L'origine de l'idolâtrie
Le 17 Tamouz, quarante jours après la Réception de la Torah au mont Sinaï, le grave péché du Veau d'Or manqua d'anéantir le peuple juif.
Il est difficile de comprendre comment un tel fait put se produire si peu de temps après que le peuple juif eut entendu le second des Dix Commandements :
« Tu n'auras pas d'autres dieux devant Ma face. Tu ne te feras pas d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre. Tu ne te prosterneras pas devant elles, et tu ne les serviras pas... »
Les Enfants d'Israël étaient encore au pied du mont Sinaï, et le second Commandement devait encore résonner à leurs oreilles quand fut confectionné le Veau d'Or. Comment purent-ils s'oublier au point de commettre une action si grave ?
Nombreuses sont les explications ; elles se résument cependant à une seule : la nature humaine est telle que l'homme est capable des crimes les plus inconcevables s'il consent à se laisser égarer par l'inclination au mal qui est en lui, ou par l'influence de ceux qui l'entourent.
Les débuts de l'idolâtrie remontent, nous disent nos Sages, au temps d'Enoch, petit-fils d'Adam le premier homme, que D.ieu créa à Son image. Cela ne prit pas d'emblée la forme d'une négation totale du Créateur et Maître du monde. On commença par penser qu'Il était trop grand et trop saint pour s'intéresser aux affaires humaines et aux choses matérielles d'ici-bas, et l'on vit en D.ieu une sorte de grand et puissant monarque qui gouverne son empire par l'intermédiaire de ministres et de fonctionnaires nombreux. Or, ces ministres et ces fonctionnaires peuvent intercéder efficacement auprès du souverain en faveur d'un sujet donné, si ce dernier, par une attitude ou des actions appropriées, sait les gagner à sa cause. Ainsi fut-on amené à considérer le soleil et la lune, le vent et la pluie, les montagnes et les arbres, les bêtes et les oiseaux, comme des sortes de « dieux » qu'il fallait apaiser ou rendre propices pour attirer sur soi leurs faveurs.
De là à l'idolâtrie proprement dite, il n'y avait qu'un pas. Bien vite les hommes se taillèrent leurs propres idoles, images du soleil, de la lune et d'autres semblables, d'or, d'argent ou de bois, qu'ils transportaient partout avec eux. À ces idoles, ou à la « puissance » qu'elles représentaient, ils adressaient leurs prières. Ils en vinrent à croire qu'il y avait un « dieu » différent ou une puissance différente pour chaque chose. Il y eut le dieu de la fertilité pour leurs champs, le dieu de la guerre, dont dépendait la victoire ou la défaite, et ainsi de suite.
Le premier de sa génération
Quand Abraham naquit, presque tous les hommes de cette génération étaient idolâtres. Même son propre père Téra'h n'y faisait pas exception. Abraham fut le premier de sa génération à reconnaître qu'il y a un D.ieu unique qui règle le sort de chaque individu, Qui sait et gouverne toute chose en ce monde, et que Lui seul devait être adoré. D.ieu fit un pacte d'alliance avec Abraham, engageant ce dernier et ses descendants à garder à jamais leur foi en un D.ieu unique ; la récompense en serait la Terre Sainte qu'ils auraient en héritage, et qu'ils seraient une nation sainte, c'est-à-dire une inspiration et une bénédiction pour le monde entier. Pour réaliser cette promesse, D.ieu fit sortir d'Égypte les Enfants d'Israël au moyen de miracles extraordinaires et, sept semaines plus tard, Il leur donna la Torah au mont Sinaï. Quarante années plus tard, ils devaient entrer en Terre Promise et s'y établir.
Cependant, au cours des 210 ans que dura leur esclavage en Égypte, les Enfants d'Israël subirent l'influence des Égyptiens, une nation d'idolâtres de la pire espèce. Il n'y avait pratiquement rien qu'ils n'adorassent. Pharaon lui-même était pour eux un dieu. Aussi, les enseignements d'Abraham, d'Isaac et de Jacob furent oubliés pour un temps, sauf au sein d'une famille, celle de Lévi, fils de Jacob, l'ancêtre d'Aaron et de Moïse. D.ieu choisit comme messagers Aharon, Moïse et Miriam pour délivrer le peuple juif de l'esclavage en Égypte, et Moïse pour recevoir la Torah et nous la donner.
