« Jusqu’à quand tolérerai-Je cette eida – communauté... »
Nombres 14, 27
La paracha de Chela’h retrace l’épisode de l’envoi de douze explorateurs en terre de Canaan. Leur mission consistait à espionner le pays et d’y ramener des informations pour la future conquête. Dix hommes de ce groupe revinrent avec des nouvelles très pessimistes qui causèrent le désespoir de tout Israël. C’est de ce passage que nos sages déduisent que le terme eida, « communauté », implique un groupe de dix personnes. Aussi, ils en viennent à conclure que, pour un événement déterminé tel que la constitution d’un Minyane qui nécessite qu’une « communauté » soit présente, la Torah réclame un quorum de dix hommes au minimum.
Il est néanmoins étonnant que la Torah ait institué un principe si important à partir d’un épisode négatif de l’histoire du peuple juif : l’erreur des explorateurs ! C’est pourquoi nous proposerons une autre lecture – plus profonde – de l’histoire des espions. En effet, la Torah est constituée de deux éléments, comparables au corps et à l’âme : la partie exotérique et la partie ésotérique. Les deux parties sont complémentaires et, ensemble, elles incarnent la Sagesse Divine.
Bien qu’une simple lecture de cet événement laisse entendre que les explorateurs ont gravement fauté, au point où ils furent punis et que tout le peuple fut retenu quarante ans dans le désert du Sinaï, il existe toutefois une allusion dans la mystique juive qui voit en ces hommes des personnages de très grande qualité.
La pensée ‘hassidique explique que le refus des explorateurs de monter en Israël était le fruit de leur état spirituel : ils craignaient de rentrer dans une terre où ils seraient obligés de s’investir dans les domaines et les contraintes du monde matériel.
Après avoir reçu la Torah, les explorateurs envisageaient de rester cloîtrés dans le désert où ils jouissaient quotidiennement de miracles : la Manne, le puits de Miriam et les Nuées saintes. Les conditions idéales pour étudier et s’attacher au Divin étaient, ici, regroupées.
Ils se sont trompés, parce que le fait de vivre en Terre d'Israël, d’y appliquer les commandements relatifs à la Terre Sainte, ainsi que d’accomplir toutes les Mitsvot dans ce monde est – pour D.ieu – encore plus élevé que la réclusion dans la sainteté.
C’est précisément du fait de leur statut élevé que leur prise de position fut considérée comme un grave péché : ils ne devaient pas être de mauvais exemples pour tout un peuple. En revanche, le fait que leur motivation fut positive sert à nos sages pour déduire les conditions de la constitution d’un Minyane.
En outre, un autre détail permet de conclure que ces hommes n’étaient pas si mauvais que ça. Car, en effet, comment comprendre que ces hommes qui souhaitaient rester dans le désert causèrent que le peuple soit puni précisément par la réalisation de leur souhait : rester quarante ans dans le désert du Sinaï !
En réalité, D.ieu permit au peuple durant cette période de continuer de jouir de cette situation spirituelle qu’il avait peine à quitter. Ainsi, les progrès produits leur permirent d’atteindre la maturité requise pour entrer enfin en Terre d’Israël.
Adapté de Likoutei Si’hot vol. 33
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