23:1 Les années de la vie de Sarah furent toutes d’un bonheur égal. Bien que Sarah atteignait en permanence des degrés toujours plus élevés de vertu – et qu’il semble ainsi que chaque période particulière de sa vie était, dans cette perspective, supérieure à la période qui la précédait et inférieure à celle qui la suivrait –, toutes ces années peuvent être considérées comme également heureuses. Chacun de ses accomplissements prolongeait et conférait de la perfection à ses précédents accomplissements, et, de façon complémentaire, la préparait à atteindre de nouveaux sommets. En ce sens, Sarah parvint à s’affranchir des contingences du temps et à créer une unité cohérente entre les différentes périodes de sa vie. Cela nous enseigne que ce que nous accomplissons aujourd’hui n’affecte pas uniquement le présent mais également le passé et le futur.1

23:2 Sarah mourut à Kiryat Arba. Hébron était également appelé Kiryat Arba en raison des quatre géants qui habitaient l’endroit : les trois frères A’himane, Chechaï et Talmaï, et leur père. Le nom constitue également une allusion prophétique au fait que ce lieu était appelé à devenir la sépulture de quatre couplets éminents : Abraham2 et Sarah, Isaac et Rébecca,3 Jacob4 et Léa,5 ainsi qu’Adam et Ève (qui y reposaient déjà).

Sarah mourut. Durant toute la vie de Sarah, trois miracles permanents se produisaient de par son mérite : la lampe à huile qui se trouvait dans sa tente demeurait allumée d’un vendredi au suivant, bien qu’elle ne contenait qu’huile lui permettant de brûler un seul jour ; une petite quantité de pain cuit par elle suffisait à rassasier pleinement ; et une nuée, par laquelle se manifestait concrètement la Présence divine, se maintenait en permanence au-dessus de sa tente. Lorsqu’elle mourut, ces miracles cessèrent de se produire.6

Mériter ces trois miracles requérait quelques efforts méritoires préalables. Abraham et Sarah plantaient leur tente ; c’est seulement ensuite que Dieu manifestait Sa présence par la nuée qui se maintenait au-dessus d’elle. Sarah préparait la farine et allumait la lampe ; c’est seulement ensuite que les bénédictions de Dieu rendaient son pain miraculeusement bienfaisant et maintenaient la lampe allumée.

Cette leçon vaut pour nous. Si nous investissons notre plein effort, nous pouvons avoir la certitude que Dieu bénira les résultats et les amplifiera de façon miraculeuse.7

Bien plus : si Dieu l’avait voulu, il aurait pu faire que les bougies de Sarah brûlent sans interruption, mais en fait elles devaient être rallumées chaque veille de Chabbat. Cela nous enseigne que, quelque parfaite et miraculeuse qu’une chose apparaisse, elle peut toujours être à nouveau accomplie à un degré plus haut et plus sublime.8

23:3 Abraham parla. Bien qu’Abraham s’adressa avec déférence aux Hittites, il n’avait en même temps aucune intention de négocier : il affirma fermement sa position, et laissa entendre qu’il prendrait possession du lieu par la force de la loi s’ils refusaient de le lui vendre. Comme nous le voyons dans le dialogue qui suit, les Hittites respectèrent la détermination d’Abraham et ne mirent pas en question son droit sur cette propriété. De fait, ils ne lui offrirent pas uniquement le caveau funéraire mais le champ tout entier.

De façon analogue, chaque fois qu’il s’agit d’accomplir la volonté de Dieu, nous devons signifier notre position de façon respectueuse mais avec détermination, et faire clairement comprendre à toutes les voix qui tentent de s’y opposer – qu’elles soient issues de notre propre esprit ou qu’elles viennent de l’extérieur – que nous n’hésiterons pas à faire valoir nos pleins droits le cas échéant. Lorsque nous ne mollissons pas, la vérité de notre résolution fait de nos ennemis potentiels des amis et des alliés.

La chose est particulièrement vraie pour ce qui concerne notre droit sur le Pays d’Israël. Si les nations du monde nous entendaient proclamer sans ambages que le pays est le nôtre de par le droit divin, elles cesseraient de s’opposer à notre souveraineté sur lui ; bien plus, la sincérité de nos convictions ferait même d’elles nos alliés.9

23:9 Le caveau de Ma’hpélah. Cette grotte fut ainsi nommée car : (a) elle était jouxtée par une maison à deux niveaux, et (b) elle possédait des cryptes intérieures jumelles qui permettaient d’y ensevelir des couples.

