Première lecture – Richone

Les rêves de Pharaon

41:1 Au bout de deux années après la libération de prison du maître échanson, Pharaon eut un rêve. Dans son rêve, voici qu’il se tenait au bord du Nil,

2 et voici que du fleuve sortaient sept vaches belles et saines qui se mirent à paître dans l’herbage.

3 Puis sept autres vaches, laides et chétives, montèrent après elles du Nil, et se tinrent à côté des vaches saines sur la rive du Nil.

4 Les vaches laides et chétives dévorèrent les sept vaches belles et saines. Alors Pharaon s’éveilla.

5 Il se rendormit et rêva une seconde fois. Dans ce rêve, voici que sept épis, pleins et beaux, s’élevaient sur une seule tige.

6 Puis sept épis germèrent après eux, flétris et desséchés car battus par le vent d’est.

7 Les épis flétris engloutirent les sept épis pleins et beaux. Pharaon s’éveilla, et voici qu’il était convaincu qu’il venait d’avoir un rêve entier qui devait à présent être convenablement interprété.

8 Le matin, son esprit fut agité, et il envoya quérir tous ses devins et ses savants de l’Égypte. Pharaon leur raconta ses rêves, mais aucun d’eux ne fut en mesure de les interpréter de façon satisfaisante pour Pharaon.

L’échanson fait mention de Joseph

9 Le maître échanson prit alors la parole et dit à Pharaon : « Je dois aujourd’hui rappeler mes fautes.

10 Pharaon s’était irrité contre ses serviteurs, et mit alors le maître panetier et moi en prison dans la maison du chef des bouchers.

11 Nous eûmes tous deux un rêve la même nuit, lui et moi, ayant chacun un rêve qui s’accordait avec son interprétation.

12 Et là-bas, en prison avec nous, se trouvait une personne qui interpréta nos rêves. En dépit de ses attitudes, il n’est pas digne d’occuper une fonction politique, car en premier lieu c’est un simple jeune homme ; ensuite, c’est un Hébreu qui ne parle pas couramment notre langue ; et pour terminer, c’est un serviteur du maître boucher – et comme tu le sais, la loi égyptienne ne permet pas à quiconque a été esclave d’occuper une fonction publique ou de revêtir un vêtement royal. Nous lui avons raconté nos rêves et il les a interprétés pour nous, en les interprétant pour chacun de nous conformément à son rêve et ses détails.

13 Or, précisément comme il les avait interprétés pour nous, ainsi en advint-il : je fus rétabli à mon poste, et lui, le maître panetier, on le pendit. »

14 Pharaon envoya quérir Joseph et on le tira rapidement de la geôle. On lui coupa les cheveux en vue de son audience avec Pharaon, on changea ses habits de détenu pour des vêtements ordinaires,1 et il parut devant Pharaon.

Deuxième lecture – Cheni

15 Pharaon dit à Joseph : « J’ai eu un rêve, mais personne parmi mes devins ou mes savants ne peut l’interpréter, et j’ai entendu témoigner en bien2 à ton propos, que tu peux comprendre un rêve et l’interpréter. »

16 Joseph répondit à Pharaon : « Cela n’est pas en mon seul pouvoir ; Dieu fournira une réponse à travers moi pour le bien-être de Pharaon. »

Pharaon raconte ses rêves à Joseph

17 Alors Pharaon dit à Joseph : « Dans mon rêve, je me tenais au bord du Nil.

18 Et voici que du Nil sortirent sept vaches, saines et de belle apparence, qui vinrent paître dans l’herbage.

19 Puis sept autres vaches sortirent après elles, maigres, de laide apparence et décharnées ; je n’en ai jamais vu d’aussi laides dans toute l’Égypte. Elles se tinrent à côté des vaches saines sur la rive du Nil.3

20 Les vaches chétives et laides dévorèrent les sept vaches saines.

21 Elles furent entièrement englouties en elles, mais on ne se serait pas douté qu’elles avaient été ingérées en elles : elles étaient de laide apparence comme auparavant. Puis je m’éveillai.

22 Après m’être rendormi, j’ai vu dans mon second rêve sept épis sains et beaux s’élevant sur une même tige.

23 Puis, sept épis maigres, desséchés et battus par le vent d’est germèrent après eux.

24 Les grains desséchés engloutirent alors les sept épis sains. Je le racontai à mes devins, mais pas un d’entre eux n’a pu me l’expliquer. »

L’interprétation de Joseph

25 Joseph dit à Pharaon : « Les deux parties du rêve de Pharaon sont un seul et même rêve qui n’a fait que se répéter. Dieu a fait part à Pharaon de ce qu’Il s’apprête à faire.

26 En premier lieu, les vaches et le blé caractérisent la nourriture.4 Ensuite, les sept vaches saines et les sept épis sains sont les mêmes sept années ; c’est un même rêve.

27 Les sept vaches décharnées et chétives qui sont sorties après elles sont sept années, de même que les sept épis maigres battus par le vent d’est. Ce seront sept années de famine.

28 À propos de ces années de famine, c’est bien ce que j’ai dit à Pharaon : Dieu a montré à Pharaon ce qu’il va faire après les années d’abondance.

29 Sept années vont venir durant lesquelles il y aura une grande abondance dans toute l’Égypte. Le fait que les sept vaches saines étaient de “belle apparence” signifie que l’abondance sera telle que nul ne sera jaloux de la richesse de l’autre ; tous verront “d’un bon œil” la prospérité des semblables.5

30 Puis sept années de famine leur succéderont, lors desquels toute l’abondance de l’Égypte sera oubliée, tout comme les vaches décharnées ont englouti les vaches saines et demeurèrent cependant décharnées.6 La famine ravagera le pays.

