La discussion portait sur plusieurs Juifs simples que le Rabbi louait abondamment. Un marchand de diamants, parmi les disciples éminents du Rabbi, s’exclama : « Pourquoi tant d’éloges à leur égard ? »
Le Rabbi : « Ils possèdent de belles qualités. »
Le ‘hassid : « Je ne les vois pas. »
Plus tard, le Rabbi demanda soudainement à voir le paquet de diamants du marchand.
Le ‘hassid les déploya et désigna une pierre : « Celle-ci est un joyau d’une exceptionnelle beauté. »
Le Rabbi : « Je n’y vois rien de particulier ! »
Le ‘hassid : « Il faut être un mévine (expert). »
Le Rabbi : « Un Juif est exceptionnellement merveilleux – mais il faut être un mévine ! »
— Rabbi Joseph Isaac Schneersohn, le sixième Rabbi de ‘Habad
Telle est la philosophie de ‘Habad-Loubavitch, la plus grande organisation mondiale d’éducation juive.
‘Habad-Loubavitch est une force vibrante et dynamique dans la vie juive, et ses programmes affectent la vie de millions de personnes et exercent directement ou indirectement une influence sur la vie juive dans chaque communauté.
Combien d’institutions le mouvement ‘Habad-Loubavitch possède-t-il, quel est son programme, quels services fournit-il et qui en sont les bénéficiaires ? Qui sont ses travailleurs, ses représentants et ses émissaires ? Qu’est-ce qui les motive ? Nous fournirons quelques réponses à ces questions. Bien que certains contours du contexte philosophique soient inclus, l’accent principal est mis sur les activités et une vue générale de ‘Habad-Loubavitch.
Il fut un temps où il existait différentes synagogues pour différentes classes sociales : une synagogue pour les charpentiers et les cordonniers, une autre pour les fermiers, et une autre spécialement réservée aux érudits de la Torah qui ne priaient pas aux côtés des « simples gens ».
Incroyable ? Il y a juste deux cents ans, dans les shtetls d’Europe de l’Est, telle était bien la situation.
Puis vint le Baal Chem Tov.
Aucun Juif ne devrait être caractérisé comme « éloigné », car, en essence, nous sommes un.Rabbi Israël Baal Chem Tov (lit. « Maître du Bon Nom », 1698-1760), le fondateur du ‘hassidisme, a montré comment de telles divisions « sociales » étaient contraires au judaïsme. Il expliquait l’origine divine commune de toutes les âmes et les belles qualités des trésors spirituels à trouver chez chaque Juif, qu’il soit érudit ou non. Il enseignait :
Il est écrit : « Car vous (le peuple juif) serez une terre de désir, dit le Seigneur des armées. »
Tout comme les plus grands scientifiques ne découvriront jamais les limites des immenses ressources naturelles que le Tout-Puissant a enfouies dans la terre, personne ne trouvera jamais les limites des grands trésors qui se trouvent en Israël, la « terre de désir » de D.ieu.
Partout où il allait, le Baal Chem Tov brisait les barrières entre les Juifs, construisant des ponts d’ahavat israël (amour du prochain), les rassemblant, leur enseignant leurs énormes obligations de responsabilité et d’affection mutuelles ; montrant que nous sommes un.
Mais l’opposition était féroce – parfois fanatique. Construire des ponts entre l’érudit de la Torah et l’illettré – déclaraient ses opposants – dégradait l’honneur de la Torah et encourageait la simplicité.
Pourtant, en quelques générations, l’approche ‘hassidique est devenue universelle. À notre époque, l’idée de synagogues séparées pour différentes classes de Juifs semble une absurdité telle que certains, encore aujourd’hui, ont du mal à accepter que le Baal Chem Tov ait été l’auteur de cette révolution fondatrice dans la société juive il y a deux siècles.
L’histoire se répète. Il y a seulement 80 ou 90 ans, toutes les petites communautés rurales d’Europe étaient entièrement religieuses ; un Juif non pratiquant était un phénomène inconnu. Mais les bouleversements consécutifs aux deux Guerres mondiales ont radicalement transformé la société juive. Dans les années 1930 et 1940, les communautés d’Europe occidentale et d’Amérique étaient divisées en deux camps distincts : d’un côté, ceux partiellement ou totalement non religieux, et de l’autre, les pratiquants, ces derniers n’ayant guère l’intention de se mélanger ou de tendre la main au camp non religieux.
Puis vint Loubavitch, dans les années 1940, et l’assaut contre les barricades divisant les Juifs commença sérieusement.
