Ce qu’enseigne le contexte
Dans la communication, le choix du cadre est très important. De fait, le cadre lui-même véhicule une partie importante du message, car la mise en œuvre d’un message ne saurait être séparée de son contenu. Choisir un cadre approprié non seulement facilite la compréhension d’un concept, mais peut encourager, voire concrétiser, son application.
Ceci est également valable en ce qui concerne le choix d’un lieu par D.ieu pour le don de la Torah. Nos Sages demandent1 : « Pourquoi la Torah fut-elle donnée dans le désert ? » D.ieu n’était pas obligé de donner la Torah dans un endroit particulier. Dès lors, Son choix est porteur d’enseignements.
De plus, ce message ne concerne pas seulement les Juifs qui reçurent la Torah au Sinaï, mais pour toutes les générations. En effet, nous qualifions D.ieu dans nos louanges de Notène HaTorah, « Celui qui donne la Torah », au présent.2 Les leçons que nous apprend le cadre du don de la Torah nous éclairent ainsi sur la façon de l’aborder en tout temps et en tous lieux.
Où il n’y a pas de propriété
La première réponse que nos Sages apportent à cette question est qu’un désert n’appartient à personne en particulier. Il en est de même de la Torah. Elle n’est pas la propriété exclusive d’un individu, d’une tribu ou d’un type de personnalité. Au contraire : « La couronne de la Torah est préparée et elle attend, prête pour chaque Juif... Tout celui qui le souhaite peut venir s’en saisir »3
Cette caractéristique du désert d’être sans propriétaire permet également de comprendre comment mettre cette leçon en pratique et s’approprier la Torah. Nos Sages poursuivent en disant qu’une personne doit « se rendre comparable à un désert, renonçant à toutes ses préoccupations », c’est-à-dire qu’elle doit se défaire de tout ce qui entrave son engagement envers la Torah.
La Torah est la volonté de D.ieu et Sa sagesse et est de ce fait infinie et illimitée, tout comme Il l’est Lui-même. C’est pourquoi il est nécessaire, pour aborder la Torah, de s’élever au-dessus de soi-même et accepter un cadre de compréhension différent.4
C’est ce qu’exprimèrent nos ancêtres lorsqu’ils s’engagèrent en disant naassé venichma, « Nous ferons et nous écouterons ».5 L’ordre dans lequel cette double promesse fut formulée est significatif. Au lieu d’écouter d’abord les commandements de D.ieu puis de décider ensuite s’ils les acceptaient ou non, ils s’engagèrent à Lui obéir quel que soit ce qu’Il leur demanderait.6 Plutôt que de laisser leur compréhension déterminer leur engagement, ils promirent que ce serait leur engagement qui déterminerait leur compréhension.7
Une déclaration de dépendance
Quand une personne s’engage de la sorte, D.ieu façonne son environnement de sorte que son engagement puisse être exprimé.8 Ceci ressort également du fait que la Torah fut donnée dans le désert, comme le disent nos Sages : « Tout comme un désert n’est ni semé ni labouré, quand une personne accepte le joug de la Torah, le joug des préoccupations matérielles lui est retiré. » Dans le désert, nos ancêtres dépendaient de D.ieu pour tous leurs besoins. Ils ne pouvaient compter sur aucune ressource naturelle.
Ce ne fut toutefois pas une source d’inquiétude pour eux. Bien au contraire, malgré l’aridité et la désolation du désert, ils y pénétrèrent avec amour et confiance, comme le décrit le prophète9 : « Je te garde le souvenir de l’affection de ta jeunesse, de l’amour du temps de tes fiançailles, quand tu Me suivis dans le désert, dans une terre inculte. »
Et D.ieu répondit avec un amour attentionné. Leur nourriture, leur eau et même leurs vêtements leur furent procurés de façon miraculeuse. D.ieu pourvut à tout ce dont les Juifs avaient besoin, leur permettant de se consacrer exclusivement à la Torah. Le cadre dans lequel nos ancêtres vécurent fut si parfait que nous Sages ont dit : « La Torah fut donnée... seulement à ceux qui consommèrent la manne. »10
Ce n’est pas là seulement une histoire passée. Même si nous semblons avoir des moyens naturels d’obtenir notre subsistance, la vérité est que la nature elle-même n’est qu’une série de miracles. Du fait de leur constante récurrence, ces miracles ne nous apparaissent plus comme étant particuliers.11 Mais cela ne doit pas occulter la vérité : nous devons être conscients que nous dépendons constamment de D.ieu.