31 On n’en saura plus rien dans le pays de l’abondance passée du fait de la famine qui suivra – tout comme les vaches décharnées demeurèrent décharnées après avoir englouti les vaches saines –, car elle sera extrêmement sévère.

32 Quant au fait que le rêve se soit produit deux fois pour Pharaon, c’est que la chose est arrêtée devant Dieu, et que Dieu va l’accomplir sans tarder.

33 À présent, que Pharaon choisisse un homme de discernement et de sagesse et le mette en charge de l’Égypte.

34 Que Pharaon fasse en sorte de désigner des officiers dans le pays et prépare l’Égypte pour les sept années de famine pendant les sept années d’abondance.

35 Qu’ils amassent toute la nourriture pendant les années fertiles à venir, et qu’ils entreposent du blé sous l’autorité de Pharaon dans les villes, et qu’ils le gardent. Se préparer aux sept années de famine pendant les sept années d’abondance fera écho à l’indication donnée par le rêve que les années de famine et les années d’abondance interviendront “simultanément” – ainsi que le caractérise le fait que les vaches saines et les vaches décharnées se tenaient simultanément sur la rive du Nil.7

36 La nourriture entreposée sera tenue en réserve pour le pays pour les sept années de famine qui se produiront en Égypte, de sorte que le pays ne périsse pas à cause de la famine. »

37 Le discours par lequel Joseph expliqua le rêve conformément à son évidente référence à la subsistance de l’Égypte, en même temps qu’il résolvait l’anachronisme des vaches robustes et des vaches décharnées se tenant côte à côte sur la rive du Nil, plut à Pharaon et à tous ses courtisans.8

38 Alors Pharaon dit à ses courtisans : « Pourrions-nous trouver un homme tel que celui-ci, qui est clairement investi de l’Esprit de Dieu ? » Pharaon ne prêta guère attention aux remarques dénigrantes de l’échanson concernant l’inaptitude de Joseph à occuper un poste officiel.

Troisième lecture – Chelichi

39 Pharaon dit à Joseph : « Puisque Dieu t’a révélé tout cela, nul n’est aussi clairvoyant et aussi sage que toi pour être en charge des dispositions que tu recommandes de prendre.9

Pharaon anoblit Joseph

40 C’est toi qui seras en charge de ma maison, et c’est par tes ordres que mon peuple sera ravitaillé. C’est seulement le trône – autrement dit le fait que je suis le roi tandis que tu n’es que le vice-roi – qui aura prééminence sur toi.

41 En dehors de cela – Pharaon dit à Joseph –, je te confère le même pouvoir que je possède moi – même sur toute l’Égypte. »

42 Pour montrer qu’il faisait de Joseph le vice-roi, Pharaon retira sa bague de sceau d’un doigt de sa main et la mit à la main de Joseph. Il le fit habiller de lin, une matière hautement prisée en Égypte,10 et plaça un collier en or marquant sa fonction11 autour de son cou.

43 Il le fit monter et traverser la capitale à côté de son propre chariot, sur son second chariot royal, et on proclama devant lui : « Voici le conseiller du roi ! Comme il est sage pour son jeune âge ! Pliez le genou devant lui ! » Il fut établi chef de rang royal de tout le pays d’Égypte. Cependant, Pharaon ordonna à ces sujets de ne faire que plier le genou devant Joseph, et de ne pas se prosterner devant lui (comme il convient devant une personne d’autorité royale), car il voulait marquer le fait que Joseph ne devait pas sa position à sa naissance mais à la bonne volonté de Pharaon.12

44 Pharaon dit à Joseph en présence de tous : « Je suis Pharaon ; moi seul aurai autorité sur toi. De par mon autorité en tant que Pharaon, je décrète que, sans ton ordre, nul homme ne lèvera la main pour porter des armes ou son pied pour monter un cheval dans tout le pays d’Égypte. »

45 Pharaon donna à Joseph le nom de Tsafnat Panéa’h [« celui qui déchiffre l’énigme »], et il lui donna Assenath, fille du précédent maître de Joseph, Poti-Phéra seigneur13 d’One, pour épouse. Joseph sortit pour inspecter l’Égypte.

Les sept années d’abondance

46 Joseph était âgé de trente ans quand il se tint devant Pharaon, le roi d’Égypte. Joseph prit congé de Pharaon et parcourut tout le pays d’Égypte afin de mettre en œuvre son projet d’entreposer la production des sept années d’abondance.

47 Pendant les sept années d’abondance, le pays produisit du blé, qui fut déposé par lots considérables, car l’abondance était telle que dès qu’une personne déposait un lot, une autre personne venait à la suite en déposer un autre.14

48 Joseph recueillit toute la nourriture qui était en surplus durant les sept années qui passèrent en Égypte, et il déposa la nourriture dans des complexes d’entrepôt dans les villes. On savait que la nature du sol varie d’un lieu à l’autre, le sol de chaque région possédant des caractéristiques propres lui permettant de produire différentes récoltes. On savait également que, de ce fait, les récoltes d’une région particulière étaient mieux conservées en étant entreposées avec un peu de la terre qui les avait fait pousser. C’est pourquoi Joseph déposa avec la nourriture un peu du sol pris des champs environnants la ville où ils avaient poussé.15

49 Joseph amassa des quantités de blé aussi abondantes que les sables de la mer, au point qu’on dut cesser de le compter car sa quantité devint incalculable.

50 Deux fils naquirent à Joseph avant que la première année de famine ne survienne, que lui avait enfantés Assenath, fille de Poti-Phéra, seigneur d’One.