Abraham dit aux Hittites qu’il souhaitait se faire l’acquisition de cette grotte car elle comportait également une place qui lui permettrait d’être enseveli auprès de Sarah, de même que des places pour les futurs couples patriarcaux.10

23:13 Je te donne l’argent pour le champ. Une autre raison pour laquelle Abraham insista pour ne pas acquérir le champ à titre gracieux, ou même pour un prix réduit, est qu’il voulait le défaire de tout lien avec ses précédents propriétaires. Lorsqu’une personne offre un cadeau, celui qui le reçoit reste éternellement le débiteur de celui qui l’a donné, quel que soit le degré de désintéressement de ce dernier. Aussi, le donneur conserve quelque lien avec le cadeau offert. En revanche, lors d’un achat il n’existe plus aucune dépendance à sens unique. Un échange mutuellement satisfaisant a été effectué, et le vendeur s’est virtuellement défait de tout lien avec l’objet vendu.

Ce fut pour la même raison que le roi David insista pour acheter le site sur lequel le Temple était appelé à être bâti, et ce, même s’il avait conquis ce lieu et qu’il lui avait été offert en cadeau par son propriétaire.11

De fait, les sages12 affirment que la souveraineté juive sur le caveau de Ma’hpélah, le Mont du Temple et la sépulture de Joseph à Che’hem ne peut être contestée car ils furent tous trois acquis13 en en payant le plein prix et sans objection de la part du vendeur.14

Je te donne l’argent pour le champ. Les objets saints ne sauraient être acquis « gratuitement », c’est-à-dire sans effort approprié.15 C’est la raison pour laquelle Abraham décida de payer le transfert de propriété au domaine de la sainteté.

De façon analogue, il a été assigné à chacun de nous une part du monde qu’il est de notre responsabilité de transférer au domaine de la sainteté. Nous devons le faire en en acquittant le « juste prix », avec beaucoup de travail et d’efforts. C’est seulement de cette façon que nous pouvons atteindre la finalité de notre présence dans ce monde.16

23:18 Le statut du champ et du caveau fut élevé. Nous apprenons d’Abraham que nous pouvons élever des objets physiques en les acquérant dans un but sanctificateur. En fait, la seule intention de faire usage d’un objet à des fins spirituelles le sanctifie et l’ennoblit, avant même que nous en fassions usage, tout comme le caveau de Ma’hpélah fut élevé de son précédent statut avant même qu’Abraham n’y ensevelisse Sarah.17

24:1 Abraham était âgé… et continua d’intérioriser profondément son vécu. Le vieillissement physique (les rides du visage, etc.) est en grande partie causé par le fait que nous permettons aux événements vécus par nous de nous affecter de façon excessive. D’ordinaire, lorsque les gens prennent de l’âge, ils développent un certain détachement envers les vicissitudes de la vie. Mais du fait qu’Abraham continua d’être profondément affecté par les événements, les années retentirent sur sa personne et leurs effets devinrent apparents. Dans cette perspective, la Torah nous dit qu’« Abraham était âgé… parce qu’il continua d’intérioriser profondément son vécu. »

Ici, nous pouvons considérer l’attitude d’Abraham comme une leçon sur la façon de ne pas se conduire. Nous devons, bien évidemment, aspirer à intérioriser profondément nos expériences comme il le fit. Mais en même temps nous devons avoir confiance en la protection de Dieu, et ne pas prendre trop à cœur les événements vécus par nous au point qu’ils nous fassent prendre physiquement de l’âge.18

D’intérioriser profondément son vécu. Selon nos sages, cette expression (littéralement « être avancé dans les jours ») signifie « avoir fait usage de tous ses jours pour accomplir les commandements de Dieu. »19

Comment la Torah peut-elle considérer tous les jours d’Abraham comme féconds, alors que nous savons qu’il fut élevé comme un idolâtre et qu’il ne reconnut l’existence de Dieu qu’à un certain moment de son enfance ?20 La réponse est que c’est précisément le culte des idoles qui conduisit Abraham à rechercher activement la vérité.21

