C’était quelques semaines avant ‘Hanouccah, en 2003. Dans notre synagogue de Postville, dans l'état de l'Iowa aux Etats-Unis, nous avions visionné une vidéo du Rabbi de Loubavitch, à l’issue de Chabbat. On y voyait un clip d’un homme qui déclarait au Rabbi qu’il s’appelait Robert mais n’avait jamais reçu de prénom juif. Le Rabbi répondait que puisque Robert commence avec la lettre R – qui ressemble à la lettre hébraïque « Rèch » - il devait adopter le prénom Réouven. Je trouvai cela intéressant mais sans y attacher une importance particulière et sans y repenser par la suite.

Je terminai mon mandat de conseiller de la mairie. Postville était devenu le point de mire de tous les médias, le sujet de nombreux commentaires, d’innombrables articles et même d’un livre. Le magazine Hadassa avait même dépêché une envoyée spéciale pour enquêter sur place.

L’histoire de cette ville était effectivement étonnante. Un groupe de ‘Hassidim de Loubavitch s’était installé dans cette ville du fin fond de l’Iowa, peuplée jusqu’alors uniquement de fermiers blancs et chrétiens. Comme les Loubavitch recherchaient une région reconnue pour la qualité de sa viande, ils avaient acquis un terrain à Postville afin d’y établir un abattoir industriel et donc une communauté avec toutes les structures éducatives et sociales nécessaires : école, synagogue, Mikvé, magasins cachères etc… C’était devenu une success-story à la gloire de la diversité et de la bonne entente entre les différentes populations.

Le Rav Aaron Schimel avait préparé un fantastique programme pour ‘Hanouccah auquel il avait convié toute la communauté juive, mais aussi les habitants non-juifs. Différents stands proposaient beignets de pommes de terre, pizzas cachères et travaux manuels pour les enfants : fabriquez votre propre Menorah !

Moché Yess, animateur et chanteur, avait fait rire et chanter tout le monde. Il avait raconté ses plaisanteries favorites sur son retour à la pratique du judaïsme et comment de « Hippie » il était devenu « ‘Happie » (un mot qu’il avait formé avec les mots ‘Hassid et hippie).

Puis arriva le moment tant attendu, l’allumage des lumières de ‘Hanouccah en présence du maire de Postville. Je remarquai une femme-photographe et j’appris qu’elle était envoyée par le magazine Hadassa.

Le lendemain, j’entrai dans un magasin cachère et aperçus la femme-photographe qui semblait un peu perdue dans cet environnement. Je me présentai et lui demandai si elle avait apprécié sa visite dans notre ville. Elle répondit qu’elle s’était sentie très à l’aise. Je lui demandai si elle avait appris quelque chose de nouveau et elle rétorqua : « Oui, j’ai appris la différence entre un Hippie et un « ‘Happie ».

Sa réponse me surprit, non pas tant parce qu’elle s’était souvenue des plaisanteries de Moché Yess, mais parce qu’elle avait prononcé le « ‘H » de « ‘Happie » de la façon gutturale propre au judaïsme. Je m’enhardis et lui demandai :

- Etes-vous juive ?

- Oui ! répondit-elle de façon très naturelle.

- Et comment vous appelez-vous ?

- Arwin.

- Arwin ? Je n’ai jamais entendu un tel prénom ! Que signifie-t-il ?

- Mes parents s’intéressaient aux philosophies orientales et c’est de là que provient mon prénom.

Je lui demandai si elle avait aussi un prénom hébraïque, mais elle secoua la tête négativement.

Nous avons discuté un moment sur l’importance d’un prénom juif puis je proposai de lui en trouver un. Cette idée l’enthousiasma. C’est alors que je me souvins de la vidéo du Rabbi que nous avions eu le privilège de visionner quelques semaines auparavant. Son prénom civil commençait par un A, soit l’équivalent du « Alef » hébraïque : le prénom Ariella me semblait convenir parfaitement. Elle sourit : « J’aime cette sonorité, cela me semble un très beau prénom, mais que signifie-t-il ? »

- C’est la forme féminine d’Ariel, qui signifie « lion de D.ieu ».

Elle redevient très sérieuse et remarqua, pensive : « Vous n’allez pas le croire mais le prénom « Arwin » signifie justement « lionne de D.ieu » !

Comment décrire nos impressions devant cette mystérieuse « coïncidence » ? Nous avons longuement discuté du Rabbi de Loubavitch et de Robert devenu Réouven, de la Providence Divine et du don de la prophétie que D.ieu accorde aux parents lorsqu’ils choisissent un prénom pour leur enfant.

Arwin – Ariella était très émue par son miracle de ‘Hanouccah personnel.

Peut-être que la photographe de Hadassa Magazine qui était venue prendre des photos des Juifs de Potsville finit-elle par prendre une nouvelle image d’elle-même...

Aaron Goldsmith - L’Chaim