Un ami perspicace m’a écrit ce matin : « Quand une personne est “présente”, elle n’est nulle part ailleurs. Seulement ici. C’est tout, et, bien sûr, c’est beaucoup plus facile à dire qu’à faire... Quand je suis seulement ici, et nulle part ailleurs, je ne pense pas à ce que je vais dire, à ce que lui ou elle va dire, à ce que je dois faire ensuite... Je suis seulement ici et nulle part ailleurs. »

Étant en proie à l’invasion de mon cerveau par mon smartphone, et à la difficulté d’être vraiment présent tout en me sentant tiraillé dans de multiples directions, ces mots ont touché chez moi une corde sensible.

Mais tout objectif valable a besoin d’un outil. Comment devient-on « présent » ?

Il ne s’agit pas de moi et de ma journée, de moi et de mon smartphone ou de moi et de mes rendez-vous futurs

Cela m’a rappelé une idée que j’ai un jour entendue de la bouche du Rabbi :

Dans la Torah, D.ieu ordonne aux Juifs de contribuer un demi-shekel (une certaine monnaie) à un fonds pour les besoins du Tabernacle.

La Torah décrit le shekel comme valant vingt guéras (une monnaie plus petite), ce qui signifie évidemment que le demi-shekel vaut dix guéras.

Mais la Torah ne dit pas « donnez dix guéras » ; elle souligne que cela doit être un demi-shekel.

Pourquoi, demande le Rabbi, la Torah emploie-t-elle une formule (apparemment) détournée aboutissant à souligner le concept de « demi » ?

Approfondissant la question, le Rabbi a noté que la même contribution semble mettre l’accent sur un message contraire : la Torah indique que le don lui-même ne doit pas être fait en plusieurs fois ; il faut donner la totalité du demi-shekel en une seule fois.

Il fallait donc donner la moitié d’un shekel, de façon entière (non divisée).

Qu’est-ce que la Torah essaie de nous dire ?

Le Rabbi l’a expliqué de la manière suivante :

Si vous voulez vous donner entièrement à une personne ou à une situation, vous devez reconnaître votre situation de « moitié ».

Tel que je le comprends, si je veux être totalement présent dans une situation, je dois m’élever au-dessus de mes préoccupations concernant ce qui s’est passé ou ce qui va se passer, de la partie de mon cerveau envahie par des pensées concernant les autres endroits où je dois être et le moment où je dois y être. Je dois reconnaître que la personne ou la situation qui me fait face mérite toute mon attention. Car il ne s’agit pas de moi et de ma journée, de moi et de mon smartphone ou de moi et de mes rendez-vous futurs. Il s’agit de nous. De moi et de vous. Moi et ce à quoi je fais face à ce moment.

Et à ce moment, je ne suis que la moitié de l’équation. Quand je respecterai vraiment cela, je serai prêt à être là.

En entier. Pour de vrai.