À propos du verset « car l’homme est un arbre des champs », le Sifri commente : « cela nous enseigne que l’homme tire sa subsistance exclusivement de l’arbre. » Comment comprendre cette déclaration alors que de toute évidence, les individus sont également nourris par d’autres aliments ?

Un autre verset énonce : « le pain nourrit le cœur de l’homme. » Rabbi Chnéour Zalman explique que bien qu’une personne prenne également pour nourriture de la viande, cela ne la rassasie pas comme le pain.

La raison pour laquelle les minéraux, les végétaux apportent à l’homme de la nourriture, en dépit du fait que l’homme appartienne à un règne plus élevé que le leur, est que leur source spirituelle est plus haute que celle de l’homme. Parce que leur source spirituelle est plus élevée, au moment où ils descendent sur terre, ils descendent plus bas. Puisque le règne végétal est encore plus bas que le règne animal, indiquant que sa source est plus haute, il possède une plus grande aptitude à nourrir l’homme.

Ce que dit le Sifri peut être compris de la même manière. Puisque l’homme tire sa nourriture première du règne végétal, et puisque la plus abondante forme de végétation est constituée par les arbres, dit le Sifri, l’homme vit de l’arbre, c’est-à-dire des nourritures végétales symbolisées par l’arbre.

Le Talmud cite le verset « Car l’homme est un arbre des champs » et s’interroge : « L’homme serait-il donc un arbre ? » Elle répond qu’en ce qui concerne les arbres, nous trouvons deux versets contradictoires. L’un d’eux énonce « de lui tu mangeras, mais l’arbre tu ne détruiras pas », alors que l’autre déclare « l’arbre doit être détruit ».

Comment concilier ces deux versets ?

Le Talmud répond : « s’il (c’est-à-dire l’individu, car l’homme est comparé à l’arbre) est un érudit craignant D.ieu, tu dois “en manger”, c’est-à-dire étudier la Torah qu'il enseigne. Sinon, tu dois “le détruire”, c’est-à-dire te détourner de lui. »

Chaque fois que l’on trouve deux commentaires sur un simple verset, cela signifie qu’ils possèdent un lien entre eux deux. Quelle est donc la relation entre le commentaire du Sifri et celui du Talmud ?

Nos Sages se réfèrent à l’homme comme à un « petit monde », un microcosme de l’univers. Tout comme le monde est partagé en quatre catégories : minérale, végétale, animale et humaine, l’homme possède lui aussi des aspects de ces quatre ordres. Les attributs émotionnels de l’homme représentent l’aspect végétal, car tout comme la végétation, ils ont la caractéristique de s’épanouir en abondance.

La supériorité de l’homme sur le monde animal réside dans le fait qu’il est un être rationnel.  C’est la raison pour laquelle le Talmud pose la question : « l’homme est-il un arbre ? » En d’autres termes, alors qu’il est vrai que l’homme possède également certains aspects de « l’arbre du champ », est-ce la principale caractéristique de son humanité ?

La réponse du Talmud est que le but ultime de l’intellect de l’homme est de descendre et d’influencer ses émotions de sorte qu’elles soient guidées par l’intellect.

En réalité, l’intellect seul ne peut conduire l’individu à un état d’achèvement total. L’objectif « connais (D.ieu) aujourd’hui » a pour but de « L’implanter dans ton cœur » de sorte que cette connaissance exerce son effet sur les émotions.

C’est là que réside l’analogie avec l’arbre. Tout comme la qualité d’un arbre se manifeste dans ses fruits, la véritable qualité d’un érudit n’est pas simplement son érudition, mais le fait qu’« il craint D.ieu », c’est-à-dire que son intellect affecte ses émotions.

Ici nous retrouvons la similitude entre le macrocosme et le microcosme. L’homme est soutenu par le règne végétal parce que sa source est supérieure à celle de l’homme. En mangeant des végétaux, l’homme élève la nourriture à sa source. Et cela permet ensuite à la nourriture de le soutenir.

Il en va de même pour l’homme lui-même. Son aspect végétal, ses émotions, a une source encore plus élevée que son intellect. Ce n’est que dans leur aspect révélé qu’elles sont descendues plus bas que son intellect, et ainsi c’est l’intellect qui doit guider les émotions, les purifiant et les raffinant. Quand cela est achevé, les émotions à leur tour affectent l’intellect, l’élevant à son état le plus achevé.

Le Sifri et le Talmud soulignent donc tous deux le même point : l’élévation de l’homme par l’intermédiaire du règne végétal. La seule différence est que le Sifri s’adresse au monde comme un tout alors que le Talmud parle dans les termes d’« homme » et de « végétal » à l’intérieur du microcosme humain.

(Basé sur Likouteï Si’hot Vol. IV pp. 1114-1117)