24:3 Il n’est à présent pas seulement le Dieu des cieux mais également le Dieu de la terre. Au début, les gens sont disposés à accepter l’existence d’un « Dieu des cieux » abstrait et distant ; l’idée d’un « Dieu de la terre » personnel et intime, susceptible d’empiéter sur leur vie privée, est bien plus menaçante. Aussi, lorsqu’Abraham commença de diffuser son message de moralité divine, il n’avait pas d’autre choix que de le fonder sur le postulat de l’existence d’un « Dieu des cieux ». Néanmoins, il continua d’éduquer ses disciples jusqu’à ce qu’ils furent prêts à accepter également l’existence d’un « Dieu de la terre ».22

Nos activités quotidiennes peuvent être divisées entre celles qui sont d’ordre « céleste » et celles qui sont d’ordre « terrestre », autrement dit celles accomplies dans une perspective spirituelle et celles qui ont pour propos notre maintien physique ou le plaisir. Notre défi consiste à nous assurer que Dieu est tout autant le « Dieu de la terre » qu’Il est le « Dieu des cieux », c’est-à-dire d’être aussi conscients de Lui lorsque nous sommes investis dans des activités d’ordre physique que lorsque nous le sommes dans des activités d’ordre spirituel.23

24:4 Prendre une épouse. Les prophètes identifient la relation entre Dieu et le peuple juif à la relation entre un mari et son épouse.24 Dans cette perspective, nous sommes tous investis d’une mission comparable à celle qu’Abraham donna à Eliézer : d’aller au dehors pour trouver les âmes qui ont dérivé et les ramener à Dieu, leur « époux ».

Dieu accorde à chaque individu le libre arbitre, d’où il s’ensuit que notre succès dans ce domaine dépend autant de la personne que nous tentons d’influencer que de nos propres efforts. Mais il nous est aussi enseigné que, lorsqu’Il le veut, Dieu inspire aux individus de bonnes pensées qui les incitent à choisir le bien. Aussi, si, comme Eliézer, nous sommes entièrement dévoués à notre mission et prions Dieu pour qu’Il favorise son aboutissement,25 nous sommes assurés que Dieu couronnera de succès nos efforts sincères et notre persévérance.26

24:9 Alors le serviteur prêta serment. Eliézer, qui avait lui-même une fille, suggéra qu’Abraham l’envisage comme une épouse pour Isaac plutôt qu’une des filles d’Aner, Echkol ou Mamré. Cependant, Abraham lui dit : « Mon fils est béni, et toi, comme descendant de Canaan, tu es maudit.27 Les maudits ne sauraient s’unir par le mariage aux bénis. »28

Le serviteur. Comme nous l’avons vu, Eliézer était un homme vertueux : il était le serviteur loyal d’Abraham et son plus fidèle disciple, qui l‘aidait à diffuser ses enseignements. Néanmoins, Eliézer était un descendant de Canaan, dont la postérité avait reçu la malédiction d’être toujours esclave. L’essence de cette malédiction était que les descendants de Canaan manqueraient toujours de l’esprit d’autodétermination et se considéreraient toujours comme victimes de forces échappant à leur contrôle, des esclaves du destin ou des circonstances.

Une telle attitude est diamétralement opposée à la ferme conviction de la Torah que l’humanité est libre et affranchie de toute forme de prédestination morale. Quiconque ne se sent pas libre de ses actes – et donc responsable d’eux – ne saurait faire parti du peuple dont la mission divine est d’amener à l’humanité le message de la Torah d’espoir et de liberté morale.

Et, plus crucial encore, le spectre insidieux de la victimisation et de la prédestination est source de dépression : une personne qui se considère comme une victime désarmée et sans recours ne peut respirer la joie de vivre qui constitue le fondement de notre relation avec Dieu.29

24:10 ‘Harane. Comme Téra’h n’avait été qu’un monothéiste inavoué, il n’était pas parvenu à inspirer les siens de ses convictions. La plupart des membres de sa famille à ‘Harane continuaient de servir les idoles comme par le passé, bien qu’ils avaient connaissance des convictions monothéistes d’Abraham et leur manifestaient une certaine adhésion de façade. Rébecca, en revanche, avait très tôt reconnu le caractère insensé de l’idolâtrie et se consacrait à agir dans le sens du monothéisme par une conduite pénétrée d’éthique.

