7 Une femme qui est dégradée. Une femme appartient à cette catégorie si :1

(a) elle est la fille d’un prêtre et d’une femme qui n’est pas autorisée à épouser un prêtre, c’est-à-dire fille d’un prêtre et d’une divorcée, ou d’un grand prêtre et d’une veuve ou d’une non-vierge.2

(b) elle est la fille d’un prêtre qui a été dégradé de la prêtrise, que ce soit temporairement3 ou dès sa naissance.4

(c) elle n’est pas autorisée à épouser un prêtre (parce qu’elle est divorcée, par exemple, ou qu’elle a cohabité avec quelqu’un qui lui est interdit comme époux par la loi de la Torah, comme l’indique ce verset), et a tout de même des relations avec lui.

(d) elle n’est pas autorisée à épouser un grand prêtre (parce qu’elle est veuve ou non vierge, par exemple), et a néanmoins des relations avec lui.

Les femmes citées dans les cas (c) et (d) ne sont autorisées à épouser le prêtre par qui elles ont acquis leur statut de femmes dégradées ni aucun autre prêtre.

11 Pour enterrer un cadavre. L’obligation du grand prêtre de se rendre rituellement impur pour ensevelir un défunt dans le cas où personne d’autre ne se trouve là pour le faire s’applique même dans la circonstance, certes peu probable, où cela se passerait pendant qu’il procède aux sacrifices de Yom Kippour dans le Saint des Saints. Si personne n’est en mesure d’enterrer ce corps, le grand prêtre doit quitter le lieu le plus saint du Tabernacle le jour le plus saint de l’année pour accomplir cette tâche. Cela nous enseigne avant tout que veiller aux besoins cruciaux de nos frères juifs prime sur le souci de nos propres tâches d’ordre spirituel.

Deuxièmement, il nous arrive parfois de rencontrer des personnes qui, au sens figuré, semblent être des « corps inanimés, restés à l’abandon », c’est-à-dire qui ne se soucient pas de l’aspect spirituel de leur vie et qui n’ont personne pour les guider dans ce domaine. Dans de tels cas, il nous faut saisir l’occasion de leur venir en aide, nous rappelant que même le grand prêtre est censé ignorer jusqu’à ses plus sublimes devoirs le jour saint de Yom Kippour pour enterrer un défunt qui se trouve abandonné. Quant à nous, nous avons à la fois l’obligation et le privilège, non seulement de venir en aide à une personne « sans vie », mais encore de la ramener à la vie !5

27 Sept jours durant. La signification mystique de cette loi est la suivante :

« La mère » représente ici l’intellect, car c’est lui qui « engendre » les émotions. Lorsque l’intellect reconnaît la valeur d’une chose ou d’une personne, il « donne naissance » à un sentiment d’amour pour elle ; lorsqu’il décèle le caractère indésirable ou nocif d’une chose ou d’une personne, il « donne naissance » à un sentiment de dégoût ou de peur à son égard, et ainsi de suite.

« L’animal » caractérise les sentiments, car les animaux sont mus par des pulsions plutôt que par leur intellect.

Lorsqu’un sentiment « naît », il doit être porté à maturité par l’intellect. Ce processus couvre un parcours de sept étapes qui sont autant de « jours », à raison d’un jour pour chacun des attributs émotionnels de base. C’est une fois seulement que les sentiments ont été portés à maturité qu’ils peuvent constituer « une offrande à D.ieu », autrement dit qu’ils deviennent dignes d’intégrer l’esprit d’un homme dévoué au service de D.ieu.6

31-33 Le don de soi. En règle générale, si nous avons à choisir entre transgresser un commandement ou mourir, l’ordre est de transgresser le commandement. Les exceptions à cette règle sont les suivantes :

• Les actes d’idolâtrie, la pratique de relations charnelles interdites et le meurtre : si nous nous trouvons face au dilemme de commettre ces transgressions ou d’être tués, notre choix doit être la mort.

• En cas de répression religieuse réalisée en public : si, pour éliminer la pratique du judaïsme, on nous enjoint d’enfreindre l’un des autres commandements sous peine de mort et qu’au moins dix hommes juifs adultes en sont témoins, c’est la mort que nous devons choisir. Autrement, nous devons transgresser le commandement.

