L’herbe de Jérusalem

L’herbe est toujours plus verte dans le jardin du voisin. Achetez sa maison, et vous trouverez celle d’un autre voisin plus verte encore. C’est ainsi, le mauvais penchant essaie par tous les moyens de nous extraire de l’« ici » et du « maintenant » pour saboter notre mission. Car si nous sommes ici maintenant, c’est que nous devons faire de cet « ici » et de ce « maintenant » un lieu divin dans l’espace et dans le temps. Oui, nous pourrions apprécier le jardin du voisin, si nous étions lui. Mais nous sommes nous et nous devons apprendre à reconnaître les vertus de ce que D.ieu nous donne, de sorte à les développer, à les faire fructifier et à les transcender. Parce que c’est là, ici, maintenant, qu’Il nous a placés.

[Dans les jours qui viennent, des milliers d’élèves découvriront leurs nouveaux professeurs, et des milliers de professeurs découvriront leurs nouveaux élèves. Certains parmi eux pourront se dire qu’il eut été préférable que ce soit autrement. Qu’ils auraient préféré avoir tel brillant élève ou tel professeur exalté. Ou ne pas avoir tel ou tel. Que l’herbe est plus verte dans la classe d’à côté.

Pourtant ils seront là parce que D.ieu les y aura placés, parce que telle est la mission de leur âme. Tout au long de l’année scolaire, ces millions d’interactions interpersonnelles, petites ou grandes, passionnées ou banales, agréables ou difficiles constitueront autant de « plants » de vie qu’il faudra s’attacher à remplir de sens, de positif, de vision pour le présent et pour l’avenir. Sans s’y dérober, ni rêver de s’y dérober.]

Mais comment comprendre cette approche lorsqu’on appartient à un peuple dont les yeux sont rivés sur Jérusalem, et qui prie trois fois par jour à D.ieu de l’y ramener ? L’herbe de Jérusalem n’est-elle pas, elle au moins, plus verte que n’importe quelle autre ? Comment apprécier l’ici et le maintenant si nous sommes en exil ?

La réponse est que c’est justement cette vérité qui nous permet d’apprécier ce que nous avons. Si nous n’avions pas « Jérusalem » – qui signifie en hébreu « la perfection de la crainte de D.ieu » – comme point de mire, nous n’aurions aucune notion de ce qu’il convient d’apprécier. Et nous ne saurions pas reconnaître les « graines de Jérusalem », si ténues mais bien présentes, dans notre quotidien.

En attendant que D.ieu nous envoie le Machia’h qui nous ramènera à Jérusalem – et encore plus si l’on a déjà la chance et le privilège de s’y trouver –, ayons à cœur de faire de chaque minute de notre vie l’une des marches qui mènent au Troisième Temple.


Emmanuel Mergui
au nom de l’équipe éditoriale de Chabad.org