Nanti de la richesse entière de son maître. Bien qu’Isaac était déjà âgé de quarante ans à cette époque, Abraham ne s’épargna aucun effort susceptible de bénéficier à son fils, car il savait que son rôle parental ne connaissait pas de fin. Il va de soi qu’il arrive un moment où nos enfants doivent assumer la responsabilité de leur propre vie. Mais même alors, en tant que parents, nous restons tenus de nous impliquer dans leur vie pour les guider et les aider de toutes les manières possibles.30

24:11 En arrivant. Les sages comparent Rébecca du temps où elle se trouvait au foyer de ses parents à une « rose parmi les épines ».31 Les ronces ont pour vocation d’empêcher la rose d’être cueillie pendant qu’elle pousse, mais une fois qu’elle est assez épanouie pour être cueillie, elles ne sauraient continuer à la garder et à la protéger.

Aussi, avant que Rébecca n’atteigne l’âge d’être fiancée, Abraham n’avait aucun motif pour l’arracher à sa famille et à son environnement pervers, ni même d’engager une telle démarche. Mais une fois ce moment venu, il était périlleux d’y laisser demeurer Rébecca ne serait-ce qu’un jour de plus.

C’est pourquoi le voyage d’Eliézer devait être miraculeusement court, car d’un côté il ne pouvait pas partir un jour plus tôt, et de l’autre il ne pouvait pas revenir un jour plus tard. Ainsi, Dieu accéléra miraculeusement son voyage de sorte que Rébecca n’ait pas à demeurer un jour de trop à l’endroit où elle se trouvait.

Les « épines » parmi lesquelles Rébecca vivait savaient que c’est à son mérite qu’elles devaient leur subsistance divine, tout comme les épines ne doivent leur subsistance qu’à la vertu de protéger la rose. Aussi ne pouvaient-elles être que réticentes à toute tentative de la soustraire à leur protection. Elles n’y consentiraient qu’à condition d’être convaincues que c’était la volonté incontestable de Dieu qu’elle parte. Aussi Eliézer leur prouva-t-il que Dieu n’avait pas seulement fait aboutir sa mission, mais que son urgence était assez critique pour circonvenir les lois de la nature.32

À l’image de tous les événements vécus par les patriarches et les matriarches, celui-ci également préfigure la future rédemption de leurs descendants. Lorsque ce fut le moment pour les Juifs de quitter l’Égypte, Dieu les en fit sortir sans un instant de retard.33 Ainsi également, lorsque le moment tant attendu arrivera pour nous d’être délivrés de notre présent et ultime exil, Dieu ne nous retiendra certainement pas un instant de trop.34

24:15 Il n’avait pas fini de parler. La prière d’Eliézer exprima la conscience qu’il avait de ne pas pouvoir compter sur ses seules aptitudes pour accomplir sa mission. Dès lors qu’il affirma son propre effacement à Dieu, il lui fut donné le privilège d’être témoin des miracles que Dieu allait accomplir pour Abraham.35

Dans la mesure où nous faisons écho à la conscience d’Eliézer de sa dépendance de Dieu et orientons nos prières vers la révélation de l’unité de Dieu avec le monde, Dieu répond également à nos prières de façon immédiate, comme Lui-même le promet :36 « Avant qu’ils appellent, Je répondrai, et tandis qu’ils parleront encore, J’entendrai. »37

24:22 Un anneau nasal. Les cadeaux d’Eliézer à Rébecca, la première mariée de la première union mentionnée explicitement par la Torah,38 sont une allusion aux deux piliers sur lesquels un foyer et un mariage juifs doit reposer : l’accomplissement des commandements et l’étude de la Torah. Le don d’un demi sicle était une forme de charité, qui est le commandement quintessentiel ;39 ainsi, l’anneau nasal d’un demi sicle constitue une allusion à tous les commandements. Les deux bracelets caractérisent les deux tables sur lesquels Dieu grava les Dix Commandements, qui constituent la fondation de la Torah entière.40

