Parmi les milliers de convives qui prirent part au festin donné par le roi Assuérus se trouvaient dix-huit mille cinq cents Juifs. Ils mangèrent tous de la nourriture non cachère et burent également du vin non cachère.

Alors Satan, l’ange accusateur, parut devant le Tout-Puissant et dit : « Seigneur et Maître de l’Univers ! Jusqu’où ira Votre patience à l’égard de Votre peuple ? Ils Vous ont oublié, ils Vous ont abandonné. Ils pèchent et ne montrent aucun signe de repentir. Il faut en finir avec eux ! »

À quoi D.ieu répondit : « Si Je t’écoute, si Je fais comme tu dis, qui veillera sur ma Torah ? »

– Les anges étudieront Votre Torah, répliqua Satan.

D.ieu dit alors :

– Très bien, Satan. Va chercher un rouleau, et la cour céleste rédigera le décret ordonnant la destruction de Mon peuple.

Satan disparut avec la rapidité de l’éclair et ne tarda pas à reparaître avec son rouleau. Et D.ieu rédigea le décret.

Sitôt que la nouvelle se répandit, la Torah revêtit sa robe de deuil et parut en hâte devant le Tout-Puissant. Les yeux inondés de larmes, elle implora D.ieu d’avoir pitié du peuple juif. Au même moment, le prophète Élie s’empressa d’aller trouver les Patriarches Abraham, Isaac et Jacob, et les supplia en ces termes : « O saints Patriarches ! Comment pouvez-vous dormir en paix pendant que vos enfants sont en si grand péril ? Même le ciel et la terre sont bouleversés par le terrible décret suspendu sur leurs têtes ! »

– Pourquoi ce décret a-t-il été décidé ? demandèrent les Patriarches. Une raison grave a dû le motiver.

–  Le péché des Juifs est d’avoir pris part au festin donné par le roi Assuérus, leur répondit Élie.

–  Dans ce cas, que pouvons-nous faire ? dirent tristement les Patriarches.

Dans le désespoir, Élie courut chez Moïse et l’implora : « Fidèle Berger ! Tant de fois tu as sauvé le peuple juif. Je t’en supplie, sauve-le cette fois encore ! » Et Élie raconta à Moïse toute la triste histoire.

– Y a-t-il au moins un homme vertueux parmi les Juifs d’aujourd’hui ?, demanda Moïse.

– Oh ! oui, répondit vivement Élie. Mardochée le Juif. C’est un homme sincèrement vertueux.

– S’il en est ainsi, dit Moïse, il n’y a pas de temps à perdre. Cours chez Mardochée. Qu’il incite les Juifs à la prière et à la repentance. De mon côté, je ferai au ciel tout ce qui est en mon pouvoir pour obtenir en leur faveur le pardon de D.ieu.

Élie se hâta d’aller chez Mardochée. Quand ce dernier apprit la nouvelle du funeste décret, il couvrit sa tête de cendres et se précipita dans les rues de Chouchane en poussant des cris pleins d’amertume.

– Qu’y a-t-il ? demandèrent les Juifs.

– Une atroce calamité va s’abattre sur nous, répondit Mardochée, les larmes aux yeux.

Quand les Juifs apprirent l’affreuse nouvelle, des lamentations angoissées et unanimes se firent entendre.