Ben Zoma disait :
Qui est sage ? C’est celui qui apprend de chaque homme, car il est dit (Psaumes 119, 99) : « C’est par tous ceux qui m’ont enseigné que je me suis instruit. »
Qui est un héros ? C’est celui qui domine ses penchants…
Qui est riche ? Celui qui se réjouit de son sort, ainsi qu’il est dit (Psaumes 128, 2) : « Si tu te nourris du travail de tes paumes, tu seras heureux, et ce sera bien pour toi. » Tu seras heureux : dans ce monde ; ce sera bien pour toi : dans le Monde Futur.
Qui est honoré ? C’est celui qui honore les créatures, ainsi qu’il est écrit (Samuel I 2, 30) : « J’honore ceux qui M’honorent... »
(Chapitre 4:1)
Un homme sage voit – de par sa finesse d’esprit – les faiblesses et les défauts des autres personnes. Il serait donc naturel qu’il regarde ceux qui sont moins instruits que lui avec une certaine condescendance.
Cependant, Ben Zoma vient nous apprendre que le véritable sage est celui qui concentre son attention sur les caractères positifs des autres personnes. Il est alors capable de découvrir des traits positifs de chacun, car chaque homme a été créé à l'image de D.ieu, et possède donc des vertus innées.
C’est précisément en s’efforçant d’apprendre des qualités que l’autre possède que le sage découvre de nouveaux horizons et accroît sa propre sagesse.
Chabbat Kora’h 5740
Qui est riche ? Celui qui se réjouit de son sort, ainsi qu’il est dit (Psaumes 128, 2) : « Si tu te nourris du travail de tes paumes, tu seras heureux, et ce sera bien pour toi. » Tu seras heureux dans ce monde ; ce sera bien pour toi dans le Monde Futur.
Ce verset des Psaumes apporte une précision sur l’enseignement de Ben Zoma : la clé du bonheur dépend du fait que le travail soit produit par « les paumes ». Ceci implique que l’homme n’engage que ses forces extérieures dans sa vie professionnelle. Il réservera son cœur et son esprit pour des sujets plus importants, pour son élévation spirituelle.
Le roi David promet dans ce verset que le résultat de cette approche sera « le bonheur dans ce monde ». En revanche, l’engagement démesuré dans le monde des affaires pourra, certes, apporter une réussite matérielle, mais pas le bonheur absolu. Celui-ci ne sera atteint que par les réalisations et les transformations personnelles motivées par des buts spirituels.
Extrait de Likoutei Si’hot vol. I
Cette Michna comporte un enseignement extraordinaire : elle définit le sage, le héros, le riche et l’honoré ; or, ces définitions sont complètement à contre-courant des idées reçues. Ainsi, le sage est celui qui cherche encore à apprendre ; le héros est celui qui se domine ; le riche est celui qui se contente ; et l’honoré est celui qui honore les autres.
Néanmoins, la Michna utilise le terme de « créatures » pour parler des autres. Ce détail révèle lui aussi un enseignement important. Il est habituel de voir que ceux qui sont honorés ou honorables sont séparés de ceux qui sont différents ou inférieurs à eux. Ben Zoma vient nous dire que la personne qui mérite véritablement les honneurs est celle qui est capable d’honorer tout le monde, même les personnes qui ont pour unique qualité le fait d’être des créatures de D.ieu.
En rapportant le verset (Samuel I 2, 30) : « J’honore ceux qui M’honorent… », la Michna précise que D.ieu Lui-même honore toutes Ses créatures puisqu’elles renvoient, par le seul fait d’exister, à Son honneur, ainsi qu’il est dit (Avot fin du Chapitre 6) : « Tout ce que D.ieu a créé en Son monde, Il l’a créé pour proclamer Sa Gloire. »
L’homme doit imiter D.ieu ; il doit apprécier et estimer les autres, même si la seule motivation est qu’ils sont des êtres créés par D.ieu.
Chabbat Kora’h 5740
Ben Azaï dit : Cours à la poursuite d’une simple mitsva... car une mitsva entraîne une mitsva... le salaire d’une mitsva est la mitsva.
