E pluribus unum : « De plusieurs, faire un » proclame le sceau des États-Unis, mais comme n’importe quel politicien vous le dira, c’est plus facile à dire qu’à faire. L’unité entre des personnes de cultures et de milieux différents n’est pas chose aisée à réaliser. Aussi idéalistes que nous soyons, nous avons tous des besoins et des désirs auxquels il peut être difficile de renoncer au nom du bien commun.

Dès lors, comment parvenir à une véritable unité ?

Comment parvenir à une véritable unité ?

La lecture de la Torah de cette semaine jette de la lumière sur cette question. Dans la Parachat Balak, Bilaam, un prophète non-juif, donne une vision de la Rédemption future : « Une étoile sortira de Jacob, et un sceptre se dressera en Israël, qui écrasera les princes de Moab et détruira tous les fils de Seth. »1

Cela paraît extrême. Pourquoi Machia’h, qui sera le dirigeant d’une ère pacifique et idéale, se mettrait-il à éradiquer des nations ? Un monde qui serait pacifique seulement pour quelques élus ne semble pas être un idéal auquel il convient d’aspirer.

Et comment pouvons-nous comprendre cette prophétie en regard des autres prophéties de rédemption qui décrivent les nations du monde servant D.ieu de concert ? Dans le livre de Sophonie, par exemple, il est écrit : « Car alors Je convertirai les peuples à un langage pur, pour que tous invoquent le nom de l’Éternel et l’adorent d’un cœur unanime. »2

En outre, la prophétie de Bilaam indique que Machia’h « détruira tous les fils de Seth ». Seth était le troisième fils d’Adam et Ève. Leur premier fils, Abel, fut assassiné et tous les descendants de Caïn furent anéantis dans le déluge. Ainsi, toute l’humanité descend de Seth. Ce verset ne peut absolument pas être interprété littéralement parce que, si Machia’h éliminait tous les fils de Seth, il ne resterait personne.

Le Rabbi de Loubavitch donne l’interprétation suivante :

Quand Machia’h viendra, il y aura une révélation divine sans précédent qui ne laissera aucune place au mal ou à l’impureté. Tous les êtres humains accepteront volontiers la loi divine, tant la présence de D.ieu sera manifeste. Tel est donc la « destruction » à laquelle se réfère le verset : la destruction de nos tendances, de nos désirs et de nos motivations égoïstes.

Il existe toutefois deux façons dont cette destruction peut avoir lieu. Il est possible d’imaginer l’émergence d’un chef si puissant, avec une vision si convaincante, que le monde entier se soumettrait à lui. Dans un tel monde, tous se comporteraient d’une manière exemplaire : il n’y aurait pas de meurtres, pas de vol, pas de discriminations, pas d’égoïsme. Cependant ces tendances n’auront pas été vraiment détruites, mais seulement réprimées. Tant que ces croyances et ces valeurs ne sont pas intégrées à notre propre psyché et à notre propre vision du monde, la rédemption est incomplète.

Le leadership de Machia’h sera différent. Ce ne sera pas une domination imposée de l’extérieur, mais l’aboutissement d’un processus de raffinement qui dure depuis le début de l’exil. Au cours des siècles de son exil, le peuple juif n’a pas seulement erré d’un endroit à l’autre. Nous avons également minutieusement planté les graines de la Rédemption future en pénétrant de sainteté tous les endroits où nous nous trouvions à travers notre observance de la Torah et des mitsvot.

Quand le monde et tout ce qu’il renferme percevra D.ieu de son propre gré, quand tous invoqueront D.ieu de leur propre voix, il y aura alors une véritable Rédemption. Là est la clé de la véritable unité : quand nos expériences et nos talents individuels contribuent tous à un objectif commun.

Le leadership de Machia’h sera différent

Sur un plan personnel, il arrive qu’on rencontre des gens dont les opinions sont si répugnantes, dont le comportement est si affligeant, que l’on souhaiterait qu’ils disparaissent tout simplement. Mais les personnes réellement irrécupérables sont extrêmement rares. On peut choisir de se concentrer sur les points de désaccord et tenter de les convaincre d’évoluer vers notre point de vue, ou pire, les condamner pour leur égarement. Mais la seule chose que cela effectue, c’est ajouter à la discorde. Une approche plus efficace est de se concentrer sur notre terrain d’entente et de cultiver le bien présent chez les autres.

En 1991, à la suite des émeutes de Crown Heights, le maire de New York David Dinkins rendit visite au Rabbi et demanda une bénédiction pour les gens de « toutes nos communautés ». Le Rabbi répondit : « ... Oubliez que c’est “deux côtés”. C’est un côté, un peuple... »3

L’unité des nations est à notre portée. Cela peut nécessiter des efforts, mais en regardant au-delà des différences superficielles, nous pouvons voir les nombreuses façons dont nous ne faisons qu’un. La Rédemption n’est pas un rêve lointain, mais une réalité qui approche rapidement.

(Basé sur un discours du Rabbi de Loubavitch, Likoutei Si’hot vol. 23, p. 172.)