Les Dix Commandements sont la seule section de la Torah qui fut gravée sur les tables ; le reste de la Torah fut écrit avec de l’encre sur du parchemin. Les lettres écrites sur du parchemin restent distinctes de leur support et peuvent être grattées ou effacées. Mais lorsqu’elles sont gravées sur une table, elles deviennent partie intégrante de la table et ne peuvent être séparées d’elle sans qu’une partie de la table elle-même soit détruite. En donnant un cadeau qui constitue une allusion aux Dix Commandements, Eliézer signifiait qu’un foyer juif doit être fondé sur un engagement envers la Torah aussi intrinsèque que des lettres gravées dans la pierre.41

24:52 L’ange qui accompagnait Eliézer lui enleva la vie. En ayant choisi de se conformer à son environnement idolâtre, Bethouel s’était rangé aux côtés des forces opposées au divin et au bien. Aussi, il y avait très peu de choses dans la vie de Bethouel qui pouvaient justifier qu’elle se poursuive excepté le fait d’avoir enfanté la vertueuse Rébecca, qui était destinée à devenir l’épouse d’Isaac. Cependant, au lieu de faciliter cette union, pour une obscure raison Bethouel choisit de s’y opposer. En agissant ainsi, il ne perdit pas seulement sa première raison d’exister, mais se montra encore comme la menace la plus sérieuse au progrès de la Création vers sa finalité divine. Il démentit ainsi toute justification de son existence et fut retiré de la scène.42

24:63 Il avait initié l’usage de prier également l’après-midi. Néanmoins Isaac ne souhaitait pas faire offense à son père en instituant formellement une nouvelle prière quotidienne, car cela aurait pu sous-entendre que les efforts dévoués de son père comportaient quelque déficience.43 Aussi Isaac priait-il dans les champs, en privé, même s’il est d’ordinaire préférable de prier en intérieur.44 Cependant, quand Abraham découvrit l’innovation de son fils, il l’adopta lui-même,45 et ainsi la prière de l’après-midi devint une institution.46

Prier l’après-midi. Nous récitons la prière du matin avant de commencer notre journée de travail, et la prière du soir, après avoir terminé nos activités de la journée. Par contraste, la prière de l’après-midi nous demande de nous interrompre au beau milieu de nos affaires ordinaires et de nous concentrer sur Dieu.

Nos activités quotidiennes ordinaires sont symbolisées par « le champ », le lieu situé en dehors des limites de la ville, qui est sauvage et inculte. En instituant la prière de l’après-midi, Isaac transforma « le champ » en un lieu de prière à Dieu.

La prière du matin caractérise indéniablement le renouveau quotidien de notre conscience du divin. Néanmoins, par la suite il reste à vérifier l’attitude qui sera la nôtre lorsque nous nous trouverons dans « le champ ». Les influences profanes et matériels du « champ » feront-elles disparaître en nous la conscience spirituelle et la proximité à Dieu que nous avons atteintes au cours de la prière du matin ? En interrompant le cours de nos activités ordinaires pour réciter la prière de l’après-midi, nous faisons la preuve que notre implication dans les activités d’ordre matériel ne nous défait pas de Dieu.47  

24:67 Dans la tente de Sarah sa mère. Quand Eliézer relata son voyage à Isaac, il souligna qu’il avait accompli la mission d’Abraham avec dévouement et de façon désintéressée, afin de dissiper le moindre doute dans l’esprit d’Isaac quant au fait que la jeune fille qu’il avait amenée était bien celle qu’Abraham lui destinait. Comme preuve, il décrivit tous les miracles que Dieu avait accomplis pour lui, y compris la façon dont il était arrivé à destination le jour même où il s’était mis en chemin, et que Rébecca se trouvait déjà à la source48 avant qu’il eût fini sa prière.49

Néanmoins, tout cela ne suffit pas à convaincre Isaac que Rébecca était digne de succéder à sa mère Sarah.50 Aussi, il commença par lui confier la conduite des affaires domestiques de son foyer. Dès le moment où elle assuma ce rôle, il devint clair que Rébecca était exactement comme Sarah, car les miracles permanents qui se produisaient quand Sarah était vivante se reproduisirent : la lampe à huile dans sa tente demeurait allumée d’un vendredi au suivant, même si elle ne contenait que la quantité d’huile nécessaire à durer un seul jour ; la petite quantité de pain qu’elle cuisait suffisait à rassasier ; et la nuée qui caractérisait la manifestation concrète de la Présence de Dieu était constamment présente au-dessus de sa tente.51 Constatant la façon dont elle était bénie dans ces domaines, Isaac fut pleinement convaincu que Rébecca était bien digne de succéder à sa mère Sarah et l’épousa.