(Chapitre 4:2)
« Cours à la poursuite d’une simple mitsva. » Ceci ne signifie pas que l’homme doit courir pour accomplir une mitsva, mais plutôt que celle-ci se doit d’être accomplie avec joie, vitalité et vigueur. Ainsi, même une mitsva qui paraît facile ou insignifiante doit être accomplie avec enthousiasme et dévotion.
« Car une mitsva entraîne une mitsva. » Là encore, la mitsva ne se limite pas à nous apprendre un phénomène de causalité : faire une mitsva engendre l’accomplissement d’autres mitsvot. Cette phrase a, en fait, un sens plus profond : chaque mitsva – injonction accomplie – établit un lien (« tsavta » de la même racine que mitsva) avec D.ieu.
De plus, « le salaire d’une mitsva est la mitsva ». Même la personne qui se soucie du salaire – de la récompense réservée à ceux qui accomplissent les mitsvot – doit réaliser la valeur inestimable du lien établi avec D.ieu par la pratique de Ses commandements. C’est cela qui devrait lui apporter la plus grande des satisfactions. Lorsque la personne apprécie l’aspect privilégié de ce lien, son engagement pour la Torah et les mitsvot prend alors une autre dimension.
Extrait de Likoutei Si’hot vol. 17
Rabbi Lévitas de Yavné disait : Sois très humble...
(Chapitre 4:4)
Les maîtres du Talmud s’interrogent sur la légitimité du sentiment de fierté. Deux positions s’opposent : les premiers estiment que l’homme doit s’éloigner de tout sentiment d’orgueil jusqu’à l’extrême ; les autres Sages recommandent que l’homme exprime un minimum – « un soixante-quatrième » – de sentiment de fierté. Maïmonide est, pour sa part, catégorique au sujet de l’orgueil : « Celui qui aurait la moindre expression de sentiment hautain mérite le bannissement. » Certains commentaires expliquent que ce texte montre qu’il n’accepte pas le deuxième avis talmudique.
Rabbi Chnéour-Zalman de Lyadi défend l’idée qu’un minimum de fierté est indispensable. Si un homme manque d’avoir ce type de sentiment, il ne trouvera jamais la force pour surmonter les épreuves qu’il rencontre.
Cependant, nous pouvons affirmer que ces deux positions – celles de Maïmonide et de Rabbi Chnéour-Zalman – ne sont pas contradictoires. Rabbi Chnéour-Zalman parle d’une personne qui n’en est qu’aux phases primaires du service de D.ieu. À ce niveau, elle ne pourra progresser sans un sentiment d’amour propre. La personne n’est pas assez mature pour comprendre que c’est la Torah qui fournit la force de surmonter les épreuves. Plus tard, lorsqu’elle aura progressé, elle s’efforcera d’être en accord avec la recommandation de Maïmonide : éradiquer tout sentiment d’orgueil.
Sefer HaSi’hot 5749
Rabbi Yossé dit : Celui qui honore la Torah sera honoré par les créatures.
(Chapitre 4:6)
Il est d’usage de trouver un lien entre les enseignements dictés, dans Pirkei Avot, par les maîtres du Talmud et leur personnalité. De fait, ces leçons reflètent des aspects de leur vécu. Le Midrash raconte longuement la discussion que Rabbi Yossé eut avec une matrone romaine. Elle le questionna sur plusieurs sujets de Torah et il s’efforça de répondre à toutes ses interrogations avec le plus de rationalité.
Pourquoi s’est-il tant investi pour répondre aux questions de cette bourgeoise romaine qui, de surcroît, paraissaient être seulement le fruit de sa curiosité ? Rabbi Yossé se souciait de ce que la Torah soit perçue par tous comme une sagesse suprême. C’est pourquoi il souhaitait éveiller en eux un sentiment de respect à l’égard de la Torah.
C’est pourquoi la Michna utilise le terme de « créatures » : dans l’esprit de Rabbi Yossé, nous avons le devoir de mettre en valeur la Sagesse Divine auprès de tous les hommes et les femmes de la terre. Nous ne devons pas faire d’exception. Tous méritent d’entendre le message de la Torah, même s’ils n’ont pour seule et unique qualité que le fait d’être une « créature » de D.ieu.
