L’un des sentiments les plus terribles et les plus effrayants est celui de se sentir piégé. Lorsqu’il n’y a pas d’issue. Quand on est bloqué de toutes parts. C’est une situation qui peut arriver, à D.ieu ne plaise, littéralement, en termes physiques, dans un contexte de violence ou de guerre. C’est aussi une situation qui peut survenir dans les aléas d’une carrière ou lors de relations humaines difficiles. Être piégé est aussi quelque chose qui peut arriver à une personne, dans son propre esprit et dans son cœur. Piégée, incapable d’évoluer librement, coincée. Comme le Pharaon, souverain d’Égypte, dans la Paracha de cette semaine.
En quoi était-il pris au piège ? Pharaon était l’oppresseur des Juifs. C’étaient plutôt eux qui étaient piégés. En quoi, lui, l’était-il ?
Notre Paracha commence en nous disant que D.ieu « avait endurci le cœur de Pharaon ». A cause de cela, celui-ci n’était plus capable de répondre aux avertissements de Moïse et à la série de plaies qui s’abattaient sur l’Égypte l’une après l’autre. D.ieu avait piégé Pharaon dans une position de défiance et il semblait qu’il n’y avait rien que le roi égyptien put faire pour s’en sortir. Il devait suivre l’inexorable cours des choses qui le menait à la destruction.
Nos Sages ont commenté cela. Comment est-ce possible ? D.ieu accorde pourtant le libre arbitre ! Est-il juste de punir Pharaon quand son refus de reconnaître D.ieu lui est imposé, en l’occurrence par D.ieu Lui-Même ?
L’une des solutions les plus célèbres à ce dilemme est celle donnée par Maimonide. Le durcissement du cœur de Pharaon fut en soi une punition pour la façon cruelle dont il avait traité le peuple juif. Quand quelqu’un fait le mal, il s’enlise dans une position de laquelle il ne peut plus s’échapper. Ceci en soi fait partie de la punition pour son méfait.1
Nous trouvons à ce propos un récit dans le Talmud à propos d’un rabbin, Élicha fils d’Abouya, surnommé A’her, « l’autre », qui abandonna le chemin du Judaïsme. De nombreuses raisons sont données à cela, parmi lesquelles l’influence de la culture grecque, la perplexité devant la souffrance des innocents et le fait d’avoir tiré les mauvaises conclusions d’une expérience mystique. En conséquence, il cessa d’observer la loi Juive. Et puis, à un certain moment de sa vie d’errance, il entendit une voix divine proclamer : « Repentez-vous, enfants capricieux, à l’exception d’A’her. »2 Il utilisa ceci plus tard comme excuse pour le fait de ne s’être jamais repenti.
L’exclusion d’A’her de l’invitation générale au repentir faisait partie intégrante de sa punition, comme dans le cas de Pharaon.
Cependant, l’enseignement juif dans toutes ses diverses dimensions n’est pas aussi simple. Un commentaire important du Talmud, discutant du cas d’A’her, statue : « Pourtant, il n’aurait pas dû prendre cela en considération… Rien ne résiste à la Téchouva (repentance). »3
L’enseignement ‘hassidique nous dit que, quelle que soit la profondeur de l’abîme dans laquelle une personne ait sombré, et quand bien même il apparaît que D.ieu Lui-Même l’a piégée dans son propre mal, la repentance est toujours possible. Elle peut s’avérer plus difficile que d’ordinaire, voire beaucoup plus difficile ou même incroyablement difficile, mais elle est toujours possible. Piégé ? Non, pas piégé. Quiconque, et même l’ancien Pharaon, peut toujours sortir du piège et retourner vers D.ieu. Nous sommes toujours libres.4
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