• En cas de répression religieuse au niveau national : si le gouvernement a interdit la pratique du judaïsme et en a fait un crime capital, nous devons choisir la mort plutôt que de violer un commandement, même en privé.

Sacrifier sa vie dans tous les cas où nous sommes tenus de le faire est « sanctifier le Nom de D.ieu » ; décider de ne pas sacrifier sa vie lorsque nous sommes tenus de le faire, c’est « profaner le Nom de D.ieu.7

En outre, tout acte rebelle et intentionnel de désobéissance à la volonté de D.ieu constitue une profanation de Son Nom, et tout accomplissement de la volonté de D.ieu effectué pour lui-même et non pas en raison de motivations autres constitue une sanctification de Son Nom.

Enfin, tout acte qui discrédite la Torah ou son effet sur ceux qui observent ses lois – comme le serait une conduite immorale ou vulgaire menée par un Juif pratiquant – constitue une profanation du Nom de D.ieu, et tout acte qui contribue à renforcer la dignité de la Torah ou ses effets sur ceux qui observent ses lois – encourageant ainsi son étude et l’observance de ses commandements – constitue une sanctification du Nom de D.ieu.8

32 Vous ne profanerez pas. L’exil constitue la profanation la plus flagrante du Nom de D.ieu. La nature existentielle de l’exil consiste en la dissimulation du Divin dans le carcan de la cause et de l’effet naturels ; aussi, l’exil transmet au monde l’impression que D.ieu n’est pas à même de l’emporter sur les forces de la nature et de l’histoire. Dans ce contexte, la plus grande sanctification du Nom de D.ieu aura lieu à l’ère messianique.9

Comme nous l’avons vu,10 D.ieu accomplit tous les commandements dans leur sens cosmique. Si ce principe est valable pour tous les commandements en général, il doit très certainement l’être pour le commandement majeur de sanctifier Son Nom ! Aussi, il est impératif de Sa part, pour ainsi dire, d’amorcer l’ère messianique.

Quant à nous, nous devons constamment « rappeler » à D.ieu Son obligation, à la fois en exigeant de Lui qu’il nous délivre sur-le-champ et en effectuant la réorientation de notre conscience afin de la mener de la mentalité d’exil à celle de la délivrance.11

Que Je puisse être sanctifié. Ce verset décrit le processus en trois étapes par lequel nous pouvons amener la présence de D.ieu dans notre vie quotidienne.

Ne profanez pas. Ces mots signifient également « Ne créez pas de vide ». Nous ne devons pas permettre qu’un écart se crée entre nous et D.ieu. Nous évitons cela en surmontant l’apathie et en agissant conformément à la volonté de D.ieu.

Afin que Je puisse être sanctifié. Le mot hébreu pour « sanctifié » ou « saint » signifie également « séparé », « au-delà » ou « transcendant ». Méditer sur la transcendance de D.ieu (un des thèmes principaux de la liturgie quotidienne du matin) tout en restant conscients de Sa proximité avec nous ravivera les flammes de notre amour inné et ardent pour Lui. Ainsi, une fois que nous aurons éliminé le vide artificiel qui nous sépare de D.ieu, nous pourrons attiser les braises de nos âmes, jusque-là dormantes, et les transformer en un feu dévorant qui éveillera notre amour intérieur de D.ieu, le feu qui brûle parmi (littéralement, « dans ») chacun de nous.

Parmi les enfants d’Israël. Le mot « parmi » signifie également « dans », ce qui signifie que la méditation continuelle sur la transcendance de D.ieu permettra à cet enthousiasme renouvelé de pénétrer dans nos cœurs et imprégner ainsi d’amour de D.ieu notre conscience.

