La Paracha Béhaalotekha s’ouvre avec le commandement à Aaron d’allumer les lampes de la Ménora, le candélabre à sept branches qui se dressait dans le Sanctuaire. Le symbolisme de la Ménora et de l’acte d’allumage est le thème que le Rabbi aborde dans ce discours, ainsi que l’exemple que représente le service d’Aaron.

L’amour d’Aaron

Aaron, dont les devoirs comme Grand-Prêtre sont décrits dans notre Paracha, était connu pour l’amour qu’il portait à chaque créature. Hillel dit de lui dans la Michna : « Sois l’un des disciples d’Aaron, aimant la paix et recherchant la paix, aimant tes semblables et les attirant vers la Torah. »1

Quel fut le trait particulier de son mode de vie, qui représente un exemple suprême de diffusion de la lumière spirituelle de la Torah ? C’est celui-ci : il n’attendait pas que ceux qui se tenaient dans les ténèbres s’avancent d’eux-mêmes dans le cercle de lumière ; il allait, lui, vers eux. Selon les termes de Hillel, il allait vers ses « semblables », c’est-à-dire y compris ceux dont l’unique mérite était d’être, eux aussi, des créations de D.ieu.2 Mais néanmoins, il « les rapprochait de la Torah » plutôt qu’il ne rapprochait la Torah d’eux. Il ne simplifiait pas les exigences de celle-ci ni ne tolérait de compromis pour la faire descendre à leur niveau. Il n’abaissait pas la Torah, il élevait les hommes.

Cet aspect de la vie d’Aaron est suggéré dans notre Paracha, qui débute avec le commandement : « Lorsque tu allumeras (littéralement élèveras) les lampes, les sept lampes devront projeter leur lumière vis-à-vis de la face du candélabre. »3

Les lampes de la Ménora du Sanctuaire sont un symbole de l’âme juive — « L’âme de l’homme est la lampe de l’Éternel ».4 Et les sept lampes, les branches de la Ménora, sont les sept espèces de l’âme juive.5 La tâche d’Aaron était d’élever chaque âme, de faire apparaître le Divin à l’intérieur du Juif, Divin dissimulé dans son subconscient.

Nos Sages ont cherché une explication au fait que le mot « élèveras » (בְּהַעֲלֹתְךָ) est employé au lieu de celui plus évident de « allumeras ». Et ils ont conclu que le verset signifiait qu’Aaron devait les allumer « jusqu’à ce que la flamme monte d’elle-même ».6

L’accomplissement spirituel d’Aaron n’était donc pas seulement d’allumer la flamme dans les âmes du peuple juif, mais aussi de les amener au stade où elles donneraient d’elles-mêmes de la lumière. Il ne fit pas que créer simplement des disciples, des hommes dépendant de son inspiration ; il engendra en eux un amour de D.ieu qu’ils pouvaient soutenir sans son aide.

Trois règles

Trois règles s’appliquaient à la Ménora dans le Sanctuaire et dans le Temple7 :

La première : même un homme qui n’était pas un prêtre pouvait allumer les lampes.

La deuxième : mais seulement un prêtre pouvait préparer les lampes, prenant soin des mèches et de l’huile.

La troisième : la Ménora pouvait être allumée seulement dans le Sanctuaire du Temple.

Ces règles sont similaires aux conditions requises pour l’éveil spirituel, l’allumage de la lampe de l’âme.

D’abord, ce n’est pas la prérogative du prêtre seul, ou de quelques élus, de répandre la lumière de la Torah. La tâche revient à chaque Juif, tant comme privilège que comme obligation. Les paroles de Hillel « Sois l’un des disciples d’Aaron », s’adressaient à chaque individu.

Mais seul le prêtre peut se charger de la préparation. Nous pourrions être tentés de penser que, dans la poursuite du but pour amener les Juifs à une vie de Torah, la fin justifie les moyens ; que des concessions peuvent être faites, de notre propre initiative, afin d’entraîner plus facilement nos frères. Mais un avertissement, qui dit que quiconque n’est pas habilité à décider quelles interprétations et quelles lignes d’influences sont valables, s’y oppose.

Qu’est-ce qu’un prêtre ? À l’époque du Temple, quand les Juifs possédèrent pour la première fois leur pays, les prêtres n’y avaient aucune part. « D.ieu est son héritage », le seul bien qu’il possède. Là était sa sainteté. Et selon les termes de Maïmonide8 : « Non seulement la tribu de Lévi, mais aussi tout homme, d’où qu’il vienne, dont l’esprit est bien disposé et prêt à se tenir devant D.ieu, à accomplir Son ministère et à Le servir », lui, et lui seul, est le guide sur les traces duquel nous devons marcher.

Et le lieu où les lampes doivent être allumées est le Sanctuaire. Il y a différentes teintes, différents niveaux de sainteté. Le Sanctuaire n’est pas le seul lieu saint. Mais cette tâche spécifique d’allumer la flamme ne peut être accomplie en un lieu d’un degré de sainteté moindre. Nous devons éveiller l’esprit, en nous-mêmes et chez les autres, au plus haut degré possible de sainteté.

La Ménora dans le Sanctuaire avait sept branches, et celles-ci représentent les sept espèces d’âmes juives. Certaines de ces âmes ont la vocation de servir D.ieu avec amour et bonté (‘Hessed), certaines avec crainte et rigueur (Guevoura), d’autres sont la synthèse des deux (Tiféreth). Il y a, en tout, sept voies générales menant au service de D.ieu, et chaque Juif en a une qui constitue sa direction personnelle. Mais ce qui est commun à toutes, c’est le fait qu’elles sont éclairées par la flamme de la Torah : elles brûlent avec amour, et répandent la lumière de la vérité à l’intérieur du Sanctuaire, et de là au monde entier.

Les « grands-prêtres » contemporains

Le Temple avait une particularité : ses fenêtres étaient « larges et étroites »,9 ce que nos Sages commentent10 ainsi : « Elles étaient larges à l’extérieur et étroites à l’intérieur, car Je n’ai nul besoin de lumière. » Contrairement à d’autres constructions dont les fenêtres sont dessinées pour capter la lumière, le Temple, lui, était construit pour envoyer la lumière au-dehors, dans le monde.

La source de cette lumière était les lampes — les âmes des Israélites. Et, bien que chacune d’elles fût unique, dotée de ses propres aptitudes pour accomplir sa tâche, elles avaient de commun qu’elles étaient toutes des sources de lumière.

Tel est l’objectif poursuivi par chaque Juif : apporter la lumière de la Torah au monde. Les moyens employés peuvent être différents de l’un à l’autre — certains abordant leur tâche par le moyen de la rigueur, d’autres par celui de l’amour. Mais pour ceux qui choisissent la voie de l’amour, les fins et les moyens sont les mêmes : le but est la lumière, et la voie est la lumière. Ce fut la voie d’Aaron, qui « aimait la paix et recherchait la paix, aimant son prochain et le rapprochant de la Torah ». Tels ont également été les grands chefs de ‘Habad, allumant la flamme assoupie dans les âmes des Juifs, où qu’ils pussent les trouver, préférant être proches plutôt qu’éloignés, bons plutôt que sévères, dans leurs efforts pour rapprocher notre peuple de la Torah.

(Source : Likoutei Si'hot, Vol. II, p. 314-318)