Cette prise de conscience doit susciter un ordre de priorités. Au lieu d’accorder la préséance à nos préoccupations matérielles, nous devons la réserver à la Torah. C’est ainsi que nous pourrons avoir l’assurance que D.ieu pourvoira à nos besoins, comme Il le fit pour nos ancêtres. Même lorsque, comme nos ancêtres dans le désert, nous ne voyons pas de ressources naturelles par lesquelles notre subsistance pourrait être assurée, nous devons persévérer dans notre engagement dans la Torah et nous en remettre à Lui.
Pour que le désert fleurisse
L’aridité du désert peut également servir d’analogie pour l’état spirituel d’une personne. Bien qu’on puisse se sentir vide et désolé, et ce, peut-être à juste titre, du fait que l’on a vécu dans un désert spirituel, il n’y a pas lieu de désespérer. D.ieu est descendu dans le désert pour donner à l’homme Son bien le plus précieux, la Torah. Et il en est de même aujourd’hui. Quel que soit le niveau spirituel d’une personne, D.ieu lui donne la possibilité d’établir un lien avec Lui à travers la Torah.
Nous encourageant à imiter cette initiative, nos Sages12 nous engagent à « être des disciples d’Aaron... d’aimer les créatures et de les rapprocher de la Torah ». Dans le Tanya,13 l’Admour Hazakène explique que ceci enseigne que nous devons aller vers chaque Juif et l’aimer, même s’il est « infertile comme un désert » et que sa seule qualité est d’être une créature de D.ieu.
Nos Sages relatent qu’au cours des quarante années d’errance du peuple juif, ils transformèrent le désert en « terre habitée », au point que des arbres y fleurirent et donnèrent des fruits. Notre étude de la Torah peut produire un effet similaire. Des aspects de notre personnalité qui semblent stériles peuvent devenir productifs sous l’influence de la Torah.
L’épanouissement ultime
La Paracha Bamidbar, « Dans le désert », est toujours lue avant la fête de Chavouot.14 Les fêtes juives ne sont pas de simples commémorations d’événements passées, mais sont une occasion de les revivre.15 Pour revivre l’expérience du Sinaï, nous devons d’abord passer par le désert et les leçons qu’il enseigne, au moins sur un plan spirituel. Tel est le message de cette lecture de la Torah.
Ces enseignements sont particulièrement pertinents aujourd’hui, car notre génération attend une nouvelle étape dans la révélation de la Torah, une ère dans laquelle « une nouvelle [dimension de la] Torah émanera de Moi ».16
Le Don de la Torah ne se répétera jamais,17 comme écrit le Rambam18 au sujet de l’ère messianique : « Le point fondamental est ainsi : cette Torah, avec ses lois et ses préceptes, est éternelle. On ne peut ni y ajouter, ni en retrancher quoi que ce soit. » Cependant, nos Sages ont affirmé19 que les enseignements de la Torah du temps présent ne sont « rien comparés aux enseignements de Machia’h ». Car en ce temps-là, la dimension divine de la Torah sera ouvertement révélée, et tous pourront en apprécier le message spirituel.
Tout comme les Juifs se préparèrent impatiemment à la révélation du mont Sinaï, comptant fébrilement les jours jusqu’à ce qu’ils reçoivent la Torah,20 nous devons également nous préparer à la révélation de Machia’h avec joie et excitation.
Et alors, avec la venue de la Rédemption, « les pâturages du désert reverdiront et les arbres donneront leurs fruits ».21 Puisse cela advenir immédiatement.
Adapté de
Likoutei Si’hot vol. 8 p. 236 ; vol. 28 p.22 ;
Si’hot parachat Bamidbar 5745
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