Je suis l’Éternel, Qui vous sanctifie. D.ieu répondra alors à notre élan et manifestera Sa transcendance dans notre vie. Le pronom « Je » fait référence dans ce verset à l’essence de D.ieu (qui est normalement au-delà de toute révélation) ; le nom Havayah décrit ensuite le processus par lequel D.ieu « contracte » Son essence et la manifeste dans notre vie, faisant de nous des êtres humains « sanctifiés », c’est-à-dire vivant leur vie ordinaire sur le plan de la transcendance de D.ieu. Dans ce contexte, le feu de notre amour pour D.ieu est le « creuset » dans lequel nous forgeons les vases qui contiendront et conserveront la conscience transcendante du Divin, ces vases étant notre étude de la Torah et notre observance de ses commandements.12

2 Le Sanhédrine intercalera un mois. Étant donné que l’année solaire est environ onze jours plus longue que l’année lunaire, il est nécessaire d’intercaler périodiquement un mois supplémentaire dans notre calendrier (lunaire pour le déroulement des mois) afin de garantir que les fêtes – qui se célèbrent à des dates fixées – se déroulent pendant la saison appropriée.13 En conséquence, lorsque le calendrier juif fut établi, au milieu du IVe siècle,14 on détermina par calcul, pour chaque période de dix-neuf ans, sept années dites « embolismiques », dans lesquelles on ajoute un mois supplémentaire avant celui d’Adar.15

4 Ils détermineront. Le système institué pour déterminer quel jour devait être « sanctifié » comme le premier de chaque mois – fondé sur les calculs du Sanhédrine et les dépositions des témoins – resta en vigueur jusqu’au milieu du IVe siècle de notre ère, lorsque Hillel II, alors à la tête du Sanhédrine, établit l’usage d’un calendrier fixe, qui est le calendrier que l’on emploie encore de nos jours. Hillel II s’était vu contraint d’abandonner l’ancien système en raison de la grande diminution de la population juive en terre d’Israël, de la persécution des Juifs par le gouvernement byzantin (rendant dangereuses les dépositions des témoins) et de la dissolution imminente du Sanhédrine. Le système original sera rétabli, conjointement avec le renouvellement du Sanhédrine, lors de la Délivrance messianique.16

14 Dans toutes vos demeures. Bien qu’il soit permis dès lors de consommer le produit de la nouvelle récolte de grains, il n’est pas permis d’en apporter d’offrande de grain (autre que l’omer d’orge prescrit, que l’on vient de mentionner) jusqu’à Chavouot, comme cela va être décrit.

15 Vous compterez pour vous sept semaines. D.ieu nous permet chaque année à Pessa’h de faire l’expérience d’une renaissance, individuellement et collectivement. Tout comme D.ieu renouvelle miraculeusement la nature chaque printemps, Il nous donne une inspiration nouvelle chaque Pessa’h, nous libérant de la servitude glaciale, déprimante, des forces de l’entropie matérielle et spirituelle, enracinées dans la conscience matérialiste de notre âme animale. Cependant, étant donné que ce saut infini (Pessa’h signifie en hébreu « sauter ») est dans une large mesure un acte accompli par Lui, il ne réussit pas à nous transformer d’une manière durable. Cela peut uniquement s’accomplir par l’acceptation renouvelée de la Torah, qui a lieu à Chavouot, et la façon dont nous nous préparons pour Chavouot est en comptant l’omer.

Notre âme animale inclut intellect et émotions. Quand le Temple existait, l’offrande de l’omer rectifiait l’intellect animal. Pour cette raison, c’est la seule offrande de grain faite au nom de la communauté qui est constituée d’orge,17 une céréale utilisée d’abord comme nourriture des animaux. Aujourd’hui, tout ce que nous pouvons faire en remplacement est d’étudier les lois et la signification de l’omer afin d’accomplir ce que l’offrande elle-même réalisait. Dans la mesure où tout intellect, y compris celui de l’âme animale, est prédisposé à l’intellectualité, il est relativement simple de le raffiner. Ce qu’il faut changer en lui n’est que sa cible, la réorientant vers le Divin. Ce processus peut donc aboutir par un seul acte et en un seul jour.

La rectification des émotions présentes dans l’âme animale exige, par contre, un travail plus ardu, car les émotions n’ont pas seulement à être réorientées mais encore refaçonnées. En conséquence de cela, le processus est plus complexe, et s’accomplit (que le Temple soit présent ou absent) par le processus au cours duquel sont comptées les sept semaines de l’omer.

