Dans la paracha de Vayétsé, D.ieu bénit Yaakov en lui déclarant1 : « Tu t’étendras vers l’ouest, vers l’est, vers le nord et vers le sud ». Le Talmud commente2  : « Quiconque se délecte du Chabbat reçoit un héritage illimité, comme il est écrit3  : “Alors tu te délecteras en D.ieu... et Je te nourrirai de l’héritage de Yaakov”, au sujet duquel il est écrit : “Tu t’étendras vers l’ouest, vers l’est...” »

La récompense de l’accomplissement d’une mitsva est, naturellement, mesure pour mesure.4 Quel aspect de la mitsva du Chabbat fait que sa récompense devienne « un héritage illimité » ?

Le Chabbat diffère de toutes les autres mitsvot du fait que l’accomplissement des autres mitsvot s’effectue par le travail et l’action. Il existe donc des différences entre la manière dont une personne très pieuse accomplira une mitsva et celle d’une personne simple.

Ainsi, les téfiline doivent être placés en face du cœur et sur la tête afin de « lier » la tête et le cœur à D.ieu. On comprend qu’il existe une immense différence entre la tête et le cœur spirituels d’une personne véritablement pieuse et ceux d’une personne moins pieuse. Il en va de même pour les autres mitsvot.

L’observance du Chabbat, cependant, consiste en une cessation du travail. En ce qui concerne le « non-faire », tous les Juifs peuvent être égaux.

Bien que la cessation du travail des gens simples implique de s’abstenir de tâches quotidiennes tandis que la cessation du travail des personnes élevées implique une pause dans le raffinement spirituel du monde matériel, la seule différence réside dans la nature du travail dont elles se reposent ; à l’égard de la cessation du travail qui en résulte, tous les Juifs observant le Chabbat sont égaux.5

À première vue, il semblerait que cela soit également vrai pour tous les commandements prohibitifs ; comme le Chabbat, ils impliquent de ne pas faire quelque chose. Mais à y regarder de plus près, la différence entre la cessation du travail pendant Chabbat et le respect des commandements négatifs est évidente :

Les commandements prohibitifs sont en effet un prolongement direct des commandements positifs. L’interdiction de l’idolâtrie, par exemple, découle du commandement positif selon lequel un Juif ne doit placer sa foi et sa connaissance qu’en D.ieu ; l’interdiction de manger des animaux non cashers est une conséquence directe de la mitsva de la casherout, etc.

La cessation exigée par le Chabbat, en revanche, est l’essence même du commandement, selon les termes du verset6 : « Tu ne feras aucun travail... Car [en] six jours, D.ieu a fait les cieux et la terre... et S’est reposé le septième jour. »

La raison pour laquelle tous les Juifs sont entièrement égaux à l’égard de la mitsva de cessation du travail pendant Chabbat découle de ce que la mitsva du Chabbat touche l’essence même de l’âme juive. Les différences entre les Juifs ne se manifestent qu’au niveau externe ; concernant leur essence, ils sont tous égaux.

C’est aussi le sens de la déclaration dans la prière de Min’ha de Chabbat : « Puissent Tes enfants reconnaître et savoir que de Toi vient leur repos, et que par leur repos ils sanctifient Ton Nom. » Le repos du Chabbat émane de l’Essence même de D.ieu – « de Toi ». Cela fait que le repos de chaque Juif est lié à l’essence de son âme.

C’est également de ce niveau d’âme essentielle qu’un Juif trouve la force d’offrir sa vie pour la sanctification du Nom de D.ieu – un pouvoir que tous les Juifs possèdent de manière égale.

Ainsi, le repos du Chabbat et le sacrifice de soi ultime proviennent d’une même source. Il s’ensuit que « par leur repos », c’est-à-dire par le pouvoir même qui permet à tous les Juifs d’observer également le repos du Chabbat, vient la capacité de « sanctifier Ton Nom ».

Le lien entre la bénédiction « Et tu t’étendras... » et le Chabbat peut être compris en conséquence. « Et tu t’étendras... » est un héritage illimité qui émane de l’Essence illimitée de D.ieu. Cela est réalisé en observant le Chabbat, car le Chabbat découle aussi de l’Essence de D.ieu.

Basé sur Likoutei Si’hot, vol. 15, p. 226-229.