Noé: vers un bien nouveau
Le monde d’avant le déluge fut une catastrophe. Les créatures se permettaient tout. Hommes et animaux ne respectaient pas les limites fixées par le Créateur. Chacun prenait, de force au besoin, ce qui lui faisait envie. Le bien était introuvable.
Puis D.ieu mit un terme à cette expérience et relança le monde et l’humanité sur de nouvelles bases.
Le monde qui suivit le déluge fut un « nouveau monde ». Un monde à même de révéler la beauté du Divin enfoui dans la création, comme la gouttelette de pluie fait jaillir l’arc-en-ciel caché dans la lumière du soleil.
La transition d’un monde à l’autre fut l’épisode du déluge. Et pendant que le monde subissait une métamorphose, l’humanité connaissait elle-aussi une transformation radicale.
Noé, « juste dans ses générations », apprit que la vertu qui était la sienne avant le déluge n’était plus suffisante au regard de la suite du projet divin. Il apprit que le bien que D.ieu attend de l’humanité était désormais bien plus élevé que ce qui était attendu du monde d’avant.
Le Rabbi de Loubavitch illustre cela avec un épisode relaté dans le Midrash :
La vie dans l’arche, enseignent nos Sages, était un aperçu des temps messianiques : les animaux cohabitaient sans s’entre-dévorer. Le loup habitait littéralement avec l’agneau.
Une personne, toutefois, ne vivait pas ces moments comme une délivrance. Noé travaillait sans répit à nourrir les animaux, servant à chacune des milliers d’espèces peuplant l’arche la nourriture appropriée, dans la quantité appropriée, au moment approprié. Pendant les mois que dura le confinement dans l’arche, Noé n’eut de vie que pour les précieux passagers que D.ieu Lui-même lui avait confiés.
Un jour, exténué, il tarda à apporter au lion sa pitance. On aurait pu imaginer que le lion se sente solidaire de Noé et qu’il accepte ce désagrément. Mais ce ne fut pas le cas. La mission de Noé était de le nourrir à l’heure, et cela n’avait pas été fait. Un instant, la nature féroce du lion réapparut en lui, et il rétribua la négligence de Noé par un énorme coup qui lui causa une profonde blessure.
Cet épisode exprime le degré de bonté qui devenait le nouvel idéal auquel le Créateur voulait que l’humanité s’applique : savoir que consacrer sa vie aux autres, fut-ce en sacrifiant son propre confort, voir au prix d’énormes souffrances, et ce, même pour « des animaux », ne justifie pas d’exiger, ni même d’attendre, la pareille en retour. Il s’agit de faire le bien pour le bien, de manière totale et authentique.
Seule cette attitude de vérité peut inspirer nos semblables à faire de même. Le bien ne se communique pas la force ou par la culpabilisation, mais en étant un exemple vivant.
C’est ce que Noé compris, et ce qu’il nous légua, à nous l’humanité, ses descendants.
Chabbat Chalom !
Emmanuel Mergui
au nom de l’équipe éditoriale de Chabad.org