Noa’h – Noé, le Déluge et les épisodes ultérieurs
La deuxième section du livre de la Genèse porte le nom de son personnage central, Noé (Noa’h en hébreu), et commence avec le récit du grand Déluge, qui purgea le monde de la dépravation et de la dégénérescence dans lesquelles l’humanité avait sombré depuis la création du monde. Il est ensuite fait le récit de la façon dont le monde fut partagé entre les fils de Noé, de la dispersion de l’humanité causée par l’épisode de la Tour de Babel et du prélude à la narration des sections à venir, relatives au prochain grand héros de l’humanité, Abraham.
Le mot Noa’h signifie « repos » et « tranquillité ». Et cependant, les événements de cette paracha sont tout sauf tranquilles. Le déluge cataclysmique est l’incarnation même du bouleversement et du trouble.
Cependant, si l’on considère le propos sous-jacent de ces épisodes et des résultats qui s’ensuivirent, nous pouvons voir que le nom Noa’h est parfaitement adapté. Aussi mouvementé qu’ait pu être le Déluge, sa finalité de guérir le monde d’un état de déchéance spirituelle bien plus calamiteux le rendit nécessaire. Le monde était encore relativement jeune, et toutes les formes de vie possédaient la pleine vigueur de la jeunesse, rendue d’autant plus manifeste par l’extraordinaire longévité humaine qui caractérisait cette ère. Et cependant, cette force était précaire, et à mesure que les créatures s’épanouirent et mûrirent, elles se rigidifièrent, devenant presque immuables ; il leur était quasiment impossible de changer. Et la dimension spirituelle de la vie était à l’avenant de la dimension physique dans la mesure où, lorsque le caractère des gens était façonné et que leur mode de vie avait pris corps, il était extrêmement difficile pour eux de changer. En outre, du fait que les normes sociétales devenaient de plus en plus corrompues, l’immense majorité de l’humanité fut entraînée dans une spirale infernale de dégénérescence morale.
Le Déluge transforma tout cela. Les eaux battantes adoucirent la terre au plan spirituel autant qu’au plan physique, et rendirent la réalité plus flexible et plus réceptive au changement. Le « Nouveau Monde » que Noé trouva en émergeant de l’arche1 fut un monde au sein duquel les vents du repentir (techouva) soufflaient librement, accessibles à tous, quel que fût le degré d’égarement chronique que leur conduite pouvait atteindre.
Aussi, lorsque Dieu affirma après le Déluge : « Il n’y aura plus jamais de déluge pour détruire la terre »,2 Il n’entendait pas se réconcilier avec ceux qui continuaient à pécher comme ils l’avaient fait auparavant, pas plus qu’Il n’admettait qu’en inondant la terre Il avait commis quelque bévue qu’Il ne reproduirait jamais. Il affirmait plutôt que, par le Déluge, Il avait altéré la réalité de telle façon qu’il ne serait jamais plus nécessaire d’amener un nouveau déluge, car Il avait désormais doté l’humanité d’une faculté nouvelle dont elle pourrait faire usage pour contrer et même éradiquer les effets d’une conduite négative.
Dans cette perspective, le Déluge constitua une avancée cruciale vers l’accomplissement de la finalité de la Création, à savoir, promouvoir et diffuser la conscience du divin dans le monde pour le transformer en une demeure naturelle de Dieu. Le message d’espoir que la Torah adresse au monde est qu’il n’est jamais trop tard ; que Dieu attend toujours de nous accueillir à nouveau à bras ouverts ; et que nous pouvons toujours recommencer à zéro, et même poursuivre dans la vocation donnée par Dieu jusqu’à l’accomplir avec un succès jamais imaginé par nous.
La leçon de cette paracha garde perpétuellement sa pertinence pour notre existence. Lorsque nous sommes confrontés à une situation particulièrement éprouvante ou tourmentée, il n’est pas inutile de nous rappeler que, tout comme le Déluge, cette situation intervient dans le but de nous purifier et de nous ennoblir. En nous concentrant sur l’opportunité que recèle notre épreuve plutôt que sur la difficulté qu’elle semble constituer, nous pouvons transformer les eaux déferlantes et destructrices en « eaux de Noé »3 – les eaux de tranquillité et de repos.
Et si, à l’instar de Noé, nous sommes assez sensés pour faire un usage avantageux de cette expérience, nous pouvons faire du monde entier un environnement plus propice à la conscience du divin, et le rendre ainsi plus proche de son accomplissement véritable et ultime. 4
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