Le calendrier sur mon mur indique janvier. Mais c’est aussi le mois juif de Chevat, ce qui signifie que Tou BiChevat (« le quinze Chevat »), le Nouvel An des Arbres, approche, marquant le début de la saison de croissance pour les arbres fruitiers. C’est un jour où nous exprimons notre gratitude envers D.ieu pour l’utilité, la beauté et le plaisir que nous procurent les arbres, et tout particulièrement les arbres fruitiers.

Dans le pays d’Israël, les amandiers sont en fleurs. Mais je vis dans le Connecticut, et tout ce que je vois, c’est de la neige et des branches nues. Cela s’explique par le fait que de nombreuses célébrations de l’année juive suivent le cycle climatique de la Terre Sainte, peu importe notre lieu de résidence.

Ceci est fondé sur l’idée que le lieu de vie idéal pour un Juif est le pays d’Israël. Et pas seulement le pays géographique d’Israël : notre idéal est de vivre là-bas avec un Beth Hamikdache (Saint Temple) reconstruit et toutes les mitsvot associées à la terre et au cycle de l’année qui dépendent du Beth Hamikdache.

En effet, le « nouvel an des arbres » sert à marquer la fin de « l’année fiscale » pour les dîmes que nous donnions aux Lévites et aux pauvres, et la part de nos produits que nous amenions à Jérusalem à l’époque du Temple.

La plupart des Juifs vivent aujourd’hui en dehors de la terre d’Israël. Même en Israël, les dîmes ne sont pas pleinement fonctionnelles aujourd’hui car nous n’avons pas de Beth Hamikdache actuellement. Dans ce cas, pourquoi même célébrer Tou BiChevat ?

Roch Hachana marque la création de l’humanité, qui est partout présente. Pessa’h célèbre la Sortie d’Égypte, qui est au cœur de notre identité où que nous nous trouvions. Mais Tou BiChevat, pourquoi le célébrer maintenant et dans la Diaspora ?

Je crois que la raison est double :

  1. Il s’agit d’exprimer notre espoir, notre désir et notre foi que très bientôt nous serons tous dans le pays d’Israël, avec le Saint Temple reconstruit, et être ainsi en mesure d’accomplir toutes les mitsvot qui ne sont peuvent l’être que dans cet état spirituellement idéal. Notre célébration actuelle de Tou BiChevat rend la mitsva des dîmes de fruits – et la Rédemption elle-même – une possibilité très réelle et anticipée dans nos vies.
  2. Tou BiChevat nous rappelle que chacun de nous a en lui-même, en microcosme, la capacité d’atteindre l’état d’une « Terre d’Israël ».

Le prophète Malachie (3,12) déclare que D.ieu dit au peuple juif : « Vous serez pour Moi la Terre de Mon Désir » (un terme également utilisé pour la Terre d’Israël).

Le Baal Chem Tov explique que le prophète sous-entend que tout comme la terre cache les plus grands trésors sous sa surface – sous la forme de métaux précieux et de gemmes enfouis dans les profondeurs de la terre, ainsi que dans les énergies productives enfermées dans son sol – de même, chacun de nous a la capacité de découvrir d’énormes réserves de bien et de sainteté cachées au fond de soi. Nous devons simplement extraire les trésors spirituels cachés sous notre superficialité, et « creuser » celle-ci pour planter les graines – les bonnes actions – qui prendront racine, fleuriront et se multiplieront.

Nous devons rechercher un sens plus profond dans chacune de nos activités quotidiennes. C’est pourquoi nous avons des bénédictions pour toutes sortes d’activités et des lois qui couvrent toute notre vie, de sorte qu’aucune de nos journées ne saurait être banale. En considérant attentivement la Torah, nous découvrons des occasions de nous connecter à D.ieu de manière significative dans chaque aspect de nos vies. Tant que nous ne laissons pas notre terre en friche – tant que nous n’acceptons pas la vie telle qu’elle vient mais faisons l’effort de réaliser nos potentiels –, nous trouverons de grands trésors.

Nous pouvons profiter de l’occasion pour faire une bénédiction sur notre déjeuner. Nous pouvons trouver le temps de faire une prière de Min’ha l’après-midi, créant ainsi un îlot d’introspection au milieu de l’agitation de la journée de travail. Nous pouvons faire l’effort d’adresser des mots gentils et encourageants à un collègue qui en a besoin. Nous pouvons faire la charité en entrant et en sortant de notre lieu de travail. Dans nos transactions financières, nous pouvons exiger – de nous-mêmes et des autres – une honnêteté absolue dans tous les aspects de notre activité économique.

Lorsque nous vivons de cette manière, nous extrayons un véritable trésor du fondement même de notre âme. Nous plantons dans le sol de notre vie des arbres de D.ieu qui donnent de beaux « fruits » de D.ieu. Nous devenons une « terre de désir » microcosmique florissante, une terre où se réalise le désir de D.ieu que nous atteignions notre plein potentiel spirituel et éthique.

En créant ces nombreux « micro-Israël », nous formons une masse critique de bien qui, à son tour, permet à la « macro » Terre d’Israël d’atteindre son véritable potentiel. Ce potentiel réalisé s’exprimera dans le retour de tout le peuple juif à la Terre d’Israël et dans la divinité révélée dans le Beth Hamikdache reconstruit d’où le bien et l’harmonie rayonneront pour embrasser l’ensemble de l’humanité.

Puissions-nous tous profiter d’un hiver sain et fructueux.