L’expression même du commandement fait allusion à ce processus. Le mot hébreu pour « vous compterez » (ousfartem) peut également être traduit par « vous rendrez lumineux ». Ainsi, Rabbi Chneour Zalman de Liadi interprète ce verset comme suit :

Vous vous rendrez lumineux : vous devez vous purifier à tel point que votre sainteté intérieure rayonne et éclaire votre vie. Ceci est accompli en travaillant sur vos – sept semaines ; elles doivent être entières : raffinez les sept attributs émotionnels de votre âme animale, transformant chacun en une gamme complète de ces sept émotions.18

La leçon de « compter » et de « rendre lumineux », le processus de raffinement spirituel et de maturation, continue après Chavouot et se déroule tout au long de l’année. Nous devons compter constamment ; chaque jour – chaque heure même – doit être considéré comme une occasion de parvenir à une croissance spirituelle supérieure. Au terme du jour, nous devons être à même d’évaluer ce que nous avons accompli et ce qui reste encore à faire.

En outre, au fur et à mesure que l’on compte, le nombre va toujours en augmentant : nous devons veiller à ce que ce jour-ci soit meilleur qu’hier, et que demain soit encore meilleur qu’aujourd'hui.19

16 Le cinquantième jour. La compréhension est constituée de cinquante « portes » ; autrement dit, il existe cinquante degrés généraux de conscience du Divin que nous pouvons aspirer à atteindre. Les quarante-neuf premières portes sont celles que nous pouvons atteindre grâce à nos propres efforts, mais la cinquantième est le degré suprême que D.ieu nous accorde en reconnaissance de notre succès à être parvenus aux quarante-neuf premières par nous-mêmes. Les quarante-neuf jours du « compte de l’omer » correspondent aux quarante-neuf premières portes ; à chaque jour du compte, nous atteignons potentiellement un degré plus élevé de conscience du Divin. C’est la raison pour laquelle notre compte va dans un sens croissant plutôt que d’aller à rebours jusqu’au don de la Torah. Le cinquantième jour du compte, Chavouot, est le moment où D.ieu nous offre la cinquantième porte, ce qu’il fait à travers la nouvelle révélation de la Torah que nous recevons en ce jour.

La cinquantième porte étant ainsi un cadeau de D.ieu, ce jour n’est pas inclus dans notre compte. Pourtant, la Torah (au moins littéralement) nous indique de « compter cinquante jours » et de considérer le cinquantième comme faisant partie de notre compte ; la raison en est que la révélation de la cinquantième porte, qui a lieu à Chavouot, dépend de tous les efforts que nous avons investis afin d’atteindre les quarante-neuf portes précédentes.20

De plus, l’ordre de « compter cinquante jours » peut être compris comme une exhortation à dépasser notre potentiel. Chacun de nous possède quarante-neuf portes différentes, en fonction du degré de conscience du Divin où nous nous trouvons à présent. Même lorsque nous ne pouvons pas atteindre notre cinquantième porte actuelle par nous-mêmes, une fois que nous avons élargi notre conscience du Divin, un nouvel ensemble de cinquante portes apparaît à nos yeux. Ainsi, dans ce sens, arriver à la « cinquantième porte » signifie nous élever au-delà de notre niveau de conscience actuel et atteindre un nouvel horizon de conscience du Divin, avec ses propres cinquante nouvelles portes.21

L’élévation ultime dans la conscience du Divin se produira, bien entendu, dans le futur messianique. Ainsi, le compte de l’omer nous prépare également à la révélation ultime des dimensions les plus profondes de la Torah, qui aura lieu dans cette nouvelle ère.22

17 Ils seront cuits à pâte levée. Le pain à pâte levée représente l’ego, la conscience de soi et l’égocentrisme, tandis que le pain sans levain, qui reste plat, rappelle l’oubli de soi et le désintéressement. Aussi, on pourrait penser que la Torah devrait interdire la consommation de pâte levée durant toute l’année, et non seulement à Pessa’h.

