Le jour de Pourim 1988, après avoir passé la journée à distribuer les Michloa’h Manot (les cadeaux de nourriture) ainsi que les Matanot Laévyonim (dons aux pauvres), nous étions enfin assis pour le festin de la fête. Soudain une sirène retentit : le signal était clair, cela signifiait que le Rabbi allait probablement distribuer des dollars à remettre à la Tsedaka (charité) en l’honneur de Pourim. Mes invités se précipitèrent à l’extérieur pour courir vers le 770 Eastern Parkway, la synagogue du Rabbi. Comme nous étions des habitants locaux, nous nous demandions s’il était judicieux de nous présenter nous aussi devant le Rabbi : d’habitude nous ne prenions notre tour dans la queue que pour des événements particuliers : anniversaires, naissance, Bar Mitsva, mariages...
Mon mari jeta un coup d’œil sur les enfants : ils étaient déguisés – selon la coutume – et il estimait qu’ils n’étaient pas vêtus correctement pour passer devant le Rabbi (nous avions toujours revêtu nos habits de Chabbat pour ces occasions spéciales). Par contre, moi je pensais que le Rabbi serait heureux de voir les enfants respecter cette coutume ancestrale. Après tout, c’était le jour de Pourim ! Finalement mon mari accepta mon raisonnement et nous aussi, nous nous sommes précipités vers le 770. Je tenais à la main mes trois plus jeunes enfants mais la porte de la synagogue venait de se fermer. Nous avons décidé d’attendre un peu et, effectivement, au bout de quelques minutes, le secrétaire du Rabbi rouvrit la porte : le Rabbi avait demandé que d’autres Juifs se présentent et avait insisté pour qu’il laisse entrer les retardataires.
Dobie – âgée de 10 ans – était déguisée en Mexicaine et arborait fièrement un énorme sombrero : quand elle passa devant le Rabbi, elle le remercia pour le dollar et le Rabbi la regarda en répondant : « Gracias ! » avec un grand sourire.
Quand nous sommes sorties, Dobie me demanda ce qu’avait dit le Rabbi : « Le Rabbi t’a répondu “merci” en espagnol puisque tu es déguisée en Mexicaine ! Maintenant tu vas devoir apprendre l’espagnol ! »
Mashie – âgée de sept ans – s’était déguisée en soldat avec un grand emblème de « Tsivot Hachem », (le mouvement de jeunesse fondée par le Rabbi) sur son calot militaire. Le Rabbi lui tendit un dollar et la salua en levant sa main vers son chapeau ! Quand nous sommes sorties, j’expliquai à Mashie qu’en la saluant, le Rabbi lui avait certainement donné d’incroyables forces pour réussir plus tard dans une chli’hout, pour devenir son émissaire et « conquérir » des communautés entières.
Âgée de 5 ans, Rivkie avait choisi un déguisement de clown. Quand le Rabbi lui tendit un dollar, il lui adressa un large sourire. Nous avons décidé que cela signifiait que son mari serait certainement doté d’un grand sens de l’humour.
Effectivement, 22 ans plus tard, les faits sont là. Dobie s’est mariée avec Rav Shea Rubinstein d’Argentine qui parle couramment l’espagnol et s’occupe principalement des Juifs qui parlent l’espagnol à Bal Harbour en Floride.
Mashie s’est mariée avec Rav Lévi Hazan, un « général dans l’armée de Tsivot Hachem » et ils habitent à Milan, en Italie, où ils accomplissent des merveilles au sein de la jeunesse, encourageant de nombreux jeunes à se rapprocher d’une vie de Torah.
Rivkie s’est mariée avec Rav Chaim Lipsker qui est doué d’un grand sens de l’humour. Ils habitent à Orlando, en Floride et s’occupent avec succès des étudiants.
Alors, cela valait-il la peine d’emmener les enfants déguisés pour prendre un dollar le jour de Pourim ? Vous pensez bien que nous ne l’avons pas regretté ! Le Rabbi avait aidé par ses bénédictions mes enfants en ce qui concernait leurs futurs mariages et leur avait donné toutes les forces nécessaires pour leur mission dans la vie !
Et tout ceci grâce à leurs déguisements de Pourim !
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