Motsaé Chabbat Kora’h 5738
Ne juge jamais seul, car il n’y a qu’Un seul qui juge Seul.
(Chapitre 4:8)
Cette Michna indique aux juges de ne jamais traiter seuls les affaires judiciaires.
Ce principe peut toutefois être également mis en œuvre par chaque homme qui a le devoir de porter un jugement sur son propre service de D.ieu. L’intérêt personnel et l’amour propre peuvent troubler un homme dans son analyse. C'est pourquoi il est indispensable de demander conseil à son prochain, même lorsqu’il s’agit d’affaires personnelles.
Extrait de Likoutei Si’hot vol. 5
Rabbi Chimone dit : Il existe trois couronnes : la couronne de la Torah, la couronne de la prêtrise et la couronne de la royauté ; mais la couronne de la bonne renommée les surpasse toutes.
(Chapitre 4:13)
Le fait que notre Michna cite la couronne de la bonne renommée après celle de la Torah implique un enseignement : une personne qui étudie ne doit pas uniquement se consacrer au développement personnel (« la couronne de la Torah »), elle doit aussi s'efforcer de partager sa sagesse avec les autres (« la couronne de la bonne renommée »).
C'est pourquoi l'auteur de cette Michna est Rabbi Chimone Bar Yo'hai, au sujet duquel il est dit dans le Talmud que « torato oumnato – Sa seule occupation était la Torah. » Il était entièrement dévoué à l'étude de la Torah et n'était pas du tout impliqué dans des activités matérielles. Malgré cela, Rabbi Chimone ne vivait pas à l'écart des autres individus, car il était conscient de l'importance de diffuser la Torah parmi ses frères qui étaient, eux, investis dans des activités matérielles. Ainsi, il partagea avec nous les secrets les plus précieux, consignés dans le livre du Zohar.
Extrait de Likoutei Si’hot vol. 18
Chmouel HaKatan disait : (Proverbes 24, 17) Ne te réjouis pas de la chute de ton ennemi et, s’il trébuche, que ton cœur ne s’en félicite pas.
(Chapitre 4:19)
Dans cette Michna, Chmouel cite un verset des Proverbes. Cependant, là-bas, il s’agit de désaccord entre deux personnes dans des affaires profanes ; Chmouel, lui, vient nous enseigner que ceci est aussi valable dans le domaine de l’étude de la Torah. Lorsque deux Sages s’opposent dans l’interprétation d’un texte ou d’une loi, c’est l’avis d’un des deux qui, en conclusion, aura force de loi. Le gagnant de ce débat ne devra pas se réjouir de la défaite de son camarade, mais sa joie viendra plutôt du fait que, grâce à leur débat, un nouveau sujet de la loi a été éclairci.
Dans cet enseignement se reflète le caractère de l’auteur de cette Michna, Chmouel HaKatan – « Le Petit ». En effet, ce surnom lui fut donné par ses camarades, car malgré tout ce qu’il accomplit pour le développement du Talmud, il se conduisit toujours modestement.
Extrait de Likoutei Si’hot vol. 19
Elicha ben Abouya disait : celui qui apprend dans son enfance est comparé à de l’encre écrite sur un papier neuf. Celui qui étudie alors qu’il est âgé ressemble à l’encre écrite sur un papier effacé.
(Chapitre 4:20)
Les âges évoqués dans la Michna ne correspondent pas exactement à ceux qui sont inscrits sur notre état civil. Ils symbolisent, en fait, l’état d’esprit dans lequel nous devons appréhender l’étude de la Torah.
L’enfance a pour qualités la modestie, l’ouverture et la créativité spontanée. Ces caractères doivent être protégés tout au long de notre existence. L’homme qui aura gardé ces valeurs verra des fruits dans son étude de la Torah.
En revanche, la personne qui mettra en avant ses connaissances personnelles aura une approche rigide, subjective et donc plus réservée. Cet homme ne sera capable d’apprendre que ce qui lui paraîtra juste. Cet état d’esprit sera un grave handicap à son évolution dans les dimensions les plus élevées de l’étude.
Extrait de Likoutei Si’hot vol. 19
Commencez une discussion