D’abord, Loubavitch a innové avec le système d’écoles juives en Amérique, introduisant le concept qu’une éducation fidèle à la Torah à temps plein puisse être accessible à tous les enfants juifs. Ensuite, ils se sont concentrés sur les écoles publiques, fréquentées majoritairement par des enfants juifs non religieux. Pourtant, précisément pour ces enfants, les éducateurs de Loubavitch ont utilisé la disposition de « Temps Libéré » de la loi de l’État de New York pour mettre en place, en 1942, un réseau de classes fournissant une instruction de base en Torah une heure par semaine. Des « Messibot Chabbat », des séances éducatives et récréatives pour des groupes d’enfants les après-midis de Chabbat ont été instaurées ; les ‘hassidim ‘Habad ont commencé à apparaître dans les rues de la ville pendant la fête de Soukkot, proposant l’étrog et le loulav, à qui ? –aux non pratiquants bien sûr ; « Talks and Tales », le premier mensuel pour enfants en anglais axé sur la Torah à voir le jour, est sorti de presse pour Hanouka 1942, bientôt suivi par sa version française, « Conversations avec les Jeunes ».
Il y a trente ans, des « ‘Habadniks » nés en Russie étaient assis côte à côte avec leurs frères juifs supposément de tendance communiste et « anti-religieuse », dans une atmosphère d’affection chaleureuse et d’amitié joyeuse, lors d’un rassemblement ‘hassidique dans le village Loubavitch israélien de Kfar ‘Habad. La première yeshiva au monde pour les baalei techouva (« ceux qui retournent » à la pratique juive), Hadar Hatorah, a ouvert ses portes à Brooklyn en 1962 ; plus tard, une autre, le programme « New Direction » de Tiféreth Ba’hourim à Morristown, New Jersey. Puis les Beth ‘Habad…
… Et le reste appartient à l’histoire.
Tout comme à l’époque du Baal Chem Tov, l’approche de Loubavitch brisant les barrières a été, au début, vivement critiquée, voire attaquée avec véhémence ; et une fois de plus, après seulement quelques années, le système d’écoles juives et l’approche de l’activisme communautaire sont devenus presque universels. Dans toute la communauté juive, il est de plus en plus reconnu et accepté que nous sommes un. Une unicité propre au peuple juif. Membres du même corps. Renforcer un membre, un Juif, nous fortifie tous. Une unicité fréquemment et éloquemment soulignée au sein du ‘hassidisme ‘Habad, reflétant sa croyance fondamentale que chaque Juif, quelle que soit son affiliation ou son origine, possède une nechama, une âme unique, une étincelle divine. Dans son essence, cette étincelle de divinité est commune à tous les Juifs et égale chez tous les Juifs, ce qui donne une nouvelle signification au dicton souvent répété : « Un Juif est un Juif ».
En vertu de la nechama (l’âme divine), la Torah et tous ses préceptes sont l’héritage, le droit et le privilège de tout notre peuple. Alors, lorsque la question est posée : « Pourquoi mettez-vous des téfiline dans la rue, ou distribuez-vous des bougies et des chandeliers de Chabbat, à des hommes et des femmes que vous n’avez jamais rencontrés auparavant ? », le ‘hassid de Loubavitch répond :
À cause de ce qu’ils sont déjà, et non à cause de ce qu’ils pourraient devenir ; non pas pour qu’un jour ils deviennent « orthodoxes », mais parce que maintenant ils sont déjà juifs, et que les téfiline et les bougies de Chabbat leur appartiennent ; c’est leur droit et leur devoir d’accomplir la mitsva, et c’est notre privilège, notre honneur et notre obligation de les aider respectueusement à le faire, avec la même ferveur et la même compassion avec lesquelles je fournirais un repas chaud et un endroit où dormir à un passant que je n’ai jamais vu auparavant et que je ne reverrai peut-être jamais.
Certains ont décrit cette démarche comme étant du kirouv re’hokim, c’est-à-dire « rapprocher ceux qui sont éloignés ». Ce que Loubavitch commente ainsi : Aucun Juif ne devrait être caractérisé comme étant « éloigné », car, en essence, nous sommes un.
Rabbi Chnéour Zalman de Lyadi, le fondateur de ‘Habad-Loubavitch, a déclaré : « Grand-père (comme il appelait le Baal Chem Tov) aimait profondément les gens simples. Dans mes premiers jours à Mézeritch, mon Rabbi (le successeur du Baal Chem Tov) a dit : C’était une remarque fréquente du Baal Chem Tov que l’amour d’Israël est l’amour de D.ieu. “Vous êtes les enfants de l’Éternel votre D.ieu” ; quand on aime le père – on aime les enfants. »
— Rabbi Joseph Isaac Schneersohn, le sixième Rabbi de ‘Habad
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