travail et la honte subie.
D.ieu merci, ce genre de situation est extrêmement rare. Pourtant, toutes les lois de la Torah ont une pertinence pour chacun, quels que soit le lieu et l’époque. Il y a donc un enseignement à retirer pour nous dans cette loi de la Torah.
Le Baal Chem Tov, fondateur du mouvement ‘hassidique, explique2 que la loi à appliquer lorsque, à D.ieu ne plaise, la perte d’un membre est causée nous édifie sur la valeur profonde du corps humain et de ses aptitudes. De la gravité du négatif, nous apprenons la valeur du positif. De la nécessité de la réparation, nous apprenons l’importance de la préservation, et donc du respect de la chose.
En effet, contrairement aux autres créatures qui peuplent notre planète – les animaux, les plantes, les micro-organismes –, l’être humain a été doté d’une âme divine et du libre arbitre d’agir en exprimant celle-ci ou bien de façon à satisfaire ses désirs égoïstes et ses pulsions physiques. En résumé, l’être humain oscille entre le Divin et l’animal, c’est pourquoi son choix peut être jugé selon une échelle morale.
Dès lors, lorsque l’on s’attache à n’utiliser un membre ou une faculté de notre corps que dans un but divin et positif, nous « sanctifions » ce membre ou cette faculté dans la mesure où cela devient un véhicule du Divin. Par exemple, lorsque nous nous employons à ne pas regarder ce qui ne doit pas être vu et à n’utiliser nos yeux qu’à des fins positives (comme étudier la Torah, lire la prière, voir de quelle manière nous pouvons aider autrui, etc), alors nos yeux sont, par extension, les « yeux » de D.ieu : « un œil [humain] pour un œil [divin] ».
Dès lors, diminuer de façon permanente – et même temporaire – la capacité d’une personne à utiliser telle ou telle faculté physique l’empêche d’incarner à travers celle-ci la volonté divine et de sanctifier soi-même et le monde qui l’entoure : « une plaie [matérielle] pour une plaie [spirituelle] ».
Apprenons à considérer notre existence et celle de notre prochain pour ce qu’elle est : la promesse d’un ennoblissement de soi et du monde, d’une sanctification qui permettra très bientôt d’accueillir la révélation de l’Essence divine lors de la venue de Machia’h.
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