En effet, dans le Temple, la plus grande partie des offrandes de grain étaient dépourvues de levain, et même les quelques pains levés qui étaient autorisés se voyaient explicitement interdits d’être offerts sur l’autel.23 La révélation manifeste de la Présence Divine dans le Temple exige que nous fassions preuve d’un oubli de soi presque absolu lorsque nous nous trouvons dans son enceinte. À l’opposé, une fois que nous quittons l’enceinte du Temple pour accomplir notre mission divine dans le monde matériel, nous devons manifester au moins un peu d’affirmation de soi afin d’imposer notre vision du Divin à un monde qui y est peu enclin ou même carrément hostile. C’est la raison pour laquelle la consommation de pain levé hors du Temple est autorisée.

Cependant, afin de garantir que ce qui s’affirme dans ce processus n’est pas l’âme animale, matérialiste, mais notre moi divin – notre âme divine –, il nous faut d’abord nous abstenir de levain de manière temporaire bien qu’absolue. L’expérience d’une période caractérisée par un intense oubli de soi au début de notre renouveau spirituel annuel permet à notre âme divine d’acquérir la puissance dont elle a besoin pour assumer le rôle dominant dans notre conscience quotidienne. C’est la raison pour laquelle à Pessa’h le levain est interdit. La spiritualisation et la maturation de notre âme animale qu’accomplissent l’offrande de l’omer et le compte de l’omer nous permettent d’affirmer notre ego – de consommer du hamets – sans risque. En effet, une fois que nous sommes prêts, l’affirmation de soi signifiée par le ‘hamets est non seulement autorisée mais exigée, car nous ne voulons pas seulement soumettre l’âme humaine/animale et la raffiner, mais encore la mobiliser pour notre mission divine.24

21 Comme une occasion sainte. Alors que les fêtes de Pessa’h et Souccot sont toutes deux célébrées pendant une semaine entière, Chavouot ne dure qu’un jour.25 Ceci est dû au fait que Chavouot représente le fait de revivre chaque année la révélation qui eut lieu lorsque la Torah fut donnée au mont Sinaï. Cette expérience de l’essence infinie de D.ieu transcende les limites du temps ; aussi, nous n’avons pas besoin d’une semaine entière pour l’assimiler dans la gamme complète de nos émotions.26

22 Lorsque vous récolterez. Ces lois sont répétées ici, au milieu des lois concernant les sacrifices propres à chaque fête, afin de comparer ces épis épars à des sacrifices : dans les deux cas, nous cédons de manière absolue une partie de nos biens, durement gagnés, afin de les consacrer aux finalités divines.

24 Le souvenir de la sonnerie du chofar. La sonnerie du chofar le premier jour de l’année suscite une nouvelle énergie divine qui soutiendra la création entière – spirituelle comme matérielle – pour cette année. Cependant, lorsque Roch HaChana tombe un Chabbat, on ne sonne pas du chofar :27 on ne fait que « se souvenir » de lui en le mentionnant dans nos prières.

En effet, sonner du chofar le Chabbat n’est pas seulement superflu, mais inutile. Comme nous le verrons,28 la question au cœur de Roch HaChana est la souveraineté de D.ieu sur nous. Sonner du chofar au moment du « couronnement » de D.ieu constitue la déclaration de notre volonté de renouveler notre oubli de soi et notre soumission volontaire à Sa souveraineté. Or, la nécessité d’une telle déclaration sous-entend que notre perception de nous-mêmes est celle d’êtres indépendants qui, en tant que tels, se soumettent à D.ieu de leur propre gré. Cette perception de nous-mêmes comme des êtres indépendants est le trait distinctif de notre conscience pendant les jours ouvrables. Le Chabbat, par contre, lorsque nous sommes pénétrés de la conscience accrue du Divin inhérente au jour même, une telle déclaration devient redondante.29

34 La fête de Souccot. Le moment de Souccot coïncide avec l’engrangement de la moisson, qui se déroule une fois que le soleil de l’été a séché les épis récoltés depuis Pessa’h (orge) et Chavouot (blé), et fait mûrir les fruits. Dans ce contexte, il s’agit de l’une des trois fêtes de pèlerinage qui servent d’occasion de louer D.ieu pour nous avoir donné les fruits de la terre comme moyens de subsistance. Les trois fêtes de pèlerinage commémorent également la sortie d’Égypte : Pessa’h et Chavouot se passent aux dates historiques de la sortie d’Égypte et de son point culminant, le don de la Torah ; Souccot, pour sa part, commémore les nuées de Gloire qui entouraient le peuple lors de son périple dans le désert, d’Égypte à la terre d’Israël. Quant aux célébrations de Roch HaChana et Yom Kippour, elles ne sont associées au cycle agricole pas plus qu’elles ne rappellent explicitement la sortie d’Égypte. C’est ainsi que nous avons, dans cette partie de la Torah, deux ensembles de fêtes apparemment indépendants : les fêtes de pèlerinage et les « grandes » fêtes.