À cette sortie triomphale des Juifs du pays des Pharaons se joignirent un mélange d'autres peuples (le « erev rav ») formés aussi bien d'esclaves que de princes. Parmi eux des magiciens et des sorciers qui n'avaient pas complètement renoncé à leurs idées et à leurs pratiques. Ce furent ces étrangers au sein du peuple juif qui l'égarèrent quand Moïse disparut sur le mont Sinaï pour quarante jours et quarante nuits. Et bien qu'environ trois mille personnes seulement, la plupart appartenant au erev rav, eussent pris part à l'adoration du Veau d'Or, toutes les tribus d'Israël, sauf celle de Lévi, se trouvèrent impliquées dans ce crime. Toutefois, les Enfants d'Israël s'étant repentis et ayant regretté sincèrement leur faute, D.ieu leur pardonna. Cela fut pour nous la grande leçon du pardon divin et du pouvoir de la repentance : quelque graves que soient nos péchés, il suffit que nous retournions sincèrement à D.ieu pour qu'il nous pardonne, de manière que nous puissions recommencer une vie sans tache.
Plusieurs formes d'idolâtrie
Mais l'idolâtrie a-t-elle était complètement effacée ? Ou bien la pensée des hommes est-elle toujours accordée à celle des anciens idolâtres ? Adorent-ils encore des idoles ?
La réponse dépend du sens que l'on donne à ce dernier mot. Si par lui on entend des images d'or, d'argent ou de bois, alors on peut affirmer sans crainte d'erreur qu'il n'y a actuellement aucun Juif au monde qui soit idolâtre. Il est toutefois d'autres formes d'idolâtrie. En fait, tout ce qui nie D.ieu est, d'une manière ou d'une autre, une forme d'idolâtrie.
De même, nos Sages ont enseigné que celui qui se laisse envahir par la colère est considéré, pour ce laps de temps, comme idolâtre. Quel rapport y a-t-il entre la colère et l'idolâtrie ? La réponse est simple : quand il a été fait du mal à un homme, que ce soit par accident ou intentionnellement, cela éveille en lui la colère. Mais qu'il s'arrête un instant pour réfléchir à cette vérité : que rien n'arrive sans que D.ieu en ait connaissance, et le voilà qui découvre que ce mal dont il a souffert ne peut être qu'un effet de la volonté divine, et qu'il devait le mériter, puisque D.ieu est juste. Ce mal, il ne pouvait l'empêcher ; il l'aurait assurément subi, que ce soit de la part de l'homme qui le lui a fait ou d'un autre. (Ce qui ne veut pas dire que celui par lequel le mal est arrivé soit dégagé de toute responsabilité. Loin de là. Quand un homme cause un préjudice à un autre, celui qui l'a subi a droit à dédommagement, car tout homme est responsable de ses actes). Celui qui croit réellement en D.ieu ne se laissera jamais gagner par la colère ; il éprouvera plutôt un sentiment de repentance.
Nos Sages ont condamné encore plus sévèrement la haine sans fondement. Celle qu'on nourrit sans raison aucune. Ainsi ont-ils déclaré : « Le premier Beth Hamikdache fut détruit à cause des péchés d'idolâtrie, d'immoralité et de meurtre. Le second, bien que la Torah fût étudiée et les commandements observés tant qu'il dura, fut détruit à cause de la haine sans fondement qui régnait à cette époque. L'enseignement est clair : un tel sentiment est semblable à l'idolâtrie, l'immoralité et le meurtre mis ensemble. » (Yoma 9b)
La colère, la haine, voilà deux parmi les formes d'idolâtrie dont nous devons nous garder. C'est la leçon pratique du Dix-Sept Tamouz. Si la haine non fondée a été cause de la destruction du Beth Hamikdache, alors l'amour sans raison particulière, l'amour « gratuit » – l'amour pour nos frères juifs sans autre raison que parce qu'ils sont juifs – amènera sa réédification par l'intermédiaire de notre juste Machia'h, puisse-t-il venir rapidement en notre temps.
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