Roch Hachana est plus qu’une simple fête, c’est le Jour du Jugement. C’est pourquoi la salutation traditionnelle en ce jour n’est pas « joyeuse fête » ni même « bon yom tov » ou « ‘hag saméa’h », mais plutôt « chana tova » ou, en yiddish, « a gout yohr » (« bonne année »). Le tribunal céleste décide de notre destin et détermine notre sort pour la nouvelle année, alors nous nous souhaitons les uns aux autres que ces jours de jugement se passent bien, et que chacun de nous soit béni de n’avoir que des bonnes choses pour la nouvelle année.
Et s’il n’y avait pas de période dédiée à l’introspection et l’auto-évaluation ?Et c’est précisément ce qui rend nos observances du Nouvel An si distinctement différentes de celles de tant d’autres à travers le monde. Pour les Juifs, le Nouvel An est joyeux, mais grave également. Pas de fête toute la nuit pour nous. Pas de réjouissances ivres lorsque l’horloge sonne minuit. Je me suis d’ailleurs souvent demandé si les fêtards du Nouvel An passent une inoffensive nuit de fête et d’amusement ou bien s’ils noient inconsciemment leur chagrin dans l’alcool en faisant le deuil de l’année écoulée et de tous les rêves qu’elle n’a pas vu se réaliser.
Et je me suis aussi souvent demandé ce que nous, les Juifs, ferions sans Roch Hachana. C’est le temps du ‘hechbone hanefech (l’état des lieux spirituel), lorsque nous faisons l’inventaire de nos moments les plus personnels et les plus intimes. Nous méditons sur l’année écoulée, sur nos succès et nos échecs. Nous considérons et reconsidérons notre relation avec D.ieu et avec les autres. Nous nous efforçons d’identifier nos faiblesses pour pouvoir les corriger afin que l’année à venir soit meilleure que la précédente. Nous faisons amende honorable avec ceux que nous avons peut-être blessés dans l’année écoulée. Nous mettons fin aux rancunes mesquines et autres faribels (griefs) de la vie, et nous aspirons à un avenir meilleur, plus heureux, plus serein et plus paisible.
Mais si nous n’avions pas Roch Hachana ? S’il n’y avait pas de période dédiée à l’introspection et à l’auto-évaluation ? La créerions-nous de nous-mêmes ? Et, dans la négative, arriverions-nous à nous extraire de l’ornière dans laquelle nous nous enlisons au fil d’une longue et dure année ? Je suppose que nous poursuivrions tout simplement la même routine de vie ennuyeuse jusqu’à ce que quelque chose de radical survienne à l’improviste et nous sorte de notre léthargie.
Sans Roch Hachana, nous arriverait-il de prendre le temps d’examiner si notre façon de vivre est vraiment celle que nous souhaitons ? Nous arriverait-il de prendre une pause pour réévaluer notre plan de vie ? Il semble plutôt que nous continuerions notre course aveugle et sans fin.
Nous arriverait-il de prendre le temps d’examiner si notre façon de vivre est vraiment celle que nous souhaitons ?Roch Hachana est un moment où nous sommes obligés de lever la tête et de prendre conscience, de freiner le médiocre carrousel de la vie et de nous écrier : « Arrêtez le monde, je veux descendre ! » Ces Jours Solennels nous obligent à penser à la vie, à nous-mêmes, à nos familles, à nos relations et à notre mode de vie. Et si nécessaire, à faire une réévaluation. Ils nous donnent l’occasion de regarder notre boussole pour établir notre sens de l’orientation de sorte que, si besoin était, nous pourrions modifier notre cap et corriger notre itinéraire. Comment la voix qui sort de notre GPS le dit-elle ? « Recalcul en cours ». La plupart d’entre nous ont besoin de recalculer leur course de temps à autre.
Ainsi, si nous n’avions pas cette invitation et cette possibilité de nous livrer une fois par an à une introspection personnelle, quelles seraient les chances que nous le fassions de nous-mêmes ? Probablement très ténues. Eh bien, D.ieu merci, nous avons Roch Hachana. Et c’est maintenant le moment faire ce fameux inventaire. Ou bien, comme l’a dit le légendaire Hillel dans les Maximes des Pères : « Si ce n’est pas maintenant, alors quand ? »
Dans notre monde chaotique et souvent fou, nous devons apprécier et saisir cette merveilleuse opportunité. Honnêtement et vraiment, que ferions-nous sans Roch Hachana ?
Je souhaite à mes lecteurs, à notre communauté, au monde entier, une chana tova. Puissions-nous tous être inscrits dans le Livre de la Vie pour une nouvelle année heureuse, saine, paisible, prospère, sûre et spirituellement enrichissante.
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