Néanmoins, le fait que Souccot (et sa fête associée, Chemini Atséret) soit célébrée presque immédiatement après les fêtes de Roch HaChana et Yom Kippour la lie naturellement à ces dernières, ce qui accorde à Souccot, outre son sens agricole et historique, un troisième degré de signification, celui d’être la conclusion de la période des « grandes fêtes », qui ont lieu au mois de Tichri.

Dans ce contexte, il nous est enseigné qu’à Souccot et Chemini Atséret, ainsi qu’à Roch HaChana et Yom Kippour, nous devons renouveler et revitaliser notre relation avec D.ieu en tant que relation sujet-roi, suscitant ainsi l’influx nouveau et accru de force de vie divine lié à la nouvelle année. La différence entre les deux premières et les deux dernières fêtes se situe dans le fait que, tandis que dans les premières nous nous concentrons sur D.ieu d’une manière qui produit en nous la crainte révérencielle pour Lui – c’est pourquoi ces jours sont couramment appelés les « jours redoutables » –, au cours des dernières nous nous concentrons sur Lui d’une manière qui suscite en nous l’amour pour Lui. Ainsi, ce que nous accomplissons à Roch HaChana et à Yom Kippour par la prière révérencielle et prolongée et la contrition introspective s’accomplit à Souccot et à Chemini Atséret par la joie. En particulier, la croissance spirituelle qui se produit dans les recoins intérieurs de notre cœur ou dans les pièces intérieures du Temple pendant les jours redoutables se révèle au cours de Souccot et de Chemini Atséret.

Aussi, les rites de Souccot reflètent ceux des « jours redoutables » :

• Le rite majeur de Roch HaChana est la sonnerie du chofar. Traditionnellement, cette sonnerie consiste en cent sons : soixante sons longs (tekiot), vingt sons de lamentations (chevarim) et vingt sons saccadés (terouot).30 Ces chiffres sont identiques aux valeurs numériques des trois lettres qui composent le mot signifiant « toit de branchage » (sekhakh), le toit qui couvre la soucca : soixante, vingt, vingt.31

• Les sept jours séparant Roch HaChana de Yom Kippour correspondent aux sept jours de Souccot.

• Le point culminant des rites de Yom Kippour dans le Temple était l’offrande d’encens, qui produisait une nuée de fumée dans le Saint des Saints. Les facettes de la révélation divine incarnées dans cette nuée de fumée sont les mêmes que celles qu’exprime le toit de branchage recouvrant la soucca, comme il sera expliqué plus bas.32

40 Ces quatre plantes. Le Midrach.33 souligne que ces quatre plantes diffèrent entre elles par leur goût et leur parfum. Il note ensuite que le goût et le parfum sont des métaphores appropriées pour désigner, respectivement, l’étude de la Torah et l’accomplissement des commandements de D.ieu, et les bonnes actions en général : puisque c’est l’étudiant qui jouit en premier des bienfaits de l’étude, celle-ci est représentée par le goût, le goût n’étant ressenti que par celui qui mange le fruit. Les bienfaits des bonnes actions profitant à un groupe étendu de personnes, elles sont représentées par le parfum, dans la mesure où quiconque se trouve situé à une distance raisonnable du fruit peut le sentir.

Prenant appui sur ces associations, le Midrach identifie les quatre plantes en tant que symboles de quatre types de personnes, classées d’après leurs accomplissements religieux :

• Le cédrat, savoureux et au parfum agréable, représente ceux qui sont riches à la fois en connaissance de la Torah et en bonnes actions.