51 Joseph nomma le premier-né Manassé [Menaché : « qui fait oublier »] « car – dit-il – en m’accordant le succès, Dieu m’a fait oublier toutes mes épreuves passées, mais cela aurait pu aussi me faire oublier et tous ceux qui me sont chers dans la maison de mon père. » Joseph savait que la prospérité comporte le risque de l’assimilation ; alors, afin de ne pas oublier sa famille et son héritage, il donna à son premier-né un nom qui lui rappellerait en permanence ce danger.16

52 Il nomma le second fils Ephraïm [de peri : « fruit »] – « car – dit-il – Dieu m’a fait fructifier dans le pays de ma souffrance. »

Quatrième lecture – Revii

53 Les sept années d’abondance qui se déroulèrent en Égypte se terminèrent.

La famine commence

54 Les sept années de famine commencèrent, comme Joseph l’avait prédit. Il y eut famine dans tous les autres pays, mais dans tout le pays d’Égypte il y eut du pain grâce au projet de stockage de Joseph.

55 Cependant, bien que tous eussent entreposé du blé pour eux-mêmes, tout pourrit ; tout ce qui resta fut ce que Joseph avait entreposé dans les granges officielles. Quand toute l’Égypte fut affamée, le peuple demanda à grands cris du pain à Pharaon ; alors, Pharaon répondit à toute l’Égypte : « Allez chez Joseph et faites ce qu’il vous demande. »

56 Quand la famine devint si sévère qu’elle affecta toutes les personnes fortunées du pays, Joseph ouvrit tous les entrepôts contenant du blé et le vendit aux Égyptiens. Entre-temps, la famine s’intensifia dans le pays d’Égypte.

57 De toute la région on vint en Égypte, chez Joseph, pour acheter des vivres, car la famine était sévère dans toute la région. La Torah poursuivra par la suite le récit de la façon dont Joseph administra l’Égypte pendant les années de famine.17 En attendant, elle va décrire les circonstances dans lesquelles la famille Joseph fut amenée à s’y établir.

Le premier voyage des frères de Joseph en Égypte

42:1 La famine ne frappa pas uniquement l’Égypte : elle affecta aussi le Pays d’Israël, dont les habitants furent aussi affamés que ceux d’Égypte. Jacob entendit qu’il y avait du blé à vendre en Égypte, et au même moment il vit à travers une vision prophétique qu’il y avait quelque espoir pour lui en Égypte. Jacob dit à ses fils : « Pourquoi donnez-vous l’apparence devant les Ismaélites et les Édomites que nous avons assez de provisions pour tenir durant toute la famine, alors que nous n’en possédons que pour une courte période ? Pourquoi attirez-vous l’attention sur vous en ne vous mettant pas activement en quête de moyens de survivre avant que nos provisions ne s’épuisent ? Nous n’avons aucune garantie que Dieu continuera à nous nourrir miraculeusement ; aussi, si vous ne faites pas de provisions pour l’avenir, vous finirez par être affamés. Pourquoi vous permettez-vous le risque d’être amaigris par la faim ? »

2 Il dit : « Voici, j’ai ouï dire qu’il y a du produit à vendre en Égypte. Descendez-y et achetez-nous du produit de là-bas pour que nous restions en vie et ne mourrions pas. » La valeur numérique du mot « descendez » (רדו) est 210, une allusion aux 210 ans qu’eux et leurs descendants étaient appelés à demeurer en Égypte (2238–2448). Il leur dit également :18 « Entrez dans la ville chacun par une porte différente ; puisque vous êtes tous d’apparence impressionnante, il est impératif que vous évitiez d’éveiller le mauvais œil19 sur vous. »

3 Quand les frères virent que Jacob avait eu la prémonition qu’il y avait quelque espoir pour lui en Égypte, ils comprirent que le temps était venu de savoir avec certitude où se trouvait Joseph ainsi que sa situation, et, si possible, le ramener à son père.20 À ce moment, ils avaient tous regretté d’avoir vendu Joseph, bien que chacun à un degré différent. Les frères de Joseph descendirent en Égypte à dix, ressentant chacun un degré différent d’amour fraternel envers lui, mais tous également résolus à le délivrer quoiqu’il en coûte, tout comme ils étaient également motivés pour acheter du blé en Égypte.

4 Quant à Benjamin, frère de Joseph, Jacob ne l’envoya pas avec ses frères, car il dit : « Il pourrait lui arriver malheur. »

5 Les fils d’Israël vinrent s’approvisionner, entrant chacun dans la ville par une porte différente comme leur père le leur avait demandé, se mêlant ainsi à ceux qui étaient venus pour acheter du produit, car la famine sévissait en Canaan et nombreux étaient ceux qui arrivèrent en même temps qu’eux.

6 Or, Joseph étant le vice-roi du pays, c’était lui qui vendait du produit à tout le peuple du pays, et les frères de Joseph vinrent et se prosternèrent devant lui, leur face contre terre.

