Les clochettes du grand prêtre
Dans notre paracha, il est fait obligation au Cohen Gadol, le grand prêtre, de pénétrer dans le Sanctuaire en « faisant du bruit ». Son vêtement était à cet effet muni de clochettes qui tintaient lorsqu’il se mouvait.
Mais ce qui est surprenant, c’est qu’il est précisé que ce bruit est pour lui une question existentielle : « Aaron devra porter ces ornements lorsqu’il effectuera son service, pour que le son s’entende quand il entrera dans le saint lieu devant D.ieu et quand il en sortira et qu’il ne meure point. » (Exode 28,35) Pourquoi la vie du Cohen Gadol devait-elle dépendre de ce bruit de clochettes ?
De fait, l’idée même de ce bruit dans le Sanctuaire semble déplacée, car c’est généralement le silence qui est la marque de la sainteté : la prière est à peine susurrée, le son du Choffar s’étouffe en sanglots.
Mais il y a pourtant une catégorie de Juifs chez qui la sainteté s’exprimer « bruyamment » : ce sont les baalei techouva, ceux qui reviennent vers D.ieu. Tout comme quelqu’un qui fuit un meurtrier ou un glissement de terrain en poussant de grands cris, ceux-ci fuient leur mauvais penchant et leur passé équivoque dans un grand tumulte, signe de vitalité et de résolution.
Or, le grand prêtre entre dans le Sanctuaire pour y représenter l’ensemble du peuple juif. Pas seulement les Justes dont le cheminement est structuré et progressif, mais aussi les fils rebelles qui reviennent vers leur Père de façon démonstrative. Faillir de représenter aussi ces Juifs-là n’était pas, pour le Cohen Gadol, une simple défaillance. Cela signifiait ne pas être le Cohen Gadol. Telle est la marque d’un véritable leader du peuple juif : celui qui représente et qui défend l’ensemble du peuple.