• La branche de palmier, dont le fruit (la datte) n’a aucun parfum mais est savoureux, désigne ceux qui étudient la Torah mais n’ont pas de bonnes actions.

• Le myrte, qui sent bon, mais n’a pas de goût, représente ceux qui sont riches en bienfaits mais démunis en ce qui concerne l’étude de la Torah.

• Le saule, dépourvu de saveur comme de parfum, fait allusion à ceux qui manquent à la fois de connaissances de la Torah et de bonnes actions.

Bien sûr, tous les Juifs possèdent une certaine connaissance de la Torah, et sont, dans les paroles des sages, « pleins de [mérites dérivés de l’accomplissement des commandements de D.ieu] comme une grenade [est pleine de grains] » ;34 la différence concerne seulement l’importance relative qui leur est accordée. En outre, dans la mesure où l’étude de la Torah constitue une recherche intellectuelle tandis que les bonnes actions relèvent d’un engagement émotionnel, ces quatre catégories représentent également les différents degrés d’implication intellectuelle ou émotionnelle dans la vie religieuse que chacun peut éprouver :

• Le cédrat représente ceux qui sont impliqués par l’intellect comme par l’émotion.

• La palme représente ceux qui sont impliqués par l’intellect mais non par l’émotion.

• Le myrte représente ceux qui sont impliqués par l’émotion mais non par l’intellect.

• Le saule représente ceux qui ne sont impliqués ni par l’émotion ni par l’intellect ; leur engagement est uniquement fondé sur leur foi innée en D.ieu et leur sens de l’autodiscipline.

En réunissant ces quatre plantes, nous unifions tous les éléments qui constituent notre peuple.35

42 Vous habiterez dans des cabanes (souccot). La soucca se démarque de tous les commandements de la Torah en ce sens que c’est le seul dans lequel nous pénétrons physiquement ; la soucca nous entoure de tous côtés. Cette caractéristique de la soucca est une manifestation concrète de l’énergie divine qu’elle incarne : la transcendance de D.ieu. Comme on l’a mentionné ci-dessus,36 la soucca est issue spirituellement de la nuée que dégageait l’encens allumé par le grand prêtre dans le Saint des Saints le jour de Yom Kippour. Alors que les sacrifices d’animaux mettaient l’accent sur le raffinement de notre âme animale, l’encens exprimait la conscience intérieure de notre âme divine.37 Notre âme divine opère sur un plan plus élevé que celui où siège notre conscience normale, humaine/animale. L’âme divine nous permet de transcender les limites imposées à notre vie par l’âme animale, dont l’intellect et les émotions n’ont trait qu’au domaine de la matière. Ainsi, notre tâche lors de la fête de Souccot est, en premier lieu, de porter le regard sur le caractère illimité de D.ieu en construisant la soucca ; puis d’intérioriser cette conscience du Divin en demeurant dans la soucca et, comme il a été expliqué auparavant, en accomplissant le commandement de tenir et de balancer les quatre plantes.

La conscience transcendante que nous obtenons dans la soucca nous permet de transcender les différences présentes entre nous et autrui, ainsi que les aspects, normalement en conflit, de notre propre psychisme. Ainsi donc, la soucca favorise la paix. Le fait même que la soucca entoure tous ceux qui s’y trouvent sans distinction nous rappelle également qu’en dépit de nos différences, nous pouvons tous nous impliquer dans un même commandement. Entrer dans le soucca équivaut donc à avoir un avant-goût de la paix suprême qui caractérisera l’ère messianique.38

4 Il entretiendra les lampes. Les lampes du candélabre sont alignées de l’est vers l’ouest.39 Ainsi, au fur et à mesure que l’on s’avance vers l’intérieur (c’est-à-dire l’ouest) du Sanctuaire, la première lampe que nous rencontrons, et qui peut être nommée la « lampe occidentale », est la deuxième lampe, puisqu’il s’agit de la première lampe placée à l’ouest d’une autre lampe.40 Chacune des lampes était remplie chaque soir avec une même quantité d’huile. Cependant, alors que le reste des lampes restaient seulement allumées jusqu’au lendemain matin, cette deuxième lampe éclairait miraculeusement toute la journée jusqu’au lendemain soir. Ce miracle témoignait que la Présence Divine reposait parmi le peuple juif.