Les frères se présentent devant Joseph

7 Joseph vit ses frères et les reconnut, mais il ne leur révéla pas sa véritable identité. Il comprit qu’il devait d’abord s’assurer qu’ils regrettaient de l’avoir vendu et qu’ils étaient prêts à passer à la prochaine étape du développement de leur famille pour faire d’elle le peuple élu. Aussi, il agit comme un étranger envers eux, jouant son rôle de vice-roi d’Égypte, leur parlant rudement. En même temps, dans les échanges suivants avec ses frères, Joseph fit en sorte d’agir occasionnellement de façon conviviale envers eux et de laisser entendre qu’il savait qui ils étaient, de sorte que, lorsqu’il finirait par leur révéler son identité, ils se souviendraient de ces marques de gentillesse et seraient plus enclins à croire qu’il était vraiment leur frère.21 Affirmant ne pas comprendre leur langue, il leur demanda à travers son interprète, son fils Manassé, âgé de sept ans :22 « D’où venez-vous ? » Ignorant la langue égyptienne, ils répondirent, également à travers l’interprète : « De Canaan, pour acheter de la nourriture. »

8 Bien que, comme on l’a dit, Joseph reconnut bien ses frères – car toutes leurs barbes avaient bien poussé avant leur séparation de lui et leur apparence n’avait pas véritablement changé entre-temps –, eux ne le reconnurent pas, car, lorsqu’il les avait quittés, sa barbe n’avait pas encore poussé, et à présent, quelque vingt-et-un ans plus tard, sa barbe était pleine. Cependant, Joseph ne profita pas de ce que ses frères ne l’avaient pas reconnu. Bien qu’ils étaient à présent en son pouvoir et qu’il pouvait facilement se venger d’eux pour l’avoir vendu, Joseph les traita comme ses frères, les prenant en compassion malgré le fait qu’eux ne l’avaient pas traité comme leur frère, en ayant pitié de lui lorsque lui-même était en leur pouvoir.

Joseph accuse

9 Il se souvint des rêves qu’il avait faits sur eux, et constata qu’ils s’étaient à présent prosternés devant lui dans un contexte lié au blé, tout comme ils l’avaient fait dans son premier rêve.23 Comprenant que les rêves étaient devenus réalité, il réalisa qu’il devait imaginer quelque moyen de faire que Benjamin les rejoigne, de sorte que lui aussi puisse se prosterner devant lui et parachever le rêve. C’est pourquoi il leur dit : « Vous êtes des espions ! Vous êtes venus afin de découvrir le côté vulnérable du pays. »

10 Ils lui dirent : « Non, mon seigneur ! Ne dis pas une telle chose, car nous, tes serviteurs, ne sommes venus que pour acheter de la nourriture.

11 Nous sommes tous les fils d’un même homme. » Ils choisirent leurs mots sous l’influence d’une inspiration divine, en sous-entendant sans le vouloir que lui aussi était un des fils de leur père. « Nous sommes d’honnêtes gens ; tes serviteurs n’ont jamais été des espions ! »

12 Il leur dit : « Non ! J’ai la conviction que vous êtes des espions ! Vous êtes venus afin de découvrir le côté vulnérable du pays ! Si, comme vous le dites, vous êtes frères, pour quelle obscure raison êtes-vous entrés par différentes portes ? Et si vous n’êtes pas frères, alors vous êtes des menteurs ! »

13 Ils répondirent : « Non ! Nous pouvons l’expliquer. Nous, tes serviteurs, étions douze frères, fils d’un seul homme qui est en Canaan. Le plus jeune est aujourd’hui auprès de notre père, et un autre a disparu, et nous nous sommes séparés afin de le rechercher. »

14 Joseph leur dit : « Et si vous le trouvez et que ses ravisseurs demandent une somme importante pour le relâcher, la paierez-vous ? » Ils répondirent : « Bien sûr. » Il leur demanda ensuite : « Et s’ils refusent de le libérer, même pour une forte rançon, que ferez-vous ? » Ils répondirent : « Alors nous le reprendrons de force, même si nous avons à tuer pour le sauver ou devons être tués en tentant de le faire ! » Il leur dit : « Alors c’est bien ce que je vous ai affirmé tout à l’heure : vous êtes des espions, et vous êtes venus pour tuer les habitants de cette ville. Ne pensez pas que j’ignore que vous êtes capables de meurtre : la divination par ma coupe m’a permis de savoir que deux d’entre vous ont détruit la ville de Che’hem !

15 C’est par cela que vous serez éprouvés : je vous fais le serment par la vie de Pharaon que vous ne sortirez pas d’ici que votre jeune frère n’y soit venu.

16 Dépêchez l’un de vous qu’il aille quérir votre plus jeune frère, tandis que vous autres demeurerez emprisonnés, de sorte que la véracité de vos dires soit vérifiée. Sinon, alors, par la vie de Pharaon, vous êtes bien des espions ! » Chaque fois que Joseph jurait de façon fallacieuse dans le cadre de son imposture, il le faisait au nom de Pharaon.

17 Il les garda tous en prison durant trois jours afin de leur donner du temps pour réfléchir à leur situation calmement et de façon raisonnable.24

18 Le troisième jour, Joseph leur dit : « J’ai décidé de rendre votre épreuve plus facile que prévu. Faites ceci et vous vivrez. Vous pouvez me faire confiance, car je crains Dieu.

Cinquième lecture – ‘Hamichi

19 Si vous êtes de bonne foi, prouvez-le de la façon suivante : l’un de vous parmi les frères restera en otage dans votre prison, tandis que vous partirez et ramènerez le produit que vous avez acheté en Égypte pour calmer la faim de vos maisons.

20 Puis vous m’amènerez votre jeune frère, et ainsi vos paroles seront attestées et vous ne mourrez pas. » Ils firent ainsi.

21 Ils s’éloignèrent de l’interprète pour qu’il ne les entende pas parler entre eux25 tout en demeurant à portée de voix de Joseph, qui – pensaient-ils – ne pouvait pas comprendre ce qu’ils disaient. Ils se dirent l’un à l’autre : « En vérité nous sommes coupables envers notre frère, car nous avons vu son désespoir lorsqu’il nous a suppliés, et nous ne l’avons pas entendu. Voilà pourquoi ce malheur nous est arrivé. »

Les frères commencent à se repentir

22 Ruben leur répondit en disant : « Ne vous ai-je pas dit : “Ne fautez par envers l’enfant” ? Mais vous n’avez pas entendu. Et à présent qu’il est probablement mort,26 nous devons rendre compte pour avoir versé son sang. Nous sommes appelés à rendre compte pour la mort de notre père également, s’il meurt de douleur lorsqu’il entendra que Joseph est mort. »27

23 Or ils ne savaient pas que Joseph les comprenait, car, comme on l’a vu, lorsqu’ils conversaient avec lui, il y avait un interprète entre eux.

