Dans le calendrier grégorien civil, tous les quatre ans, un jour supplémentaire est ajouté au mois de février, puisque la révolution solaire prend presque 365 jours et un quart : c’est « l’année bissextile ». Le système d’« année embolismique » juive est nettement plus complexe – et pour cause !
Pour que les fêtes conservent leur position par rapport aux saisons, un ajustement doit être effectué...D’une part, la Torah commande de suivre les nouvelles lunes et de tenir un calendrier lunaire (voir Exode 12,2). Étant donné que le cycle lunaire est d’environ 29,5 jours, une année lunaire de 12 mois contient 354 jours (les mois alternent entre 29 et 30 jours de longueur ; en effet, un mois ne peut pas compter 29,5 jours, pas plus qu’une année calendaire ne peut compter 365 ¼ jours). Une conséquence de la tenue d’un calendrier strictement lunaire serait que nos fêtes (comme c’est le cas des fêtes musulmanes) se produiraient 11 jours plus tôt chaque année par rapport au cycle solaire, et ainsi, tous les trois ans tomberaient plus d’un mois solaire plus tôt, et tous les neuf ans, une saison entière plus tôt.
Cependant, il est également spécifié dans la Torah que Pessa’h doit toujours être célébré au printemps (Deut. 16,1) et Soukkot en automne (ibid. 16,12).
Ainsi, pour que les fêtes conservent leur correspondance avec les saisons, un ajustement doit être fait pour permettre au calendrier lunaire de maintenir l’harmonie avec le cycle solaire, et une disposition remarquable est prise : dans les 3e, 6e, 8e, 11e, 14e, 17e et 19e année de chaque cycle de 19 ans, un mois entier est ajouté avant le mois où tombe Pessa’h – pas juste un jour.1 On nomme une telle année « chana mé’oubéreth », ce qui signifie littéralement « une année enceinte ».
... enceinte d’un treizième mois et aussi de sens supplémentaire...Cette année – 5784 – est une telle année, la sixième du cycle actuel de 19 ans, enceinte d’un treizième mois et aussi de sens et de potentiel de croissance supplémentaires. Voyons ensemble l’une des leçons intéressantes qui peuvent être tirées de la « réconciliation » du soleil et de la lune et considérons ses applications pratiques pour notre vie :
Les cycles lunaire et solaire symbolisent deux principes spirituels de base, à savoir, la constance et l’innovation.
Le soleil symbolise la stabilité en ce que la quantité de lumière qu’il projette chaque jour est constante. Le « pôle solaire » dans nos vies est notre modèle régulier d’observance et nos principes et objectifs primordiaux. Ce sont des domaines où il est important d’être constant et inébranlable.
La lune symbolise le changement en ce que la quantité de lumière qu’elle reflète varie continuellement. Ainsi, le « pôle lunaire » dans nos vies est l’aspiration à l’amélioration, au progrès et à la croissance, ainsi que l’expression de notre créativité.
Le service de D.ieu est complet lorsque ces pôles opposés deviennent complémentaires...Chaque type de service – celui qui est constant et celui qui est changeant – possède certains avantages. Lorsque les mitsvot sont accomplies avec constance sur une certaine durée, la répétitivité elle-même conduit à ce que le service devienne une partie de notre nature même (voir Michna Avot 4:2).
Le service de D.ieu est complet lorsque ces pôles opposés deviennent complémentaires, tout comme le soleil et la lune jouent un rôle égal dans la fixation du calendrier juif et de ses fêtes. Les mitsvot dont l’accomplissement est nouveau pour nous (ou les niveaux plus élevés d’observance de celles que nous accomplissons déjà) doivent devenir des engagements durables, et celles auxquelles nous sommes déjà habituées doivent être effectuées chaque fois avec l’enthousiasme habituellement réservé aux premières fois.
Le treizième mois
Considérons à présent le mois qui est ajouté. Fait intéressant, il porte le même nom que le douzième mois : Adar. Ainsi, lors de chaque « année enceinte », nous avons un Adar I et un Adar II. Deux mois complets de tout ce qu’Adar implique. Quelle merveilleuse particularité !
Adar est le mois de la bonne fortune du peuple juif...Adar, le mois de la fête de Pourim, est le mois de la bonne fortune du peuple juif. Cela est même intégré dans la loi juive, où il est recommandé qu’un litige que l’on pourrait avoir avec un non-juif soit programmé pour Adar. C’est aussi le mois de la joie, comme il est écrit : « Dès qu’Adar commence, augmentez la joie ! »
S’il devait survenir quelque chose qui paraisse malchanceux ou malheureux, ne soyez pas désillusionné. Tout comme, par exemple, le bouillon de poulet n’est pas rendu non-casher par le lait qui s’y renverse si la proportion de bouillon par rapport au lait est au moins soixante fois supérieure, auquel cas le mélange tout entier, y compris le lait qu’il contient, est considéré comme apte à être consommé et ne doit pas être jeté, de même les soixante jours consécutifs de bonne fortune et de joie d’Adar non seulement « avalent » toute événement d’apparence désagréable pendant cette période, mais peuvent même rendre ceux-ci digestibles et, en fin de compte, savoureux.
Soixante jours durant (cette année, du 8 février au 8 avril 2024), il y a une mitsva d’accroître la joie. Puissent tous nos lecteurs prendre cette mitsva très au sérieux. Si vous voulez être super orthodoxe en la matière, il convient d’être chaque jour d’Adar plus joyeux que le jour précédent. Puisse D.ieu nous aider tous à accomplir cela en hâtant notre joie ultime, la rédemption complète du peuple juif.
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