11 Le maudissant. Cet homme s’en prit à la règle établissant que le pain de proposition ne devait être remis aux prêtres pour sa consommation que neuf jours après sa cuisson41 et chercha à la tourner en ridicule, disant : « À un roi terrestre est servi chaque jour un pain chaud et frais. Est-il donc correct que D.ieu soit “servi” du pain froid, rassis de neuf jours ? » – ignorant le fait que c’était précisément la fraîcheur miraculeuse et continue du pain de proposition qui témoignait de la « fraîcheur » continue de l’alliance de D.ieu avec Israël.

Chelomit bat Dibri. Elle était connue sous ce nom parce qu’elle parlait à l’excès (dibri) et qu’elle s’enquérait outre mesure du bien-être (chalom) des gens qu’elle rencontrait.

La Torah cite le nom de cette femme pour indiquer qu’elle fut la seule Hébreue à avoir été violentée par un Égyptien. Ceci témoigne du fait que le reste des femmes juives gardèrent en Égypte une décence si exemplaire qu’aucune d’elles ne fut violentée, pas même à contrecœur ou par inadvertance.42 La Torah se réfère à elle par son surnom afin d’indiquer que la raison pour laquelle l’Égyptien fut amené à la violenter fut son babillage impudique, qui attira sur elle une attention impropre.43 Elle mentionne le nom de sa tribu afin d’indiquer qu’une conduite inappropriée déshonore non seulement ceux qui agissent ainsi, mais encore leurs parents et leur tribu, de même que la bonne conduite honore non seulement ses acteurs, mais également leurs parents et leur tribu – comme on le voit par l’allusion à la descendance de l’artisan Aholiav, lui aussi membre de la tribu de Dan.44

Le surnom de sa mère. Bien que la Torah ne mentionne que le surnom de cette femme, elle l’identifie néanmoins, lui faisant apparemment honte publique. Il va sans dire que cela semble aller à l’encontre de l’enseignement de la Torah de ne faire honte publiquement à personne.45

La vérité, cependant, est qu’en mentionnant son nom à propos de cet incident, la Torah fait la louange de Chelomit. Elle fut distinguée par la providence divine pour être celle par qui la conduite exemplaire des autres femmes juives fut mise en relief.

Ceci indique en fait l’une des façons par lesquelles les fautes peuvent se transformer en mérites : en devenant le catalyseur de comportements positifs. L’exemple négatif donné par Chelomit inspira les futures générations de femmes juives à prendre pour guide l’exemple donné par nos ancêtres en Égypte.46

12 On le plaça dans le poste de garde. Comme nous l’avons souligné, les châtiments de la Torah ne sont pas simplement punitifs ; ils visent à réparer les dommages spirituels ou matériels causés, permettant ainsi au transgresseur de réparer le tort qu’il a causé. Ainsi, la Torah considère que l’enfermement en prison est contre-productif, car il ôte à l’individu la possibilité d’agir.47 Tout individu existe dans ce monde dans un but précis ; tout moment a son potentiel, qui doit être réalisé. Ces vérités sont valables même dans le cas de celui qui a commis des crimes.

Si quelqu’un a fait une transgression d’une gravité telle que ne reste pour lui plus d’espoir, et qu’il ne peut plus contribuer à la société de quelque façon, la Torah nous demande de le mettre à mort. Mais celui que la Torah ne juge pas passible de la peine de mort n’est pas considéré comme hors de toute possibilité de salut.48

Bien que nous doutions du fait que l’emprisonnement soit une punition profitable, nous sommes tenus de respecter la loi du pays.49 De toute façon, suivant la perspective abordée ci-dessus, nous considérons que les initiatives récentes prônant la réhabilitation par opposition à l’incarcération purement punitive sont bienvenues et méritent d’être prises en considération. Il faut procurer aux prisonniers des possibilités de s’instruire et de recevoir une instruction religieuse ; de même, ceux qui ont fait preuve de leur volonté de tourner la page devraient pouvoir bénéficier de programmes autorisant des permissions de sortie et la liberté conditionnelle.50