24 Il se détourna et s’éloigna d’eux pour qu’ils ne le voient pas, et pleura après avoir constaté qu’ils regrettaient de l’avoir maltraité. Mais ensuite il reprit son attitude afin de les faire amener Benjamin en Égypte. Il revint vers eux, leur parla, puis il sépara Siméon d’eux et le fit incarcérer devant leurs yeux. Il choisit Siméon car c’était lui qui avait incité les frères à comploter contre lui28 et qui l’avait jeté dans le puits,29 et également pour le séparer de Lévi afin que les deux n’ourdissent pas de plan pour le tuer.

25 Joseph donna des ordres pour qu’on remplisse leurs bagages de blé, puis qu’on remette l’argent de chacun dans son sac, et qu’on leur donne des provisions pour le voyage. Cela fut exécuté pour eux. Bien que Joseph retint Siméon, il ne retint pas son âne ; il fit charger les bagages de Siméon de provisions pour sa famille, et les fit charger sur son âne, qu’il renvoya avec les autres frères.30

26 Les frères chargèrent leurs produits sur leurs ânes et partirent. Après leur départ, Joseph libéra Siméon et lui fit servir un repas.

27 Lorsque Lévi – l’un d’eux qui était désormais sans son compagnon habituel, Siméon – ouvrit son sac à l’auberge pour donner du fourrage à son âne, il vit que son argent se trouvait là, à l’ouverture de son bagage.

28 Il dit à ses frères : « Mon argent a été remis ! Non seulement il y a du blé, mais lui aussi est dans mon bagage ! » Leur cœur chavira. En tremblant, ils s’entreregardèrent et dirent : « Qu’est-ce donc que Dieu nous a fait ? L’argent n’a pu être remis dans son bagage qu’à titre de prétexte pour nous accuser de ne pas avoir payé pour le blé ! »

Les frères retournent chez Jacob

29 Lorsqu’ils arrivèrent chez leur père Jacob en Canaan, ils lui racontèrent tout ce qui leur était arrivé en disant :

30 « L’homme qui est le seigneur du pays nous a parlé avec dureté et nous a traités comme des espions du pays.

31 Nous lui avons dit : “Nous sommes de bonne foi ; nous n’avons jamais été des espions.

32 Nous étions douze frères, fils d’un même père ; l’un de nous a disparu, et le plus jeune est à présent auprès de notre père en Canaan.”

33 L’homme qui est le seigneur du pays nous a dit : “C’est de cette façon que je saurai que vous êtes honnêtes : laissez l’un de vos frères auprès de moi, prenez ce que réclame le besoin de vos familles acheté par vous, et partez.

34 Puis vous m’amènerez votre jeune frère, et alors je saurai que vous n’êtes pas des espions et que vous êtes honnêtes. Je vous rendrai votre frère, et vous pourrez circuler librement dans le pays.” »

35 Or comme ils vidaient leurs sacs, voici que chacun trouva son argent payé par lui pour le blé serré dans son sac ! Lorsqu’eux et leur père virent leurs bourses d’argent, ils prirent peur.

36 Jacob leur père ne crut pas leur histoire. À présent que deux de ses fils étaient manquants, il commença à suspecter que les autres frères avaient eu une conduite soit malicieuse, soit négligente : ou ils avaient tué Joseph et Siméon, ou ils les avaient fait tuer.31 Il leur dit : « Vous m’avez enlevé mes fils ! Joseph n’est plus à cause de vous, Siméon n’est plus à cause de vous, et vous voulez m’enlever Benjamin aussi ?! C’est sur moi que tout cela tombe ! »

37 Ruben dit à son père : « Tu pourras mettre à mort mes deux fils si je ne te le ramène pas. Confie-le à mes mains, et je promets que je le ramènerai auprès de toi. »

Le deuxième voyage des frères de Joseph en Égypte

38 Jacob ignora la proposition de Ruben. Il se dit : « Ce premier né est stupide ! Croit-t-il donc que je vais vraiment tuer ses fils, mes propres petits-fils ?! » Il répondit : « Mon fils Benjamin ne descendra pas en Égypte avec vous ! Car son frère Joseph est mort et lui seul reste de sa mère, et si un malheur lui arrivait sur la route où vous irez, du fait de votre malice ou de votre négligence,32 vous ferez descendre, sous le poids de la douleur, mes cheveux blancs dans la tombe. » Judah possédait d’autres arguments dont il pouvait faire usage pour convaincre son père de les laisser emmener Benjamin en Égypte avec eux, mais, constatant l’obstination de Jacob, il considéra qu’ils se révéleraient plus efficaces lorsque la nourriture viendrait à manquer. Aussi, il dit à ses frères : « Ne perturbons pas notre vieux père à présent ; attendons notre heure jusqu’au moment où la nourriture manquera. »

43:1 Cependant la famine sévissait dans le pays.

2 Lorsqu’ils eurent consommé le produit qu’ils avaient apporté d’Égypte, leur père leur dit : « Retournez en Égypte et achetez-nous un peu de nourriture. »

3 Alors Judah lui dit : « L’homme en charge de fournir la nourriture nous a formellement avertis en disant : “Ne vous présentez pas à moi à nouveau sans que votre frère soit avec nous.”