Au sujet de la lampe, la loi juive dispose que, si la maîtresse de maison ne peut allumer les bougies du Chabbat pour quelque raison, son mari doit le faire à sa place.52 Comme, ainsi que nous le savons, Abraham observait tous les commandements,53 il allumait les bougies du Chabbat après le décès de Sarah. Et pourtant, malgré son immense vertu, ces bougies ne demeuraient pas allumées tout au long de la semaine comme celles de Sarah.

Cela atteste le pouvoir unique des femmes et des filles juives, qui sont toutes des « filles » de Sarah et Rébecca. Bien que la lumière produite par leurs bougies ne soit physiquement visible que pour un temps limité, leur illumination spirituelle se poursuit durant la semaine entière.

Il est instructif de remarquer que ce miracle et les autres se reproduisirent avant même que Rébecca n’épouse Isaac.54 Ainsi, nous pouvons voir Rébecca âgée de trois ans allumant les bougies de Chabbat comme un précédent à l’usage de faire que des jeunes filles non mariées, dès l’âge de trois ans, allument les bougies de Chabbat en plus de celles allumées par leur mère.55 Cela apportera la lumière spirituelle si nécessaire à leur maison et, en définitive, au monde entier.56

25:6 Vers l’orient. Comme ces contrées pullulaient de sorciers et d’autres gens de la sorte,57 Abraham enseigna aux fils de Agar la façon de se protéger des puissances spirituelles impures.58 Ces progénitures diffusèrent au moins une forme diluée de l’héritage spirituel d’Abraham dans leurs nouvelles patries. Abraham renvoya également Ichmael avec ses autres fils de Agar, mais il revint quelque temps avant la mort de son père.59

25:9 Ichmael, par déférence, lui permit de conduire. Bien qu’Ichmael s’était repenti avant les obsèques d’Abraham,60 la Torah n’en fait pas mention plus tôt. La raison est que la faute essentielle d’Ichmael avait été d’affirmer que, du fait qu’il était le premier-né, il devait recevoir une double part de l’héritage.61 Aussi, la preuve qu’il s’était sincèrement repenti ne vint qu’après la mort d’Abraham, lorsqu’il eut la possibilité de revendiquer son double héritage en tant que premier-né et qu’il ne le fit pas. En permettant à Isaac de marcher devant, Ichmael montra qu’il s’était véritablement repenti, car il reconnaissait ainsi qu’Isaac était l’héritier légitime d’Abraham.

Il est approprié que le repentir d’Ichmael soit précisément mentionné dans la parachah ‘Hayé Sarah, car son changement d’attitude est à mettre au crédit de Sarah. Son insistance à discipliner Ichmael finit par le conduire à se repentir et à reconnaître la vérité de la primauté d’Isaac. En suivant l’exemple de Sarah, nous ne devons jamais désespérer ou hésiter à amender et assister ceux qui ont véritablement besoin de notre aide dans le défi permanent de l’ennoblissement personnel.62

25:12 Agar l’Égyptienne, la servante de Sarah. Avant d’évoquer la grandeur d’Ichmael et d’énumérer ses nombreux descendants, la Torah réitère son statut inférieur pour deux raisons : (a) afin que ses descendants se souviennent que leur ancêtre n’était que le fils de la servante de Sarah, autrement dit qu’ils ne pouvaient rien revendiquer du droit d’aînesse d’Abraham et Isaac ; et (b) de sorte que les descendants d’Isaac ne soient pas intimidés par les descendants d’Ichmael.63

25:18 Il s’étendit à travers le domaine de tous ses frères. Littéralement, le texte hébreu se lit : « Il tomba à travers le domaine… » Ichmael était la version « déchéante » d’Abraham. Abraham incarnait l’amour sanctifié – l’amour de Dieu et la bonté pour autrui. Ichmael incarnait la forme « déchéante » de l’amour, un désir obsessionnel de la réalité physique et sensuelle. Dans notre propre vie, il est de notre devoir de transformer notre amour pour les objets matériels – l’amour déchéant d’Ichmael – en un amour sanctifié pour Dieu.64