4 Si tu consens à laisser partir notre frère avec nous, nous descendrons en Égypte et achèterons pour toi de la nourriture.

5 Mais si tu ne l’envoies pas, nous ne descendrons pas là-bas, car l’homme nous a dit : “Vous ne paraîtrez pas devant moi sans que votre frère soit avec vous.” »

6 Israël dit : « Pourquoi m’avez-vous nui à ce point en disant à l’homme que vous avez un autre frère ? »

7 Bien que les frères eussent compris que la rudesse du vice-roi d’Égypte envers eux était la réponse divine au fait qu’ils avaient vendu Joseph, ils ne pouvaient l’expliquer de cette façon à Jacob. C’est pourquoi ils présentèrent son attitude comme la conséquence d’une suite d’événements.33  Ils répondirent : « L’homme nous a abondamment questionnés sur nous et notre famille en disant : “Votre père est-il encore en vie ? Avez-vous un autre frère ?” Il nous a même dit de quelle sorte de bois nos berceaux étaient faits. Nous lui avons dit en réponse à ses questions que nous avions un père et un autre frère. Pouvions-nous savoir qu’il dirait : “Amenez votre frère” ?! »

8 Judah dit à son père Israël : « Si tu envoies Benjamin avec nous, il peut être ou ne pas être capturé. Mais si tu ne l’envoies pas, nous ne pourrons pas acheter de la nourriture et nous mourrons sûrement de faim. Aussi, envoie le jeune homme avec moi, puis disposons-nous à partir et allons, de sorte que nous vivions et ne mourrions pas – nous, toi et nos tout-petits. » Quand Judah dit : « que nous vivions », en incluant son père, il prophétisa sans le vouloir que l’inspiration divine de Jacob lui serait rendue à la suite de ce voyage.34

9 Judah poursuivit : « Je comprends que tu nous soupçonnes de malice ou de négligence. Pour t’assurer que nous le protégerons à tout prix, je me porte garant de lui ; tu pourras me le réclamer. Si je ne te le ramène pas et ne te le présente pas vivant, j’aurai péché contre toi, et je renoncerai alors au privilège de t’être associé pour tous les jours qui me restent à vivre, et dans ce monde et dans l’au-delà.35

10 Car si nous ne nous étions pas attardés du fait de ta réserve exagérée, nous aurions pu être revenus déjà deux fois. Nous aurions pu depuis longtemps te ramener Siméon, et l’épreuve t’aurait été épargnée de t’inquiéter pour lui tout ce temps. »

11 Israël leur père leur dit : « S’il en est ainsi, que comme vous le dites, l’attitude du vice-roi est la conséquence d’une suite d’événements qui ne me laisse d’autre choix que d’envoyer Benjamin avec vous, alors nous devons faire usage de tous les moyens dont nous disposons pour avoir toutes les chances de réussir. Aussi, faites ceci : prenez des produits de choix du pays de Canaan dans vos bagages, et emportez-les pour les offrir à cet homme – un peu de baume, un peu de miel, de la cire, du lotus, des pistaches et des amandes.

12 Prenez un double montant d’argent, car entre-temps le prix de la nourriture peut avoir augmenté ; et prenez avec vous l’argent qui vous a été retourné à l’ouverture de vos sacs : c’est peut-être une erreur de l’assistant de Joseph, qui a oublié de prendre l’argent qui lui était dû.

13 Et prenez votre frère, et disposez-vous à retourner chez cet homme.

La prière de Jacob pour le succès

14 Telles sont les dispositions naturelles que nous pouvons prendre ; mais parallèlement nous devons aussi demander à Dieu Son aide. Nous savons tous que les prières adressées à Dieu par les premiers concernés sont plus efficaces que les prières adressées en leur faveur par d’autres personnes.36 Mais comme vous sentez que notre situation ne dénote pas d’intervention divine surnaturelle, je sais que vous ne vous investirez pas excessivement en prières. Moi, cependant, je sens que Dieu est impliqué ici de manière plus que naturelle ; c’est pourquoi je vais également prier pour vous. Je vais prier pour que 37 le Dieu tout-puissant – pour qui rien n’est impossible – accorde que l’homme vous manifeste de la compassion. Et que Dieu – qui, en créant le monde, arrêta le processus de création en disant : “Assez !” – dise : “Assez !” à mes maux, car durant toute ma vie je n’ai eu que des ennuis : des ennuis avec Laban, des ennuis avec Ésaü, des ennuis à propos de Rachel, des ennuis à propos de Dinah des ennuis à propos de Joseph, des ennuis à propos de Siméon, et des ennuis à propos de Benjamin. Enfin, je vais également prier pour que l’homme et retourne votre autre frère Siméon, qu’il aura libéré pour vous de sa captivité, et Benjamin indemnes. » Quand Jacob fit usage du mot « autre » pour désigner Siméon, il prophétisa sans le savoir que Joseph, lui aussi, serait « libéré » de l’obscurité. « Quant à moi – conclut Jacob –, comme j’ai perdu Joseph et Siméon, de même j’aurai perdu Benjamin tant qu’il ne reviendra pas sain et sauf avec vous. »

15 Les hommes prirent ce cadeau et prirent aussi avec eux le double montant d’argent, ainsi que Benjamin. Ils se mirent en route et descendirent en Égypte, et parurent devant Joseph.

Sixième lecture – Chichi

16 Quand Joseph vit Benjamin avec eux, il dit à l’intendant de sa maison : « Fais entrer les hommes dans la maison et qu’on abatte des animaux et qu’on les accommode, car ses hommes mangeront avec moi au déjeuner. »

17 L’homme fit comme Joseph avait dit, et l’homme introduisit les gens dans la maison de Joseph.

18 Les hommes s’alarmèrent car ils avaient été amenés dans la maison de Joseph, alors que d’ordinaire les voyageurs logeaient dans les auberges alentour. Ils dirent : « C’est à cause de l’argent qui a été remis dans nos sacs la première fois qu’on nous a conduits ici, pour nous accabler, se jeter sur nous, pour nous rendre esclaves et prendre nos ânes. Nous ne serons pas en mesure d’utiliser nos ânes pour envoyer de la nourriture à nos familles. »38

La crainte des frères

19 Ils s’approchèrent de l’intendant de la maison de Joseph, en le poussant hors de la maison,39 et ils lui parlèrent à l’entrée de la maison

20 en lui disant : « De grâce, seigneur, nous sommes venus une première fois pour acheter de la nourriture. Crois-nous, le seul fait que nous ayons dû le faire est humiliant pour nous : nous sommes habitués à nourrir nos semblables. Aussi, vois-tu, nous n’aurions pas fait cela si ce n’était pas nécessaire.

21 Il advint, quand nous sommes arrivés à l’auberge et avons ouvert nos sacs, que l’argent de chacun était à l’entrée de son sac, notre argent, à son poids. Nous le rapportons dans nos mains.

22 Nous avons également apporté de l’argent supplémentaire pour acheter de la nourriture. Nous ne savons pas qui a déposé l’argent dans nos bagages. »

23 Il répondit : « Soyez tranquilles ; n’ayez crainte. Votre Dieu, de par votre mérite, et si votre mérite est insuffisant, alors le Dieu de votre père – au titre de son mérite – a déposé un trésor caché pour vous dans vos bagages. Votre argent m’est parvenu. » Sur quoi il leur amena Siméon. Leurs craintes se dissipèrent, et ils acceptèrent de suivre à nouveau l’intendant dans la maison de Joseph. Entre-temps, Siméon leur raconta que Joseph l’avait libéré et lui avait donné un repas aussitôt après leur départ, et qu’il l’avait bien traité, comme on l’a vu plus haut.40 Cet aimable traitement constituait un autre moyen pour Joseph de les préparer à l’accepter comme leur frère lorsqu’il finirait par leur révéler son identité.41

24 Alors l’homme conduisit les frères à nouveau dans la maison de Joseph et leur donna de l’eau, et ils lavèrent leurs pieds ; et il donna du fourrage pour leurs ânes.

25 Ils préparèrent leur présent avant la venue de Joseph à midi, ayant appris que c’était là qu’on ferait le repas.

Joseph et ses frères se rencontrent à nouveau

26 Quand Joseph fut de retour à la maison, ils lui offrirent le cadeau qu’ils avaient apporté à l’intérieur, et ils se prosternèrent à terre devant lui.

27 Il s’enquit de leur bien-être et demanda : « Comment se porte votre vieux père dont vous avez parlé ? Est-il encore en vie ? »

28 Ils répondirent : « Ton serviteur, notre père, va bien ; il vit encore. » Ils s’inclinèrent et se prosternèrent à nouveau pour remercier Joseph de s’inquiéter de leur bien-être.

29 Joseph leva les yeux et aperçut son frère Benjamin, le fils de sa mère, et il dit : « Est-ce là votre jeune frère dont vous m’avez parlé ? » Et il dit, s’adressant à Benjamin : « Puisse Dieu t’être favorable, mon fils. » Benjamin n’était pas encore né quand, lors de sa rencontre avec Ésaü, Jacob avait qualifié ses enfants de faveurs issues de la bienveillance de Dieu ;42 c’est pourquoi Joseph souhaita lui conférer cette distinction à lui aussi.

Septième lecture – Chevii

30 Joseph sortit en hâte, car il était gagné par la compassion pour son frère et il avait besoin de pleurer. Il entra dans une chambre et y pleura.

31 Il se lava le visage et ressortit en retenant son émotion, et dit : « Servez le repas. »

32 On le servit, lui à part, et eux à part, et les Égyptiens qui mangeaient avec lui, à part, car les Égyptiens ne pouvaient prendre le repas en commun avec les Hébreux, car les Hébreux mangeaient des animaux que les Égyptiens adoraient,43 et c’était une abomination pour les Égyptiens. Aussi, Joseph ne put prendre le repas avec ses frères car il s’était présenté à ses frères comme Égyptien, et les Égyptiens ne pouvaient manger en compagnie de Joseph sachant que c’était un Hébreu.

33 Alléguant l’usage divinatoire de sa coupe, Joseph la frappa et annonça : « Ruben, Siméon, Lévi, Judah, Issa’har et Zeboulon sont tous nés dans cet ordre de la même mère ; aussi doivent-ils s’asseoir à une même table. Dane et Naphtali sont nés dans cet ordre à une seconde mère ; aussi doivent-ils s’asseoir à une autre table. Gad et Acher sont nés dans cet ordre à une troisième mère, et ils doivent s’asseoir à une troisième table. La mère de Benjamin ne vit plus, et la mienne non plus ; aussi doit-il s’asseoir à ma table. » Les frères s’assirent devant Joseph, l’aîné selon son âge et le plus jeune selon le sien, et ces hommes se regardèrent avec étonnement, se demandant comment Joseph avait pu connaître toutes ces informations exactes à propos de leur famille et comment il avait pu asseoir Benjamin, un Hébreu, à côté de lui. Joseph avait encore agi ainsi afin d’instiller dans leur esprit l’idée qu’ils se connaissaient mutuellement, de sorte qu’ils seraient plus enclins à le croire lorsqu’il finirait par dire qui il était.44

34 Il leur fit servir des parts de sa table. Après qu’ils furent tous servis, Joseph annonça : « Les dix autres sont venus ici de leur plein gré, mais Benjamin n’est venu que parce que je l’y ai forcé ; aussi mérite-t-il une part supplémentaire. » Il lui fit porter une autre part. Lorsque l’épouse de Joseph, Assenath, le vit agir ainsi, elle fit également servir à Benjamin une part supplémentaire ; et les fils de Joseph, Manassé et Ephraïm, firent de même.45  La part de Benjamin fut ainsi cinq fois plus importante que celle des autres. Depuis que les frères avaient vendu Joseph, ni eux ni lui n’avaient touché au vin. Ce jour-là cependant, ils burent avec lui et s’enivrèrent.

Joseph prépare son épreuve finale

44:1 Entre-temps, Joseph donna cet ordre à l’intendant de sa maison : « Remplis les sacs des hommes d’autant de vivres qu’ils peuvent en emporter, et dépose l’argent de chacun à l’entrée de son sac.

2 Et ma coupe – ma coupe d’argent que j’utilise pour la divination – mets-la à l’ouverture du sac du plus jeune avec l’argent de son produit. » Il exécuta ce que Joseph lui avait ordonné.

3 Aux premières lueurs du matin on fit repartir ces hommes, eux et leurs ânes. Lors de leur précédent départ d’Égypte, les frères avaient emmené avec eux l’âne et le sac de Siméon ;46 aussi Siméon partit à présent à pied et les mains vides, cherchant à acheter un autre âne en route.47

4 Ils venaient de quitter la ville et ne s’en étaient pas éloignés, quand Joseph dit à l’intendant de sa maison : « Va et poursuis ces hommes, et quand tu les auras rattrapés, dis-leur : “Pourquoi avez-vous rendu le mal pour le bien ?

5 N’est-ce pas là la coupe dont mon maître boit et dont il se sert pour la divination ? C’est une mauvaise action que la vôtre !” »

6 Il les rattrapa et leur dit ces mots.

7 Ils lui dirent : « Pourquoi mon seigneur tient-il de tels propos ? Ce serait déshonorant pour nous, tes serviteurs, de commettre une telle chose ! Dieu nous préserve de jamais faire une telle chose !48

8 De fait, nous avons apporté l’argent que nous avons trouvé à l’ouverture de nos bagages en revenant de Canaan. C’est la preuve éclatante de notre intégrité. Comment pourrions-nous voler de l’argent, de l’or de la maison de ton maître ?

9 Celui de tes serviteurs chez qui on la trouvera sera mis à mort, et nous-mêmes deviendrons les esclaves de mon seigneur. »

Les frères sont compromis

10 Il répondit : « Il en sera bien comme vous avez dit – car en effet, quand un objet volé est trouvé en possession d’un membre d’un groupe, tout le groupe est compromis ; j’agirai néanmoins envers vous avec indulgence : seul celui en possession de qui elle sera trouvée sera mon esclave, et vous autres serez innocentés. »

11 Ils se hâtèrent de descendre chacun son bagage à terre, et chaque homme ouvrit son bagage.

12 L’intendant fouilla en commençant par le sac du plus âgé pour finir avec celui du plus jeune, fouillant dans cet ordre de façon qu’ils ne le soupçonnent pas de savoir déjà dans quel bagage elle se trouvait, et la coupe fut découverte dans le bagage de Benjamin.

13 Ils déchirèrent leurs vêtements. Chacun rechargea son âne tout seul, car ils étaient tous très forts et n’avaient besoin d’aucune aide. Ils retournèrent à la ville. Convaincus d’être victimes d’une machination, ils commencèrent à deviser des plans pour de possibles éventualités, et se confortèrent à l’idée qu’ils pourraient venir à bout de la ville si la confrontation s’avérait nécessaire.

14 Judah et ses frères entrèrent dans la maison de Joseph, qui se trouvait encore là-bas, anticipant leur arrivée, et ils se jetèrent à terre devant lui.

MAFTIR

15 Joseph leur dit : « Quel acte venez-vous de commettre ? Avez-vous cherché à saper mon pouvoir en volant ma coupe de divination ? Ne savez-vous pas que les personnes de rang s’élèvent à leur poste de par leur propre intelligence, et qu’à ce titre un important personnage comme moi peut découvrir la vérité quant à la personne qui a volé la coupe par le raisonnement, même sans coupe de divination ? »

16 Judah répondit : « Que pouvons-nous dire à mon seigneur ? Nous nous savons innocents de ce crime, mais comment pouvons-nous parler de façon convaincante, comment pouvons-nous prouver notre innocence ? Comme nous n’avons aucun moyen de le faire, il est clair que Dieu a mis au jour l’iniquité passée de tes serviteurs et a trouvé un moyen de nous en punir. Nous sommes dès lors les esclaves de mon seigneur, et nous et celui en possession de qui la coupe a été trouvée. » Constatant qu’ils étaient piégés, Judah considéra que Dieu accomplissait à présent Sa prophétie à Abraham que ses descendants seraient esclaves dans un pays étranger.49

Joseph retient Benjamin

17 Mais Joseph répondit : « Ce serait déshonorant pour moi d’agir ainsi ! Celui en possession de qui la coupe a été trouvée, lui seul sera mon esclave ; quant à vous, retournez en paix chez de votre père. » Quand Judah entendit que Joseph souhaitait ne rendre esclave que Benjamin et pas le reste des frères, il comprit que Dieu n’accomplissait pas encore la prophétie de l’esclavage, comme il l’avait présumé. Il résolut donc de faire tout ce qui était possible pour empêcher Joseph de retenir Benjamin.50